AccueilL’esthétique comme quête de sens : enjeux et fonctions de l’art au XXIᵉ siècle
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Publié le jeudi 02 octobre 2025

Résumé

L’art et, plus largement, la dimension esthétique de l’existence, peuvent être envisagés comme une véritable « porte de secours » dans le contexte de crise du sens qui marque notre époque. L’objectif de ce colloque sera d’interroger, dans une perspective interdisciplinaire, les manières dont l’esthétique, la pensée et l’expérience de l’art peuvent constituer aujourd’hui un puissant instrument de quête de sens – existentiel, éthique, thérapeutique, social et écologique.

Annonce

Faculté des lettres et des sciences humaines de Sousse (Université de Sousse - Tunisie), 15-16 Octobre 2026

Organisateurs 

Laboratoire « Ecole et Littératures » (Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Sousse, Tunisie) et Centre Gilles Gaston Granger (Aix-Marseille Université, France).

Nizar Ben Saad (laboratoire Ecoles et Littératures, Université de Sousse) et Pierre Léger (Centre Gilles Gaston Granger, Aix-Marseille université). 

Argumentaire

L’esthétique comme quête de sens : enjeux et fonctions de l’art au XXIᵉ siècle

Le monde contemporain traverse une profonde crise du sens. Guerres, réchauffement climatique, effondrement de la biodiversité, consommation de masse, uniformisation des identités et des cultures sous l’effet de la mondialisation : autant de phénomènes qui nourrissent une inquiétude existentielle et un sentiment d’épuisement de la signification. Ce thème renvoie, dans l’histoire de la philosophie, principalement à la tradition phénoménologique (dans la Krisis d’Husserl d’abord, puis chez Patočka et Richir), ainsi qu’à une base de réflexion d’ordre éthique (Jean-François Mattéi). Sur un plan plus scientifique, la « collapsologie » (Pablo Servigne, Raphaël Stevens) propose aujourd’hui un cadre d’analyse du possible effondrement des sociétés modernes, voire de la disparition de l’humanité elle-même.

Dans ce contexte, la question du « sens » doit être pensée à double titre : comme signification et comme orientation. Mais cette crise de la signification n’est-elle pas, plus originellement encore, liée à la troisième acception, esthétique, du mot sens, dans la mesure où elle est aussi une crise de la sensibilité ? Pour le présenter autrement : quel rôle peut jouer la dimension esthétique de l’existence dans l’élaboration du sens de nos vies ? Quels sont les enjeux d’une éducation et d’une pratique esthétiques dans le monde contemporain ?

Notre colloque se propose d’explorer ces questions à partir de plusieurs axes complémentaires :

Une dimension existentielle

L’esthétique, comme l’avaient pressenti Schiller dans ses Lettres sur l’éducation esthétique de l’homme ou encore Nietzsche dans La naissance de la tragédie, ne se réduit pas à l’ornement du quotidien mais participe à la construction d’une vie « digne d’être vécue ». L’art intensifie et affine notre sensibilité, enrichissant ainsi notre expérience du monde. Cet idéal d’éducation esthétique, présent dès l’Antiquité (Platon, Aristote), fut repris par le romantisme allemand, souvent sous une forme élitiste. Reste à interroger sa possible réinvention dans un cadre démocratique, où l’expérience esthétique ne serait pas le privilège d’une élite mais le bien commun d’une humanité partagée.

Par ailleurs, les émotions esthétiques dites « négatives » (le dégoût, l’effroi, la mélancolie) jouent elles aussi un rôle structurant. Comme le montrent les recherches contemporaines en esthétique et en psychologie des émotions, elles délimitent les frontières de l’acceptable et de l’inacceptable, contribuant ainsi à l’orientation pratique et morale de nos existences. Plus profondément encore, quel rôle la dimension esthétique joue-t-elle dès les premiers pas de l’humanité dans des domaines aussi déterminants sur le plan évolutionniste que la maîtrise de l’environnement, la compréhension de soi et le renforcement des groupes sociaux ? La perspective bio-esthétique (Ellen Dissanayake, Stephen Davies) en construction depuis une quarantaine d’années enrichit sur un plan très pragmatique cette fonction existentielle de la sensibilité et des productions artistiques.

Une dimension éthique et politique

L’expérience esthétique mène-t-elle nécessairement à un esthétisme déconnecté du réel, tel que le craignait Kierkegaard, ou peut-elle fonder un engagement éthique et politique authentique ? La beauté est-elle simple diversion, ou bien, comme le suggérait Dostoïevski, une force susceptible de « sauver le monde » ? De Kant, qui liait le jugement de goût à une forme d’universalité communicable, jusqu’à Rancière et son analyse du « partage du sensible », se pose la question d’une possible fonction critique et transformatrice de l’art dans nos sociétés. D’un autre côté si l’esthétique est bien l’ouverture sur différentes manières de faire des mondes, elle se pose aussi comme un instrument créatif de nouveauté et ainsi de singularisation pour l’individu, résistant à l’objectivité des sphères logiques et techniques.

Une dimension écologique

Dans le contexte de la crise environnementale, l’émergence d’une « esthétique environnementale » (Arnold Berleant, Allen Carlson) interroge le rôle des arts et de la sensibilité esthétique face à l’Anthropocène. Comment surmonter la « cécité à la nature » (Freud, puis aujourd’hui Baptiste Morizot ou Vinciane Despret) et faire de l’esthétique un levier pour renouveler notre rapport au vivant ? L’éducation du regard et de la sensibilité à la beauté fragile du monde peut-elle nous aider à dépasser la vision utilitariste de la nature et favoriser un rapport de soin et de respect ?

Une dimension sociale

L’art, depuis toujours, fut un outil de construction de sens collectif. De Dewey (L’art comme expérience) à Jacques Rancière, nombreux sont les penseurs qui ont placé l’esthétique au cœur de l’éducation populaire et de l’émancipation sociale. Mais de quel art parlons-nous ? Faut-il réserver ce rôle aux œuvres consacrées par l’institution, ou étendre la réflexion à l’« esthétique de l’ordinaire » (Yuriko Saito) et aux formes populaires ou médiatiques de la culture ? En reconnaissant la pluralité des expériences esthétiques – de la banalité quotidienne à l’exceptionnel – ne peut-on pas contribuer à un « réenchantement » du monde contemporain ?

Une dimension thérapeutique

L’art, enfin, possède une puissance de soin et de réparation. Qu’il amuse, console, ou bouleverse, qu’il soit pratiqué ou reçu, il participe de processus de « re-création » de sens dans des contextes de fragilité psychologique. L’art-thérapie en témoigne (Anne-Marie Dubois), tout comme les recherches récentes en neurosciences qui explorent les effets de l’expérience esthétique sur le cerveau (Semir Zeki, Vittorio Gallese). De nombreuses cultures traditionnelles mobilisent depuis longtemps l’art comme outil thérapeutique, confirmant l’universalité de cette fonction.

Ainsi, l’art et, plus largement, la dimension esthétique de l’existence, peuvent être envisagés comme une véritable « porte de secours » dans le contexte de crise du sens qui marque notre époque. L’objectif de ce colloque sera d’interroger, dans une perspective interdisciplinaire, les manières dont l’esthétique, la pensée et l’expérience de l’art peuvent constituer aujourd’hui un puissant instrument de quête de sens – existentiel, éthique, thérapeutique, social et écologique.

Modalités de soumission

Les propositions de communication de 500 mots maximum, accompagné d’une brève notice bio-bibliographique (100 mots maximum) seront envoyées à Pierre Léger (pierre.leger@univ-amu.fr) et Nizar Ben Saad (bensaadnizou@yahoo.fr)

avant le 31 mars 2026.

Précisions logistiques

Le laboratoire « Ecole et Littératures » prend en charge l'hébergement (3 à 4 nuitées), les repas, les pauses café, le déplacement entre les aéroports et un exemplaire des Actes. En effet, le colloque donnera lieu à une publication et les communications devront être préparée en ce sens.

Les frais de déplacement, ainsi que la réservation des transports sont à la charge des participants.

De plus, un tarif d’inscription au colloque est fixé à 50euros pour l’ensemble des participant et sera à remettre au comité d'organisation.

Lieux

  • Sousse, Tunisie

Format de l'événement

Événement uniquement sur site


Dates

  • mardi 31 mars 2026

Mots-clés

  • esthétique, art, crise, quête, sens

Contacts

  • Pierre LEGER
    courriel : pierre [dot] leger-philo [at] outlook [dot] fr
  • Nizar BENSAAD
    courriel : bensaadnizou [at] yahoo [dot] fr

Source de l'information

  • Pierre LEGER
    courriel : pierre [dot] leger-philo [at] outlook [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« L’esthétique comme quête de sens : enjeux et fonctions de l’art au XXIᵉ siècle », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 02 octobre 2025, https://doi.org/10.58079/14udb

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