AccueilLes collectivités territoriales, opérateurs privés avisés

Calenda - Le calendrier des lettres et sciences humaines et sociales

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Publié le mercredi 11 mars 2015

Résumé

L’objectif de ce colloque est d’analyser dans quelles conditions les collectivités territoriales peuvent agir de telles manière qu’elles puissent être qualifiées d’opérateur privé en économie de marché. L’enjeu est de leur permettre d’intervenir financièrement auprès des entreprises sans que cela soit requalifié en aide d’État.

Annonce

Argumentaire

Les collectivités territoriales se sont depuis très longtemps intéressées au développement économique de leur territoire, même si la loi (décret d’Allarde) ou la juridiction administrative leur ont interdit d’intervenir directement sauf dans des circonstances exceptionnelles ou particulière (CE, 30 juin 1930, Chambre syndicale du commerce de détail de Nevers, Les grands arrêts de la Jurisprudence administrative, Sirey 10e éd., p. 268). Néanmoins, elles ont parfois pris en charge directement des activités économiques, dans le cadre par exemple du socialisme municipal. Mais dans d’autres situations, elles ont cherché à aider ou à soutenir les entreprises présentes. Jusqu’à l’acte I de la décentralisation (82-83), ces actions des collectivités territoriales vers l’économie sont restées très limitées et très surveillées par l’Etat. A l’occasion de l’acte I, le pouvoir politique national a souhaité mieux organiser et coordonner l’action des collectivités territoriales en matière économique, s’agissant notamment de leurs interventions vers les entreprises sous la forme d’aides alors dites directes ou indirectes (loi du 2 mars 1982 et 7 janvier 1983). Cependant, l’action locale reste subsidiaire à celle de l’Etat. Le dispositif a fait l’objet de modifications dans les années qui ont suivi, à l’exemple de l’interdiction faite aux communes d’aider les entreprises en difficultés (loi du 5 janvier 1988).

L’acte II de la décentralisation en 2003-2004, vient apporter des modifications importantes au dispositif existant principalement en raison de l’influence du droit de l’Union européenne sur les actions économiques publiques mais aussi par un souhait des autorités centrales de renforcer le rôle des régions dans le domaine économiques. Nous relèverons alors la disparition de la distinction des aides directes ou indirectes qui ne connaît pas d’équivalent en droit de l’Union ainsi que le renforcement de la région en tant que chef de file du développement économiques (voir les articles L. 1511-1) (cela laisse néanmoins d’autres possibilités d’actions pour les départements ou les communes).

Il apparaît clairement que les régions sont les acteurs principaux de l’action économique. Elles ont toutes mis en place un schéma régional du développement économique (SRDE) dont la force juridique devrait être renforcée dans la prochaine loi portant sur ce sujet (voir à ce propos le projet de loi NOTRE). Avec les difficultés économiques de ces dernières années, les régions ont vu leur rôle prendre encore plus d’importance, notamment à l’égard des entreprises connaissant des difficultés ou pouvant en connaître. L’enjeu est alors de parvenir à inscrire les aides ainsi apportées dans le cadre juridique tant français qu’européen. Si se soumettre au cadre français n’est pas trop difficile il n’en est pas tout à fait de même avec celui de l’UE. En effet, le droit de l’UE fixe un cadre complexe aux interventions publiques en faveur des entreprises. Ces interventions ne sont compatibles avec les traités UE que dans le respect de certaines conditions (art 107 TFUE), puisque les collectivités territoriales sont assimilées aux Etats pour leurs interventions économiques (CJCE, 14 oct 1987, Allemagne c/ Comm), sachant que les aides sont considérées comme incompatibles si quatre conditions sont réunies (peu importe alors la forme de l’aide) :

  • aide publique (donc financée par des ressources publiques) ;

  • susceptible d’affecter les échanges entre Etats membres ;

  • en favorisant une entreprise ;

  • et qu’elle menace de fausser la concurrence (maintenant ou dans le futur, CJCE, 16 mai 2000, France c/Ladbroke Racing), ce qui pose la question de l’avantage accordée à cette entreprise.

Assez classiquement, les aides aux entreprises sont étudiées au regard de la notion d’aide d’Etat. Dès lors, il appartient à une région par exemple de se placer sous l’un des régimes existant afin de maintenir la validité de l’aide, comme :

  • le RGEC (règlement général d’exemption par catégorie) ;

  • le régime des aides de minimis ;

  • le régime des aides à finalité régionale.

Il est encore possible de notifier une aide spécifique à la Commission.Il reste qu’il n’est pas toujours possible d’intervenir en raison des contraintes précitées. Dès lors les collectivités peuvent encore essayer de se placer sous un autre régime, sous réserve que l’aide ne fausse pas la concurrence.

Pour cela elles peuvent aider une entreprise sous la forme d’une compensation d’une obligation de service public en respectant le cadre posé par le Pacquet « Alumnia ». Ce dernier a cherché à rendre praticable la complexe jurisprudence Altmark. Si la traduction par les textes des positions juridictionnelles n’est qu’imparfaite, il n’en demeure pas moins que cette possibilité de compensation d’obligations de service public présente un intérêt indéniable pour les collectivités, au travers du financement des SIEG.

Par ailleurs, les collectivités territoriales peuvent souhaiter intervenir dans le domaine économique, auprès des entreprises, comme d’autres entreprises pourraient le faire et sans que cela puisse alors être considéré comme une aide. Elles pourraient donc agir comme n’importe quel autre opérateur privé agissant dans les conditions normales du marché.

Les instances de l’Union européenne, ainsi que la juridiction administrative, ont reconnu que les interventions publiques puissent ne pas être qualifiée d’aide d’Etat si les conditions normales du marché sont respectées, à savoir si l’intervention se réalise dans des conditions « identiques » ou « similaires » à celles qui auraient prévalues si un opérateur (un investisseur, un créancier) privé était intervenu.

Il n’est déjà pas évident de savoir ce qu’est un tel opérateur (investisseur, créancier) privé au regard des conditions fixées par les juridictions. Il est dès lors important de revenir sur cette notion et d’en voir les contours exacts (sous l’angle économique et juridique).

Mais surtout comment les collectivités territoriales peuvent-elles prendre les « habits » d’un tel opérateur, investisseur, créancier privé avisé en économie de marché, alors qu’elles agissent dans l’intérêt général avec leurs prérogatives particulières très souvent ?  La limitation d’action des collectivités par leurs compétences listées (en tenant compte de la disparition programmée de la clause générale de compétences des départements et régions selon le projet de loi NOTRE) est-elle un frein à une telle opération des collectivités ? Si les collectivités territoriales peuvent intervenir dans ce cadre, le peuvent-elles pour n’importe quelle situation ou n’importe quelles entreprises, à l’exemple notamment des entreprises en difficulté ?

Modalités de soumission

Les contributions peuvent ainsi porter :

  • sur la notion d’opérateur privé avisé en économie de marché ;

  • sur l’application de cette notion aux collectivités territoriales au regard de la nature même des collectivités ou au regard du type d’entreprises visées ; 

Les propositions de contribution d’une longueur de deux pages maximum (environ 6 à 7000 signes) doivent être envoyées, accompagnées d’un CV, par e-mail,

avant le 15 juin 2015,

à l’adresse suivante : crdp(at)univ-lille2.fr. Le résultat de la sélection sera communiqué normalement le 30 juin 2015.

Comité scientifique

  • Bracq Stéphane, maître de conférences de droit public à l’IEP Lille

  • Mondou Christophe, maître de conférences de droit public, CRDPD

  • Potteau Aymeric, maître de conférences de droit public, CRDPD

  • Voinot Denis, professeur de droit privé, CRDPD

  • Vandendriessche Xavier, professeur droit public, CRDPD, Président université Lille 2

Le colloque aura lieu le 27 novembre 2015 à la Faculté de sciences juridiques, politiques et sociales de Lille et/ou à l’IEP de Lille. Les actes devraient faire l’objet d’une publication dans le courant de l’année 2016.

Organisation du colloque

  • Mondou Christophe, maître de conférences de droit public, CRDPD

  • Olivier François, Doctorant en droit public, CRDPD – Conseil régional Nord-Pas-de-Calais

Bibliographie indicative

Doctrine

  • Autorité de la concurrence, avis n°12-A-02 du 17 janvier 2012

  • KARPENSCHIF M., « L’investisseur privé en économie de marché », Concurrences, n°3-2011

  • KARYDIS G., « Le principe de l'« opérateur économique privé », critère de qualification des mesures étatiques, en tant qu'aides d'État, au sens de l'article 87 § 1 du Traité CE », RTD eur. 2003. 389

  • IDOT L., « Critère de l’opérateur privé en économie de marché », Europe, mai 2010, n°5

  • IDOT L., « Regards sur les « mutations » du droit des aides d’Etat, » Concurrences, n°1-2000, Doctrines, pp. 79 et ss.

  • ECKERT G., « L’affaire Ryanair : le Conseil d’Etat applique le critère de l’investisseur privé en économie de marché », Contrats et marchés publics, Avril 2006, n°4

Jurisprudence non exhaustive

  • CJCE, 10 juill. 1986, Belgique c/ Commission, aff. 40/85, Rec. 2321, « Boch »

  • Triu. UE, 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein-Westfalen c/ Commission T-228/99 et T-233/99

  • CJCE, 8 mai 2003, République Italienne et SIM 2 Multimédia Spa, aff jointes C-328/99 et C-399/00

  • CJCE, 3 juillet 2003, Chronopost, aff. C-83/01

  • CJCE, 14 sept. 2004, Espagne c/ Commission, aff. C-276/02, Rec. I. 8091

  • Trib. UE, 3 mars 2010, aff. T-163/05, Bundesverband deutscher Banken,

  • Trib UE, 3 mars 2010, aff. T-36/06, Bundesverband deutscher Banken

  • CAA Nancy, 18 décembre 2003, CCI de Strasbourg et du Bas-Rhin, req. n°03NC00864 (investisseur)

  • CAA Paris, 3 juillet 2006, SAISOF International, req. n°04PA02815 (opérateur)

  • CE, 27 février 2006, Cie Ryanair Limited (req n°264406 et 264545) (investisseur)


Dates

  • lundi 15 juin 2015

Fichiers attachés

Mots-clés

  • collectivités territoriales, opérateur privé en économie de marché, investisseur privé avisé, créancier privé avisé, aides d’État, interventionnisme public local

Contacts

  • Christophe Mondou
    courriel : crdp [at] univ-lille2 [dot] fr

Source de l'information

  • Eric Fouré
    courriel : eric [dot] foure [at] univ-lille [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Les collectivités territoriales, opérateurs privés avisés », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 11 mars 2015, https://doi.org/10.58079/s77

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