Making one's salvation, working for salvation. Monks, canons and friars in the Iberian Peninsula
Faire son salut, œuvrer pour le salut. Moines, chanoines et frères en Péninsule ibérique
Between conversion, mediation and cure of souls (VIth-XVth centuries)
entre conversion, médiation et soin des âmes (VIe-XVe siècle)
Published on Friday, June 01, 2012
Abstract
Announcement
Argumentaire
Le christianisme peut être défini, fondamentalement, comme une « religion de délivrance » ou « religion de salut » (Erlösungsreligion), selon le concept développé par Max Weber. L’espoir du salut constitue, dans le Moyen Âge occidental, une valeur communément partagée, et sa quête forme l’objectif même de toutes les communautés religieuses, monastiques, canoniales ou mendiantes.
Si la vocation monastique se fonde ainsi, originellement, sur une aspiration à la conversion personnelle, entre ascèse et prière (faire son salut), moines, chanoines et frères s’investissent aussi dans le salut des autres (œuvrer pour le salut). À cet égard, la fonction médiatrice, par l’exercice d’une « prière pour », constitue longtemps la réponse majeure des communautés régulières aux attentes des fidèles – à commencer par les rois et les grands – et de l’Église. L’engagement pastoral a, lui, constitué un volet plus problématique de l’insertion des religieux dans le salut collectif. Présente dès les premiers temps du monachisme à travers la prédication d’ermites et la prise en charge de lieux de culte, la question pastorale acquiert une acuité particulière au cours du grand mouvement de la réforme dite grégorienne, qui entraîne une remise accrue d’églises « privées » à des établissements monastiques ou canoniaux réformés. Face à l’amplification du phénomène, les différents papes montrent des attitudes contradictoires ou ambiguës, entre exclusion des moines des tâches liées à la cura animarum et encouragement – sous contrôle – de nouveaux ordres religieux autorisés à exercer un ministère pastoral, à l’instar des chanoines réguliers. Un siècle plus tard, les ordres mendiants renforcent cette tendance. Le rapport des communautés régulières au salut ne se réduit cependant pas, aux derniers siècles du Moyen Âge, à la question de la pastorale ni à celle des Mendiants. Ces derniers ont ainsi su faire leurs les fonctions médiatrices d’un monachisme bénédictin qu’ils n’ont évidemment pas fait disparaître. Et d’autres voies de salut, davantage tournées vers la conversion personnelle, continuent d’être explorées, ouvertes au monde des laïcs à travers l’institution des tiers ordres, ou plus individuelles à l’image du mysticisme et du maintien d’aspirations érémitiques. Par ailleurs, à partir du XIIe siècle, des communautés religieuses particulières, par leur forme comme par leurs fonctions, rencontrent dans la péninsule de notables succès : en raison d’une situation politico-confessionnelle spécifique, les ordres militaires offrent dans l’espace ibérique des perspectives renouvelées et élargies pour la conquête du salut.
Tel est le cadre général, applicable avec des variations plus ou moins amples à l’ensemble de l’Occident chrétien. Si la Péninsule ibérique s’inscrit globalement dans ce contexte, il convient cependant de s’interroger sur ses éventuelles particularités, comme le souligne d’emblée la faiblesse relative de la fonction médiatrice assumée par les moines ibériques du haut Moyen Âge, par rapport à son importance dans le modèle historiographique dominant du monachisme carolingien et clunisien. De même, la configuration territoriale et politique de la Péninsule du VIIIe siècle à la fin du Moyen Âge, marquée par la présence musulmane, conduit à s’interroger, à nouveaux frais, sur une possible accentuation eschatologique des discours sotériologiques, ou au contraire sur l’absence – et ses raisons – de traces discursives d’une telle situation.
En adoptant une perspective nourrie de comparatisme, il s’agira ainsi de s’interroger sur les caractères que revêt le rapport des communautés régulières au salut dans l’espace péninsulaire, et ses éventuelles spécificités par rapport au reste de la Chrétienté latine. L’histoire des communautés régulières dans la Péninsule ibérique médiévale gagnerait ainsi à être (re)lue à partir de cette grille de lecture, centrée sur la conquête du salut, entre pratiques et discours. Malgré l’intérêt accru porté par des chercheurs hispanistes, au cours des dernières années, à de telles problématiques, leurs travaux restent isolés ; le séminaire que nous souhaitons organiser au sein de l’E.H.E.H.I. (Casa de Velázquez) vise à poursuivre les réflexions en les organisant autour des trois rapports au salut fondamentaux : la conversion, la médiation, le soin des âmes.
- La conversion. L’entrée en religion constitue le moyen le plus recommandable de progresser sur la voie étroite du salut individuel : le choix d’une vie de renoncements, consacrée à la méditation et au service divin – y compris par les armes –, doit faire de ceux qui s’y engagent des hommes ou des femmes plus proches de la perfection et, partant, de la félicité dans l’au-delà. Les communautés religieuses ne doivent cependant pas être considérées comme espaces ou instruments d’une conversion salvatrice pour leurs seuls membres : des clercs séculiers ou des laïcs s’y retirent, librement ou sous la contrainte, de façon temporaire ou définitive, pour des motifs pieux ou pénitentiels ; d’autres y trouvent des modèles sur lesquels régler leur propre vie. L’articulation, chez les réguliers, de la conversio intérieure et de la conversion d’autrui, par la prière ou, chez les Mendiants, par la prédication verbo et exemplo, mériterait ici une attention particulière. L’intérêt pourra se centrer aussi sur les discours favorisant la qualité de cette conversion (homélies, collations, sermons ; traités, commentaires bibliques ; commentaires de la règle, coutumiers, hagiographie, etc.), tant pour leur matière prescriptive que pour leur circulation et les traditions qu’ils créent ou reflètent.
- La médiation. Les hommes d’Église, et spécialement ceux qui obéissent à une règle, sont réputés tenir une position d’intermédiaires entre Dieu et l’Ecclesia des fidèles. Menant une vie plus pure, largement consacrée au service liturgique, dans des églises conservant les reliques de saints intercesseurs, les moines au premier chef, mais aussi les autres religieux, apparaissent comme des hommes hautement qualifiés pour conduire le salut des autres. De là leur spécialisation progressive dans la « commémoraison » des défunts : donations pro remedio animae, fondations de messes et élections de sépulture en témoignent abondamment. Cette fonction médiatrice des communautés religieuses invite aussi à s’intéresser aux phénomènes de concurrence qu’elle a pu nourrir devant le choix qui s’offrait aux fidèles dans l’élaboration de « stratégies » de salut, dans le cadre d’une forme de « polycentrisme religieux » accentué à partir du XIIIe siècle par l’implantation urbaine des couvents mendiants.
- Le soin des âmes. L’engagement des Mendiants dans les tâches pastorales n’est pas à démontrer : prédicateurs et confesseurs, ils s’efforcent de conduire le troupeau des fidèles sur le chemin du salut – on aimerait cependant mieux connaître l’activité pastorale des frères dans la Péninsule ibérique. Il sera également souhaitable d’éclairer, aux époques antérieures, la prise en charge de telles fonctions – mineure ? – par les moines ou les chanoines réguliers. On voudrait encore, en fonction des sources disponibles, essayer de mesurer l’impact de cette pastorale en étudiant les concordances, ou les écarts, ayant existé entre les pratiques de salut par les fidèles (telles qu’on peut les approcher par les séries testamentaires, les statuts synodaux ou les visites pastorales) et le « modèle » de salut produit par les religieux, exprimé notamment dans leurs sermons. Enfin, étudier les relations entre ces communautés et le monde ecclésiastique séculier, en termes de modèles, de concurrence voire de conflits, contribuerait sans doute à mieux définir le rôle tenu par les réguliers dans l’économie du salut en Péninsule ibérique.
Modalités de participation
Vous êtes convié à faire part de votre proposition (titre et résumé, en une page maximum, de votre intervention)
avant le 15 juillet 2012.
- Celle-ci devra s’insérer précisément et de façon explicite dans l’un des trois axes précédemment définis.
- Les communications seront prononcées en castillan ou en français.
- En cas d’acceptation, les frais de déplacement et d’hébergement seront pris en charge, selon des modalités qui seront précisées ultérieurement.
Sélection des propositions :
- Amélie DE LAS HERAS,
- Florian GALLON,
- Nicolas PLUCHOT
Organisation :
ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES HISPANIQUES ET IBÉRIQUES (Casa de Velázquez, Madrid)
- Lieu : Madrid
- Date limite de soumission des propositions : 15 juillet 2012
- Les journées auront lieu les lundi 25 février, vendredi 5 avril et lundi 27 mai 2013.
Subjects
Places
- Calle de Paul Guinard 3 (Casa de Velazquez)
Madrid, Kingdom of Spain
Date(s)
- Sunday, July 15, 2012
Keywords
- moines, chanoines, Frères mendiants, réguliers, salut
Contact(s)
- Amélie de Las Heras
courriel : delasheras [dot] amelie [at] gmail [dot] com - Florian Gallon
courriel : florian [dot] gallon [at] univ-tlse2 [dot] fr - Nicolas Pluchot
courriel : nicolas [dot] pluchot [at] casadevelazquez [dot] org
Reference Urls
Information source
- Florian Gallon
courriel : florian [dot] gallon [at] univ-tlse2 [dot] fr
License
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To cite this announcement
« Making one's salvation, working for salvation. Monks, canons and friars in the Iberian Peninsula », Call for papers, Calenda, Published on Friday, June 01, 2012, https://doi.org/10.58079/l4m