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(Dé)faire les catégories

Quand elles ne (nous) tiennent plus en place : sexe, genre et sexualité

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Published on Wednesday, September 18, 2024

Abstract

Dans le cadre de ce colloque, nous nous pencherons sur les actualités vivantes, polémiques et en mutation des catégories de sexe, de genre et de sexualité dans leur articulation avec les rapports de race et de classe. Dans le prolongement de travaux portant sur les épistémologies critiques des mouvements et pensées féministes, queer et décoloniaux (Bakshi, Jivraj, et Posocco 2016), nous chercherons à penser à partir des crises contemporaines qui traversent ces catégories, les déplacent, voire les font éclater. L’objectif de ces journées est d’appréhender de manière critique des catégories dont l’institutionnalisation au sein des champs académiques français est encore récente, fragile, voire contestée.

Announcement

Présentation

La modernité européenne occidentale est indissociable de processus d’objectification croissante du monde, visant à rendre ses composantes distinctes, observables et donc contrôlables. L’importance contemporaine des « catégories » pour penser et gouverner – des sociétés, des individus, des réalités non humaines – repose sur des épistémologies et des pratiques de l’abstraction théorique, de la définition, du classement, de la hiérarchisation, de la différenciation ou encore de l’assignation. La production de ces outils d’entendement et d’analyse du monde doit donc être pensée conjointement avec les transformations historiques des rapports de domination et avec l’imposition de conditions de vie matérielles inégalitaires (Chow 1998 ; Curiel 2013 ; Grosfoguel 2022 ; Colin et Quiroz 2023).

Ce colloque envisage les catégories hégémoniques comme autant de tentatives de produire, naturaliser et légitimer un rapport de pouvoir, un ordre social hiérarchisé notamment, mais pas uniquement, en termes de classe, de race, de genre et de sexualité (Scott 1986 ; Vicente 2021). Il nous semble cependant que ce travail d’assignation et de maintien de l’ordre ne peut pas s’opérer sans échecs, ni sans produire ses propres marges (Kosofsky Sedgwick 1990 ; Lemebel 1996 ; Bento 2006 ; Cabral 2011 ; Espinosa Miñoso 2016). Il apparaît alors évident que certains corps, certaines subjectivités ou certains mouvements sociaux ne tiennent pas en place, refusent de rester à leur place, s’organisent pour se faire une place, ou plus radicalement encore, pour renverser l’ordre en place.

Dans le cadre de ce colloque, nous nous pencherons sur les actualités vivantes, polémiques et en mutation des catégories de sexe, de genre et de sexualité dans leur articulation avec les rapports de race et de classe. Dans le prolongement de travaux portant sur les épistémologies critiques des mouvements et pensées féministes, queer et décoloniaux (Bakshi, Jivraj, et Posocco 2016), nous chercherons à penser à partir des crises contemporaines qui traversent ces catégories, les déplacent, voire les font éclater. L’objectif de ces journées est d’appréhender de manière critique des catégories dont l’institutionnalisation au sein des champs académiques français est encore récente, fragile, voire contestée. Compte tenu du fait que les processus de racialisation et de colonialité traversent et structurent ces catégories (Anzaldúa et Moraga 1981 ; Mama 1995 ; Mohanty 2003), le comité scientifique sera donc particulièrement sensible aux propositions qui articulent la catégorie de race aux trois autres – sexe, genre, sexualité – et font appel aux approches critiques décoloniales et postcoloniales.

L’enjeu du colloque est ainsi pour nous de penser avec et contre les catégories de sexe, de genre et de sexualité. On cherchera à questionner leur efficacité critique, tout comme les processus de stabilisation normatifs liés à leur inscription dans les champs de savoirs académiques existants. Quels sont alors les risques et les potentiels liés au « devenir catégorie » des outils conceptuels des pensées critiques ? On se demandera notamment comment ces catégories ont été fabriquées et comment elles fonctionnent – aussi bien historiquement (D’Emilio 1983 ; Laqueur 1992 ; Chauncey 1994) que dans des champs d’études contemporains (Suess 2014 ; Oso, Grosfoguel, et Christou 2018). Comment est-ce que ces catégories nous font et nous défont, en tant que corps, individus, entités (Butler 2004) ? Quelles sont les logiques historiques et politiques de leurs transformations et de leurs mises en action en matière de revendication, de réappropriation, de résistance ? Quelles nouvelles perspectives font-elles émerger dans les savoirs et quelles sont leurs limites constitutives ?

Ce colloque se veut résolument inter et trans-disciplinaire (au sein des sciences humaines et sociales principalement), et souhaite faire émerger des dialogues stimulants entre des champs disciplinaires (linguistique, philosophie, sociologie, histoire, psychanalyse…) et des épistémologies différentes (théories féministes et queer, études décoloniales, marxisme…).

Programme

Mardi 8 octobre 2024

9h : Ouverture par le collectif d’organisation du colloque

9h15 : Session 1 – Axe « (Se) Décoloniser : racialisation et sexualité »

Modération : Hourya Bentouhami

  • Massinissa Garaoun (chercheur indépendant) « Lūbya mṛa wəlla Tṛãnṣiya, sur les changements identitaires induits et/ou forcés par les migrations des minorités de genre du Sud vers le Nord ».
  • Francesco Barilà Ciocca (LCSP, CEDREF, Université Paris Cité), « Putting Euopean LGBT+ tolerance on the map : articulations of space, time, and affect ».

10h45 Pause

11h15 : Session 2 - Axe « (Se) Décoloniser : racialisation et sexualité »

Modération : Camille Back

  • Cecilia Rodriguez Ribeiro (UTRPP, USPN) « La terre et la femme autochtone : entre tradition et identité ».
  • May Khattab (EHESS), Penser les mécanismes de racialisation de la sexualité chez les jeunes élites égyptiennes.
  • María Marta Quintana (IPEHCS, CONICET-UNCo, UNRN, Université de Buenos Aires), « Crítica (des)colonial del género y la sexualidad en la teoría travesti latinoamericana ». Contribution à distance depuis Río Negro, Argentine.

12h45 Pause Repas

14h : Session 3 – Axe » Interpréter : Psychanalyse (et) queer »

Modération : Géraldine Bray

  • Pierre Niedergang (IrePh, Paris 10), « L’homosexualité au commencement de la psychanalyse et la pédérité à son recommencement ».
  • Rachel Colombe (LEGS, Paris 8) et Mej Hibold (CIRCEFT, Paris 8), « (Tout) contre : de la psychanalyse comme alliée et mauvais objet des analyses de la normativité médico-éducative ».

15h : Pause

15h30 : Session 4 – Axe » Interpréter : Psychanalyse (et) queer »

Modération : Pascale Molinier 

  • María Agostina Silvestri (IPEHCS, Argentine), « La performatividad de lo imaginario : estrategias de (de)/(re) subjetivación para (des)hacer, (re)inventar y fabular mundos más vivibles ». Contribution à distance depuis Bariloche-Furilofche, Argentine.
  • Sofia Batko (LEGS, Paris 8) et Anna Cominetti (CRPMS, UPC), « Le corps pulsionnel à l’épreuve des catégories ».

16h30 : Pause

17h : Conférence : Thamy Ayouch : Race et psychanalyse : silences psychiques et politiques.

Discutant·e : Géraldine Bray

18h : Fin de journée

Mercredi 9 octobre 2024

9h : Session 5 – Axe « Raconter : généalogies, archives, épistémologies »

Modération : María Cegarra

  • Anouk Durand (EHESS), « Histoire trans, intersexe, lesbienne ? La figure de la tribade au XVIIIe siècle ».
  • María Beas (LER, Paris 8), » Devenir voix du VIH dans l’Espagne post-franquiste ».

10h30 : Pause

11h : Session 6 – Axe « Raconter : généalogies, archives, épistémologies »

Modération : Ruby Faure

  • Camille Fauroux (FRAMESPA, Université Toulouse Jean Jaurès), « Les femmes françaises et les hommes colonisés dans les archives du travail en 1939-1940 ».
  • Maïa Petoton (LEGS, Paris 8), « Naturaliser et racialiser la citoyenneté : de l’usage de la catégorie de « sexe » dans les programmes de Sciences de la vie et de la Terre ».
  • Lou Mousset (LEGS Paris 8, Université d’Amsterdam), « Faire l’amour, faire la guerre, être un homme. Approches libérales de la sexualité dans la littérature islamophobe française ».

12h30 : Pause midi

14h Conférence : Hanane Karimi : La femme voilée n’existe pas : quand l’assignation révèle l’ordre hégémonique.

Discutant·e : Ruby Faure

15h Pause

15h15 : Session 7 – Axe « Revendiquer / Abolir »

Modération : Corto Le Perron

  • Mathias Quéré (FRAMESPA, Université Toulouse Jean Jaurès), « Nous n’avons pas de Marx pédé » : réinventer le militantisme homosexuel dans la France des années 1970 ».
  • Mahdis Sadeghipouya (LEGS, Paris 8), « L’activisme des lesbiennes musulmanes pour décoloniser le "lesbianisme politique" ».
  • Al Caudron (chercheureuse indépendant·e), « "On ne naît pas queer dans la forêt". Socialisations queers, dispositions à la marginalité, trajectoires de classe, de genre et militantes ».

16h45 Pause

17h : Session 8 – » F(r)ictions Queer »

Modération : Sandeep Bakshi

  • Sariah Texier (Université Paris 8), « Écritures queer et trans racisées : marginalités et affranchissements ».
  • Valentine Alloing (LARCA, Université Paris Cité), « "This boy is sitting on the scales, ready to be tilted either way." Paranoia, homosexuality, and conspiracy in Don DeLillo’s Libra ».

18h30 Fin de journée.

Jeudi 10 octobre 2024

9h : Session 9 – Axe « Revendiquer/ Abolir »

Modération : Corto Le Perron

  • Jeanne Delanous (CENS, Université Nantes), « Des limites de la binarité cis/trans : condition de genre, auto-définition et conformité de genre ».
  • Bénedicte Gattère (LEGS, Université Paris 8) et Sélène Domino (ISYEB, Paris 1), « Penser une catégorisation déhiérarchisante : dans quelle mesure la déconstruction écoféministe des binarismes peut-elle revendiquer la systématique biologique ? ».
  • Noureddine Noukhkhaly (Centre Max Weber, ENS Lyon) « Sortir du placard dans un monde blanc ? Le coming-out en contexte familial pour des personnes trans d’ascendance nord-africaine ».

10h30 : Pause

11h : Session 10 – Axe « Revendiquer/ Abolir »

Modération : Camille Back

  • Annabelle Bezo (UTRPP, USPN), « La vague "nappy", un processus de renarcissisation ? ».
  • Raia Veto (EHESS) « Ce que les normes de genre font à la transition et ce que l’automédication fait aux normes de genre ».
  • Fatma Çıngı (CMH, EHESS), « La blanchité de l’égalité hétéroconjugale et la figure de la "femme émancipée" ».

12h30 : Pause repas

14h : Conférence : Mame-Fatou Niang : Une question de langue ? Penser les sources du savoir.

Discutant·e : Sandeep Bakshi

15h : Pause

15h30 : Session 11 « Marronner les grammaires corporelles »

Modération : Michaëla Danjé (Cases Rebelles)

  • Jazil Santschi (Master of Fine Arts, CCC, La HEAD, Genève), « Transmuting Black Sonic Entities ; The Necessary Voices of A Culture in The Making ».
  • Soto Labor, « Ouvrir la fenêtre ou fermer les volets : désirs et savoirs domestiques ».
  • Dionys Andriamahakajy (LIS, UPEC), « Trans*fuge de cadre : transidentités et poéthiques du refus ».

17h : Pause

17h30 : Clôture par le collectif d’organisation du colloque

18h : Fin de journée

Places

  • Maison des Sciences de l'Homme Paris Nord, - 20, avenue George Sand
    La Plaine-Saint-Denis, France (93)

Event attendance modalities

Hybrid event (on site and online)


Date(s)

  • Tuesday, October 08, 2024
  • Wednesday, October 09, 2024
  • Thursday, October 10, 2024

Keywords

  • catégories, sexe, genre, sexualité, race, décolonialisme, queer, psychanalyse

Contact(s)

  • Equipe d'organisation
    courriel : contact [dot] cedc2425 [at] gmail [dot] com

Information source

  • Corto Le Perron
    courriel : corto [dot] leperron [at] ehess [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« (Dé)faire les catégories », Conference, symposium, Calenda, Published on Wednesday, September 18, 2024, https://doi.org/10.58079/12bcz

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