Notre époque, hantée par une nostalgie des Lumières, cherche à renouer avec les idéaux fondateurs de nos valeurs républicaines et de l'universalisme européen. Mais face aux crises, le défi de réinventer les Lumières semble plus que jamais d'actualité. Ce cycle de rencontres invite historiens, philosophes et sociologues à interroger l’héritage des Lumières et à envisager comment leurs principes peuvent répondre aux enjeux du XXI^e siècle.

Le cycle de rencontres Les Lumières face aux défis d'aujourd'hui est organisé à l’initiative de Bettina Laville, présidente de l'IEA de Paris, conseillère d’État honoraire, fondatrice et présidente d'honneur du Comité 21.

Programme

Lundi 10 mars à 18h : Les Lumières : un héritage toujours vivant ?

avec la participation

• d'Antoine Lilti, professeur agrégé d’histoire au Collège de France, où il dirige la chaire « Histoire des Lumières, XVIIIe-XXIe siècle », et directeur d’études à l’EHESS. Il a notamment publié l’ouvrage L'Héritage des Lumières. Ambivalences de la modernité (EHESS, Gallimard, Seuil, 2019) portant sur l’actualité des idées des Lumières dans le débat contemporain
• et de Corine Pelluchon, professeure agrégée de philosophie politique et d’éthique appliquée à l’Université Gustave Eiffel. Dans le sillage de sa thèse, elle publie Leo Strauss, une autre raison, d'autres Lumières : essai sur la crise de la rationalité contemporaine (Vrin, 2005) puis Les Lumières à l'âge du vivant (Seuil, 2021).

Lundi 07 avril à 18h : Connaissance et progrès : de l'Encyclopédie à l'ère numérique

avec la participation de

• Bruno Bachimont, philosophe, informaticien et enseignant-chercheur à l’Université de technologie de Compiègne. Ses recherches portent notamment sur la philosophie de la technique et du numérique, l’ingénierie des connaissances, les théories de l’archivage, la mémoire et le patrimoine ;
• Marie Leca-Tsiomis, professeure émérite à l'Université Paris Nanterre, membre du Centre des Sciences des Littératures en langue Française (CSLF) et spécialiste de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert. Elle est l'une des fondatrices du projet ENCCRE (Edition Numérique, Collaborative et CRitique de l’Encyclopédie) visant à regrouper et à mettre à la disposition de tous l'ensemble des connaissances qui concernent l'Encyclopédie des Lumières
• et de Stéphanie Roza, chargée de recherche en philosophie politique au CNRS, est une spécialiste des idées des Lumières et de leurs héritages contemporains ainsi que de l'histoire des pensées républicaines et socialistes du XVIIIe siècle à nos jours.

Lundi 19 mai à 18h : Le cosmopolitisme des Lumières peut-il refonder un nouvel ordre mondial ?

avec la participation de

• Jean-Vincent Holeindre, professeur agrégé de science politique à l'Université Paris-Panthéon-Assas et directeur du Centre Thucydide de recherche en relations internationales. Il a entre autres coécrit l'ouvrage Nations désunies ? La crise du multilatéralisme dans les relations internationales avec Julian Fernandez (CNRS Editions, 2022)
• et Alain Policar, spécialiste de la théorie politique et de la philosophie politique, également chercheur associé au Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF). Il est notamment l'auteur de Comment peut-on être cosmopolite ? (Le Bord de l'eau, 2018) et de Cosmopolitisme ou barbarie (Editions Rue d'Ulm, 2020).

Jeudi 19 juin à 17h : Peut-on réinventer les Lumières ?

avec la participation de

• Francis Wolff est professeur émérite à l'Ecole Normale Supérieure de Paris (ENS-PSL), dont il a dirigé le département de philosophie. Sa philosophie s'articule autour de la notion d'humanisme critique. Il a en particulier beaucoup approfondi la notion d'universel, notamment, parmi de très nombreux ouvrages, dans Trois Utopies Contemporaines et de Plaidoyer pour l'universel
• et de Céline Spector, professeure de philosophie à Sorbonne Université, est une spécialiste en philosophie politique des Lumières et de la démocratie européenne. Elle a publié de nombreux ouvrages consacrés entre autres à Montesquieu et à Rousseau, et ses travaux ont été récompensés de la Médaille d'argent du CNRS en 2024.

Présentation détaillée

En ces temps troublés, caractérisés par des menaces de toutes sortes, cette dernière séance sera l'occasion de se demander comment deux valeurs phares des Lumières, la quête de la liberté et la foi dans l’universalisme, peuvent être réincarnées et revivifiées.

L’universalisme, aujourd’hui, est mis à mal par de nombreux courants philosophiques et politiques, qui considèrent que cette notion s’est développée dans une temporalité où l’Occident était l’étalon de toutes les valeurs. Par conséquent, cet universalisme aurait négligé, voire méprisé, d’autres cultures n’ayant pas moins vocation à l’universalisme, en particulier celui des peuples méconnus ou opprimés. A partir de cette lecture de l’histoire se répandent une relativité de toutes les valeurs qui ont fait le socle républicain et une mise en question de l’appréhension occidentale de la liberté et de la vérité. On constate ces évolutions tant dans les mouvements libertariens venus des Etats-Unis que dans des enfermements identitaires, pour parler comme Souleymane Bachir Diagne.

Or, à partir de ces dérives et en même temps que les évolutions technicistes de nos sociétés, le doute est distillé sur la valeur même de l’humanisme, alors que justement les Lumières peuvent continuer de nous inspirer pour en renouveler le rayonnement.