Página inicialContextualiser les objets, un changement de regard sur le patrimoine technique et scientifique
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Publicado quinta, 03 de julho de 2025

Resumo

L’objectif de cette journée d'étude est de croiser des approches de l’objet technique et des « objets de science » émanant de toutes les composantes des sciences humaines et sociales tout en interrogeant l’expression de leurs contextes dans un cadre muséal : depuis la collecte de l’objet jusqu’au discours muséographique en passant par ses modalités de conservation.

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Journées d’étude organisées par la section Sciences, histoire et patrimoine des sciences et des techniques et de l'archéologie industrielle du Comité des travaux historiques et scientifiques (CTHS) et le Musée des arts et métiers-Cnam.

Date et lieu

Mardi 9 et mercredi 10 décembre 2025

Musée des arts et métiers-Cnam, amphithéâtre Grégoire

Accès par l’accueil du Musée des arts et métiers-Cnam : 60 rue Réaumur 75003 Paris

Comité d’organisation 

  • Michèle Antoine, Musée des arts et métiers-Cnam
  • Marie-Sophie Corcy, CTHS, Musée des arts et métiers-Cnam
  • Rosène Declementi, Musée des arts et métiers-Cnam
  • Olivier Labat, Musée des arts et métiers-Cnam,
  • Guy Lambert, CTHS, ENSA Paris-Belleville/IPRAUS

Argumentaire

Rendre accessible les collections techniques et scientifiques : défis et enjeux

Bien que reconnues comme une richesse patrimoniale exceptionnelle, les collections scientifiques, techniques et naturelles posent un défi majeur aux institutions muséales : celui de la compréhension par les publics.

Ces collections peuvent être perçues comme hermétiques, par leur apparence disjointe de leur fonction ou par la complexité des domaines auxquels elles renvoient. Elles ne se limitent pas à leur seule matérialité ; elles portent en elles des histoires, des contextes et des significations qui dépassent leur fonction première. Face à des visiteurs aux attentes hétérogènes – scolaires, amateurs, experts –, les musées doivent repenser les approches univoques. Comment collecter, étudier, sélectionner, conserver, gérer, les informations contextuelles pour transmettre cette richesse sans la simplifier exagérément) ni en trahir la profondeur ? Une muséologie efficace doit croiser des discours multiples, réintroduire des contextes historiques et techniques, et valoriser les dimensions immatérielles qui donnent sens à ces objets allant de la production artisanale aux artefacts industriels complexes.

Actualiser les discours et les collections : enjeux, contextes et perspectives sociétales

Le discours muséal a longtemps réduit les objets techniques et par effet les collections scientifiques à des jalons d’un progrès linéaire et triomphant. Dans quelle mesure ce constat reflète-t-il le statut de ces artefacts et les difficultés à les comprendre et les faire comprendre ? Les musées, qui ont contribué à l’écriture de l’histoire des sciences et des techniques, en écho à une historiographie renouvelée, se sont confrontés au problème. L’évocation de l’invention s’est ainsi souvent cristallisée autour de quelques objets et figures emblématiques : ces « jocondes » participent à une vision simplifiée ou simpliste, voire erronée de l’histoire des sciences et des techniques. Une machine à vapeur devient le symbole d’une avancée technologique, tandis que ses implications sociales – conditions de travail des ouvriers, exploitation des ressources – ou environnementales – pollution, déforestation – sont reléguées au silence. L’histoire écrite autour de quelques personnalités majeures masque une tout autre réalité. Cette approche, bien que pédagogique dans son intention, appauvrit la polysémie des artefacts, c’est-àdire leur capacité à porter des significations multiples et contradictoires. Pour surmonter ces limites, il devient impératif de diversifier les narrations.

L’intelligibilité des collections scientifiques ne se limite donc pas à une question muséale : elle est un enjeu sociétal majeur. En rendant accessible la culture scientifique, les musées contribuent à démocratiser le savoir et à alimenter des débats contemporains essentiels, qu’il s’agisse d’écologie (impact des technologies sur l’environnement), d’éthique (progrès médical) ou de justice sociale (conditions de production). Pour ce faire, il est crucial de contextualiser les objets dans trois dimensions : celle de leur création (laboratoires, ateliers, usines…), de leur conservation (rôle des collections institutionnelles ou privées et des musées) et de leur transmission (éducation, médiation). Ce défi engage aussi les politiques d’acquisition des musées. Les stratégies d’enrichissement des collections s’inscrivent aussi dans les questionnements et débats contemporains.

Recontextualiser les objets pour développer des récits

La constitution des collections s’est souvent opérée en omettant, volontairement ou involontairement, la question des contextes. La vie de l’objet avant sa patrimonialisation est pourtant essentielle à sa compréhension et devient l’un des éléments du discours. Un objet technique ou scientifique, isolé de son contexte d’usage, perd une grande partie de son sens. Comme le souligne le philosophe Gilbert Simondon, un artefact doit être appréhendé dans son « milieu associé », c’est-à-dire l’ensemble des conditions matérielles, humaines et culturelles qui lui donnent vie. Sans cette recontextualisation, un métier à tisser, un oscilloscope ou un tesson de céramique, exposés dans une vitrine ou conservés dans une réserve, deviennent muets, réduits à leur seule esthétique ou à une notice descriptive sommaire. 

Le contexte touche aussi à la provenance et aux modalités de l’acquisition ce qui implique de repenser les modes de gestion et de conservation des éléments collectés, notamment lorsqu’ils sont immatériels. Connaître les conditions de l’entrée d’un objet dans les collections est l’occasion d’enquêtes portant sur l’objet lui-même – sa fabrication, son origine, ses spécificités – que sur les personnalités qui lui sont associées – auteur(s), propriétaire(s), usager(s). Ces enquêtes, basées sur les archives, les inventaires, les correspondances, les traces matérielles des objets (inscriptions, étiquettes, traces d’usage…), redonnent une place à l’objet parmi les collections et font émerger des figures méconnues. L’histoire des sciences et des techniques intègre l’histoire sociale, l’anthropologie.

Au prisme de ces contextes, les objets techniques éclairent les réponses apportées aux changements qui interviennent dans leur « milieu associé ». Ils révèlent ainsi les situations ou les modalités qui interviennent dans le développement, l’abandon ou la reprise de certaines filières techniques ou démarches scientifiques (découvertes, évolution énergétique, changement de régime politique, changement climatique, main d’œuvre disponible, moyens financiers, etc…).

Faire apparaître « l’humain » : savoir-faire, gestes et pratiques

Les initiatives muséales et les recherches futures doivent diversifier les discours et multiplier les approches (scientifiques, historiques, sociales), préciser comment les disciplines concernées recontextualisent leurs objets d’étude, intégrer l’immatériel à travers des cadres conceptuels comme ceux de Leroi-Gourhan, et répondre aux attentes sociétales en favorisant l’inclusion et le dialogue. Cette démarche pluridisciplinaire ne vise pas seulement à rendre ces collections accessibles ; elle cherche à en faire des outils de compréhension du monde, à la croisée du passé, du présent et des défis à venir.

Une approche plurielle serait capable d’embrasser la polysémie des collections scientifiques, techniques et naturelles permet de répondre à ces problématiques. Dans le discours de Descola, l’objet technique n’a pas de place fixe. Il oscille entre un outil passif de maîtrise humaine à celui d'acteur à part entière.

« Science de la technique » avant de devenir la « science des machines » (et de l’industrie), mais également la « science du travail » (travail manuel et savoir-faire), la technologie apparaît comme l’une des clés de lecture des collections scientifiques et techniques. Cette triple définition de la technologie permet le croisement des disciplines et ouvre des possibilités et des questionnements. Le patrimoine immatériel, composé de savoir-faire, de pratiques et de traditions, joue un rôle clé pour éclairer la matérialité des collections et construire des récits. André-Georges Haudricourt, en envisageant la technologie comme une « science humaine », insiste sur le lien indissociable entre les objets et les interactions sociales qui les façonnent. André Leroi-Gourhan, de son côté, propose une grille d’analyse précieuse avec les concepts de « faits » (actions concrètes inscrites dans un contexte), de « tendances » (évolutions techniques à long terme) et de « chaîne opératoires», cette dernière décrivant la séquence logique allant de la conception d’un objet à son usage. Appliquer cette approche à une presse d’imprimerie, par exemple, permet de décrypter les choix techniques (matériaux, mécanismes), les contraintes économiques ou sociales (division du travail) et les significations culturelles (diffusion du savoir).

Muséographier les contextes

La « muséographie dynamique », prônée par Maurice Daumas, proposait d’apporter des éléments de mise en contexte à l’objet présenté. Dans cette optique, les médiations immersives (parcours sonores, hologrammes) et participatives (co-construction avec les visiteurs) apparaissent comme des perspectives prometteuses. Les archives sonores (le sifflement d’une machine), simulations numériques (reconstitution d’un atelier) ou témoignages d’acteurs historiques (ouvriers, ingénieurs) transforment les collections en leviers d’une réflexion plus large sur notre rapport à la technique, passant d’une simple contemplation à une interrogation active sur les défis du présent et de l’avenir. Une locomotive prend alors une nouvelle dimension si l’on entend les bruits de la forge ou les récits de ceux qui l’ont construite. 

Cependant, cette démarche se heurte souvent aux lacunes documentaires qui limitent la précision des reconstitutions, et le recours à des artifices peut donner une impression de mise en scène artificielle. Pour pallier ces difficultés, des enquêtes participatives auprès de communautés liées à ces objets – artisans, techniciens, habitants locaux – permettent de collecter des savoirs vivants, enrichissant ainsi les récits muséaux de manière authentique et collaborative. Intégrer ces dimensions dans la muséographie – en croisant science, industrie et savoir-faire – offre une lecture multidimensionnelle des collections. Cette approche implique également de s’adapter aux mutations technologiques rapides, notamment numériques, qui redéfinissent les attentes des publics. Des dispositifs interactifs, comme des ateliers pratiques ou des expériences en réalité virtuelle, permettent de réactiver ces savoirs tout en oscillant entre valorisation et mise en perspective critique, évitant ainsi une idéalisation nostalgique. Cela peut passer par des approches thématiques, interdisciplinaires – en mobilisant l’histoire, la sociologie ou l’anthropologie –, ou encore par des outils technologiques comme les jumeaux numériques qui superposent des couches d’information au réel, ou une médiation ciblée selon les publics (visites guidées spécifiques, ateliers). Le statut patrimonial de ces contenus contextuels se doit sans doute d’être interrogé. 

Les approches visant à une exploration interdisciplinaire de l’objet technique sont attendues. Sont donc convoquées toutes les disciplines des SHS : archéologie, ethnographie et ethnologie, etc… 

L’objectif est de croiser des approches de l’objet technique émanant de toutes les composantes des SHS tout en interrogeant l’expression de leurs contextes dans un cadre muséal : depuis la collecte de l’objet jusqu’au discours muséographique en passant par ses modalités de conservation.

Modalités de contribution

Les propositions de communication (titre, résumé de 2000 à 2500 signes, biographie de l’auteur) doivent être adressées

avant le 15 juillet 2025 à :

  • Marie-Sophie Corcy ("CORCY Marie-Sophie" marie-sophie.corcy@lecnam.net).
  • Rosène Declementi ("DECLEMENTI Rosène" <rosene.declementi@lecnam.net>)
  • Olivier Labat ("LABAT Olivier" <olivier.labat@lecnam.net>)
  • Guy Lambert ("guy lambert" <guy.lambert@paris-belleville.archi.fr>) 

Bibliographie

Daumas, Maurice, Plaidoyer pour l’histoire des techniques, 1963

Descola, Philippe, Par-delà nature et culture, 2005

Haudricourt, André-Georges, La Technologie, science humaine : Recherches d'histoire et d'ethnologie des techniques. Paris, Éditions de la Maison des sciences de l'homme, 2002.

Ferloni, Julia, Sitzia, Emilie, « Quand le musée de société donne du pouvoir : enjeux de la construction participative d’exposition au Mucem », Culture et Musées, n°39, 2022

Guffroy, Yohann, Bontems, Vincent, « La mécanologie : une lignée technologique francophone ? Artefact, 8, 2018 Lebeau, André, Réflexions sur la muséologie des techniques. In : Journée Michel Crozon, Orléans, 20 mars 2012.

Leroi-Gourhan, André, Evolution et techniques (T1. L’Homme et la Matière. T2. Milieux et Techniques). Paris, Albin Michel, 2012.

Roux, Valentine, Courty, Marie-Agnès, Des céramiques et des Hommes. Nanterre, Presses universitaires ParisNanterre, 2016

Sigaut, François, Comment Homo devint faber. Comment l’outil fit l’homme. Paris, CNRS Éditions (Biblis), 2012. Simondon, Gilbert, Du mode d’existence des objets techniques. Paris, Aubier, 2012. 

Locais

  • Musée des arts et métiers Cnam - 60 rue Réaumur
    Paris, França (75003)

Datas

  • terça, 15 de julho de 2025

Palavras-chave

  • patrimoine technique, patrimoine scientifique, collection scientifique, collection technique, muséologie, muséographie

Contactos

  • Marie-Sophie Corcy
    courriel : marie-sophie [dot] corcy [at] lecnam [dot] net
  • Rosène Declementi
    courriel : rosene [dot] declementi [at] lecnam [dot] net
  • Olivier Labat
    courriel : olivier [dot] labat [at] lecnam [dot] net

Fonte da informação

  • Guy Lambert
    courriel : guy [dot] lambert [at] paris-belleville [dot] archi [dot] fr

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Para citar este anúncio

« Contextualiser les objets, un changement de regard sur le patrimoine technique et scientifique », Chamada de trabalhos, Calenda, Publicado quinta, 03 de julho de 2025, https://doi.org/10.58079/149ee

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