Coordinatrice du numéro
- Sophie Gravereau Anthropologue, sociologue Maîtresse de conférences en urbanisme et aménagement Laboratoire Territoires Villes Environnement & Sociétés (TVES) ULR 4477 Université du Littoral Côte d’Opale
Argumentaire
« Nous habitons nos lieux comme si de rien était », s’étonnait le sociologue Yvon Lamy en liminaire d’un numéro de la revue Genèses consacré, il y 20 ans, à la « Fabrique des lieux »1. Les lieux ont pourtant et depuis toujours, avec plus ou moins d’intérêts et d’engagements, incarné les villes et ceux qui s’y trouvent, investis ou dépourvus, indistinctement, par les maires et les édiles d’une dimension politique, par les habitants et les citadins d’une dimension sociale, par les acteurs et les professionnels urbains d’une dimension économique et symbolique, etc. « Un mot tout simple qui atteint si grand, c’est le destin sémantique du “lieu” et la puissance silencieuse de son secret ? »2, écrivait l’historien Alphonse Dupront à propos des lieux. Ces derniers représentent, pour les chercheurs enquêtant en terrains urbains, le passé et l’avenir des villes par de nouvelles formes architecturales, esthétiques et patrimoniales. Leur ethnographie informe sur la répartition des groupes sociaux dans les espaces urbains et sur les manières de les investir, de les occuper ou de les mettre à distance. Produire des lieux signifie construire un territoire, à la fois sociologiquement, spatialement et symboliquement.
Le lieu n’est pas qu’un espace physique et matériel, occupé et traversé par les individus en mouvement, il est également un espace dans lequel s’incarne et se représente la société. Pour autant, le lieu n’est jusqu’alors étudié qu’en filigrane, comme composante de l’espace, concept qui demeure dominant dans beaucoup de recherches. Mais, par sa paradoxalité et sa complexité, d’être à la fois-totalement neutre – le lieu comme endroit ou comme localisation – ou précisément spécifié - lieu de mémoire ou haut-lieu-, ce dernier fait débat et interroge de plus en plus les chercheurs, s’intéressant à la construction de l’espace dans ses multiples dimensions.
Dans ce contexte propice, le lieu devient progressivement, à partir des années 1980, un sujet d’études, digne d’intérêt. Dans sa recherche sur L’invention du quotidien, le philosophe transdisciplinaire Michel de Certeau lui accorde dès lors une place notable, en la distinguant de celle d’espace : « Un lieu est donc une configuration instantanée de positions. Il implique une indication de stabilité [...] L’espace serait au lieu ce que devient le mot quand il est parlé, c’est-à-dire quand il est saisi dans l’ambiguïté d’une effectuation, mué en un terme relevant de multiples conventions, posé comme l’acte d’un présent (ou d’un temps), et modifié par les transformations dues à des voisinages successifs. A la différence du lieu, il n’a donc ni univocité ni la stabilité d’un propre. En somme, l’espace est un lieu pratiqué »3. Le lieu constitue une manière d’occuper ou d’habiter un espace. Pour l’historien Pierre Nora, dans son étude sur les Lieux de mémoire, il est également une façon de le signifier, de le raconter et de se le représenter : il définit « toute unité significative, d'ordre matériel ou idéel, dont la volonté des hommes ou le travail du temps a fait un élément symbolique du patrimoine mémoriel d'une quelconque communauté »4. Ainsi, dans cette perspective, le lieu fait lien et se révèle un bon analyseur de la société. A l’instar de ces travaux scientifiques, mais aussi d’écrits architecturaux5 ou littéraires6 visant à en explorer tous les aspects, le lieu émerge progressivement, surtout parmi les géographes, comme une unité pertinente d’observation et comme une entrée efficiente pour analyser l’espace.
Après avoir été mis de côté au profit de notions plus consensuelles comme celle d’espace ou de territoire, le lieu se trouve mobilisé par les géographes comme la « plus petite unité spatiale complexe de la société »7 et comme « l’espace de base de la vie sociale »8, dont la valeur heuristique résiderait dans sa capacité à révéler les dynamiques à l’œuvre dans le fonctionnement des territoires. Ainsi, le lieu devient (ou redevient), pour certains, un échelon pertinent pour comprendre la construction spatiale des identités9, la production patrimoniale et l’émergence de cultures à l’échelle locale10 ou pour analyser, dans leur rapport à l’espace, les processus à l’œuvre dans le développement des sociétés contemporaines11. Ses usages, nombreux et pluriels au sein des sciences sociales, en brouillent ainsi les définitions, lesquelles se discernent en fonction des thématiques disciplinaires et des terrains d’investigations : « Les années 1990 voient aussi l’ « explosion » de l’emploi de cette notion multiforme et multi- usages. Le lieu fait florès, il est partout, sert à tout et à tous »12.
La géographie sociale13 et plus encore la sociologie14 ont également largement contribué à reconsidérer l’espace comme un élément participant activement à la structuration sociale et non seulement comme un cadre matériel à l’intérieur duquel se joue les relations sociales. Le lieu, comme échelle spatiale, devient ainsi le support ou le moyen d'expression des rapports sociaux, perceptibles par les autres ; chaque espace peut qualifier ceux qui les habitent ou les fréquentent, « consacrant » ou « dégradant symboliquement » les résidents ou les occupants. Le lieu intervient dans le statut social et dans la distribution sociale des individus. Il constitue dès lors une des modalités d’affirmation des identités collectives et de revendications des positions sociales dans l’espace.
Cet intérêt pour les lieux émerge aussi bien souvent de la société, d’un contexte social et politique au sein duquel ces derniers expriment un problème ou la résolution d’un problème. L’élan pour le local serait alors un indicateur de changement social ou une réponse à une période de crise, à l’échelle d’un territoire, d’une région ou d’une nation. Le lieu se construit comme un objet protéiforme et polyvalent, émergeant de l’actualité sociale et permettant d’aborder une diversité de thèmes de sociétés. L’enjeu est donc méthodologique et heuristique : l’objectif est de le constituer en objet de recherche, d’autant plus que celui-ci se trouve mobilisé dans les réflexions et les actions sur l’habiter, le patrimoine, l’identité ou encore les paysages.
Si certains évoquent un nécessaire « retour au lieux » pour enquêter sur les villes15, d’autres mettent en avant, un intérêt grandissant pour les lieux au sein des politiques sociales, patrimoniales et urbaines contemporaines16. Ce qui est intéressant d’observer à travers ces correspondances, c’est que le lieu apparait bien souvent comme champ de recherche au moment où il est mobilisé par les acteurs sociaux pour dire quelque chose de la ville ou pour porter un projet politique et urbain.
L’intérêt de ce numéro de TEM est de saisir la fabrique d’un lieu comme dynamique plurielle, mettant en jour, en fonction des échelles diachroniques et synchroniques et des situations d’observation, les processus à l’œuvre dans la production sociale des espaces urbains. Le « lieu », dans sa logique et sa singularité, est saisi comme espace et objet de recherche ; il se veut donc à la fois un terrain d’enquête et un filtre d’analyse permettant d’explorer la complexité des espaces contemporains et des rapports sociaux.
L’objectif est ici de demander aux chercheurs, toutes disciplines confondues, de resserrer leur focale d’analyse et de prendre le lieu comme outil de description et de compréhension des villes contemporaines. Chaque lieu est unique ; mais chaque lieu s’inscrit dans l’histoire des villes et du fait urbain. L’exemplarité est ainsi polysémique et met au jour plusieurs échelles et registres d’analyses possibles, révélant les diverses potentialités heuristiques du lieu, comme espace et objet de recherche. Ce dernier constitue à la fois une échelle temporelle, permettant de saisir, à partir d’un lieu d’observation, l’entrecroisement de temporalités urbaines divergentes ; une échelle spatiale, offrant, depuis la ville, une vision concurrentielle des espaces urbains ; enfin, une échelle sociale, considérant dans le quotidien du lieu et des gens, les dynamiques spatiales et les rapports sociaux.
Le lieu – et les processus de localisation - est ici envisagé en tant qu’objet d’étude. Nous envisageons de questionner, dans une démarche de débats interdisciplinaires, aux valeurs heuristiques du « faire lieu », en observant la manière dont ce processus est volontiers mobilisé par les chercheur-es en sciences humaines et sociales, dans leurs problématiques et leurs terrains de recherche17. Plusieurs pistes de réflexion et d’enquête de terrain pourront être ainsi présentées et envisagés, telles un kaléidoscope de lieux et de situations urbains.
Les lieux comme espaces d’identification
Les villes contemporaines sont composées d’une multitude de lieux où des groupes sociaux se fabriquent, par décomposition et recomposition. Parmi ces lieux, certains ont déjà disparu ou se trouvent manifestement sur des trajectoires déclinantes, les autres sont précurseurs et connaissent des évolutions ascendantes, parfois spectaculaires. Avec des décalages dans le temps, ces dernières se manifestent d’un bout à l’autre d’un monde urbain globalisé. Qu’ils en soient proches ou éloignés, les citadins repèrent clairement ces nouveaux mondes : il s’agit bien souvent de lieux qualifiés en fonction des gens ou des collectifs qui l’habitent et l’investissent.
Le lieu dans la ville : fabriques patrimoniales et mémoires urbaines au présent
Un lieu est par construction toujours inachevé et porte ainsi en lui la spatialisation du temps. Donner un nouvel usage aux vestiges de l’industrie, c’est envisager un nouvel avenir pour la ville, par la conservation des lieux en préservant leur valeur patrimoniale, essentielle pour construire l’identité spatiale et la mémoire locale. Dans un contexte de perte de référence collective, conséquence de la désindustrialisation, et d’un besoin de construire un nouvel avenir pour les villes, les friches industrielles sont devenues des lieux de questionnements, porteurs de nouveaux symboles pour les citadins et d’exemplarité pour les politiques à l’œuvre dans le renouvellement urbain. D’une manière générale, le lieu met au jour les relations complexes et contradictoires entre identité locale et territoires en ville. Il s’agit de comprendre comment se créent, disparaissent et se transforment les lieux dans les villes actuelles. Comment les recompositions interpellent les acteurs urbains dans leur contribution à la construction d’un local. Comment se mesure l’ancrage spatial de ces productions dans une ville faite de territoires composites et transitoires, où règnent des dynamiques réticulaires favorisant les fragmentations ?
Haut-lieux/bas-lieux : entre centralités et marges urbaines
A l’échelle des lieux, les logiques socio-spatiales, des périphéries aux marges, se brouillent et se resserrent. L’analyse et la prise en compte des contextes locaux dans la production des périphéries sont essentielles pour saisir, en creux, les processus de marginalisation des espaces et de leurs occupants. Au sein d’un même lieu, voisinent des espaces, vécus par leurs habitants, comme relégués et d’autres, perçus par leurs initiateurs et par les acteurs urbains qui les promeuvent, comme des espaces promis à un nouvel avenir. A partir d’enquêtes de lieux, dans un mouvement incessant et contradictoire de valorisation et dévalorisation locale, il est intéressant de questionner, dans le temps et dans l’espace, les nouvelles formes de marginalité urbaine, comme l’expression de centralités périphériques, à l’échelle des villes.
Du local ou global : logiques de lieux
Rejoindre le mouvement de la mondialisation passe par une réinvention du local, réinvention utilisée comme un tremplin vers le global. Les lieux ainsi réinventés s’inscrivent dans le circuit social et culturel international, comme des ponctuations, des haltes locales d’une pratique sociale et culturelle internationalisée. L’originalité de cet effet tremplin est qu’il concerne des sites distincts et indépendants des métropoles ou même des capitales de cette mondialisation. Cet effet de circuit produit une série de lieux rendus cohérents entre eux par le lien intense construit entre offre sociale et culturelle et attente des habitants et des visiteurs. Ainsi les politiques locales de développement territorial s’incorporent, par la production de ces lieux références, dans le concert économique supranational. Le lieu pourra ici apparaitre comme une grille de lecture, extrêmement fine, des effets de la globalisation à l’échelle locale.
D’autres questionnements et pistes de réflexion sont également possibles et envisageables (approches sensibles, ambiances urbaines, défaire et refaire lieu, etc.).
Modalités de contribution
Les articles devront être transmis à la coordinatrice du numéro (sophie.gravereau@univ-littoral.fr) et à l’adresse mail de la revue (temrevue@univ-lille.fr), selon les normes éditoriales de la revue, pour une évaluation double et anonyme
avant le 15 mars 2025.
Le non-respect de ces normes entraînera le renvoi systématique de l’article à son auteur pour mise aux normes avant présentation au comité de rédaction de la revue.
À la suite du processus de sélection, les articles retenus seront publiés au fil de l’eau sur le site de la revue. Le numéro spécial est prévu pour le premier semestre 2026.
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L’envoi est constitué par les éléments suivants :
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La taille de l’article ne devra pas dépasser 50 000 signes espaces compris. Il devra impérativement comporter un titre en français et en anglais (100 signes maximum chacun), un résumé en français et en anglais (et éventuellement une autre langue - 2 000 signes maximum chacun), 5 mots clés (sans majuscule) en français et en anglais, le corps de l’article avec une introduction, des parties et des sous parties numérotées (1. TITRE – 1.1. Titre – 1.1.1. Titre), une conclusion et une bibliographie respectant les normes et la présentation indiquées plus bas.
Argument
‘We inhabit our places as if nothing had happened,’ remarked sociologist Yvon Lamy in the introduction to an issue of the journal Genèses devoted 20 years ago to the “Fabrique des lieux”18. Yet places have always, with varying degrees of interest and commitment, embodied cities and the people who live in them, invested or deprived, indiscriminately, by mayors and councillors with a political dimension, by residents and city dwellers with a social dimension, by urban actors and professionals with an economic and symbolic dimension, and so on. ‘A simple word that reaches so far is the semantic destiny of ‘place’ and the silent power of its secret...’19, wrote historian Alphonse Baudelaire. wrote the historian Alphonse Dupront about places. For researchers working in urban areas, places represent the past and future of cities through new architectural, aesthetic and heritage forms. Their ethnography provides information about the distribution of social groups in urban spaces and the ways in which they are invested, occupied or distanced. Producing places means constructing a territory, sociologically, spatially and symbolically.
Place is not just a physical and material space, occupied and traversed by individuals on the move; it is also a space in which society is embodied and represented. Yet until now, place has been studied only in passing, as a component of space, a concept that remains dominant in much research. But because of its paradoxical nature and complexity, being at once completely neutral - place as location or localisation - or precisely specified - place of memory or high place - it is the subject of debate and increasingly raises questions among researchers interested in the construction of space in its many dimensions.
In this favourable context, from the 1980s onwards, place gradually became a subject of study, worthy of interest. In his research on L'invention du quotidien (The Invention of Everyday Life), the transdisciplinary philosopher Michel de Certeau gave it a prominent place, distinguishing it from space: ‘A place is therefore an instantaneous configuration of positions. It implies an indication of stability [...] Space would be to place what a word becomes when it is spoken, that is, when it is seized in the ambiguity of an effectuation, transformed into a term subject to multiple conventions, posited as the act of a present (or of a time), and modified by the transformations due to successive neighbourhoods. Unlike place, then, it has neither univocity nor the stability of a proper. In short, space is a practised place’20. Place is a way of occupying or inhabiting a space. For the historian Pierre Nora, in his study on Places of Memory, it is also a way of signifying, recounting and representing it: he defines ‘any significant unit, of a material or ideal order, which the will of men or the work of time has made a symbolic element of the memorial heritage of any community’21. So, from this perspective, place is a link and a good analyzer of society. Following the example of these scientific works, but also of architectural22 or literary23 writings aimed at exploring all its aspects, place is gradually emerging, especially among geographers, as a relevant unit of observation and as an efficient entry point for analysing space.
After being sidelined in favour of more consensual concepts such as space or territory, geographers are now mobilising place as the ‘smallest complex spatial unit of society’24 and as the ‘basic space of social life’25, whose heuristic value lies in its ability to reveal the dynamics at work in the functioning of territories. Thus, for some, place is becoming (or re-emerging) as a relevant level for understanding the spatial construction of identities26, the production of heritage and the emergence of cultures on a local scale27, or for analysing the processes at work in the development of contemporary societies in terms of their relationship with space28. Its many and varied uses within the social sciences blur its definitions, which can be discerned according to disciplinary themes and areas of investigation: ‘The 1990s also saw an “explosion” in the use of this multifaceted and multi-purpose concept. Place flourished, it was everywhere, used for everything and by everyone’29.
Social geography30, and even more so sociology31, have also made a major contribution to reconsidering space as an element that plays an active part in social structuring, and not just as a material framework within which social relations are played out. Place, as a spatial scale, thus becomes the medium or means of expression of social relationships, perceptible by others; each space can qualify those who inhabit or frequent it, ‘consecrating’ or ‘symbolically degrading’ the residents or occupants. Place plays a part in the social status and social distribution of individuals. It is therefore one of the ways in which collective identities are affirmed and social positions in space are asserted.
This interest in places also often emerges from society, from a social and political context in which they express a problem or the resolution of a problem. The impetus for the local is then an indicator of social change or a response to a period of crisis, on the scale of a territory, a region or a nation. The place is constructed as a protean and versatile object, emerging from current social events and enabling a diversity of social themes to be addressed. The challenge, then, is both methodological and heuristic: the aim is to turn place into an object of research, especially as it is mobilised in thinking and action on living, heritage, identity and landscapes.
While some argue that a ‘return to place’ is needed to investigate cities32, others point to a growing interest in place within contemporary social, heritage and urban policies33. What is interesting to observe through these correspondences is that place very often appears as a field of research at the very moment when it is mobilised by social actors to say something about the city or to support a political and urban project.
The interest of this issue of TEM lies in grasping the making of a place as a plural dynamic, bringing to light the processes at work in the social production of urban spaces, depending on the diachronic and synchronic scales and the situations under observation. The ‘place’, in all its logic and singularity, is taken as both a space and an object of research; it is therefore intended to be both a field of investigation and a filter for analysis, making it possible to explore the complexity of contemporary spaces and social relationships.
The aim here is to ask researchers from all disciplines to narrow their analytical focus and use place as a tool for describing and understanding contemporary cities. Every place is unique, but every place is part of the history of cities and urban development. Exemplarity is thus polysemic, revealing several possible scales and registers of analysis and revealing the various heuristic potentialities of place as a space and an object of research. The latter is at once a temporal scale, making it possible to grasp, from a place of observation, the interweaving of divergent urban temporalities; a spatial scale, offering, from the city, a competitive vision of urban spaces; and finally, a social scale, considering, in the everyday life of the place and the people, spatial dynamics and social relationships.
Place - and the processes of localisation - is considered here as an object of study. Our aim is to explore the heuristic value of ‘making place’, as part of a debate between disciplines and disciplinary fields, by observing the way in which this process is willingly mobilised by researchers in the humanities and social sciences, in their problematics and their research fields34. A number of avenues for reflection and field research will be presented and considered, like a kaleidoscope of urban places and situations.
Places as spaces of identification
Contemporary towns and cities are made up of a multitude of places where social groups are created through decomposition and recomposition. Some of these places have already disappeared or are clearly on the wane, while others are precursors and are undergoing upward, sometimes spectacular, change. These changes are taking place at different points in time, across a globalised urban world. Whether they live near or far from it, city dwellers can clearly identify these new worlds: they are often places defined by the people or groups who live in them and use them.
Place in the city: heritage fabrications and urban memories in the present
By its very nature, a place is always unfinished, and thus carries with it the spatialization of time. Giving a new use to the remains of industry means envisaging a new future for the city, by conserving the sites and preserving their heritage value, which is essential for building spatial identity and local memory. In a context of loss of collective reference as a result of deindustrialisation, and a need to build a new future for cities, brownfield sites have become places of questioning, providing new symbols for city dwellers and setting an example for the policies at work in urban renewal. Generally speaking, the site brings to light the complex and contradictory relationships between local identity and urban territories. The aim is to understand how places are created, disappeared and transformed in today's cities. How these recompositions challenge urban actors in their contribution to the construction of a locality. How can we measure the spatial anchorage of these productions in a city made up of composite and transitory territories, where reticular dynamics encourage fragmentation?
High places/low places: between centralities and urban margins
On the scale of places, socio-spatial logics, from the peripheries to the margins, blur and tighten. Analysing and taking into account the local contexts in the production of peripheries is essential in order to understand the processes by which spaces and their occupants are marginalised. In the same place, there are spaces that are experienced by their inhabitants as relegated, and others that are perceived by their initiators and by the urban actors who promote them, as spaces with a promise of a new future. On the basis of site surveys, in a constant and contradictory movement of local enhancement and devaluation, it is interesting to question, in time and space, the new forms of urban marginality, as the expression of peripheral centralities, on a city scale.
From local to global: the logic of place
Joining the globalisation movement requires a reinvention of the local, a reinvention used as a springboard towards the global. The places reinvented in this way become part of the international social and cultural circuit, as punctuation points, local stops on the way to an internationalised social and cultural practice. The originality of this springboard effect is that it concerns sites that are distinct and independent of the metropolises or even capitals of this globalisation. This circuit effect produces a series of places that are made coherent by the intense link built up between the social and cultural offer and the expectations of residents and visitors. In this way, local development policies are incorporated into the supranational economic concert, through the production of these places of reference. Here, the place can be seen as an extremely fine-tuned grid for reading the effects of globalisation on a local scale.
Other questions and lines of enquiry are also possible and could be envisaged (sensitive approaches, urban ambiences, undoing and remaking place, etc.).