AccueilEsthétique, corporéité des croyances et identité

AccueilEsthétique, corporéité des croyances et identité

Esthétique, corporéité des croyances et identité

The Aesthetics and Embodiment of Beliefs and Identity

Septième colloque international d’ethnoscénologie

Seventh International Conference on Ethnoscenology

*  *  *

Publié le mercredi 07 mars 2012

Résumé

Le colloque « esthétique, corporéité des croyances et identités » aura lieu les mercredi 22, jeudi 23 et vendredi 24 mai 2013. Nombre de pratiques profanes ou non qui constituent le champ de recherche en ethnoscénologie s'inscrivent dans un système de croyances. Dans la perspective retenue, celles-ci se définissent pour les individus et les communautés moins par rapport à une doxa, qu'à un habitus spirituel, éthique et esthétique où se retrouvent les constituants de l'expérience sensible : textualité et transtextualité (Genette), oralité – verbal art (Bauman), techniques du corps, danse, musicalité, ornementation, polysensorialité, états émotionnels. Institutionnalisées, les croyances composent des synesthétiques codifiées aussi pressantes sinon plus que les doctrines dont la connaissance est souvent approximative. Les arts - au sens large du terme –paraissent être intimement associés à l’expression primordiale des croyances qui, en retour, nourrissent les imaginaires qui les fécondent. La perception attentatoire de certaines formes artistiques par le croyant ne serait-il pas le contrecoup de cette symbiose des éléments sensibles de la conviction ?

Annonce

Argumentaire :

Depuis le XVIIIème siècle l’appariement du théâtre et des rituels a fait naître en Europe puis aux Etats-Unis la théorie de l’origine cultuelle des arts de la scène. Si la thèse d’une telle filiation est aujourd’hui abandonnée au profit d’une conception moins naïve et plus systémique (G. Tarabout, J.-M. Pradier), l’attention s’est tournée vers le rapport analogique entre l’art du comédien, son mode de vie parfois communautaire, le spirituel dans l’art (Jerzy Grotowski, Peter Brook, Anatoli Vassiliev). Religions, mouvements spiritualistes…, ont créé leur propre forme théâtrale (théâtre des martyrs, mélodrames édifiants des Missions Etrangères, théâtre théosophique…). Le colloque franco-russe sur les communautés artistiques qui s’est tenu à Moscou au mois d’octobre 2010 s’est attaché à présenter des exemples précis qui suggèrent l’étroite parenté de la pratique artistique, notamment dans les arts du spectacle vivant, et de la quête plus ou moins exigeante d’un espace physique et mental situé au-delà de la satisfaction des besoins matériels élémentaires. : « De Copeau à Grotowski, de Stanislavski à Vassiliev, la question du mystère de la création scénique, relais ou avatar de la création divine, reste posée. On l’aborde souvent en filant la métaphore d’une représentation assimilée à un rituel, d’un travail théâtral conçu comme une « mission » de la part du comédien-prêtre officiant devant des disciples » rassemblés dans un théâtre-temple. Les fanatiques d’un théâtre « pur », d’une théâtre « d’art », à vocation éthique, voire éducative, s’opposent farouchement aux amateurs de divertissement commerciaux, d’activités ludiques et frivoles propres au « star system ». Cette opposition reste vivante, pertinente et d’actualité » Marie-Chritine Autant-Mathieu, introduction du numéro spécial de la revue Russe Du spirituel au théâtre et au cinéma, 29, 2007, Institut d’Etudes Slaves, p. 7

Qu’un tel courant historique concerne essentiellement les arts du spectacle vivant – le théâtre jadis, théâtre et danse à présent – est significatif. Le spectacle vivant a pour matériau l’entièreté de la personne du performeur et du spectateur, corps et esprit faut-il souligner. De même, toute croyance engage l’entièreté de l’individu. Les apprentissages et l’expérience sensoriels, émotionnels, moteurs construisent un habitus dont ne peut rendre compte l’expression discursive seule. Il devient particulièrement difficile de dissocier l’activité dévotionnelle, ses enjeux, et son esthétique dont nous savons peu de l’effet retour sur la cosmologie qui la sous-tend.

Si les croyances s’identifient généralement par leur contenu “doctrinal”, la signification même de ce terme est loin d’être uniforme. Le monde des monothéismes – religions du salut - a tendance à l’entendre en tant que référé à une doctrine. La Doxa devient ainsi la fabrique d’une identité à partir de laquelle se font jour les divergences et les oppositions. En d’autres termes, l’orthodoxie agit dans la description, l’adhésion et l’affrontement en qualité de notion phare.

La réalité est plus complexe dans la mesure où les discours dogmatiques ne renvoient pas à une essence intemporelle, mais à des faits historiquement élaborés, à des personnes et à des communautés.

Nombre de cosmologies ne présentent pas un corps doctrinal homogène, construit sur le modèle des canons monothéistes. Les spécialistes – notamment les sinologues et les chercheurs en études religieuses au Japon (Tetsuo Yamaori, Isomae Jun'ichi, Susumu Shimazono,) – ont avancé la notion d’orthopraxie pour reconnaître leur spécificité. Le croire est dans l’être et l’agir. La correction de la pratique fait sens plus que la déclaration d’un Credo (Yezidis du Sinjar, et Naqshabandi de Barzan dans le Kurdistan d’Irak). Quant au chamanisme, il est reconnu que la corporéité de l’action mediumnique assure l’efficacité de la séance (R. Hamayon). L’esprit est révélé par et dans le geste de la mudang coréenne (A. Guillemoz). La sincérité de la divination qu’elle accomplit réside dans le moment où se vit la relation entre elle et ses interlocuteurs physiquement présents. Une fois l’épisode passé, la suite et ses discours n’a pas d’importance. Cette situation conduit à établir un rapport d’analogie avec le spectacle vivant lorsque le performeur - comédien, danseur -, se trouve en « état de croyance », plutôt que d’identification et de mimétisme. L’étonnante présence de l’acteur Africain Malick Bowens, remarquait Peter Brook, est fondée sur sa capacité à s’immerger dans l’imaginaire, et non de construire un jeu de scène. Capacité sans doute acquise – à son avis – au cours d’une enfance villageoise.

« Credo in unum deum ». Je crois en un seul Dieu, énonce le Chrétien, de même que le Musulman, après le Judaïsme. J’agis selon les codes, pourrait-on penser des habitués qui à la sortie des bureaux entrent dans un temple bouddhiste de Taipeh. Une telle opposition est non seulement simplificatrice et réductrice. Elle a donné lieu à l’invention d’un vocabulaire normatif, maintenu dans le langage savant et commun en usage dans les sociétés euro-américaines : paganisme, idolâtrie, superstition, magie, sorcellerie, ritualisme…De même, ce qui est perçu comme excessif dans le culte conduit à se référer à la métaphore théâtrale. Tout se passe comme si, au-delà d’un certain seuil de retenue propre aux codes liturgiques chrétiens, l’aspect spectaculaire de l’action l’emportait au détriment du spirituel. Les danses des moines tibétains (Nathalie Gauthard) n’auraient-elle pas une profondeur identique à celle de la récitation psalmodiées des psaumes par les bénédictins de Solesmes ?

La formule : « Je suis croyant mais non-pratiquant », souligne la dichotomie supposée entre doxa et praxis. Elle semble s’inscrire dans une logique dualiste fondatrice d’une conception essentialiste de la croyance et de l’imaginaire dégagée de toute corporéité, c’est-à-dire du sensible. C’est ainsi que le caractère spectaculaire de certains cultes les a fait nommer « théâtres rituels » par l’observateur euro-américain, tant leur magnificence séduisante et leur aspect dramatique lui paraissaient étrangers à la nature de la dévotion. À l’inverse, les publics occidentaux attribuent parfois à certaines pratiques lointaines, une dimension ineffablement sacrée qui les fascinent en raison de leur étrangeté et de leur hiératisme sans percevoir ce qu’elles peuvent comporter de routinier, de conventionnel et de convenu.

La définition de l’ethnoscénologie comme l’étude interdisciplinaire des incarnations de l’imaginaire met l’accent sur la corporéité des actions qui constituent l’objet de la recherche, sans pour autant revenir à une conception dualiste de l’humain. Un corollaire non moins stimulant pour l’étude des croyances résulte des propositions énoncées : la pratique ne constitue-t-elle pas en elle-même une forme de croyance sans doctrine, le discours doctrinal étant second par rapport à l’expérience sensible comme le suggèrent les travaux de l'école japonaise d'études religieuses (Isomae Jun'ichi, Yuasa Yasuo ), au départ peu embarrassée par le modèle occidental de la "religion" (Daniel Dubuisson)? Quels processus somato-psychiques et symboliques, individuels et collectifs, sont-ils à l’œuvre dans les incarnations de l’imaginaire et ses esthétiques ?

 Le colloque doit permettre de mieux comprendre comment l’unité de l’espèce humaine et ses caractères singuliers s’expriment dans la diversité du sensible garante de sa survie.

Modalités de participation 

Le VIIème colloque international d'ethnoscénologie aura lieu dans les nouveaux bâtiments de la Maison des Sciences de l'Homme Paris Nord, La Plaine-Saint-Denis.

Langues du colloque : français, anglais.

Inscription et participation gratuites.

Ouvert aux chercheurs confirmés ou non et aux praticiens, le colloque comprend plusieurs types d’activité : 

  • Communications plénières
  • Groupes de travail thématiques permettant l’exposé de travaux en cours et l’échange entre chercheurs
  • Démonstrations
  • Des manifestations (spectacles )
  • Un temps de discussion générale .

L’inscription obligatoire est gratuite.

La durée des communications est fixée à vingt minutes précises afin de laisser place aux échanges et discussions.

  • Les chercheurs et praticiens sont invités à adresser au comité scientifique, un projet de communication ou de démonstration sous forme de résumé en français ou en anglais, accompagné d’une présentation sommaire de l’auteur.
  • Les résumés envoyés par fax ne seront pas pris en compte.
  • Le résumé ne doit pas dépasser 250 mots, titre, mots clefs et nom de l’auteur non compris.
  • Il doit être accompagné de la fiche de renseignement ci-jointe, dûment remplie, afin de faciliter la tâche des organisateurs.

Date limite d’envoi des projets de communication : 1 octobre 2012 à l'adresse colloque.ethnoscenologie.2012@mshparisnord.fr

Submissions

Researchers and practitioners are invited to submit their papers for conference

before the first of October 2012 to : colloque.ethnoscenologie.2012@mshparisnord.fr

  • Abstracts submitted by fax will not be accepted.
  • All abstracts must be submitted in French or English.
  • Abstracts may not be longer than 250 words (excluding title and authors)
  • Please, when submitting your document, make sure that you do not forget : Contact details of presenting author. Abstract topic (Four keywords). Full details of all authors (First Name, Family name, Title, Affiliation: Department, City and Country).

Comités et organisation

Coordinateurs : Pr Jean-François Dusigne, Pr. Jean-Marie Pradier

Coordinatrice du Comité Organisateur : Pr Laure Garrabe

Scientific advisory board and program committee :

  • Pr Marie-Christine Autant-Mathieu, (Directeur de Recherche au CNRS, ARIAS)
  • Pr William O. Beeman, University of Minnesota
  • Pr Armindo Bião (Université Fédérale de Bahia)
  • Pr Patrick Deshayes, Université Lumière Lyon 2
  • Pr Daniel Dubuisson (Directeur de Recherche au CNRS, Université Lille 3)
  • Pr Jean-François Dusigne (Université Paris 8)
  • Pr Amos Fergombe (Université d’Artois)
  • Yvette Galot, Présidente de la Commission Culture et Patrimoine du Conseil Régional de la Martinique
  • Pr Nathalie Gauthard (Université de Nice)
  • Pr Piergiorgio Giacché (Université de Pérouse) Pr Pauline Guedj ( Université Lyon 2)
  • Pr Christine Hamon-Sirejols (Université Paris III)
  • Pr Bruna Filippi, (Université de Pérouse)
  • Pr François Picard (Université Paris 4)
  • Pr Jean-Marie Pradier (Université Paris 8 – MSH Paris Nord)
  • Patricia Ribault (ESAD)

Quelques pistes de lecture:

  • Zhargalma Dandarova - Darima Boudaraevna : Entretien avec une chamane sibérienne, Editions Labor et Fides, 2007
  • Daniel Dubuisson : L’Occident et la religion, Mythes, science et idéologie, Éditions Complexe,1998 (ce qui est dit du terme “ religion ”, convient analogiquement à l’examen critique du terme “ théâtre ”). Les sagesses de l’homme bouddhisme – paganisme – spiritualité chrétienne, Septentrion, Presses universitaires, coll.Mythes, Imaginaires, Religions, 2004.Wisdoms of Humanity Buddhism, Paganism, and Christianity (translated by Seth Cherney), Brill Numen Book Series.136 Studies in the History of Religions, 2011 -
  •  Bernard Forthomme : Théologie des émotions - Structurée par l'expérience théâtrale, Les éditions du Cerf, 2008
  • H.U. Gombrecht : Éloge de la Présence, (Production of Présence), traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Françoise Jaouën, Libella/Maren Sell, 2010
  • J. Goody : Representations and Contradictions. Ambivalence Towards Images, Theatre, Fiction, Relics and Sexuality, Blackwell, 1997
  • M. Granet : Fêtes et chansons anciennes de la Chine, Albin Michel, 1982; La Fête, Actes du Quatrième Colloque C.O.R.À.I.L., Nouméa, 18-19 nov. 1991
  • Alexandre Guillemoz : La Chamane à l'éventail - Récit de vie d'une mudang coréenne, suivi de La chamane et l'ethnologue, Imago, 2010
  • R. Hamayon, La Chasse à l’âme - Esquisse d’une théorie du chamanisme sibérien, Société d’ethnologie, Nanterre, 1990
  • Bertrand Hell : Le Tourbillon des génies. Au Maroc avec les Gnawa, Paris, Flammarion, 2002 - Possession et chamanisme. Les maîtres du désordre, Paris, Flammarion, 1999, Réédition Champs Flammarion 2002
  • Isomae Jun'ichi : The discursive position of religious studies in Japan : Masaharu Anesaki and the origins of religious studies, Brill, Method & Theory in the Study of Religion, Vol. 14, Number 1, 2002, pp. 21-46 (26)
  • Jacques Maquet : L’Anthropologue et l’esthétique – Un anthropologue observe les arts visuels, Métailié 1993
  • Anya Peterson Royce,: Anthropology of Dance, Dance Books, 2002 - Bernard Senécal, s.j. : Jésus le Christ à la rencontre de Gautama le Bouddha – Identité chrétienne et Bouddhisme, Cerf, théologies, 1998
  •  Susumu Shimazono : From Salvation to Spirituality, - Popular Religious Movements in Modern Japan, Trans Pacific Press, Melbourne, 2004 - Yuasa Yasuo : The Body - Toward an Eastern Mind-Body Theory, Edited by T.P. Kasulis, translated by Nagatomo Shigenori and T.P. Kasulis, State University of New York Press, 1987

Lieux

  • MSH Paris-Nord - 4 rue de la Croix Faron
    Saint-Denis, France (93)

Dates

  • lundi 01 octobre 2012

Fichiers attachés

Mots-clés

  • Ethnoscénologie, esthétique, corporéité des croyances, identité

Contacts

  • Organisation du colloque ~
    courriel : entipecs2011 [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Johan V
    courriel : vxx3142 [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Esthétique, corporéité des croyances et identité », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 07 mars 2012, https://doi.org/10.58079/ke0

Archiver cette annonce

  • Google Agenda
  • iCal
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search