AccueilLes mosquées : espaces, pratiques, institutions

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Publié le dimanche 12 février 2006

Résumé

Depuis les origines, les cités de l’islam sont associées aux minarets qui surplombent leurs édifices cultuels. La mosquée symbole de l’islam est une image si forte qu’elle laisse penser qu’une telle institution est restée immuable à travers le temps remplissant les mêmes fonctions partout en terre d’Islam. Naturellement donc mais curieusement cependant, la mosquée parce que trop visible a fini par être négligé par les observateurs. Comme si la visibilité était déroutant. Il s'agit de renouveler le regard sur une telle institution en privilégiant l'observation des pratiques et les discours qui les sous-tendent aujourd'hui

Annonce

Préparation d'un numéro de la REMMM sur les mosquées

Les mosquées

Espaces, pratiques, institutions

Depuis les origines, les cités de l’islam sont associées aux minarets qui surplombent leurs édifices cultuels. La mosquée symbole de l’islam est une image si forte qu’elle laisse penser qu’une telle institution est restée immuable à travers le temps remplissant les mêmes fonctions partout en terre d’Islam. Naturellement donc mais curieusement cependant, la mosquée parce que trop visible a fini par être négligé par les observateurs. Comme si la visibilité était déroutante.

La multiplicité des vocables en langue arabe laisse deviner déjà les multiples rôles que la mosquée remplit. Le sens étymologique du mot masdjid (qui a donné le terme français mosquée) renvoie au lieu où l'on se prosterne, c'est-à-dire à un temple d’adoration, ce qui explique son acception générique pour désigner tout lieu où s'accomplit la prière. Mais c’est au djâmi` (littéralement rassembleur), qui désigne la mosquée a prône (khutba) hebdomadaire, que l’on pense en général quand on parle de la mosquée. Le djâmi`qui a souvent été traduite par l'expression mosquée cathédrale est à la fois un temple pour les `ibadât (observances) mais aussi un espace où se s’informent les mu`amalât (les relations sociales). Symbole d'unité, peut aussi s'avérer le foyer d'intenses affrontements d'ordre socio‑culturel. A l'ombre de ces oeuvres pieuses, se sont souvent déroulées d'âpres luttes idéologico‑politiques. De rassembleur, le djâmi` peut devenir diviseur.

La mosquée espace de pratique et symbole de l’islam est si fortement ancré dans les représentations que cela a fini par constituer une sorte d’écran empêchant tout (re) questionnement d’un tel objet. La mosquée n’est évoquée que pour signaler un monde musulman supposé uni et identique. Il suffit pourtant de regarder l’architecture des mosquées dans le monde de l’islam pour déceler des particularismes qui pourraient signaler des différences. Du minaret piriforme (En Afrique) au minaret à base carré (Maghreb) en passant par les minarets hélicoïdaux ou octogonaux (Turquie), il existe une architecture des minarets qui pourrait aider à identifier une géographie culturelle des mosquées. Aujourd’hui la signalétique s’est compliquée. Des redondances ont brouillé ou surchargé les symboliques d’hier. L’islam transplanté a de son côté permis des tentatives tantôt audacieuses tantôt passéistes.

Mais au-delà des manifestations architecturales, la mosquée connaît des mutations et des recompositions qui justifient à son endroit l’emploi du pluriel. Le monde musulman est désormais traversé par des lignes qui n’ont pas épargné ses mosquées. L’observateur est frappé plus par une réelle diversité que par une supposée homogénéité.

A l’intérieur de la même aire culturelle des clivages peuvent être constatées. Au Maghreb par exemple et notamment en Algérie pays de tradition malikite, les pratiques cultuelles laissent percevoir les multiples références en présence. Entre les fidèles qui préfèrent prier les mains croisés sur la poitrine (al-qabdh) et ceux qui privilégient la prière avec les bras relâchés (as-sadl) on voit pointer un débat entre ceux qui préfèrent ré inventer la tradition et ceux qui croient au legs des ancêtres. Désormais, aller à la mosquée est une opération pensée parce qu’il faut savoir comment y entrer et comment en sortir. On choisit son imam en fonction de son âge de sa culture et de son obédience. Les imams sont divers et diversifiés parfois secondés par de nouvelles figures comme celle du râqi(l’exorciste).

Le ré examen d’une telle institution à la lumière des nouvelles données géopolitiques récentes mais également à partir de la problématique des NMR (nouveaux mouvements religieux), s’impose. Le 11 septembre 2001 est à cet égard un moment fort, symbolisant le passage du conflit latent à l’affrontement ouvert. Dans le monde musulman, un tel événement a libéré les discours et les attitudes revendiquant une appartenance opposée à celle du monde occidental se sont multipliées ; tandis qu’en occident, depuis, l’intérêt porté à l’islam et les implications actives des pays occidentaux à l’égard de l’islam a également connu un regain. Ce qui ne manquera pas d’impact sur les différents aspects liés notamment aux mosquées en « islam transplanté ».

Dans ce siècle de la globalisation, les pays du Sud n’importent pas des pays du Nord que des objets matériels. Ils importent également des modes et des façons d’être. Les réajustements des manières de croire demeurent, elles aussi, fonction de l’Occident qui n’est plus unanimement considéré comme une terre de combat (dâr al harb). Aujourd’hui on parle plutôt d’un territoire de mission (dâr ad da`wa) ou d’un territoire du pacte (dâr al-`ahd) qui accueillent des mosquées devenues célèbres, à l’instar de celle de Finsburk à Londres, dans l’ensemble du monde musulman.

Interroger la mosquée et les pratiques qui s’y déroulent aujourd’hui suppose une rupture avec la posture essentialiste qui partirait avec des réponses et chercherait des confirmations dans les pratiques religieuses.

Une telle réflexion est sans doute centrée sur les « évolutions » et les « aspects nouveaux » (nouveaux mouvements religieux, mutations et recompositions architecturales, nouvelles pratiques, etc.), mais non pas dans le sens d'une approche exclusivement historienne. Elle privilégie plutôt la problématique de la rupture avec les représentations ancrées et les schèmes admis tout en espérant bousculer les essentialismes. De ce point de vue la profondeur historique est importante en tant que cadre explicatif et non entant que séquence historique.

Il s'agit de renouveler le regard sur une telle institution en privilégiant l'observation des pratiques et les discours qui les sous-tendent aujourd'hui. Ce sont ces mises en forme discursives de pratiques multiples qui nous amèneront à nous interroger sur la dimension symbolique et sur sa reconstruction à partir d'une histoire en partie imaginée et fabriquée.

Trois axes apparaissent d’ores et déjà comme susceptibles d’être investis :

a) La mosquée en tant qu’espace physique

Partout les symboliques de l’architecture et de la monumentalisation contemporaines sont le fruit de tentatives tantôt audacieuses, tantôt passéistes aussi bien dans les terres traditionnelles de l’islam qu’en islam transplanté.

b) La mosquée en tant qu’institution :

Les enjeux politiques et militaires que représentent les mosquées dans les pays musulmans qu’ils soient sunnites ( Au Maghreb, en Arabie Saoudite etc.) ou chiites comme en Iran ou dans les villes saintes chiites irakiennes mais aussi en islam transplanté. L’actualité en France illustre l’importance de cette mosquée en « terre de mission » qui repose toute la question de la construction de mosquées dans les pays d’immigration.

La dimension institutionnelle de la mosquée est au cœur du politique mais se retrouve également dans les dimensions les plus éloignées des tensions d’ici-bas comme on peut le constater avec l’exemple des mosquées-sanctuaires et des mosquées comme lieux de pèlerinage.

c) La mosquée en tant que lieu de pratiques :

- De nouvelles figures et de nouvelles pratiques se rencontrent dans les mosquées des pays de l’orient et de l’occident musulman. L’exercice du culte, et les nouvelles manières de croire et de pratiquer se constatent ici et là. La présence des femmes dans la mosquée notamment le vendredi est un phénomène qui s’amplifie et se propage. Autant d’aspects qui méritent d’être explorés.

Une introduction à ces trois axes tentera de réfléchir sur « la mosquée » en tant qu’institution en précisant la place qu’elle occupe dans l’Islam par opposition aux « mosquées » comme réalités historiques. Elle posera ainsi, dans une optique comparatiste la question de la différence et de la similitude entre l’église dans le christianisme et la synagogue dans le judaïsme.



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Dates

  • mardi 06 juin 2006

Contacts

  • Moussaoui Abderrahmane
    courriel : moussaoui [at] mmsh [dot] univ-aix [dot] fr

Source de l'information

  • Moussaoui Abderrahmane
    courriel : moussaoui [at] mmsh [dot] univ-aix [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Les mosquées : espaces, pratiques, institutions », Informations diverses, Calenda, Publié le dimanche 12 février 2006, https://doi.org/10.58079/aew

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