HomeInteragir dans les sociétés anciennes
*  *  *

Published on Thursday, March 28, 2024

Abstract

Suivant la tradition de l’anthropologie historique, nous proposons aux doctorant·e·s et post-doctorant·e·s travaillant sur les mondes anciens de réfléchir collectivement autour du thème : « Interagir dans les sociétés anciennes ». Si le verbe « interagir » est particulièrement employé aujourd’hui dans des sociétés humaines de plus en plus connectées, il l’est d’autant plus depuis la révolution technologique et numérique née durant le XXe siècle.

Announcement

Journée d’étude doctorale d’ANHIMA

Organisatrices : Flavie Fontaine et Elisa Le Bail

Salle Benjamin — INHA, 2 rue Vivienne, Paris 2e

Programme

  • 9h30 : Café d’accueil, salle Warburg
  • 10h : Introduction, Flavie FONTAINE et Elisa LE BAIL (U. Paris 1, ANHIMA). Modération 1 : Kevin BLARY (U. Paris Cité, ANHIMA / AMU, CCJ)
  • 10h15 : Gaëlle HERBETH (U. Paris 1, ANHIMA) : « “ Constantin l’a fondée, Cyrus l’a rénovée : mets-les en même place, Auguste !” Interagir avec le pouvoir et ses représentants par les cris et les interpellations collectifs dans l’Antiquité tardive (IVe- VIe siècles) »
  • 10h45 : Elena RÜDIGER (U. Paris 1 / U. di Pisa, ANHIMA) : « Interagir avec le pouvoir romain : le champ d’action des dynastes de l’espace syrien lors de la construction de la frontière romano- parthe (l’apport de la correspondance de Cicéron) »
  • 11h15 : Pause Café, salle Warburg. Modération 2 : Rémi LAFONTAINE (U. Paris 1, ANHIMA)
  • 11h30 : Adrien BRESSON (U. De Lyon - Saint-Etienne, HISoMA) : « Ausonii epistula : interagir en lettré au IVe siècle de notre ère »
  • 12h : Maël DEUFFIC (EPHE, AOrOc) : « Interagir linguistiquement dans le De Bello Gallico de Jules César et Hirtius »
  • 12h30-14h : Pause déjeuner
  • 14h : Reprise de la journée, salle Benjamin. Modération 3 : Noémie LECROQ (EPHE, AOrOc)
  • 14h : Laure KLEIN (U. Montpellier 3, ASM) : « Donner pour recevoir : interagir avec les dieux de son vivant et pour sa vie post-mortem, une histoire de rang ? Étude d’éléments votifs de particuliers dans l'Égypte du Nouvel Empire »
  • 14h30 : Julie DISCHER (U. Lyon 3, HISoMA) : « Étrangers et associations des sanctuaires isiaques à Délos : interagir pour s’intégrer dans une communauté cultuelle »
  • 15h : Tea Time, salle Warburg. Modération 4 : Audrey VASSELIN (U. Paris 1, ANHIMA)
  • 15h30 : Maxence BADAIRE (U. Paris 1, ANHIMA) : « Interagir avec les dieux, interagir avec les hommes : la place du prêtre public à Rome (de la fin de la République au début du principat) »
  • 16h00 : Camilla SIGNORETTI (U. di Pisa, AMA Siena / EPHE, ANHIMA) : « La médiation delphique dans le cadre des interactions religieuses entre Rome et les peuples étrangers »
  • 16h30 : Conclusion, Thomas COMBAZ (U. Paris 1 / UCL, ANHIMA)
  • 17h : verre de l’amitié dans le quartier de l’INHA

Résumés des communications

Maxence BADAIRE (U. Paris 1, ANHIMA)

« Interagir avec les dieux, interagir avec les hommes : la place du prêtre public à Rome (de la fin de la République au début du principat) »

Cette communication propose d’étudier les différentes échelles d’interactions maîtrisées par les prêtres de la religion publique romaine. Les grands collèges à Rome étaient composés de membres de l’aristocratie, qui bien souvent occupaient les premières places politiques de la cité. Ces derniers officiaient comme prêtres du culte public, accompagnaient la pratique rituelle des magistrats, et étaient responsables des relations entretenues entre les citoyens romains et les dieux. Les dieux, considérés eux-mêmes comme des citoyens de premier ordre, étaient sollicités au travers de différents cultes et cérémonies, mais pouvaient aussi solliciter les hommes par l’intermédiaire de signes et de prodiges. Les prêtres du culte public détenaient dès lors une position particulière, d’intermédiaire entre leurs concitoyens et la sphère divine. Leur position leur permettait, de fait, d’interagir d’abord avec les dieux, mais aussi auprès des membres de la cité, devant lesquels était mis en scène le culte ainsi que l’interaction divine, parfois de manière théâtralisée. Cette superposition de différents degrés et leur conscience de leur statut d’intermédiaire permettaient souvent aux aristocrates de transformer et parfois de manipuler ces interactions, souvent à des fins politiques.

Adrien BRESSON (U. De Lyon - Saint-Etienne, HISoMA)

« Ausonii epistula : interagir en lettré au IVe siècle de notre ère »

Les échanges épistolaires sont la marque indubitable d’une interaction entre individus puisqu’elle permet de rentrer en contact par écrit – ce qui constitue une interaction – tout   en rapportant des contacts passés ou à venir. Les lettres d’Ausone (poète latin du IVe siècle de notre ère) qui nous sont parvenues s’inscrivent dans un cadre particulier et spécifique :  les individus auxquels il s’adresse font tous partie d’une même sociabilité, celle d’une élite lettrée et cultivée. À lire les lettres, il est indubitable que ces individus se connaissent et  qu’ils ont été régulièrement en contact. En conséquence, il apparaît que les lettres d’Ausone permettent de constater les interactions qui existaient entre des individus, en fournissant le cas d’étude concret d’une société constituée. En plus d’étudier les pratiques de l’interaction qui existent parmi les sociabilités du poète, il sera intéressant de s’interroger plus spécifiquement sur la terminologie employée pour les désigner, afin de voir la manière dont les individus conçoivent leurs rapports, leurs échanges, et dont ils interagissent réciproquement les uns envers les autres. À cet égard, le fait que certaines  des réponses aux lettres envoyées par Ausone nous soient parvenues permettra une étude d’autant plus approfondie de la façon dont les individus de cette société interagissaient entre eux. En conséquence, cette proposition de communication vise à s’intéresser au processus d’interaction et à sa désignation, au prisme d’une société particulière, afin de voir s’il existe une superposition du lexique et de la pratique, ou au contraire des écarts, dans le processus d’interaction.

Maël DEUFFIC (EPHE, AOrOc)

« Interagir linguistiquement dans le De Bello Gallico de Jules César et Hirtius »

Les campagnes de César en Gaule ont fait se rencontrer deux sociétés, bien sûr sur le champ de bataille, mais aussi dans le dialogue. Entre d’une part des Romains qui parlent essentiellement latin, langue qui fut celle de l’armée aussi bien en Occident que dans les régions hellénophones orientales de l’Empire, et d’autre part les Gaulois dont la langue nous est parvenue par quelques rares textes, il y a bien eu des interactions linguistiques. Il s’agit en effet d’échanger avec des alliés tels que l’Eduen Diviciacos dont on dit qu’il s’est exprimé, certainement en latin, devant le Sénat romain en 60 av. J.-C., des alliés parfois traîtres dont il faut se méfier en utilisant un langage détourné, ou au contraire avec qui il est nécessaire d’avoir un interprète pour éviter toute ambiguïté. On se demandera alors qui sont ces interprètes, d’où ils viennent et en quoi leur origine géographique ou sociale peut nous renseigner sur l’intégration linguistique de certaines populations dans l’empire romain. D’autres catégories professionnelles peuvent aussi servir à établir le lien entre les Gaulois et les soldats qui battent sans cesse la campagne pour remplir les corvées. Une partie de l’armée romaine elle-même, les auxiliaires, parle gaulois. Il faudra alors se demander comment l’on communique, ou au contraire comment on dissimule les décisions militaires. On proposera une étude de tous les passages du De Bello Gallico de César et Hirtius où il est question d’interaction verbale orale ou écrite pour montrer quel était à cette époque le paysage sonore de cette Gaule sur le point de se romaniser.

Julie DISCHER (U. Lyon 3, HISoMA)

« Étrangers et associations des sanctuaires isiaques à Délos : interagir pour s’intégrer dans une communauté cultuelle »

L’essor du phénomène associatif est bien documenté à Délos durant l’époque hellénistique, et les fouilles des sanctuaires des divinités isiaques ont permis de connaître une petite dizaine de ces groupes. On se concentrera ici sur les seules associations de la période de l’Indépendance (314-167 av. J.-C.), pour lesquelles une structure plus ou moins développée est discernable. On tâchera alors de montrer comment, par leurs activités – notamment la prise de repas communs et les réunions, celles-ci participent à la création d’une communauté cultuelle dans un cadre infra-civique. Or ces associations, comme la majorité de celles dites privées, sont ouvertes à tous les types de populations (citoyens, étrangers, affranchis et parfois esclaves, quel que soit le genre), bien que dans des proportions qu’il n’est pas toujours aisé de discerner. Elles constituent ainsi un observatoire des interactions entre différents groupes et permettent d’apprécier les modalités d’intégration d’un individu à un groupe au-delà de l’unique prisme statutaire. Pour cela, on s’intéressa particulièrement aux étrangers par l’étude croisée des inscriptions portant des listes de membres et des inscriptions individuelles, à travers l’angle des pratiques de dénomination. Deux tendances se dessinent alors : d’un côté, on constate la mise en avant d’un idéal égalitaire et intégrateur ayant tendance à gommer les différences d’origine et de statut ; de l’autre, les marques de distinction restent toujours présentes, souvent négociées par les individus eux-mêmes, témoignant de l’agentivité des membres des associations et  de la complexité des interactions à l’œuvre.

Gaëlle HERBETH (U. Paris 1, ANHIMA)

« “ Constantin l’a fondée, Cyrus l’a rénovée : mets-les en même place, Auguste ! ” Interagir avec le pouvoir et ses représentants par les cris et les interpellations collectifs dans l’Antiquité tardive (IVe -VIe siècles) »

La présente proposition de communication vise à reconsidérer les cris et les interpellations comme manière d’interagir avec le pouvoir impérial ou royal et ses représentants durant l’Antiquité tardive. C’est principalement au sein des plus grandes cités, tant en Orient romain que dans l’Occident post-romain – encore fortement marqué   par les structures romaines – que se manifestèrent ces phénomènes. Après un point sur le contexte géographique de prononciation de ces paroles destinées à demander, exiger, contester, galvaniser, annoncer, au sein d’espaces publics (notamment le cirque, l’hippodrome, la rue, l’église, le palais), nous reviendrons sur les modalités d’expression de ces dernières, afin de déterminer dans quel(s) contexte(s) et dans quel(s) objectif(s) elles furent prononcées. Cela doit nous mener à approfondir l’étude de la capacité d’action et   de l’agentivité des acteurs qui les prononcent, de manière conjointe avec une étude du contenu de ces cris et interpellations, en revenant aux termes antiques utilisés, ainsi qu’à la manière dont ces paroles étaient pensées dans leur formulation et leur adresse (termes et cas utilisés, longueurs des paroles, mention ou non d’un destinataire...). Enfin, il faudra tenter de saisir si ces cris et interpellations trouvèrent une réponse, manifestée d’une façon analogue par la parole, ou inscrite dans une réaction excluante, voire violente, de type principalement juridique ou militaire.

Laure KLEIN (U. Montpellier 3, ASM)

« Donner pour recevoir : interagir avec les dieux de son vivant et pour sa vie post-mortem, une histoire de rang ? Étude d’éléments votifs de particuliers dans l'Égypte du Nouvel Empire »

Pour formuler une demande auprès des dieux, les Égyptiens avaient différents médiums à leur disposition. Les éléments votifs figurent parmi les sources les plus accessibles pour témoigner de ces échanges entre individus et divinités. Si les stèles, notamment funéraires, ont été un support privilégié par la royauté et les dignitaires pour servir d’intermédiaire entre le monde des vivants et celui des dieux, nous pouvons nous interroger sur le reste du peuple égyptien, de rang moins élevé, non lettré et qui ne disposait donc pas des mêmes moyens, mais qui avait ce même besoin de transmettre une demande aux dieux. Est-ce que l’individu interagissait de la même manière avec le divin selon son rang et son genre, et en utilisant les mêmes supports ? Comment la réponse des dieux était-elle interprétée ? Nous verrons ensemble comment les particuliers du Nouvel Empire formulaient leur demande auprès des divinités, et percevaient les signes de leur réponse, à travers une étude de différents supports et témoignages textuels et iconographiques.

Elena RÜDIGER (U. Paris 1 / U. di Pisa, ANHIMA)

« Interagir avec le pouvoir romain : le champ d’action des dynastes de l’espace syrien lors de la construction de la frontière romano-parthe (l’apport de la correspondance de Cicéron) »

Figure politique active au sein du Sénat à Rome et proconsul de Cilicie en 51-50 av. J.-C., Cicéron, à travers sa correspondance, apporte un témoignage unique sur le répertoire d’actions utilisé par les dynastes syriens auprès du pouvoir romain, alors que Rome s’était imposée au Proche-Orient depuis une dizaine d’années seulement. Six lettres, datant des années 54 à 46 av. J.-C., informent que des ambassades, des envoyés et de nombreuses lettres ont été communiqués à différents acteurs romains, avec divers motifs et requêtes par ces dynastes. Apparaît entre les lignes un système de don contre-don : ils informent Rome des mouvements parthes au sein de l’espace syrien et reçoivent ou demandent en échange privilèges et titres de la part du Sénat romain. À la tête de principautés constituées lors du délitement de l’autorité séleucide en Syrie, ces dynastes tentent en effet de se maintenir au pouvoir, confrontés à la montée des puissances romaine et parthe dans la région. L’année 51/50 av. J.-C., correspond notamment à l’invasion parthe du territoire romain. L’empire rival réussit à atteindre les faubourgs d’Antioche, cœur de la jeune province romaine de Syrie. L’empressement des dynastes de l’espace syrien de communiquer avec Rome ne convainc pas Cicéron qui les suspecte de faire de même avec le pouvoir parthe. Les limites de l’empire romain ne semblent pas encore bien fixées : à la tête de territoires parfois encerclés par la nouvelle province romaine, ces personnages font-ils partie de l’empire ? Le mépris de Cicéron pour ces dynastes, qui transparait dans ses lettres, dévoile les débuts d’une relation asymétrique, qui sera de plus en plus marquée une fois que Rome aura pris ses marques en Orient, et que grâce à ces interactions, les dynasties syriennes auront stabilisé leur position au sein de l’empire romain.

Camilla SIGNORETTI (U. di Pisa, AMA Siena / EPHE, ANHIMA)

« La médiation delphique dans le cadre des interactions religieuses entre Rome et les peuples étrangers »

La communication a pour but d’analyser la présence de l’Oracle de Delphes dans le cadre des interactions religieuses entre Rome et les communautés étrangères pendant le IIIᵉ siècle av. J. -C. Il s’agit des échanges religieux qui se déroulent lors des conflits entre les Romains et les autres populations et qui détiennent une fonction diplomatique. En effet, les Romains avaient l’habitude d’introduire dans leur propre religion des divinités ou des rituels étrangers dans le but d’établir des alliances politiques et militaires ou d’affirmer le contrôle sur des territoires acquis. Dans certains épisodes, on peut constater la présence de l’Oracle de Delphes, qui est consulté par les Romains pour régler ces nouvelles introductions cultuelles. On abordera en particulier les récits relatifs à l’introduction du culte d’Esculape et de Cybèle à Rome, en examinant le rôle de Delphes dans le cadre des échanges religieux et diplomatiques entre Rome, la Grèce et l’Asie Mineure. En effet, à l’Apollon delphique est reconnue une agentivité considérable qui lui permet de s’interposer avec ses oracles entre l’état romain et les peuples étrangers, en jouant le rôle de médiateur des échanges cultuels et diplomatiques. En raison de cette agentivité, la tradition littéraire témoigne d’une nécessité de justifier la présence de ces divinités étrangères à Rome, en soulignant comment leur introduction a été déterminée par l’autorité de Delphes, à laquelle est reconnu un rôle universel.

Subjects

Places

  • INHA - 2 rue Vivienne
    Paris, France (75002)

Event attendance modalities

Full on-site event


Date(s)

  • Saturday, March 30, 2024

Information source

  • Flavie Fontaine
    courriel : flavie [dot] fontaine [at] univ-paris1 [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« Interagir dans les sociétés anciennes », Study days, Calenda, Published on Thursday, March 28, 2024, https://doi.org/10.58079/w4g2

Archive this announcement

  • Google Agenda
  • iCal
Search OpenEdition Search

You will be redirected to OpenEdition Search