Argumentaire
La conversion religieuse est un phénomène complexe, polysémique et polymorphe qui met en exergue la question de la mobilité religieuse et sociale à travers le temps long. À la jonction d’une démarche individuelle et d’un phénomène collectif, elle constitue un objet de recherche transversal éclairant les dynamiques et les modalités d’appartenance, le « bricolage » religieux et les enjeux de son articulation dans l’espace (Hervieu-Léger, 1999). En fonction d’où l’on place le regard, la conversion religieuse peut-être perçue comme une « entrée », une « sortie » qui traduirait le mouvement d’un « avant » à un « après ». Comment traduire l’intensité de ces « passages » ? Est-ce une rupture nette et totalisante, une mutation progressive et adaptée ou une recomposition parcellaire et estompée du croire et du faire religieux ?
Ce dossier propose de penser le religieux dans sa capacité à mobiliser institutions, groupes et individus autour de dynamiques plurielles qui contribuent à la redéfinition du champ religieux lui-même (Dirèche, 2011). Il appréhende la conversion religieuse au prisme de trajectoires multidirectionnelles et communicantes, des « bifurcations » (Le Pape, 2009) dans lesquelles se rejoignent des mouvements de détour, décentrement et retour vers soi. La conversion religieuse est comprise ici par-delà la catégorisation dualiste de rupture et continuité. Ce qui amène à la penser non comme le seul processus opaque de désaffiliation et d’affiliation religieuses mais bien comme un mouvement de soi vers soi impliquant une tension constante de négociations entre reconfiguration des modalités du croire et du faire religieux et prégnance des identités et sensibilités d’un individu propre à un milieu social donné. Par ailleurs, la conversion dépasse l(a)’(dés)affiliation religieuse et peut consister à « flirter » autour d’un référentiel, d’un groupe et/ou d’une tradition discursive nouvelle (Asad, 2017 [1986]). Parfois, la conversion est synonyme de (re)découverte d’une tradition « héritée » et/ou fantasmée. Elle peut aussi impliquer la redéfinition d’une vision (a)religieuse du monde sans s’astreindre à une praxis prescrite. À l’inverse, elle peut comprendre une redéfinition des pratiques tout en s’extrayant d’une vision religieuse du monde inspirée des dogmes.
Religion d’État versus régime de laïcité, formes de sécularisation ou retour du religieux, la politique religieuse menée au sein des sociétés contemporaines questionne les interactions entre le cadre juridique, l’institutionnalisation du religieux ainsi que les acteurs·trices du champ social (Sbaï, 2019). Comment le processus de conversion et l’assignation de « converti·e » s’articulent-ils dès lors que le fait religieux est associé à un groupe minoritaire ou majoritaire dans un espace donné : expression contestataire, marginale, levier d’insertion ou d’ascendance sociale ? C’est autour de la tension entre logiques de « visibilisation » ou d’« invisibilisation » de la conversion que notre réflexion s’articule. Si une conversion peut être pensée comme un processus relevant du for intérieur, de la foi et de la croyance de l’individu, le fait de la rendre (in)visible répond à des considérations collectives et sociales qui amenuisent la frontière entre dimensions publiques et privées (Boissevain, 2014).
Portant une attention particulière aux spatialités, ce dossier entend contribuer aux recherches sur les conversions religieuses passées et présentes – sans restriction temporelle – dans l’espace méditerranéen en proposant une étude croisée (Despotis, Löhr, 2022 ; Norton, 2019 ; Boissevain & Le Pape, 2014 ; Marzouki, Roy, 2013 ; Garcia-Arenal, 2001 ; Guiral-Hadziiossif, 2000). Appréhender les conversions religieuses dans le temps long et dans des espaces variés entend contribuer à une meilleure restitution de la complexité des phénomènes de retour du religieux et ceux de sortie de la religion. Dans cette optique, ce dossier comprend le fait religieux dans une acception large en regroupant « entrées » et « sorties » des monothéismes, des religions, rites et obédiences minoritaires ou marginaux ainsi que des formes d’agnosticisme et d’athéisme, soit des sorties religieuses.
L’approche diachronique ambitionne de faire dialoguer les travaux historiques, sociologiques, anthropologiques et juridiques par la mobilisation de nouvelles archives, d’observations issues d’enquêtes de terrain inédites et de matériaux juridiques autour des conversions religieuses dans ces espaces. Cette ambition n’ignore pas pour autant les contraintes que peuvent révéler la conduite d’enquêtes de terrain et l’accès aux archives mais propose de les inclure comme élément de réflexion dans le présent numéro. Qu’il s’agisse des contextes maghrébin, sud-européen ou proche-oriental, enquêter auprès de groupes confessionnels minoritaires peut également voir les enquêté·e·s refuser de participer à cette objectivation par méfiance ou craintes engendrées par des formes de pressions sociales/politiques, liées à une représentativité négative ou des mesures sécuritaires. De même, les observations et entretiens auprès d’enquêté·e·s qui se perçoivent en marge amènent à une modélisation du discours, un contrôle de l’image et à la construction d’une logique discursive cohérente. Celle-ci légitime la démarche de conversion mais fait l’impasse sur des points sensibles et subtilités, des tabous comme, par exemple, le rejet ou la coexistence d’« ex »-identités plus ou moins informelles (Ebaugh, 1988). Ainsi, comment traiter les silences de la conversion ? Que nous disent les observations de terrain sur la place accordée à l’objectivation des récits de soi dans le processus d’écriture en sciences sociales ? Comment mener une enquête de terrain et/ou accéder à des archives en passant par-delà la méfiance et/ou le refus de la participation des enquêté·e·s, le régime d’autorisation étatique et les contraintes administratives qui en découlent (Hadj-Moussa, 2019) ?
Ainsi, ce dossier saisit l’entrée des conversions pour penser la disparité des intensités, des reconfigurations et des usages contemporains du religieux (Lamine, 2024). Il souhaite contribuer à penser les logiques de l’(in)visibilisation des conversions en mobilisant trois axes thématiques qui portent sur la médiatisation, les dynamiques et pratiques qui en découlent dans le champ culturel et au quotidien, à l’échelle locale et dans les sphères de l’intime.
Axe 1 : Médiatisation. Enjeux, politiques et discours de la conversion
Afin d’interroger les effets sur les mobilisations politiques, religieuses et sociales (Angey, Fer, Vildard, 2021 ; Martin, Suire, 2016 ; Le Pape, Laakili, Mossière, 2017), la première thématique vise à rendre compte des dynamiques et enjeux propres à la réception et au traitement médiatique de la conversion. Comment se superposent, s’imbriquent et se distinguent les jeux d’échelle des récits et de la réception de la conversion dans différents espaces médiatiques (grands médias, plateformes numériques, réseaux sociaux, vlogs) ? Cet axe s’inscrit dans une double perspective, la première étant dédiée aux stratégies de communication des converti·e·s dans les médias. Il est question de confronter ce premier point avec le second, relatif au traitement médiatique de la conversion dans la mesure où celle-ci peut faire l’objet d’un relai médiatique politisé, polémique ou inclusif, apologétique ou disqualifiant (Kaoues, 2020 ; Le Pape, 2014 ; Dirèche, 2011 ; Abécassis, 2000). Sont donc bienvenues les contributions qui s’intéressent à la nature même de ce traitement, en filigrane des enjeux qui le sous- tendent, ses mécanismes ainsi que ses canaux de diffusion et sa réception.
Au Maghreb, des stratégies de mobilisation des médias sont observables – à la télévision ou en ligne via des médias privés notamment[1]. Elles sont mises en œuvre par certains leaders religieux évangéliques afin de faire porter leur voix et leur vision. Avant qu’ils ne choisissent de prendre la parole publiquement, les converti·e·s à l’évangélisme ont d’abord été visibilisés par les médias (publics) à travers une campagne de diabolisation en 2004 (Dirèche, 2009). Cette campagne a d’ailleurs été à l’origine de l’ordonnance de 2006 qui régit l’exercice collectif des cultes autres que musulmans et qui prévoit l’interdiction du prosélytisme à destination des musulman·e·s. Dans ce cadre, en 2008, le pasteur américain Hugh Johnson a été expulsé d’Algérie et d’autres au Maroc en 2010[2]. Par le passé, d’autres expulsions avaient déjà eu lieu comme celle de quinze étrangers appartenant aux Témoins de Jéhovah en 1969 (Le Tourneau, 1969). De plus, la visibilisation médiatique de certaines minorités religieuses par la presse, comme pour les Ahmadis, a permis aussi bien de leur donner une exposition qu’ils n’avaient pas recherché mais également leur inclusion en tant que sujet de recherche universitaire (Zemirli, 2018). Ce constat peut également s’étendre dans les différents pays des mondes arabes, dont l’Égypte qui a connu, par le passé, des polémiques autour de conversion (Abécassis, 2001) et dont l’actualité témoigne d’une saturation médiatique d’affaires spectaculaires pour lesquelles celle-ci révèle crispations et tensions confessionnelles (Kaoues, 2014). Si l’on regarde du côté de l’Albanie et de sa configuration multiconfessionnelle, le relai médiatique du religieux ne s’autorise pas à de telles querelles et tente d’entretenir une image publique apaisée des liens entre les communautés chrétiennes et musulmanes (Fuga, 2005). Dans ce cadre quelles sont les ressources mobilisées, les stratégies d’adaptation et de communication qu’impliquent la conversion au sein d’un milieu social, d’une « communauté d’attestation », d’une institution ou d’un public plus large (Heurtin, Michel, 2021) ?
Cet axe s’intéresse également aux usages des réseaux sociaux et plateformes de streaming puisque la parole, l’image et le faire religieux s’y meuvent sous différents styles, formats et contenus adaptés. Ces productions et usages participent à de nouvelles formes d’interaction et de leadership. Ils proposent des modalités d’être, du faire ou du croire qui médiatisent (aussi) récits et figures de conversion auxquels les usagers s’identifient. Sur ses réseaux sociaux, le combattant MMA et influenceur français Cédric Doumbé produit un récit de conversion, échange en direct avec ses followers lors de lives, revient sur ses croyances et pratiques religieuses en les médiatisant de manière quotidienne. Cela peut aussi s’observer chez l’influenceuse Paloma Ruiz de Almodóvar qui revendique un certain héritage andalou à Grenade. Aussi, de nombreuses vidéos disponibles mettent en scène des prédicateur·trices qui invitent les fidèles à une utilisation orthodoxe des réseaux sociaux. De fait, comment les supports numériques et interactifs viennent-ils redéfinir la diffusion et l’image de la conversion au même titre qu’ils permettent de nouveaux espaces d’expression du religieux ?
Ainsi, toutes contributions ayant trait à la présence de la question de la conversion dans les médias et, plus précisément, de l’analyse des politiques communicationnelles mises en œuvres par les converti·e·s, celles du traitement médiatique des différents relais de l’information (privés, confessionnels, nationaux) et de la réception de cette question médiatisée à différentes échelles (locales, régionales, nationales) sont bienvenues.
Axe 2 : Investir le champ culturel. Production, promotion, médiation
Pour les converti·e·s, la production d’un récit biographique vise à traduire, légitimer, leur nouvelle appartenance religieuse et fait partie intégrante du processus de conversion lui-même. Comment observer la part de « séduction » du récit de conversion ? Ces récits sont des constructions sociales qu’il faut également pouvoir intégrer dans un ensemble plus vaste et contextualisé dont le religieux n’est qu’un prisme, un mode de présentation (Angey, Fer, Vildard, 2021 ; Le Pape, 2015). Comment ces écritures de soi s’incarnent-elles dans le champ culturel ?
Loin d’être cantonnés aux actions caritatives et sociales, les effets de la conversion conduisent les converti·e·s à s’insérer ou à créer des espaces de médiation religieuse en fonction des compétences disponibles – atelier d’enseignement de langues liturgiques, calligraphies ou enseignement confessionnel adapté. Ces médiums mobilisent leurs engagements préexistants tout en leur donnant une nouvelle orientation au sein de la communauté d’accueil. En plus de contribuer à la cohésion sociale du groupe, ils développent un rôle d’agent-médiateur et un capital symbolique croissant au sein de cette dernière. Ces médiums peuvent aussi prendre la forme de biens culturels et saisir le champ littéraire – essai, biographie, roman –, artistique – cinéma, théâtre, calligraphie, danse, chant et musique sacrés – et/ou numérique – webséries, chaînes et vlogs YouTube, comptes Instagram et X (Twitter), pages Facebook ou podcasts. Ainsi, le récit de soi et le récit de conversion « entrent en scène » et adoptent les contours des productions littéraire, cinématographique, documentaire ou numérique[3].
En plus de ces formes d’écritures du soi, les converti·e·s produisent des biens culturels qui assurent une forme de médiation de leur nouvelle appartenance religieuse. Ces productions du champ culturel largement diffusées peuvent jouer un rôle de référence, d’inspiration voire même être érigées en modèle à suivre et viennent ainsi interroger les nouvelles formes d’identification, d’expression et de normativité religieuses. Par ailleurs, qu’en est-il de la dimension genrée de ces écritures de soi ?
Cet axe accueille ainsi des contributions portant sur l’articulation entre processus de conversion et production culturelle. Il vise à interroger la façon dont les acteurs·trices de la conversion investissent le champ culturel pour traduire leur démarche, faire part de leurs aspirations et promouvoir les (nouveaux) modes de représentation qui les animent. Autrement dit, l’interrogation porte sur les dynamiques de production, les modalités d’action et les transferts dans le champ culturel d’une part, et sur la capacité du champ culturel à modéliser, favoriser, contraindre les logiques de production culturelle d’autre part. Ces logiques sous-tendent des régimes disparates de la parole publique qui interrogent la notion de liberté d’expression et ne peuvent faire l’économie du politique au vu des contraintes et conséquences de la promotion d’une religion (minoritaire) en fonction des contextes donnés. Dans ces cas de figure, comment donner cours à ces formes d’expression ?
Axe 3 : Au quotidien. Échelles locale, familiale et intime
Les effets de la conversion débordent du champ religieux et nous invitent à décentrer la conception faite de ses frontières, bien souvent enchevêtrées et mobilisées dans d’autres champs du monde social (Martin, Suire, 2016). Pour autant, si les mécanismes de conversion répondent à des considérations qui sortent bien souvent du religieux, ces derniers ne peuvent non plus totalement en exclure la dimension religieuse, dogmatique et doctrinale. Nous souhaitons interroger la façon dont on place le curseur d’analyse des conversions entre l’agentivité des acteur·trices, la force que peut exercer le groupe sur les converti·e·s dans la vie quotidienne et leur caractère interactionnel. Le troisième axe de ce dossier accueille des contributions portant sur la dimension vécue et quotidienne de la conversion religieuse pensée dans l’intimité du foyer, au prisme de la sphère de l’intime, familiale et conjugale. L’objectif consiste à lire les effets de la conversion, d’abord pour les converti·e·s eux.elles-mêmes puis pour leur entourage, au regard des espaces de socialisation quotidienne (Simona, 2022). Il est ici question de rendre compte des stratégies d’adaptation, des reconfigurations observées mais aussi de la prégnance des liens qui préexistent à la conversion à travers les pratiques ordinaires, les usages du corps et les matérialités religieuses (Bentrar, 2021 ; Cohen, Mottier, 2016).
À l’échelle locale et en fonction des contextes spatio-temporels, politiques et logiques de conversions collectives ou massives peuvent se révéler instructives quant aux liens entre identité religieuse, mobilité humaine et condition sociale. Par exemple, au temps de la dite Reconquista, les Rois Catholiques mènent une politique coercitive de conversions au catholicisme des minorités juives et musulmanes puis d’expulsion d’environ 300 000 Morisques entre 1609 et 1614. Comment les communautés et familles juives et morisques, établies depuis des générations à Tolède, Grenade ou Valence ont-elle été impactées dans leur quotidien, vis-à-vis de leurs activités, leurs vies sociales et religieuses ? Comment les mudéjars ont-ils, par la suite, menés des stratégies d’accommodation et de dissimulation de l’identité et des pratiques religieuses entre les sphères publiques et privées ? L’histoire familiale et quotidienne peuvent également révéler les effets de la conversion à l’échelle individuelle, en fonction des tranches d’âge et de la mobilité sociale (Poutrin, 2016, 2023). Durant la période ottomane, ces logiques amènent aussi à penser les configurations socio-économiques de l’histoire des paysans albanais dans la mesure où se convertir à l’islam permettait aux catholiques et orthodoxes d’accéder à des propriétés terriennes fertiles et d’éviter de devoir migrer dans les régions montagneuses (Fuga, 2005). Dans une autre perspective, l’action des missionnaires jésuites amenant au baptême de 62 villageois alaouites au nord du Mont-Liban en 1931 vient interroger l’imbrication du religieux dans l’organisation sociale et politique à l’échelle locale et quotidienne (Verdeil, 2010). Ainsi, comment penser, au sein des marges religieuses et politiques, le rôle et les effets des conversions collectives dans l’organisation sociale villageoise ?
Dans les pays où l’application du droit de la famille est influencée par l’appartenance religieuse des individu·e·s, comment le processus de conversion d’un des membres du couple impacte-t-il la question des droits au divorce, de garde des enfants ou encore de l’héritage (Bernard-Maugiron, Dupret, 2012) ? En somme, la réflexion inclut les effets juridiques et sociaux de leur conversion. En France, si ces questions ne sont pas abordées d’un point de vue strictement juridique, elles peuvent l’être par la sociologie de la famille, notamment autour des liens établis entre conversion, stratégies matrimoniales, rapports et liens familiaux (Puzenat, 2015).
De même, la promotion « de l’égalité des sexes, adossés à la « mission civilisatrice », a couramment servi de légitimation des politiques coloniales ou des entreprises missionnaires à travers le monde » (Fer, Malogne-Fer, 2015, p. 16). Elle se mêle dans les pays du Maghreb, « à une critique récurrente de l’islam présenté comme un ensemble de structures culturelles, sociales et familiales particulièrement conservatrices et répressives à l’égard des femmes » (Fer, Malogne-Fer, 2015, p. 16). Par ailleurs, ce sont souvent les femmes qui sont les premières visées par les convertisseurs car considérées comme plus perméables aux forces démoniaques (il est donc nécessaire de pouvoir les sauver plus rapidement) et comme étant de « bons relais » de la conversion (elles peuvent devenir à leur tour des prédicatrices efficaces). De même, comment ces mères, piliers de la famille nucléaire, transmettent-elles cette nouvelle culture religieuse aux enfants et comment ces derniers se l’approprient-ils au fil des âges ?
C’est ainsi que la notion d’émancipation est mobilisée par les prédicateurs·trices dans un discours féministe attractif. Elle l’est aussi par les converties elles-mêmes qui s’en saisissent pour dépasser les répartitions genrées des rôles – présence dans l’espace public, mobilité quotidienne, violences conjugales, libéralisation de la parole en lien avec la sexualité ou encore office exclusivement masculin. Au-delà des pratiques strictement religieuses, qu’en est-il des pratiques sociales ordinaires des individus nouvellement convertis ? Quel est le poids des relations et obligations familiales dans les stratégies d’adaptations mises en place pour s’accommoder, voire contourner les nouvelles prescriptions religieuses ? Enfin, de quelle manière, selon les contextes et les situations, les normes locales et les normes religieuses peuvent se renforcer ou, au contraire, entrer en contradiction ?
Modalités de soumission
Les propositions d’articles (de 400 à 600 mots) en français ou en anglais, accompagnées de plusieurs références bibliographiques et d’une courte biographie des auteur.es sont à envoyer sur ce formulaire
avant le 30 juin 2024
- Un retour sera fait aux contributeur·ice·s au plus tard mi-juillet 2024.
- Les contributions seront à rédiger selon les normes de la revue, et sont attendues au plus tard le 6 janvier 2025.
- Les recommandations de rédaction aux auteur·e·s se trouvent sur ce lien.
- Les évaluations des articles seront renvoyées aux auteur·e·s dans le courant des mois d’avril à juin 2025.
- La publication du numéro est prévue pour décembre 2025.
Évaluation
La plupart des articles sont issus d’un appel à contribution, largement diffusé dans le milieu académique national et international. Une première sélection porte sur les projets d’article, sur la base d’un résumé, deux mois après la publication de l’appel à contribution. À ce stade, seules dix à vingt propositions (maximum) sont retenues. Lorsque les articles arrivent, cinq mois plus tard, des évaluateur·e·s sont désignés par le comité éditorial en vue de valider la qualité scientifique des articles proposés et de les améliorer. La règle veut qu’il y ait au moins deux évaluations par article. Pour chacun, un·e chargé·e de suivi est désigné au sein du comité éditorial. Il/elle assure l’interface entre les deux évaluateur·e·s et l’auteur·e de l’article, afin de préserver leur anonymat. Les évaluateur.e.s font partie du comité scientifique ou sont des expert·e·s extérieurs. Leur nom n’est pas rendu public.
- Pour les dossiers thématiques (70 % des articles), fonctionnant sur appel à contribution et sélection préalable sur la base d’un résumé : le-s coordonnateur·e·s du dossier participe·nt à la désignation des deux évaluateur·e·s. Ces dernier·e·s rendent leur avis sur un formulaire d’évaluation en ligne, avec un archivage pour chaque dossier. En cas de désaccord entre les deux évaluateur·e·s, un arbitrage est proposé au comité éditorial par le-s coordonnateur·e-s du dossier et le/la chargé·e de suivi ou en cas de désaccord entre eux, par la rédactrice en chef et la rédactrice en chef adjointe. Il est entendu que la rédaction ne peut imposer à des coordonnateur·e.s de numéro un article dont ils-elles ne voudraient pas. - Pour un article spontané ou varia (10 % des articles) : la sélection se fait au fil des arrivées. Le/la chargé·e de suivi et les deux rapporteur·e·s sont désignés par la rédactrice en chef adjointe après avis des autres membres du comité éditorial et une première réponse est rendue dans un délai de trois à quatre mois. Lorsque l’article est susceptible de s’insérer dans une rubrique traitant particulièrement d’un des États du Maghreb, le responsable de cette rubrique (et rédacteur de la chronique) est forcément chargé de suivi de cet article, de façon à avoir son mot à dire sur la publication de l’article dans la rubrique dont il est responsable. Le formulaire en ligne d’évaluation pour les varia est légèrement différent de celui prévu pour les dossiers.
- Pour les chroniques (20 % des articles) : Le texte est relu et amendé par le rédacteur en chef et au moins un·e membre du comité éditorial.
Pour tous les articles, la décision de publication est rendue au terme d’une réunion du comité éditorial sur la base des expertises réalisées sur chaque article et des réponses qui y ont été apportées par les auteurs.
Comité de coordination
Rédacteur en chef : Loïc Le Pape, politiste, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, CESSP, Paris, France
- Samir Abdelli, Doctorant en histoire contemporaine à l’EHESS au sein du CETOBaC.
- Kheloudja Amer, Doctorante en sociologie à Nantes Université au laboratoire du CENS
- Zohra Aziadé Zemirli, Docteure en droit comparé de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Bibliographie
Abecassis Frédéric, 2000, « Entre logiques d’État et logiques communautaires, à propos de quelques affaires de conversion en Égypte vers 1930 », in Décobert Christian (dir.), Valeurs et distance, identités et sociétés en Égypte, Paris, MMSH - Maisonneuve et Larose.
Abecassis Frédéric, 2001, « Conversion religieuse et identités nationales en Égypte durant la première moitié du XXe siècle », in Garcia-Arenal Mercedes(dir.), Conversions islamiques, identités religieuses en Islam méditerranéen, Paris, Maisonneuve & Larose, p. 259-299.
Angey Gabrielle, FER Yannick, VILDARD Martial (dir.), 2021, « (Se) convertir. Les ressorts institutionnels de la transformation biographique », Genèses, n° 124.
Asad Talal, 2017 [1986], « L’idée d’une anthropologie de l’islam », Archives de sciences sociales des religions, 180.
Azouani-Rekkas Hamida, 2022, « Processus de subjectivation religieuse en Algérie contemporaine : dynamiques d’individualisation et de communautarisation du croire en contexte évangélique pentecôtiste kabyle », Nouvelle perspectives des sciences sociales, v. 18, n° 1, p. 203-236.
Bentrar Djamel, 2021, Jeunes et conversion religieuse radicale : entre corps façonné et désempathie : le cas d’une ville de l’ouest de la France, Thèse de Sociologie, Le Mans Université, https://theses.hal.science/tel-04145508.
Bernard-Maugiron Nathalie, Dupret Baudoin (dir.), 2012, Ordre Public et droit musulman de la famille. En Europe et en Afrique du Nord, Paris, IRD éditions/Bruylant.
Bernard-Maugiron Nathalie, Dupret Baudoin (dir.), 2023, Droits et sociétés du Maghreb et d’ailleurs. En hommage à Jean-Philippe Bras, Paris, Karthala.
Boissevain Katia, Le Pape Loïc, 2014, « Les conversions religieuses en Méditerranée : dynamiques entre engagements individuels et cadres institutionnels », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial, https://doi-org.ezproxy.u-bordeaux- montaigne.fr/10.4000/cerri.1411
Boissevain Katia, 2014, « Le baptême adulte de chrétiens tunisiens : rituel public d’un engagement privé », in BOISSEVAIN Katia, LE PAPE Loïc, « Les conversions religieuses en Méditerranée : dynamiques entre engagements individuels et cadres institutionnels », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial.
Cohen Anouk, Mottier Damien, 2016, « Pour une anthropologie des matérialités religieuses », Archives de sciences sociales des religions, 174, p. 349-368.
Despotis Athanasios, LÖHR Hermut (eds.), 2022, Religious and Philosophical Conversion in the Ancient Mediterranean Traditions, Leiden, Brill.
Direche Karima, 2009, « Évangélisation en Algérie : débats sur la liberté de culte », L’Année du Maghreb, V, p. 275-284.
Direche Karima, 2011, « Mondialisation des espaces néo-évangéliques au Maghreb. Controverses religieuses et débats politiques », Méditerranée, 116, p. 59-65.
Fer Yannick, MALOGNE-FER Gwendoline, 2015, Femmes et pentecôtismes. Enjeux d’autorité et rapports de genre, Paris, Labord et Fides.
Fuga Artan, 2005, « Médias albanais entre Églises et mosquées », Diogène, vol. 210, no. 2, p. 59-72.
Garcia-Arenal Mercedes(ed.), 2001, Conversions islamiques. Identités religieuses en Islam méditerranéen, Paris, Maisonneuve & Larose.
Guiral-Hadziiossif Jacqueline, 2000, « Les conversions des juifs à l’islam et au christianisme en Méditerranée, XIe-XVe siècles », in Bresc Henri (éd.), Mutations, identités en Méditerranée. Moyen Âge et époque contemporaine, Paris, Éditions Bouchène.
Hervieu-Leger Danièle, 1999, Le pèlerin et le converti, Paris, Flammarion.
Heurtin Jean-Philippe, Michel Patrick (dir.), 2021, La conversion et ses convertis. Production et énonciation du changement individuel dans le monde contemporain, Paris, Centre Maurice Halbwachs-Politika.
Kaoues Fatiha, 2014, « Conversions religieuses et mutations sociales en Égypte, enjeux et perspectives », in Boissevain Katia, Le Pape Loïc (dir.), « Les conversions religieuses en Méditeranée : dynamiques entre engagements individuels et cadre institutionnels », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial, https://doi- org.ezproxy.u-bordeaux-montaigne.fr/10.4000/cerri.1381.
Kaoues Fatiha, 2018, « Les convertis évangéliques face à l’islam d’État en Algérie », Critique internationale, vol. 80, n° 3, p. 135-154.
Lamine Anne-Sophie (dir.), 2024, Au-delà du séparatisme et de la radicalisation, Marseille, Diacritiques Éditions.
Le Pape Loïc, 2009, « 12. “Tout change, mais rien ne change”. Les conversions religieuses sont- elles des bifurcations ? » in Grosset Michel, Bessin Marc, Bidart Claire (dir.), Bifurcations. Les sciences sociales face aux ruptures et à l’événement, Paris, La Découverte, p. 212-223.
Le Pape Loïc, 2014, “Peut-on convertir un espace ? Le cas des mobilisations « salafistes » à l’université de La Manouba (Tunis)”, Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial, https://doi-org.ezproxy.u-bordeaux- montaigne.fr/10.4000/cerri.1397.
Le Pape Loïc, 2015, Une autre foi. Itinéraires de conversions en France : juifs, chrétiens et musulmans, Aix-en-Provence, Presses Universitaires de Provence.
Le Pape Loïc, LAAKILI Myriam, MOSSIERE Géraldine, 2017, « Les convertis à l’islam en France, entre liens originels et recompositions croyantes », Ethnologie française, vol. 47, no. 4, p. 637-648.
Le Tourneau Roger, 1969, « Chronique politique-Algérie », Annuaire de l’Afrique du Nord, 1969.
Martin Philippe, SUIRE Éric (éds.), 2016, Les Convertis : parcours religieux, parcours politiques, Paris, Éditions Garnier.
Marzouki Nadia, ROY Olivier (dir.), 2013, Religious Conversions in the Mediterranean World, Londres, Macmillan.
Norton Claire (dir.), 2019, Conversion and Islam in the Early Modern Mediterranean, Londres, Routledge.
Poutrin Isabelle, 2012, Convertir les Musulmans, Espagne, 1491-1609, Paris, Presses universitaires de France.
Poutrin Isabelle, 2023, Les convertis du Pape. Une famille de banquiers juifs à Rome au XVIe siècle, Paris, Seuil.
Puzenat Amélie, 2015, Conversions à l’islam. Unions et séparations, Rennes, Presses Universitaires de Rennes.
Sbaï Jalila, 2019, La politique musulmane de la France. Une mission chrétienne ? 1911-1954, Paris, CNRS Éditions.
Simona Roberto, 2022, Conversions religieuses et liberté. Regards croisés entre christianisme et islam, Lausanne, Antipodes.
Verdeil Chantal, 2010, « Une “révolution sociale dans la montagne” : la conversion des Alaouites par les jésuites dans les années 1930 », in Heyberger Bernard, Madinier Rémy (dir), L’Islam des marges : mission chrétienne et espaces périphériques du monde musulman, XVIe-XXe siècles, Paris, EHESS Éditions, p. 81-105.
Zemirli Zohra Aziadé, 2018, Le statut juridique des minorités religieuses en Algérie, Thèse de doctorat de droit comparé, Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Notes
[1] Salah Chalah, pasteur de l’Eglise protestante du Plein évangélique de Tizi-Ouzou, Mustapha Krim, pasteur de Béjaïa, ancien président de l’association Eglise protestante d’Algérie, Alaoui Lamine, conducteur de louange à Béjaïa et Mokrane Djilali, pasteur aux Ouadhias ont été invités à l’émission Timlilit sur Berbère Télévision en octobre 2019 : https://www.youtube.com/watch ?v =wfm4QoMsUpQ (consulté le 19.12.2023). Salah Chalah a été l’invité de l’émission Dieu TV en juillet 2023 : https://www.youtube.com/watch ?v =W4dhy4Yr-jo (consulté le 19.12.2023).
[2] Mandraud, Isabelle, 5 avril 2010, Expulsés pour prosélytisme [article de presse], Le Monde, https://www.lemonde.fr/afrique/article/2010/04/05/expulses-pour-proselytisme_1328947_3212.html.
[3] En témoignent, entre autres, le documentaire Salam (2022) de l’artiste Diam’s ; le film adapté du roman autobiographique d’Abd al Malik, Qu’Allah bénisse la France (2014) ; l’ouvrage de Fadhma Amrouche, Histoire de ma vie (La Découverte, 2005) ; ou encore les albums de Cat Stevens (Yusuf Islam), The Life of the Last Prophet (1995) et A Is for Allah (2000).
Argument
Religious conversion is a complex, polysemous and polymorphous phenomenon that highlights the issue of religious and social mobility over time. At the junction of an individual process and a collective phenomenon, it constitutes a cross-disciplinary research subject that sheds light on the dynamics and modalities of belonging, religious ’bricolage’ and the issues involved in its spatial articulation (Hervieu- Léger, 1999). Depending on how you look at it, religious conversion can be seen as an ’entry’ or an ’exit’ that translates the movement from a ’before’ to an ’after’. How can we express the intensity of these ’passages’ ? Is it a clear-cut, all-encompassing break, a gradual, adapted mutation, or a fragmented, blurred recomposition of religious belief and practice ?
This issue looks at religion in terms of its ability to mobilise institutions, groups and individuals around plural dynamics that contribute to the redefinition of the religious field itself (Dirèche, 2011). It looks at religious conversion through the prism of multidirectional and communicating trajectories, ’bifurcations’ (Le Pape, 2009) in which movements of diversions, decentering and return to the self come together. Religious conversion is understood here beyond the dualistic categorisation of rupture and continuity. This leads us to think of it not simply as an opaque process of religious disaffiliation and affiliation, but as a movement from self to self, involving a constant tension of negotiation between reconfiguration of the ways in which people believe and do religion, and the significance of the identities and sensibilities of individuals in a given social environment. Moreover, conversion goes beyond religious (dis)affiliation and may consist in ’flirting’ with a new frame of reference, group and/or discursive tradition (Asad, 2017 [1986]). Sometimes conversion means (re)discovering an ’inherited’ and/or fantasized tradition. It can also involve redefining an (a)religious vision of the world without adhering to a prescribed praxis. Conversely, it can involve redefining practices while extricating oneself from a religious vision of the world inspired by dogmas.
State religion versus secularism, forms of secularisation or the return of religion, religious policy in contemporary societies raises questions about the interactions between the legal framework, the institutionalization of religion and the players in the social field (Sbaï, 2019). How do the process of conversion and the assignment of ’convert’ fit together when religion is associated with a minority or majority group in a given area : an expression of protest or marginalisation, a lever for social integration or ascendancy ? It is around the tension between the ’visibility’ and ’invisibility’ of conversion that our discussion is based. While conversion can be thought of as a process that lies within the individual’s inner self, faith and belief, making it (in)visible responds to collective and social considerations that blur the boundary between public and private dimensions (Boissevain, 2014).
Paying particular attention to spatialities, this dossier aims to contribute to research on past and present religious conversions - without temporal restrictions - in the Mediterranean space by proposing a cross-study (Despotis, Löhr, 2022 ; Norton, 2019 ; Boissevain &Le Pape, 2014 ; Marzouki, Roy, 2013 ; Garcia-Arenal, 2001 ; Guiral-Hadziiossif, 2000). Looking at religious conversions over a long period of time and in a variety of areas is intended to help us better understand the complexity of the phenomena of the return to religion and the departure from it. With this in mind, this dossier takes a broad view of religion, encompassing ’entries’ and ’exits’ from monotheisms, minority or marginal religions, rites and denominations, as well as forms of agnosticism and atheism, i.e. religious exits.
The diachronic approach aims to bring together historical, sociological, anthropological and legal research through the use of new archives, observations from unpublished field surveys and legal material on religious conversions in these areas. This ambition does not, however, ignore the constraints that may arise from conducting fieldwork and accessing archives, but proposes to include them as an element of reflection in this issue. Whether in the Maghreb, Southern European or Middle Eastern contexts, interviewing minority faith groups can also result in respondents refusing to participate in the objectification process out of mistrust or fear engendered by forms of social/political pressure, linked to negative representativeness or security measures.
Similarly, observations and interviews with respondents who perceive themselves to be on the margins lead to discourse modelling, image control and the construction of a coherent discursive logic. This legitimises the conversion process but overlooks sensitive points and subtleties, taboos such as, for example, the rejection or coexistence of more or less informal "ex"-identities (Ebaugh, 1988). So how do we deal with the silences of conversion ? What do field observations tell us about the place given to the objectification of self-narratives in the social science writing process ? How can we conduct a field survey and/or access archives while overcoming the mistrust and/or refusal of respondents to participate, the state authorisation regime and the administrative constraints that ensue (Hadj- Moussa, 2019) ?
This issue therefore uses conversions as an entry point to consider the disparate intensities, reconfigurations and contemporary uses of religion (Lamine, 2024). It aims to contribute to thinking about the ways in which conversions are (in)visible by focusing on three themes : media coverage, and the dynamics and practices that result from it in the cultural field and in everyday life, at local level and in intimate spheres.
Axis 1 : Media coverage. The stakes, politics and discourse of conversion
In order to examine the effects on political, religious and social mobilisations (Angey, Fer, Vildard, 2021 ; Martin, Suire, 2016 ; Le Pape, Laakili, Mossière, 2017), the first theme aims to account for the dynamics and issues specific to the reception and media treatment of conversion. How are the different scales of narratives and reception of conversion superimposed, intertwined and distinguished in different media spaces (mainstream media, digital platforms, social networks, vlogs) ? This theme has a dual perspective, the first being dedicated to the communication strategies of converts in the media. The second is concerned with the media’s treatment of conversion insofar as it can be the subject of politicised, polemical or inclusive, apologetic or disqualifying media coverage (Kaoues, 2020 ; Le Pape, 2014 ; Dirèche, 2011 ; Abécassis, 2000). Thus, we welcome contributions that examine the very nature of this treatment, the underlying issues, its mechanisms and the channels through which it is disseminated and received.
In the Maghreb, strategies for mobilising the media can be observed - on television or online via private media in particular . These strategies are used by certain evangelical religious leaders to make their voice and vision heard. Before they chose to speak out publicly, converts to evangelicalism were first made visible by the (public) media through a demonisation campaign in 2004 (Dirèche, 2009). This campaign led to the 2006 ordinance governing the collective exercise of religions other than Muslims, which prohibits proselytising towards Muslims. In 2008, the American pastor Hugh Johnson was expelled from Algeria and others from Morocco in 20103 . Other expulsions had already taken place in the past, such as that of fifteen foreigners belonging to Jehovah’s Witnesses in 1969 (Le Tourneau, 1969). In addition, the media’s exposure of certain religious minorities, as in the case of the Ahmadis, has not only given them exposure they had not sought, but also enabled them to be included as a subject for academic research (Zemirli, 2018). This observation can also be extended to the various countries of the Arab world, including Egypt, which has in the past experienced controversy surrounding conversions (Abécassis, 2001) and whose current events bear witness to a media saturation around spectacular cases that reveal tensions and denominational tensions (Kaoues, 2014). If we look at Albania and its multi-faith configuration, the media relay of the religious does not allow itself such quarrels and tries to maintain a calm public image of the links between the Christian and Muslim communities (Fuga, 2005). In this context, what resources are mobilised and what are the adaptation and communication strategies involved in conversion within a social milieu, a "community of attestation ", an institution or a wider public (Heurtin, Michel, 2021) ?
This area also focuses on the use of social networks and streaming platforms, where religious words, images and actions are conveyed throughout a variety of styles, formats and adapted content. These productions and uses contribute to new forms of interaction and leadership. They propose ways of being, doing and believing that (also) mediatise the stories and figures of conversion with which users identify. On his social networks, the French MMA fighter and influencer Cédric Doumbé shares a story of conversion, live chats with his followers and talks about his religious beliefs and practices on a daily basis. It can also be seen with influencer Paloma Ruiz de Almodóvar, who lays claim to a certain Andalusian heritage in Granada. Moreover, many of the videos available feature preachers urging the faithful to make an orthodox use of social networks. So how are digital and interactive media redefining the dissemination and image of conversion, just as they are opening up new spaces for religious expression ?
We therefore welcome all contributions dealing with the presence of the issue of conversion in the media and, more specifically, an analysis of the communication policies implemented by converts, the media treatment of the various information relays (private, denominational, national) and the reception of this media issue at different levels (local, regional, national).
Axis 2 : Investing in the cultural field. Production, promotion, mediation
For converts, the production of a biographical narrative aims to translate and legitimise their new religious affiliation, and is an integral part of the conversion process itself. How can we observe the ’seductive’ aspect of the conversion story ? These narratives are social constructions that must also be integrated into a wider contextualised whole, of which religion is only a prism, a mode of presentation (Angey, Fer, Vildard, 2021 ; Le Pape, 2015). How are these writings of the self embodied in the cultural field ?
Far from being confined to charitable and social work, the effects of conversion lead converts to join or create spaces for religious mediation, depending on the skills available - liturgical language teaching workshops, calligraphy or adapted denominational teaching. These activities mobilise their pre- existing commitments while giving them a new direction within the host community. As well as contributing to the social cohesion of the group, they develop a role as mediators and a growing symbolic capital within the community. These mediums can also take the form of cultural goods and encompass the literary field - essay, biography, novel -, the artistic field - cinema, theatre, calligraphy, dance, sacred song and music - and/or the digital field - webseries, YouTube channels and vlogs, Instagram and X (Twitter) accounts, Facebook pages or podcasts. In this way, self-narratives and conversion narratives ’enter the scene’ and adopt the contours of literary, cinematographic, documentary or digital productions4.
In addition to these forms of self-writing, converts produce cultural goods that mediate their new religious affiliation. These widely disseminated cultural products can act as a reference, an inspiration or even a model for others to follow, and can thus raise questions about new forms of religious identification, expression and normativity. Incidentally, what about the gendered dimension of these writings of the self ?
This area therefore welcomes contributions on the relationship between the conversion process and cultural production. It aims to examine the way in which those involved in conversion use the cultural field to express their approach, communicate their aspirations and promote the (new) modes of representation that motivate them. In other words, we are looking at the dynamics of production, modes of action and transfers in the cultural field on the one hand, and the capacity of the cultural field to model, promote and constrain the logics of cultural production on the other. These logics underpin disparate regimes of public discourse that call into question the notion of freedom of expression, and cannot do without politics in view of the constraints and consequences of promoting a (minority) religion in a given context. In such cases, how can these forms of expression be accommodated ?
Axis 3 : Everyday life. Local, family and intimate scales
The effects of conversion go beyond the religious sphere and invite us to decentralise our conception of its boundaries, which are often intertwined and mobilised in other areas of the social world (Martin, Suire, 2016). However, while conversion mechanisms often respond to considerations outside the religious sphere, they cannot totally exclude the religious, dogmatic and doctrinal dimension. We would like to look at the way in which we place the cursor for analysing conversions between the agentivity of the actors, the force that the group can exert on converts in everyday life and their interactional nature. The third theme of this issue includes contributions dealing with the lived, everyday dimension of religious conversion in the intimacy of the home, through the prism of the intimate, family and marital sphere. The aim is to read the effects of conversion, first for the converts themselves and then for those around them, in terms of everyday socialisation (Simona, 2022). The goal is to take account of adaptation strategies and the reconfigurations observed, but also of the significance of the links that pre-dates conversion through ordinary practices, uses of the body and religious materialities (Bentrar, 2021 ; Cohen, Mottier, 2016).
On a local scale and depending on the space and time, the policies and logic of collective or mass conversions can be instructive in terms of the links between religious identity, human mobility and social condition. For example, at the time of the so-called Reconquista, the Catholic Monarchs pursued a coercive policy of converting Jewish and Muslim minorities to Catholicism and then expelling around 300,000 Moriscos between 1609 and 1614. How were the Jewish and Morisco communities and families, established for generations in Toledo, Granada and Valencia, affected in their daily lives, their activities and their social and religious lives ? How did the Mudéjars subsequently develop strategies for accommodating and concealing their religious identity and practices between the public and private spheres ? Family and everyday history can also reveal the effects of conversion at an individual level, depending on age and social mobility (Poutrin, 2016, 2023). During the Ottoman period, these logics also led us to consider the socio-economic configurations of the history of Albanian peasants, insofar as converting to Islam enabled Catholics and Orthodox to gain access to fertile land and avoid having to migrate to mountainous regions (Fuga, 2005). From another perspective, the action of the Jesuit missionaries leading to the baptism of 62 Alawite villagers in the north of Mount Lebanon in 1931 raises questions about the interweaving of religion with social and political organisation on a local and daily scale (Verdeil, 2010). How, then, are we to think about the role and effects of collective conversions in villages’ social organisation within the religious and political margins ?
In countries where the application of family law is influenced by the religious affiliation of individuals, how does the conversion process of one of the couple’s members impacts the issue of divorce rights, child custody or inheritance (Bernard-Maugiron, Dupret, 2012) ? In short, the legal and social effects of their conversion need to be considered. In France, while these issues are not addressed from a strictly legal point of view, they can be tackled by the sociology of the family, focusing in particular on the links established between conversion, matrimonial strategies, family relationships and ties (Puzenat, 2015).
Similarly, the promotion of "gender equality, backed by the ’civilising mission’, has commonly served to legitimise colonial policies and missionary endeavours throughout the world" (Fer, Malogne-Fer, 2015, p. 16). In the Maghreb countries, it is combined with "recurrent criticism of Islam as a set of cultural, social and family structures that are particularly conservative and repressive towards women" (Fer, Malogne-Fer, 2015, p. 16). Moreover, it is often women who are the first to be targeted by converters, as they are considered to be more susceptible to demonic forces (so they need to be saved more quickly) and to be "good relays" for conversion (they can in turn become effective preachers). Similarly, how do these mothers, pillars of the nuclear family, pass on this new religious culture to their children, and how do the children appropriate it as they grow older ?
This is how the notion of emancipation is mobilised by preachers as an attractive feminist discourse. It is also used by female converts themselves to overcome gendered role allocations - presence in the public space, daily mobility, domestic violence, liberalisation of speech in relation to sexuality or an exclusively male office. Beyond strictly religious practices, what about the ordinary social practices of newly converted individuals ? How important are family relationships and obligations in the adaptation strategies put in place to accommodate, or even circumvent, the new religious prescriptions ? Finally, in what ways, depending on the context and situation, do local and religious norms reinforce each other or, on the contrary, conflict ?
Submission guidelines
Proposals for articles (from 400 to 600 words) in French or English, accompanied by several bibliographical references and a short biography of the authors, should be sent using on line form
by 30 June 2024
- Contributors will be informed by mid-July 2024 at the latest.
- Contributions must be written according to the journal’s standards and are due no later than 6 January 2025. Editorial recommendations to authors can be found at this link.
- Article reviews will be sent back to authors between April and June 2025.
- Publication of the issue is scheduled for December 2025.
Coordination committee
Review editor : Loïc Le Pape, politiste, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, CESSP, Paris, France
- Samir Abdelli, Doctorant en histoire contemporaine à l’EHESS au sein du CETOBaC.
- Kheloudja Amer, Doctorante en sociologie à Nantes Université au laboratoire du CENS
- Zohra Aziadé Zemirli, Docteure en droit comparé de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
Bibliography
Abecassis Frédéric, 2000, « Entre logiques d’État et logiques communautaires, à propos de quelques affaires de conversion en Égypte vers 1930 », in Décobert Christian (dir.), Valeurs et distance, identités et sociétés en Égypte, Paris, MMSH - Maisonneuve et Larose.
Abecassis Frédéric, 2001, « Conversion religieuse et identités nationales en Égypte durant la première moitié du XXe siècle », in Garcia-Arenal Mercedes(dir.), Conversions islamiques, identités religieuses en Islam méditerranéen, Paris, Maisonneuve & Larose, p. 259-299.
Angey Gabrielle, FER Yannick, VILDARD Martial (dir.), 2021, « (Se) convertir. Les ressorts institutionnels de la transformation biographique », Genèses, n° 124.
Asad Talal, 2017 [1986], « L’idée d’une anthropologie de l’islam », Archives de sciences sociales des religions, 180.
Azouani-Rekkas Hamida, 2022, « Processus de subjectivation religieuse en Algérie contemporaine : dynamiques d’individualisation et de communautarisation du croire en contexte évangélique pentecôtiste kabyle », Nouvelle perspectives des sciences sociales, v. 18, n° 1, p. 203-236.
Bentrar Djamel, 2021, Jeunes et conversion religieuse radicale : entre corps façonné et désempathie : le cas d’une ville de l’ouest de la France, Thèse de Sociologie, Le Mans Université, https://theses.hal.science/tel-04145508.
Bernard-Maugiron Nathalie, Dupret Baudoin (dir.), 2012, Ordre Public et droit musulman de la famille. En Europe et en Afrique du Nord, Paris, IRD éditions/Bruylant.
Bernard-Maugiron Nathalie, Dupret Baudoin (dir.), 2023, Droits et sociétés du Maghreb et d’ailleurs. En hommage à Jean-Philippe Bras, Paris, Karthala.
Boissevain Katia, Le Pape Loïc, 2014, « Les conversions religieuses en Méditerranée : dynamiques entre engagements individuels et cadres institutionnels », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial, https://doi-org.ezproxy.u-bordeaux- montaigne.fr/10.4000/cerri.1411
Boissevain Katia, 2014, « Le baptême adulte de chrétiens tunisiens : rituel public d’un engagement privé », in BOISSEVAIN Katia, LE PAPE Loïc, « Les conversions religieuses en Méditerranée : dynamiques entre engagements individuels et cadres institutionnels », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial.
Cohen Anouk, Mottier Damien, 2016, « Pour une anthropologie des matérialités religieuses », Archives de sciences sociales des religions, 174, p. 349-368.
Despotis Athanasios, LÖHR Hermut (eds.), 2022, Religious and Philosophical Conversion in the Ancient Mediterranean Traditions, Leiden, Brill.
Direche Karima, 2009, « Évangélisation en Algérie : débats sur la liberté de culte », L’Année du Maghreb, V, p. 275-284.
Direche Karima, 2011, « Mondialisation des espaces néo-évangéliques au Maghreb. Controverses religieuses et débats politiques », Méditerranée, 116, p. 59-65.
Fer Yannick, MALOGNE-FER Gwendoline, 2015, Femmes et pentecôtismes. Enjeux d’autorité et rapports de genre, Paris, Labord et Fides.
Fuga Artan, 2005, « Médias albanais entre Églises et mosquées », Diogène, vol. 210, no. 2, p. 59-72.
Garcia-Arenal Mercedes(ed.), 2001, Conversions islamiques. Identités religieuses en Islam méditerranéen, Paris, Maisonneuve & Larose.
Guiral-Hadziiossif Jacqueline, 2000, « Les conversions des juifs à l’islam et au christianisme en Méditerranée, XIe-XVe siècles », in Bresc Henri (éd.), Mutations, identités en Méditerranée. Moyen Âge et époque contemporaine, Paris, Éditions Bouchène.
Hervieu-Leger Danièle, 1999, Le pèlerin et le converti, Paris, Flammarion.
Heurtin Jean-Philippe, Michel Patrick (dir.), 2021, La conversion et ses convertis. Production et énonciation du changement individuel dans le monde contemporain, Paris, Centre Maurice Halbwachs-Politika.
Kaoues Fatiha, 2014, « Conversions religieuses et mutations sociales en Égypte, enjeux et perspectives », in Boissevain Katia, Le Pape Loïc (dir.), « Les conversions religieuses en Méditeranée : dynamiques entre engagements individuels et cadre institutionnels », Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial, https://doi- org.ezproxy.u-bordeaux-montaigne.fr/10.4000/cerri.1381.
Kaoues Fatiha, 2018, « Les convertis évangéliques face à l’islam d’État en Algérie », Critique internationale, vol. 80, n° 3, p. 135-154.
Lamine Anne-Sophie (dir.), 2024, Au-delà du séparatisme et de la radicalisation, Marseille, Diacritiques Éditions.
Le Pape Loïc, 2009, « 12. “Tout change, mais rien ne change”. Les conversions religieuses sont- elles des bifurcations ? » in Grosset Michel, Bessin Marc, Bidart Claire (dir.), Bifurcations. Les sciences sociales face aux ruptures et à l’événement, Paris, La Découverte, p. 212-223.
Le Pape Loïc, 2014, “Peut-on convertir un espace ? Le cas des mobilisations « salafistes » à l’université de La Manouba (Tunis)”, Cahiers d’études du religieux. Recherches interdisciplinaires, Numéro spécial, https://doi-org.ezproxy.u-bordeaux- montaigne.fr/10.4000/cerri.1397.
Le Pape Loïc, 2015, Une autre foi. Itinéraires de conversions en France : juifs, chrétiens et musulmans, Aix-en-Provence, Presses Universitaires de Provence.
Le Pape Loïc, LAAKILI Myriam, MOSSIERE Géraldine, 2017, « Les convertis à l’islam en France, entre liens originels et recompositions croyantes », Ethnologie française, vol. 47, no. 4, p. 637-648.
Le Tourneau Roger, 1969, « Chronique politique-Algérie », Annuaire de l’Afrique du Nord, 1969.
Martin Philippe, SUIRE Éric (éds.), 2016, Les Convertis : parcours religieux, parcours politiques, Paris, Éditions Garnier.
Marzouki Nadia, ROY Olivier (dir.), 2013, Religious Conversions in the Mediterranean World, Londres, Macmillan.
Norton Claire (dir.), 2019, Conversion and Islam in the Early Modern Mediterranean, Londres, Routledge.
Poutrin Isabelle, 2012, Convertir les Musulmans, Espagne, 1491-1609, Paris, Presses universitaires de France.
Poutrin Isabelle, 2023, Les convertis du Pape. Une famille de banquiers juifs à Rome au XVIe siècle, Paris, Seuil.
Puzenat Amélie, 2015, Conversions à l’islam. Unions et séparations, Rennes, Presses Universitaires de Rennes.
Sbaï Jalila, 2019, La politique musulmane de la France. Une mission chrétienne ? 1911-1954, Paris, CNRS Éditions.
Simona Roberto, 2022, Conversions religieuses et liberté. Regards croisés entre christianisme et islam, Lausanne, Antipodes.
Verdeil Chantal, 2010, « Une “révolution sociale dans la montagne” : la conversion des Alaouites par les jésuites dans les années 1930 », in Heyberger Bernard, Madinier Rémy (dir), L’Islam des marges : mission chrétienne et espaces périphériques du monde musulman, XVIe-XXe siècles, Paris, EHESS Éditions, p. 81-105.
Zemirli Zohra Aziadé, 2018, Le statut juridique des minorités religieuses en Algérie, Thèse de doctorat de droit comparé, Paris 1 Panthéon-Sorbonne.