HomeVies d'artisans dans les campagnes françaises
Vies d'artisans dans les campagnes françaises
Portraits croisés des « seconds couteaux » de la création artistique, XVIe-XIXe siècle (2) : Entre temps modernes et révolution industrielle
Published on Thursday, January 13, 2011
Abstract
Announcement
Depuis l’année 2006, l’Université de Toulouse II, le Département d’Histoire de l’Art et l’équipe 11 « Arts, Sociétés, Patrimoine » du Framespa (CNRS UMR 5136) organisent des rencontres dédiées à l’étude de la production artistique des paroisses rurales (XVIe-XIXe siècles). Les spécialistes des diverses disciplines issues des SHS et les acteurs du patrimoine sont invités chaque année à interroger ce champ d’études prometteur et à questionner divers sujets ayant trait à l’environnement culturel des paroisses françaises et aux processus déployés dans la mise en œuvre de la commande artistique, sous l’Ancien Régime puis à la veille de l’industrialisation. Après un premier état de la question (L’art au Village, PUR, 2009), puis une enquête consacrée à la place des prêtres dans la commande paroissiale et à leur culture artistique (2008 et 2009, en cours de publication), le programme de cette nouvelle journée propose de s’intéresser aux artisans des villages, à ces vies mal connues d’hommes ayant consacré leur existence à l’ornementation des églises de campagne.
A ce jour, ces « ouvriers » sont les grands oubliés de la création artistique française, souvent évoqués à travers le prisme des artistes majeurs. Dans le meilleur des cas appelés « artistes provinciaux » ou « artistes secondaires » — quand il s’agit de désigner les peintres, les sculpteurs, les menuisiers en exercice dans les grandes villes du Royaume — à peine sont-ils mentionnés lorsqu’ils travaillent pour les bourgs de moindre importance ; quant à ceux des villages, ils ne semblent pas avoir existé. Les monographies ou synthèses universitaires consacrées à leurs activités sont encore trop peu nombreuses sur les rayonnages des librairies. Pour pallier cette pénurie, cette première rencontre voudrait répondre à quelques questions essentielles.
Tout d’abord, elle souhaiterait réévaluer les outils fournis par les méthodes d’investigation de l’Histoire de l’art : la construction de la traditionnelle « monographie d’artiste », objet de débats récents, peut-elle être appliquée à l’étude des artisans des villages ? L’absence de documentation (notamment des sources archivistiques qui cautionnent souvent l’authenticité d’un parcours individuel) et le poids des conventions n’ont-ils pas dissuadé les chercheurs de s’intéresser aux artisans moins « documentés » ? Comment renouveler l’exercice quand les critères exigés ne peuvent être établis systématiquement (état civil, datation des œuvres, identification des lieux) ? Quelle légitimité donner aux facteurs stylistiques qui permettent d’apparenter les œuvres et quelle place accorder à la tradition orale ? En consacrant cette journée à la présentation d’artisans aux parcours peu connus et à un questionnement méthodologique sur le genre de la monographie, nous voudrions revoir le déséquilibre qui existe au sein de la discipline entre les artistes estimés les plus talentueux et « les autres ».
L’examen des conditions matérielles de l’exercice des métiers d’art, liés à la production de décors destinés à l’embellissement des lieux de culte (peinture, sculpture, menuiserie) sera également abordé. Ce qui pose la difficile question du statut des artisans et de la réglementation des métiers dans les faubourgs, les villages et les zones rurales. Entre les « maîtres » des petites villes et les ouvriers « libres » des campagnes, dispensés de la maîtrise, comment s’opéraient le recrutement et le jeu de la concurrence ? La quête de l’emploi, la nécessaire polyvalence, les mécanismes de la notoriété « inter-paroissiale », les procédures d’embauche (adjudications, etc.), constituent autant d’interrogations qui ne peuvent être négligées. De même qu’il paraît indispensable — dans la continuité des débats sur les prêtres et la commande — d’étudier les relations qu’entretenaient les artisans avec les autorités villageoises. A travers cette enquête, c’est examiner leur intégration dans la société rurale, leurs contacts avec les représentants des paroisses (prêtres, confréries), les institutions laïques (assemblées de villages, collèges, consulats, jurades), les populations. Comment s’installaient ces hommes quand l’offre économique leur imposait la mobilité ?
Les archives paroissiales (comptes des fabriques, des confréries), les minutes notariales (baux à besogne, contrats d’apprentissages, procès) renseignent plus ou moins le milieu artistique rural. Mais quel souvenir gardons-nous des paroles ou des pensées des artisans eux-mêmes ? De précieux carnets d’écriture ou de « voyages », dont il faudrait faire l’inventaire, rendent compte avec détail des « tournées artistiques » de quelques-uns. L’éventail des documents disponibles doit être parcouru, ceci afin de mieux circonscrire les éléments d’une approche monographique adaptée au contexte rural.
Au reste, et c’est le dernier point, ces discussions ne voudraient négliger à aucun prix la question des « sensibilités » artistiques. Parce qu’il est aujourd’hui nécessaire d’aller au-delà des « défaillances stylistiques ou intellectuelles» trop souvent invoquées par l’Histoire de l’art, cette journée voudrait mettre en lumière les cas concrets de prouesses techniques et stylistiques. Dans le champ culturel, si l’on ne peut mettre de côté la question de la réception et de l’adaptation des modèles « savants » issus du grand Art, il paraît important de s’attarder sur les exemples d’utilisations nouvelles ou de transgressions des images véhiculées par les modèles gravés. La créativité en milieu rural doit être identifiée, qu’elle relève de la technique, du style ou de l’iconographie pour ne pas laisser se perpétuer l’idée que « l’invention » ne peut naître que dans les foyers liés géographiquement aux lieux de pouvoir.
Programme
Maison de la Recherche – Salle D.31 A partir de 9 h
9h - Accueil des participants à la MDR
MATINEE
Présentation de la journée. 9h30 - Sophie Duhem (Maître de Conférences, Histoire de l’Art Moderne, Univ. Toulouse-Le-Mirail)
10 h Emmanuelle Le Seac’h (Docteur en Histoire moderne, Université de Bretagne Occidentale) "Le grand atelier de Landerneau, trois sculpteurs sur pierre successifs en Basse-Bretagne : Bastien et Henry Prigent (1527-1577), le Maître de Plougastel (1570-1621), Roland Doré (1618-1663)".
10h45 Alain Belmont (Professeur d’Histoire Moderne, Université Pierre Mendès France, Grenoble) "Aubergiste et peintre de village : le dauphinois François Chambon (1641-1720)"
11h30 Léo Minois (Doctorant en Histoire de l’Art moderne, Université de Toulouse II) "Adaptation provinciale d'une iconographie royale : le Voeu de Louis XIII de Montgeard en Lauragais".
APRES-MIDI
14h30 - Jean-Luc Antoniazzi (Docteur en Histoire moderne, Université de Perpignan) « Joseph Sunyer, genèse et postérité d'une carrière de sculpteur en Roussillon vue à travers les relations sociales ».
15 h 15 - Sophie Duhem (Maître de Conférences, histoire de l’art moderne, UTM) « De Breganzona à Albi, un parcours original : Jacques Bosia (1788-1842), barbouilleur d’églises dans le Tarn ».
16 h Débat conclusif
Subjects
- Representation (Main category)
- Mind and language > Representation > History of art
- Periods > Early modern
Places
- 5 all. A. Machado (Maison de la recherche)
Toulouse, France
Date(s)
- Tuesday, January 11, 2011
Attached files
Keywords
- artisans, paroisses, création artistique
Contact(s)
- Sophie Duhem
courriel : sduhem [at] wanadoo [dot] fr
Reference Urls
Information source
- Sophie Duhem
courriel : sduhem [at] wanadoo [dot] fr
License
This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.
To cite this announcement
« Vies d'artisans dans les campagnes françaises », Study days, Calenda, Published on Thursday, January 13, 2011, https://doi.org/10.58079/hl8