Dans un contexte d’incertitude économique, de mutations technologiques et de crises sanitaires, sociales et environnementales, cette contribution interroge le sens que les jeunes accordent au travail. Au-delà de sa fonction utilitaire, le travail se situe à l’intersection de quêtes existentielle, identitaire et sociale, et demeure un repère central de construction de soi. Le chômage apparaît dès lors comme une épreuve de sens, révélant des tensions entre désir d’accomplissement et absence de perspectives. Les transformations contemporaines — transition écologique, mondialisation, mobilités et numérisation (dont l’entrepreneuriat digital) — reconfigurent repères, attentes, santé au travail et trajectoires d’emploi, et exigent des capacités d’adaptation.

Argumentaire

Dans un contexte mondial marqué par l’incertitude économique, les transformations rapides du marché de l’emploi, les mutations technologiques et les crises sanitaires, sociales et environnementales, la question du sens que les jeunes accordent au travail prend une importance majeure. Le rapport au travail ne se réduit plus à une dimension utilitaire (Hoyt, 1991) ou encore comme une simple série d’expériences (Watson, 2021). Le travail engage le jeune dans sa manière de donner une direction à son existence de construire du sens et de se projeter dans l’avenir (Morin, 2003 ; Steger, Dik, & Duffy, 2012 ; Pratt & Ashforth, 2003 ; Ben Alaya, 2014).

Le sens du travail se situe à l’intersection de plusieurs dimensions : un besoin de quête existentiel (trouver une raison d’agir et de s’engager), une quête identitaire (se définir par l’activité qu’il réalise et par la place sociale qu’il occupe) et une quête sociale (trouver une utilité dans le monde auquel il appartient). Ainsi, le travail, ne se limite pas uniquement à un moyen de subsistance : il est porteur de valeur, d’ancrage avec les autres et avec le monde surtout dans cette ère rapide de globalisation. C’est pourquoi le chômage représente plus qu’une privation économique. Il constitue une véritable épreuve de sens. Pour beaucoup, il met en tension fondamentale : d’un côté le désir de travailler comme vecteur d’accomplissement, de reconnaissance et de construction de soi (Remili, 2016 ; Guichard, 2004). De l’autre côté, le chômage se fait l’écho persistant d’une difficulté pour le jeune de maintenir une cohérence existentielle face à l’absence de perspectives. Lorsqu’il n’est plus accessible, le travail conserve malgré tout une forte centralité existentielle : il est ce cadre de référence à partir duquel les jeunes évaluent leurs parcours et leur rapport avec cette société, ce monde. Un processus de dére-construction de sens est alors en mouvement (Disquay-Perot et al, 2019).

Cette perspective du sens du travail riche en recherches est très largement mise en évidence par des recherches théoriques et empiriques qui soulignent la complexité des processus d’orientation, d’adaptation et de construction identitaire dans des contextes socioéconomiques en constante évolution (Guichard, 2004 ; Cohen-Scali, 2012 ; Di Fabio, 2017 ; Masdonati, 2021 ; Ribeiro, 2019 ; Rossier, 2015, 2016 ; Hafsi, 2019 ; Baatouche, 2025).

Ces éclairages acquièrent une importance particulière face aux défis actuels tels que la transition écologique, la mondialisation et les crises migratoires (Hafsi & Lorer, 2025 ; Organisation Internationale pour les Migrations, 2025). Parallèlement, l’évolution numérique et l’essor de l’entrepreneuriat digital redéfinissent les repères et les attentes vis-à-vis du travail (Hötte, Somers & Theodorakopoulos, 2022). Ces transformations impactent profondément les perspectives d’emploi dans certains secteurs et la santé des travailleurs, tout en soulignant la nécessité d’adaptabilité face aux transitions professionnelles (Savickas & Porfeli, 2012).

Dans ce cadre, cet appel à communications invite les acteurs de la psychologie à questionner, comprendre et analyser la manière dont les jeunes articulent leurs projets professionnels et personnels avec les incertitudes structurelles et environnementales en mobilisant et croisant des regards disciplinaires issus de la psychologie du travail, de l’orientation, de la psychologie sociale, des sciences de l’éducation, et d’autres encore.

Enfin, cet événement souhaite également articuler réflexion scientifique et pratiques de terrain. Les professionnels de l’orientation, de l’insertion, de la formation et de l’accompagnement sont invités à partager leurs expériences sur l’intégration professionnelle, les reconversions, les transitions et les dispositifs innovants de soutien aux jeunes.

Les propositions pourront s’inscrire, sans s’y limiter, dans les axes suivants :

• Le travail à l’ère des incertitudes
• Jeunes et travail : entre quête existentielle et épreuve de sens
• Sens du travail chez les jeunes : identités, transitions et perspectives actuels et/ou futures
• Dispositifs d’accompagnement et innovations pratiques

Objectifs :

• Approfondir les connaissances scientifiques sur la question du sens du travail chez les jeunes, en mobilisant des approches pluridisciplinaires et interculturelles pour éclairer les enjeux actuels liés aux transformations sociales, économiques et professionnelles ;
• Favoriser les échanges entre universitaires issus de différentes universités internationales, afin de croiser les perspectives théoriques, méthodologiques et contextuelles autour de cette thématique centrale du sens du travail ;
• Publier un ouvrage collectif 1er semestre 2027 rassemblant une sélection de contributions présentées lors du colloque. Cette publication permettra de valoriser les travaux scientifiques et de structurer un réseau international de recherche sur le sens du travail chez les jeunes.

Modalité de contribution

Les auteur·e·s intéressé·e·s sont invité·e·s à soumettre une proposition de communication (entre 250 et 350 mots). Celle-ci devra présenter clairement : la problématique abordée, le cadre théorique et/ou empirique mobilisé, la méthodologie utilisée, ainsi que les principaux résultats attendus ou pistes de réflexion.

Les proposition de communication pourront s’inscrire dans l’un ou plusieurs de ces axes. Elles devront être accompagnées d’une courte note biographique et bibliographique (4 à 5 références).

Les propositions doivent être envoyées à l’adresse suivante : colloquesensdutravailtunisie26@gmail.com avant le 30 décembre 2025.

Le comité scientifique notifiera les auteur·e·s de sa décision avant le 05 janvier 2026. Les auteur·e·s des communications acceptées devront soumettre leur texte complet avant le 05 février 2026.

Le colloque se tiendra les 16 et 17 avril 2026 à la Faculté des Sciences Humaines et Sociales de Tunis (FSHST).

Comité scientifique :

Co-Présidentes :

• Hafsi Alma,
• Remili Donia,
• Laurence Cocandeau-Bellanger
• Baatouche Nadia.

Membres :

• Riadh Ben Rejeb (Université de Tunis),
• Tarek Bellaag (Université de Tunis),
• Dorra Ben Alya (Université El Manar-Tunis),
• Caroline Arnoux-Nicolas (Université de Paris Nanterre),
• Kokou Atistogbe (Université de Lausanne-UNIL),
• Saliha Belkacem (UCO Angers),
• Jean-Luc Bernaud (CNAM-Paris),
• Valérie Cohen-Scali (Cnam-Paris),
• Paul De Maricourt (UCO-Angers),
• Annamaria Di Fabio (Université de Florence-UNIFI),
• Angel Egido (UCO-Angers),
• Başak Eser (Université Américaine de Chypre),
• Marco Jimenez (Université Paris-Nanterre),
• Jonas Masdonati (Université de Lausanne -UNIL),
• Edouard Merigaud (UCO-Angers),
• Isabelle Pichon (UCO-La Réunion),
• Gilles Pinte (Université Bretagne-Sud),
• Afonso Ribeiro Marcelo (Université de São Paulo-Brasil),
• Nicolas Robin (Université Catholique-Niort),
• Rowayda Zein (Université du Liban)
• Elif Emir-Öksüz (Université Yıldırım Beyazıt d’Ankara).

Comité d’organisation :

Co-Présidentes : Hafsi Alma, Remili Donia et Baatouche Nadia.

Membres : Cocandeau Bellanger Laurence, Egido Angel, le CREISS (Centre de Ressources d’Etudes et d’Interventions en Sciences Sociales), la STP (Société Tunisienne de Psychologie), le Laboratoire de psychologie clinique : Intersubjectivité et culture (LR16ES01), l’Ecole Doctorale « Structures, Systèmes, Modèles et Pratiques en Lettres et Sciences Humaines et Sociales » et le Laboratoire 2PS « Processus Psychologiques et Sociaux ».

Bibliographie

Ben Alaya, D. (2014, 20–23 juillet). L’objet de représentation, un « construit » collectif. 12e Colloque International sur les Représentations Sociales (CIRSS), São Paulo, Brésil.

Cohen-Scali, V. (2012). Jeunes et insertion professionnelle : représentations, attitudes et projets. L’Harmattan.

Di Fabio, A. (2017). Positive healthy organizations : Promoting well-being, meaningfulness, and sustainability in organizations. Frontiers in Psychology, 8,1938. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2017.01938

Disquay-Perot, S., Prudhomme, N., Egido, A., Cocandeau-Bellanger, L., & Vignoli, E. (2019, février). Relations au travail et variété des parcours des jeunes : Les représentations du travail des jeunes non qualifiés ou faiblement qualifiés. Colloque CNAM inter-équipes EPN 13 : Les recompositions des emplois et leurs conséquences sur l’évolution des rapports au travail et des parcours professionnels.

Guichard, J. (2004). Se situer dans le monde du travail : la construction de l’identité professionnelle. L’Orientation scolaire et professionnelle, 33(3), 391–416. https://doi.org/10.4000/osp.2876

Hafsi, A., & Loarer, E. (2025). Reconstructing identity during migratory transitions : A qualitative analysis of the deported Tunisian migrants’ case. Crossings : Journal of Migration & Culture, 16(1–2), 219–239. https://doi.org/10.1386/cjmc_00108_1

Hafsi, A. (2019). Perception des conditions de travail et perspectives professionnelles chez les enseignants des collèges en Tunisie. Pratiques psychologiques, 25, 265-283. https://doi.org/10.1016/j.prps.2018.10.001

Hötte, K., Somers, M., & Theodorakopoulos, A. (2022). Technology and jobs : A systematic literature review. arXiv. https://doi.org/10.48550/arxiv.2204.01296

Hoyt, K. B. (1991). The concept of work : Bedrock for career development. Future Choices, 2(3), 23-30.

Masdonati, J. (2021). Transitions professionnelles et identité. Presses Universitaires de France. Morin, E. M. (2003). Sens du travail : définition, mesure et validation. Revue de gestion des ressources humaines, 50, 25–36.

Organisation internationale pour les migrations. (2025). Appel mondial 2025. https://www.iom.int/fr/resources/appel-mondial-de-loim-pour-2025

Pratt, M. G., & Ashforth, B. E. (2003). Fostering meaningfulness in working and at work. In K. S. Cameron, J. E. Dutton, & J. E. Quinn (Eds.), Positive organizational scholarship (pp. 309– 327). Berrett-Koehler.

Remili, D. (2019). Violences et souffrances en milieu hospitalier : le cas des infirmiers du gouvernorat de Tunis (Thèse de doctorat, CNAM, Paris).

Ribeiro, M. A. (2019). Career counseling : A holistic approach. Springer.

Rossier, J. (2015). Personality and career development. In P. J. Hartung, M. L. Savickas, & W.

B. Walsh (Eds.), APA handbook of career intervention (Vol. 1, pp. 327–350). American Psychological Association. https://doi.org/10.1037/14438-018

Savickas, M. L., & Porfeli, E. J. (2012). Career Adapt-Abilities Scale : Construction, reliability, and measurement equivalence across 13 countries. Journal of Vocational Behavior, 80(3), 661– 673. https://doi.org/10.1016/j.jvb.2012.01.011

Steger, M. F., Dik, B. J., & Duffy, R. D. (2012). Measuring meaningful work : Work and Meaning Inventory (WAMI). Journal of Career Assessment, 20(3), 322–337. https://doi.org/10.1177/1069072711436160

Watson, M., & McMahon, M. (2021). Group work in career development : School age populations. The Journal for Specialists in Group Work, 46(1), 1-5.