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Edith Boissonnas

L'écriture à l'état brut

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Publié le mardi 12 août 2014

Résumé

L’écrivain Edith Boissonnas (1904-1989), intégralement publiée chez Gallimard et à La NRF, a vécu de 1946 à sa mort entre Neuchâtel et Paris. Elle a laissé une œuvre discrète et impertinente qui cherche continuellement dans le langage les attaches de l’élémentaire. « Fille extraordinaire d’un Raymond Roussel » pour Joë Bousquet, écrivain « genre art brut » pour Jean Dubuffet, « le plus troublant et le plus passionnant des poètes français » pour André Pieyre de Mandiargues, Boissonnas est un auteur peu ou mal connu. Si, comme l’affirme Gérard Macé, l’écriture de Boissonnas « rejoint l’art des enfants marchant volontairement à l’extrême bord du trottoir », on demeure toujours saisi par son extrême lucidité qui ne cesse de dénoncer les structures de domination, les hypocrisies et les stéréotypes. L’œuvre partage en effet avec celle de Jean Paulhan, amant de l’auteure durant vingt ans, une volonté morale qui s’exerce à partir d’un paradoxe : comment faire de naïveté style ? A l’heure où les archives d’Edith Boissonnas sont enfin accessibles au public et aux chercheurs à la Bibliothèque publique et universitaire de Neuchâtel, l’écrivain ayant légué à l’université l’ensemble de son fonds, nous voudrions interroger les enjeux de cette écriture à l’état brut.

Annonce

Argumentaire

L’écrivain Edith Boissonnas (1904-1989), intégralement publiée chez Gallimard et à La NRF, a vécu de 1946 à sa mort entre Neuchâtel et Paris. Elle a laissé une œuvre discrète et impertinente qui cherche continuellement dans le langage les attaches de l’élémentaire. « Fille extraordinaire d’un Raymond Roussel » pour Joë Bousquet, écrivain « genre art brut » pour Jean Dubuffet, « le plus troublant et le plus passionnant des poètes français » pour André Pieyre de Mandiargues, Boissonnas est un auteur peu ou mal connu. Si, comme l’affirme Gérard Macé, l’écriture de Boissonnas « rejoint l’art des enfants marchant volontairement à l’extrême bord du trottoir », on demeure toujours saisi par son extrême lucidité qui ne cesse de dénoncer les structures de domination, les hypocrisies et les stéréotypes. L’œuvre partage en effet avec celle de Jean Paulhan, amant de l’auteure durant vingt ans, une volonté morale qui s’exerce à partir d’un paradoxe : comment faire de naïveté style ? A l’inverse, et toujours en résonance avec la réflexion paulhanienne, comment rendre aux formes lyriques héritées de la tradition la force d’un surgissement premier ? Le paradoxe se prolonge jusque dans la réception de la poésie de Boissonnas, parfois comprise comme un académique retour au vers compté. Or, ce choix prosodique est justement ce qui inscrit historiquement cette œuvre dans l’innovation poétique de l’immédiat après-guerre qui, après le Surréalisme et nourrie par lui, cherche à retrouver le mètre. De là aussi son originalité : innover en surdéterminant les éléments lyriques fondamentaux que sont le vers et l’énonciation d’un sujet ; inventer un lyrisme à l’état brut qui, exagérant l’exercice et les images de la langue, produit une vision aussi subversive du monde que peut l’être le regard jeté sur la société par un enfant, un fou, un nouvel arrivant. L’œuvre met ainsi en pratique une stratégie, propre aux moralistes, que Carlo Ginzburg définit comme un « estrangement ».

A l’heure où les archives d’Edith Boissonnas sont enfin accessibles au public et aux chercheurs à la Bibliothèque publique et universitaire de Neuchâtel, l’écrivain ayant légué à l’université l’ensemble de son fonds, nous voudrions interroger les enjeux de cette écriture à l’état brut.

D’une part, en orientant nos réflexions vers sa dimension ethnographique. En effet, peu de temps avant la guerre, Boissonnas est l’une des seules femmes à assister aux séances du Collège de sociologie dirigé par Georges Bataille, Roger Caillois et Michel Leiris et dont la visée intellectuelle, déterminante pour elle, est une ethnologie littéraire de la société contemporaine en crise.

D’autre part, en interrogeant l’impact sur son œuvre, et réciproquement, de l’Art brut. Après la guerre, Boissonnas est au cœur des échanges franco-suisses que relance le projet d’une collection de l’Art brut par Jean Dubuffet, à qui elle se lie durablement. Au-delà de cette parenté esthétique, on s’intéressera aux nombreuses critiques d’art et aux collaborations de l’auteure avec des artistes qui signalent, dans le sillage du surréalisme (Masson, Magritte, Brauner) et surtout dans le contexte de l’art informel, les nouvelles modalités de la vision expérimentée par l’écrivain au contact d’œuvres « où la forme n’est pas encore devenue signe » (La NRF, mai 1964). L’émergence de la matérialité, de la corporalité du geste, rencontre sa propre quête d’une vision expressive du dedans des choses et de soi.

Enfin, le travail sur le « naïf », le nativus, l’inné, le naturel, de même que le dégoût de l’artifice et la recherche d’un non-savoir du regard, font de la poésie de Boissonnas un outil critique particulièrement incisif auquel le « je », dans son identité subjective, culturelle, sociale, est lui-même soumis. Ce je n’est pas seulement un autre : c’est un indigène pour soi, au même titre qu’autrui. Le sujet lyrique comme le sujet autobiographique, en dépit de la différence générique des textes (poèmes, récits en prose, journal), acquièrent ainsi le statut de sujet expérimental et documentaire, dont l’observation permet d’aiguiser le sens critique et civique de l’auteure sur les questions de genre, de nationalité, d’engagement politique. Chez Paulhan, né dans une famille protestante, la tentation est forte, à l’après-guerre, de chercher en Suisse les modèles de la tolérance. Boissonnas, elle, se montre toujours critique à l’égard de son propre pays qu’elle accuse de conformisme, en particulier à l’égard des femmes. En accord avec son esprit d’indépendance, elle refuse toute étiquette : sa poésie n’est ni romande ni féministe ni NRF. Elle a pour vocation de nous donner à penser ce qui constitue un sujet en dehors de ses déterminations culturelles, sociales, politiques et religieuses, défendant par là l’utopie d’un sujet à l’état brut.

Programme provisoire

Jeudi 25 septembre 2014

Neuchâtel

  • 13h45 -14h00 : Accueil
  • 14h00 -14h30 : Frédéric Wandelère (écrivain) : La rime orpheline et le vers mesuré
  • 14h30 -14h45 : Discussion
  • 14h45 -15h15 : Simon Miaz (assistant de recherche, Université de Neuchâtel) : Jean Paulhan : Lettres à Edith Boissonnas
  • 15h15 -15h30 : Discussion
  • 15h30 -16h00 : Pause café
  • 16h00 -16h30 : Muriel Pic (collaboratrice scientifique, Université de Neuchâtel) : Le Journal pour moi seule d’Edith Boissonnas. Une auto-observation
  • 16h30 -16h45 : Discussion
  • 16h45 -17h15 : Gérard Macé (écrivain) : Lire les poèmes d’Edith Boissonnas
  • 17h15 -17h30 : Discussion
  • 18h30 : Vernissage de l'exposition Edith Boissonnas. « Une joie de vivre, animale, me secoue », Bibliothèque publique et universitaire de Neuchâtel.

26 septembre 2014-31 mars 2015.

Commissariat d'exposition : Muriel Pic.

Scénographie : Monika Roulet.

Vendredi 26 septembre 2014

Lausanne

  • 09h45 -10h00 : Accueil
  • 10h00 -10h30 : Laurent Jenny (Professeur, Université de Genève) : Style sous influences. Boissonnas, Paulhan, Michaux et la mescaline
  • 10h30 -10h45 : Discussion
  • 10h45 -11h00 : Pause café
  • 11h00-11h30 : Guillaume Bridet (Professeur, Université de Bourgogne) : Cruauté d’Edith Boissonnas ? Une lecture à la lumière de Roger Caillois et de Jean Paulhan
  • 11h30-11h45 : Discussion

Déjeuner

14h00 -14h30 : Marianne Jakobi (Professeure, Université Blaise Pascal Clermont-Ferrand) : Edith Boissonnas et Jean Dubuffet

14h30 -14h45 : Discussion

14h45 -15h15 : Lucienne Peiry (Directrice de la recherche et des relations internationales de la Collection de l’Art Brut) : Les relations d’Edith Boissonnas avec l’Art Brut

15h15 -15h30 : Discussion

15h30 -15h45 : Pause café

15h45 -16h15 : Dominique Kunz Westerhoff (Professeure, Université de Lausanne) : Edith Boissonnas prosatrice

16h15 -16h30 : Discussion

16h30 -17h00 : Stéphane Pétermann (responsable de recherche au CRLR, Université de Lausanne) : Edith Boissonnas et la Suisse romande

17h00 -17h15 : Discussion

17h30 : Table ronde : Christine Planté, Daniel Maggetti, Stéphane Pétermann : Identités d’Edith Boissonnas

Organisateurs

  • Dominique Kunz Westerhoff (Université de Lausanne),
  • Daniel Maggetti (Université de Lausanne),
  • Muriel Pic (Université de Neuchâtel)

Lieux

  • Bibliothèque publique et universitaire (BPUN). Salle circulaire (rez-de-chaussée du Collège latin) - 3, Place Numa-Droz
    Neuchâtel, Confédération Suisse (2000)
  • Salle de conférence 511 - Bibliothèque cantonale et universitaire – Lausanne, site Unithèque
    Lausanne, Confédération Suisse (1015)

Dates

  • jeudi 25 septembre 2014
  • vendredi 26 septembre 2014

Fichiers attachés

Mots-clés

  • Edith Boissonnas, poésie, nouvelle revue française, archive, naïf, enfant, folie, estrangement, art brut, ethnologie littéraire, mescaline,

Contacts

  • Muriel Pic
    courriel : muriel [dot] pic [at] gmail [dot] com

URLS de référence

Source de l'information

  • Simon Miaz
    courriel : simon [dot] miaz [at] unine [dot] ch

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Edith Boissonnas », Colloque, Calenda, Publié le mardi 12 août 2014, https://doi.org/10.58079/qp2

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