Cette journée d’étude internationale a pour objectif de participer à la construction d’un champ de recherche global autour du bijou, par le prisme de ses matérialités et du corps. L’événement, inscrit dans le cadre de la cinquième édition du Parcours Bijoux, sera l’occasion de rassembler des chercheur·euses issu·es de diverses disciplines, des artistes et professionnels du bijou, pour mettre en perspective cet objet d’étude polymorphe encore trop peu connu en France.

Argumentaire

La journée d’étude, intitulée “Le bijou, un art dont le corps est la matière _ XX^e-XXI^e siècle”, s’inscrit dans un contexte récent d’essor de la recherche sur le bijou, et plus largement sur la parure et la mode en France. Elle se tiendra le 20 octobre 2026 à l’INHA, dans le cadre de la 5^e édition du Parcours Bijoux, triennale dédiée au bijou contemporain à Paris.

En 2008, la journée d’étude « Le bijou, ses fonctions et ses usages, de la Préhistoire à nos jours », organisée à l’ENS par deux doctorantes de l’EHESS en lien avec l’association La Garantie, posait les bases d’une mise en perspective historique du bijou. Delphine Lesbros et Cécile Michaud soulevaient alors la question du statut du bijou, qui se décline en de nombreuses catégories construites en négatif les unes à partir des d’autres. En apparence incontournable, cette taxonomie induit une hiérarchie forte entre bijou fantaisie, haute joaillerie, bijou moderne ou contemporain, bijou d’artiste, bijou “ethnique”, bijou couture, etc. Ainsi qualifié en référence à d’autres domaines de création, le bijou est tour à tour objet d’art, de luxe, d’artisanat, artefact ou marqueur social, produit de design ou accessoire de mode. Disparate et insaisissable, son étude se dilue dans les champs disciplinaires que sont l’histoire de l’art, l’archéologie, la sociologie, l’ethnologie ou l’anthropologie, sans que l’on parvienne à rassembler cette somme de connaissances en un tout et sous un seul mot : le bijou. De ce fait, l’un des enjeux actuels de la recherche est de faire apparaître un domaine commun qui permette d’appréhender le bijou comme objet d’étude cohérent.

Dans cette perspective, cette journée d’étude vise à questionner la définition du bijou comme « petit objet de parure, précieux par sa matière, la façon dont il est travaillé ou son originalité ». Loin d’être englobante, cette définition fait état d’une conception particulière du bijou limitée à certaines créations et à certains usages. Il est ardu de caractériser le bijou tant cet objet a pu connaître de formes, matériaux, usages ou significations différentes selon les époques, si bien que chaque élément de cette définition – telle que l’échelle et la préciosité, que celle-ci se rapporte à la matière, la fabrication ou l’originalité – court le risque d’exclure des pans entiers de ce type de parure. Si les limites de cette définition se font sentir pour toutes les époques et aires culturelles, les XX^e et XXI^e siècle mettent à rude épreuve ce « petit objet précieux servant à la parure », notamment avec l’apparition de pratiques artistiques du bijou. En effet, il existe aujourd’hui à l’échelle mondiale un grand nombre d’artistes du bijou, structuré.es autour d’un réseau de spécialistes, d’écoles et d’institutions. En développant une réflexion sur les spécificités de leur médium – préciosité, portabilité ou significations – ces artistes mettent en exergue les divergences entre la polymorphie du bijou et son acception traditionnelle. Dès lors, cette journée d’étude invite les chercheur.euses, comme les artistes, à interroger la détermination des limites du bijou sous l’angle de son lien au corps et de sa matérialité. Il s’agira de prendre en compte non seulement les productions artistiques contemporaines mais également les autres formes et aspects du bijou qui excèdent sa définition traditionnelle, en vue de décloisonner cet objet d’étude.

Comme le reflète cette définition, le bijou est souvent considéré à travers le prisme de sa valeur ; il est alors regardé comme un objet précieux, symbole du luxe par excellence. En tant que tel, de nombreuses publications, colloques et études lui sont consacrées. Pour autant, il est surprenant de constater qu’en 2024, à l’occasion du 36^e Congrès International d’Histoire de l’Art – qui avait pour thématique matière/matérialité – c’est presque uniquement par le biais de la contrefaçon et du faux, au revers de la préciosité, que le bijou était abordé. Loin de se réduire aux métaux et aux pierres précieuses, le bijou se caractérise par la diversité des matériaux qui peuvent lui donner corps. En tant qu’objet matériel et objet de parure, il est le produit de gestes, de techniques et de savoir-faire qui impliquent le corps dans sa création et dans sa conception, puisqu’il est pensé avec et pour le corps paré. C’est dans l’idée de poursuivre la réflexion sur la matière, si foisonnante concernant le bijou, que le thème de cette journée d’étude porte sur le processus de matérialisation. Il s’agira de prendre en compte la physicalité de l’objet et l’historicité présente dans ses matériaux. 

Aux vues de la place si particulière qu’il occupe vis-à-vis du bijou, le corps ne pourrait-il être l’élément significatif qui émerge des tentatives de définition ? Pour autant, ce rapport au corps n’est pas circonscrit au bijou, car il touche également au vêtement, au tatouage, à la coiffure, au maquillage, à la gestuelle, etc. constituant l’une des approches des apparences, à tel point que le corps est parfois considéré comme « le premier medium esthétique ». En empruntant son titre à l’anthropologue Claude Chippaux, cette journée d’étude – “un art dont le corps est la matière”– incite à s’interroger sur les liens particuliers du bijou au corps, et à inscrire le bijou dans une culture de l’apparence. Dans cette perspective, cette journée d’étude espère rassembler certaines des nombreuses disciplines qui rencontrent le bijou au fil de leurs recherches, en vue de créer un cadre d’étude élargi.

Cette journée d’étude entend participer à la construction de ce champ de recherches autour du bijou, en rassemblant des chercheur.euses de plusieurs générations. En outre, en prenant part au Parcours Bijoux 2026, cette journée d’étude est pensée comme un trait d’union entre le monde universitaire et les pratiques artistiques et artisanales du bijou.

Modalités de contribution

Cet appel s’adresse aux chercheur.euses et doctorant.es, travaillant particulièrement sur la parure, le bijou ou l’ornement dans la période des XX^e-XXI^e siècles, qui souhaitent proposer une communication d’une durée de 30 minutes. Les propositions – 300 mots, accompagnées d’une courte biographie – doivent être envoyées d’ici le 19 décembre 2025 à Zoé Kiner-Wolff et à l’association Sartoria  : zo.kinerwolff@gmail.com ; sartoria.contact@gmail.com

Les organisateur.ices s’efforcent de trouver les moyens de prendre en charge une partie des défraiement des participant.es qui ne pourraient pas être financé.es par leur propre institution.

Comité scientifique 

• Pascal Rousseau, professeur à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (HiCSA) et directeur de l’école doctorale d’Histoire de l’art.   
• Émilie Hammen, professeure des universités junior à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (HiCSA) ; directrice du Palais Galliera musée de la mode de la ville de paris. 
• Zoé Kiner-Wolff, doctorante à l’école doctorale d’Histoire de l’art de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (HiCSA).