AccueilLes fruits et légumes : un objet sociologique ?

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Les fruits et légumes : un objet sociologique ?

Fruit and Vegetables: an object for sociology?

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Publié le mardi 22 mars 2011

Résumé

Il existe de nombreuses recherches en sociologie sur les fruits et légumes. Néanmoins, ces travaux restent épars et dialoguent peu entre eux. L’objectif du colloque est de réaliser cet effort de rassemblement et de totalisation, pour saisir en quoi l’objet fruits et légumes permet de déplacer des problématiques sociologiques, et d’ouvrir de nouvelles pistes de recherche.

Annonce

Présentation

Injonctions publiques à consommer « au moins 5 fruits et légumes par jour », développement des AMAP, alertes sanitaires sur les résidus de pesticides, crises du marché et arrachages des vergers, dénonciations des conditions du travail saisonnier dans les exploitations… : les fruits et légumes sont porteurs d’enjeux variés, qui touchent aussi bien à la production agricole, aux circuits commerciaux, à la consommation, qu’aux politiques publiques, à la santé ou l’environnement. Ces enjeux, s’ils sont depuis longtemps analysés par la sociologie, s’inscrivent néanmoins dans des questionnements et traditions sociologiques fortement cloisonnés : sociologie rurale, sociologie du travail, sociologie économique, sociologie des risques, sociologie de la consommation, sociologie des mobilisations … Les travaux restent donc épars et dialoguent peu entre eux. L’objectif du colloque est de réaliser cet effort de rassemblement et de totalisation, pour saisir en quoi l’objet fruits et légumes permet de déplacer des problématiques sociologiques, et d’ouvrir de nouvelles pistes de recherche.

L’historiographie et la sociologie du monde rural, et particulièrement de sa modernisation, ont été implicitement constituées autour de certains objets, particulièrement les productions qui étaient au centre des grands compromis institutionnels entre la paysannerie et l’Etat : les céréales, le lait, la viande, le vin. Or, le secteur des fruits et légumes, et en particulier le maraîchage dans les ceintures vertes des villes, permet de nuancer très fortement l’idée d’une modernisation uniforme du secteur agricole. D’une part, les travaux sur les fruits et légumes mettent en exergue l’inscription très ancienne des agriculteurs dans le marché, leur proximité aux attentes des consommateurs, et leur appropriation différenciée des spécificités de ces produits, notamment la saisonnalité et la périssabilité ; d’autre part ils montrent l’hétérogénéité des filières agro-alimentaires et les tensions qui habitent les politiques de modernisation. En déplaçant le regard vers un objet longtemps resté marginal aussi bien dans les politiques publiques que dans l’étude du monde rural, quels apports nouveaux en termes de connaissance peut-on obtenir ? Quelles sont les problématiques qui émergent et de quelles façons les sociologues les appréhendent-ils ?

Quatre types de contributions sont notamment attendues :

  1. La production de fruits et légumes et ses spécificités
  2. La filière fruits et légumes depuis la production jusqu’à la consommation
  3. La consommation et les pratiques alimentaires en matière de fruits et légumes
  4. Les politiques publiques, les risques sanitaires et environnementaux liés à la production ou à la consommation de fruits et légumes

1. La production de fruits et légumes et ses spécificités

En 2000, si les fruits et légumes représentaient seulement 2% de la SAU en France, ils représentaient simultanément 10% des exploitations et 20% de l’emploi agricole. Ces données mettent en avant la contribution du secteur des fruits et légumes à l’emploi agricole, notamment salarié. Toutefois ce modèle entrepreneurial est également contesté (emploi d’immigrés clandestins, non respect de la législation du travail, accidents du travail, etc.). De ce point de vue, une sociologie des producteurs, du travail et des conditions de travail au sein des exploitations apparaît nécessaire. Qui sont les producteurs de fruits et légumes ? Comment conçoivent-ils et organisent-ils le travail dans leurs exploitations ? Quelles sont les spécificités de la production industrielle des fruits et légumes par rapport à d’autres secteurs agricoles et de l’économie ? etc. Dans le même temps, dans ce secteur, l’auto-production est resté un élément structurel et représente une alternative au circuit marchand. La pratique des jardins potagers familiaux est une spécificité qui mérite d’être interrogée, non seulement en termes quantitatifs, mais aussi parce qu’elle contribue à définir des conceptions de la qualité (sanitaire, gustative…) des produits. Quelles sont les conséquences de cette pratique sur le secteur marchand (associations pour le maintien des vieilles variétés, troc de semences ou de plants, etc.) ? Enfin, le secteur des fruits et légumes se caractérise par une position singulière au sein de la PAC, avec une Organisation Commune des Marchés, qui vise essentiellement à équiper les producteurs d’organisations collectives (OP), pour concentrer la mise en marché et permettre une négociation d’égal à égal avec la grande distribution. Quel est le rôle de ces organisations sur les marchés et vis-à-vis de leurs adhérents ? Pourquoi une partie des agriculteurs refuse-t-elle d’entrer dans les OP censées renforcer leurs positions face à la distribution ?

2. La filière fruits et légumes depuis la production jusqu’à la consommation

Cette filière permet en outre de questionner une séparation fortement instituée entre une sociologie de l’agriculture et de la production d’une part, et une sociologie du marché et de la consommation d’autre part, qui entérine aussi une dichotomie étanche entre les catégories d’urbain et de rural. Le secteur des fruits et légumes, où la question de la fraîcheur des produits reste primordiale, conduit les acteurs concernés à mettre l’accent sur les circuits commerciaux, c'est-à-dire non pas sur ce qui sépare, mais au contraire sur ce qui relie les activités de production, de vente et de consommation, les villes et les campagnes. Cette question des circuits permet de tirer un fil historique sur la construction des marchés, depuis les projets d’organisation de la circulation des marchandises sur l’ensemble de la planète visant à offrir en permanence au consommateur des produits de toutes origines, jusqu’aux formes récentes de relocalisation des marchés (AMAP, vente directe à la ferme, etc.). La circulation de la production s’inscrit également dans des cadres contractuels qui lient les acteurs de la filière (cahiers des charges, labels, certifications de type Globalgap etc.). Quelle est la contribution des OP à la construction et la mise en œuvre de politiques de qualité au sein de la filière fruits et légumes, et comment expliquer la faiblesse des stratégies de marques dans ce secteur ? En quoi cette normalisation modifie-t-elle la production, mais aussi les pratiques agricoles ou de mise en marché (segmentation, multiplication des références, stickage) ? On s’intéressera par exemple au rôle des intermédiaires, qu’ils soient négociants, exportateurs ou industriels de la transformation (conserve, surgelés etc.), à l’analyse des mode de normalisation des produits et des pratiques, ainsi qu’aux formes de mise en marché. Enfin, le marché des fruits et légumes semble marqué par des contraintes spécifiques, telles que la saisonnalité et la périssabilité des produits. Comment les acteurs du marché s’approprient-ils ces contraintes ?

3. La consommation et les pratiques alimentaires en matière de fruits et légumes

L’analyse sociologique de la consommation de fruits et légumes implique d’appréhender toutes les formes et significations de cet acte fortement inscrit dans les pratiques quotidiennes. Les facteurs classiques de différenciation des pratiques alimentaires semblent connus, que ce soit l’effet de la position dans la hiérarchie sociale ou l’effet de la composition du ménage, du genre et de l’âge. Ont également été mises en évidence les contraintes de temps, de distance aux lieux d’achat, de moyens (financiers et matériels), ainsi que les diverses significations sociales de la consommation. Mais les produits transformés (conserves, surgelés, plats préparés, préparations pour jeunes enfants) semblent gommer les spécificités des fruits et légumes, et brouiller les enjeux de leur consommation. Il importe donc de questionner l’unité et la particularité des fruits et légumes comme biens de consommation et comme aliments. La consommation de fruits et légumes permet également d’interroger la portée et les limites de l’idée de consommation de masse ainsi que de son analyse sociologique. En effet, des formes d’alliances entre consommateurs et producteurs se sont multipliées ces dernières années. Ces alliances se fondent notamment sur la mise en place de certifications, qui valorisent l’écart à la norme du standard, la consommation de fruits et légumes « irréguliers » (bios, de saison, etc.) constituant un levier pour politiser les enjeux de consommation, tout en favorisant des stratégies de création de niches commerciales. Depuis peu la dimension politique des pratiques de consommation se trouve exacerbée par l'importance accordée à la santé et à la durabilité dans les conduites de vie : non seulement les politiques publiques de santé encouragent à consommer plus de fruits et légumes, mais en outre les discours sur la consommation engagée interrogent la durabilité de leur mode de production et de distribution, sans pour autant offrir de réponse figée ni de prescription simple.

4. Les politiques publiques, les risques sanitaires et environnementaux liés à la production ou à la consommation de fruits et légumes

Les enjeux de saisonnalité et de relocalisation des circuits, ainsi que les pratiques et attentes des consommateurs permettent d’aborder encore une autre dimension de l’analyse des fruits et légumes comme objet sociologique : ces derniers font également l’objet de controverses et de mobilisations autour des enjeux de santé publique et de respect de l’environnement posés par l’agriculture productiviste. En effet, les fruits et légumes semblent être pris dans une contradiction, entre leur image publique (soutenue par des politiques publiques telles que le PNNS) d’aliments sains, à la fois utiles dans la prévention de certaines maladies et outils de construction de certains rapports au corps (bien-être, minceur, régime végétarien etc.), et des modes de production non respectueux de l’environnement et de la santé (chauffage des serres au fioul, déchets plastiques non recyclés, usage intensif de pesticides). Ces modes de production sont justifiés par les agriculteurs par des impératifs de productivité et des standards de qualité, mais cet argumentaire est de plus en plus largement contesté. Cette tension pose à la fois la question de la transformation de conduites alimentaires et de la politisation des enjeux de consommation, celle des controverses autour des risques sanitaires (tant pour l’environnement que pour la santé) et des modes de production (production intégrée/ agriculture raisonnée/ agriculture biologique), et finalement celle de l’élaboration d’outils de régulation adaptés, pour gérer des impératifs contradictoires.

Modalités pratiques

Les propositions de communication (une page) sont à envoyer à : colloquefl@ivry.inra.fr

avant le 15 mai 2011

Cet appel à communication concerne tous les pays, ainsi que les époques présentes ou passées. Il s’adresse à tous les chercheurs, indépendamment de leur statut. Les organisateurs prévoient la publication d’un numéro thématique dans une revue à comité de lecture. Dans cette perspective, il est demandé aux contributeurs de présenter une communication originale.

Calendrier :

  • 15 mai 2011 : date limite d’envoi des propositions de communication (une page)
  • 20 juin 2011 : sélection des contributions et notification aux auteurs
  • 20 Septembre 2011 : envoi des contributions écrites (40 000 – 50 000 signes)
  • 20-21 Octobre 2011 : colloque à Ivry-sur-Seine
  • Novembre 2011 : constitution du dossier thématique pour publication

Le comité de sélection est composé des membres du comité d'organisation :

  • Antoine Bernard de Raymond (Sociologue, INRA, Cesaer)
  • Laure Bonnaud (Sociologue, INRA, Ritme)
  • Marie Plessz (Sociologue, INRA, Aliss)

Les communications seront sélectionnées sur la base des propositions de contributions envoyées.

Ce colloque est organisé avec le soutien du département SAE2.

Catégories

Lieux

  • 63 Boulevard Brandebourg
    Ivry-sur-Seine, France

Dates

  • dimanche 15 mai 2011

Fichiers attachés

Mots-clés

  • Fruits et légumes, sociologie, agriculture, marchés, nutrition, consommation, saisonnalité

Contacts

  • Antoine Bernard de Raymond
    courriel : antoine [dot] deraymond [at] inra [dot] fr

Source de l'information

  • Antoine Bernard de Raymond
    courriel : antoine [dot] deraymond [at] inra [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Les fruits et légumes : un objet sociologique ? », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 22 mars 2011, https://doi.org/10.58079/i4f

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