Página inicialMonuments publics. Entre permanences et renaissances africaines

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Monuments publics. Entre permanences et renaissances africaines

Public monuments. Between permanence and African renaissance.

Numéro spécial de la revue Cahiers d'études africaines

Special issue of the Cahiers d'études africaines journal

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Publicado terça, 02 de fevereiro de 2016

Resumo

La revue Cahiers d'études africaines sollicite des articles (en français et en anglais) consacrés au rôle des monuments publics dans les pratiques commémoratives récentes. Les études de cas réunis chercheront à saisir, par « le haut » et par « le bas », les enjeux actuels d'édification, de détournement et de destruction de monuments en Afrique. 

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La revue

Créés en 1960, les Cahiers d’Études africaines témoigne des tendances de pointe de la recherche, théorique et de terrain, sur l’Afrique, les Antilles et l'Amérique noire. La publication d’articles en français et en anglais contribue à la reconnaissance internationale de la revue. Périodicité : trimestrielle

Sommaires, résumés et compte rendus consultables en ligne: http://etudesafricaines.revues.org 

Argumentaire

Au moment des indépendances, dans un contexte de lutte pour la construction des Etats nations et du rassemblement populaire autour de valeurs communes, les métropoles africaines se dotent de nouveaux monuments publics. Avec une ferveur populaire propre aux changements de régime à travers le monde, des statues sont déboulonnées, détruites ou transférées comme celles de Gallieni à Tananarive, Diego Cao à Bissau, Léopold II à Kinshasa, Cécil Rhodes à Bulawayo ou Jules Ferry à Tunis. Les premiers explorateurs et anciens colonisateurs laissent ainsi place aux figures politiques de l’indépendance. A partir des années soixante-dix, de nombreux États se tournent vers la Chine pour édifier des monuments imposants comme les Palais du peuple, mais la réalisation de statues, fresques ou sculptures est principalement confiée aux artistes locaux, travaillant parfois sous supervision occidentale. La notion d’artiste officiel en Afrique prend tout son sens à cette époque puisque le réinvestissement des espaces urbains en particulier, et la création d’emblèmes en général, interviennent dans le cadre de concours et de commandes publics.

Ces modalités d’organisation des politiques culturelles africaines, ainsi brossées à grands traits, contrastent nettement avec la situation observable à l’heure actuelle dans de nombreux États. Malgré l’histoire chaotique ayant abouti à la légitimation de l’art africain dans le milieu réservé de l’art contemporain, les artistes nationaux sont souvent écartés de la réalisation de monuments au profit d’accords politiques et commerciaux juteux. Par exemple, la Corée du Nord essaime sur le continent africain, depuis une quinzaine d’année, des sculptures partageant le même « air de famille » stylistique. La société Mansudae Overseas Projects a ainsi été chargée de la réalisation du colossal Monument de la Renaissance africaine à Dakar d’après la maquette d’un artiste roumain (au détriment de celle d’Ousmane Sow) (De Jong & Foucher 2010) et des statues en bronze d’une hauteur plus modeste de Patrice Lumumba à Kinshasa, des trois « digkosi » (chefs traditionnels) à Gaborone ou encore du Behanzin à Abomey.

Partant du constat d’un recul de l’implication des artistes dans les projets d’aménagement urbain depuis les indépendances, ce numéro thématique souhaite étudier les rôles attribués aux monuments dans les pratiques commémoratives récentes. Trois catégories d’acteurs impliqués dans ces processus de construction mémorielle seront envisagés : les États commanditaires, les artistes et les publics. Les études de cas réunies chercheront à saisir, par « le haut » et par « le bas », les enjeux actuels d’édification, de détournement et de destruction de monuments. Que construit-on, et pourquoi, à l’heure actuelle dans les espaces publics africains ? Quelles transformations subissent les traces du passé ? Quels monuments sont jugés suffisamment dangereux ou inutiles pour être démolis ?

Ce dossier prolongera des réflexions déjà entamées au sein de la revue Cahiers d’Études africaines, comme l’étude des revendications mémorielles conflictuelles dans l’espace public africain (Fouéré dir. 2010) et des réparations consécutives à la traite des esclaves (Jewsiewicki dir. 2004), ainsi qu’une abondante littérature ciblée sur des études de cas en Afrique (Bernault 2010, De Jorio 2003, Elleh 2002, Greani 2013, Mbembe 2006, Murray 2013, Noble 2011, Roger & Delaurier dir. 2006, Sanwanda 2013, Tonda 2010, etc.) et ailleurs dans le monde (Fabre & Iuso dir. 2010, Huyssens 2003, Lossau & Stevens dir. 2014, Massu 2011, etc.).

Dans le prolongement de ces travaux, il nous a paru utile d’approfondir la question de l’impact des monuments publics dans les opérations de filtrages mémoriels (Candau 2005), officiels ou informels, à l’œuvre en Afrique.

Les monuments ont toujours valorisé des mythes mobilisateurs tout en opérant une sélection dans la symbolique politique. Or, l’effondrement des partis uniques et les situations de crise politique et de conflits ont largement complexifié les mises en scène de la mémoire collective au cours de ces vingt-cinq dernières années. A l’heure actuelle, l’engouement mémoriel officiel est tourné vers la « Renaissance africaine ». Promu par Thabo Mbeki, ce vaste projet démocratique et panafricaniste a guidé l’édification de nombreux monuments dans l’Afrique du Sud postapartheid, comme le mémorial Hector Pieterson à Soweto (Marshall 2009) ou le musée de l’apartheid à Johannesburg, et a été diversement réinterprété à l’échelle du continent en fonction des enjeux locaux (Crouzel 2000). Les monuments publics sont désormais tenus de susciter cette renaissance, de la rendre « palpable » aux yeux du monde et des générations à venir.

Pour re-naître, les nations oscillent entre des paradigmes variés. Si certains hommages rompent avec les lignes mémorielles des indépendances (Martin-Granel 2010, Atondi-Monmondjo 2006), les héros du renouveau sont largement tirés de l’histoire de la décolonisation comme le prouvent les nombreuses statues des leaders des années soixante édifiées lors des célébrations du cinquantenaire des indépendances. Or, cette vogue commémorative masque des enjeux plus complexes qu’il n’y paraît. Il s’agit pour les gouvernements en place d’annuler, activer ou réactiver habilement des alliés politiques. L’exemple de la statue de Fulbert Youlou, inaugurée en 2009 à Brazzaville, représentant l’abbé dans son habit ecclésiastique, révèle avec acuité les retournements mémoriels de l’histoire. Autrefois synonyme d’accumulation scandaleuse de richesses sur le dos de la population, les soutanes griffées du père de l’indépendance avaient même fait l’objet d’une exposition, en 1970 au Musée national, visant à « liquider » la puissance de ces anciensfétiches. Emprisonné, exilé et condamné à mort par contumace, il trône désormais fièrement sur un rond-point de la capitale (Greani 2013).

Les monuments africains, ou reliés à l’histoire africaine, ne cessent d’alimenter le débat public, que ce soit pour leur démolition par les mouvances islamistes radicales (comme la destruction du Monument de l’indépendance à Tombouctou en 2012), leur coût astronomique au regard des conditions de vie des populations, leurs puissances surnaturelles (Tonda & Yengo 2010), les tensions qu’ils ravivent (comme le tag « Baudouin assassin » sur la statue équestre de Léopold II à Bruxelles en 2013 et l’érection d’un mausolée en hommage au maréchal Rodolpho Graziani à Affile, près de Rome, en 2012) ou encore leurs réappropriations par des artistes (comme l’action d’Edwige Aplogan qui, prolongeant et exportant le geste de Christo, drape les principaux monuments de la ville de Cotonou). Produits d’études anthropologiques, historiques ou sociologiques, les articles réunis ici chercheront à mettre au jour les facettes contrastées du rapport aux monuments en Afrique. De cette manière, ce numéro se veut non seulement une contribution aux réflexions sur les usages de l’art dans les espaces publics, mais souhaite également affirmer l’importance d’une anthropologie « dans et de la ville » (Agier 1999, 2009). 

Bibliographie

  • AGIER, Michel, 1999, L´invention de la ville. Banlieues, townshisp, invasions et favelas, Éditions des Archives Contemporaines.
  • 2009, Esquisses d’une anthropologie de la ville. Lieux, situations, mouvements, Academia-Bruylant.
  • ATONDI-MONMONDJI, Lecas, 2006, Pouvoir congolais et révisionnisme postcolonial : Le cas Pierre Savorgnan de Brazza, cours donné à la Faculté de Lettres de Brazzaville, 27/09/2006,
  • BERNAULT, Florence, 2010, « Colonial bones : The 2006 burial of Savorgnan de Brazza in the Congo », African Affairs, n°109 : 367-390.
  • CANDAU, Joël, 2005 Anthropologie de la mémoire, Armand Colin.
  • CROUZEL, Ivan, 2000, « La "renaissance africaine" : un discours sud-africain ? », Politique africaine, n°77 : 171-182.
  • DE JONG, Ferdinand & FOUCHER, Vincent, 2010, « La tragédie du roi Abdoulaye ? Néomodernisme et renaissance africaine dans le Sénégal contemporain », Politique africaine, n°203 : 187-204.
  • DE JORIO, Rosa, 2003, « Narratives of the Nation and Democracy in Mali : A View from Modibo Keita’s Memorial », Cahiers d’Études africaines, n°172 : 827-855.
  • DESLAURIER, Christine & ROGER, Aurélie dir., « Passés coloniaux recomposés. Mémoires grises en Europe et en Afrique », Politique africaine, n°102.
  • ELLEH, Nnamdi, 2002, Architecture and Power in Africa, Westport, Praeger.
  • FABRE, Daniel & IUSO, Anna dir., 2010, Les monuments sont habités, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, coll. « Ethnologie de la France ».
  • FOUÉRÉ, Marie-Aude dir., 2010, « Jeux de mémoires », Cahiers d’Études africaines, n°197.
  • GREANI, Nora, 2013, Art sous influences. Une approche anthropologique de la créativité contemporaine au Congo-Brazzaville. Thèse de doctorat en Anthropologie sociale et culturelle sous la direction de Jean-Loup Amselle, EHESS/Paris.
  • HOBSBAWM, Éric & ROGER, Terence dir., 2012, The invention of tradition, Cambridge University Press.
  • HUYSSENS, Andreas, 2003, Present Pasts. Urban palimpsests and the politics of memory, Stanford University Press.
  • JEWSIEWICKI, Bogumil dir., 2004, « Réparations, restitutions, réconciliations entre Afriques, Europe et Amériques », Cahiers d’Études africaines, n°173-174.
  • L’Homme et la société, 2002, « Ville et monument », n° 4.
  • LOSSAU, Julia & STEVENS, Quentin dir., 2014, The uses of art in public space, Routledge. 
  • MARSHALL, Sabine, 2009, Landscape of Memory : Commemorative Monuments, Memorials and Public Statuary in Post-Apartheid South Africa, Brill.
  • MARTIN-GRANEL, Nicolas, 2010, « "Abracadabrazza" ou le roman du Mémorial Pierre Savorgnan de Brazza », Cahiers d’Études africaines, n° 197 : 293-306.
  • MASSU, Claude, 2011, Le Vietnam Veterans Memorial à Washington, D.C. (1982) et la crise du monument contemporain, Actes de la journée d’études « La monumentalité urbaine », HiCSA, 04/11/11, [En ligne], URL : http://hicsa.univparis1.fr/documents/pdf/MondeRomainMedieval/Art%20CMassu.pdf.
  • MBEMBE, Achille, 2006, « Que faire des statues et monuments coloniaux ? », Africultures, [En ligne], URL : http://www.africultures.com/php/?nav=article&no=4354.
  • MURRAY, Martin, 2013, Commemorating and forgetting : Challenges for the new South Africa, University of Minnesota Press.
  • NOBLE, Jonathan Alfred, 2011, African Identity in Post-Apartheid Public Architecture. White skin, black masks. Ashgate publishing.
  • SANWANDA, Biggie, 2013, Postcolonial monuments and public sculpture in Zimbabwe, Thèse de doctorat en Philosophie, Rhodes University.
  • TONDA, Joseph, 2010, « Le Mausolée Brazza, corps mystique de l’Etat congolais ou corps du "négatif" », Cahiers d’Études africaines, n°198-199-200 : 799-821.
  • TONDA, Joseph  & YENGO, Patrice, 2010, Atterrissage sorcier à Pointe-Noire ?, Conférence dans le cadre des mercredis du film ethnographique, 26/05/2010, Cité nationale de l’histoire de l’immigration.
  • PETERSON, Derek R., GAVUA, Kodzo & RASSOOL, Ciraj, 2015, The politics of heritage in Africa. Economies, Histories and infrastructures, Cambridge University Press. 

Modalités de soumission

Dans un premier temps, les propositions d’articles sous la forme d’un résumé peuvent être envoyées

jusqu’au 1 mars 2016

à l’adresse suivante : nora.greani@gmail.com

Les contributeurs/trices retenu(e)s au plus tard à la mi-mars seront ensuite invité(e)s à envoyer leur texte pour le 1 juin 2016. Les articles feront l’objet d’une évaluation selon la procédure en vigueur au sein du comité de rédaction de la revue.

Coordination

  • Nora Greani. Chercheur associée au Labex CAP, Chargée d’enseignement à l'Université de Nice-Sophia Antipolis, Faculté des Lettres, Arts et Sciences Humaines – Département Ethnologie-Anthropologie 

Rédacteur en chef 

  • Jean-Loup Amselle

Comité de direction 

  • Michel Aghassian
  • Marc Augé
  • Georges BalandieR
  • Jean Copans
  • Elikia M’Bokolo
  • Henri Moniot
  • Emmanuel Terray

Rédaction 

  • Martine Morier
  • Nadège Chabloz

Comité de rédaction

  • Roger Botte. CNRS
  • Cécile Canut. Université Paris Descartes
  • Anne Doquet. IRD
  • Yvan Droz. Institut universitaire d'études du développement, Genève
  • Éloi Ficquet. EHESS
  • Michela Fusaschi. Université de Rome 3
  • Alain Gascon. Université Paris VIII
  • Michel Giraud. CNRS
  • Benoît Hazard. CNRS
  • Bogumil Jewsiewicki. Université Laval, Québec
  • Marc Le Pape. CNRS
  • Anthony Mangeon. Université Paul-Valéry, Montpellier III
  • Nicolas Martin-Granel. CNRS
  • Anne Mélice. Université de Liège
  • Marie Miran-Guyon. EHESS
  • Abderrahmane Moussaoui. Aix-Marseille Université
  • Joseph Tonda. Université Omar Bongo, Libreville
  • Claudine Vidal. CNRS

Datas

  • terça, 01 de março de 2016

Palavras-chave

  • monuments, patrimoine, mémoire, représentation

Contactos

  • Nora Greani
    courriel : nora [dot] greani [at] gmail [dot] com

Fonte da informação

  • Nora Greani
    courriel : nora [dot] greani [at] gmail [dot] com

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Para citar este anúncio

« Monuments publics. Entre permanences et renaissances africaines », Chamada de trabalhos, Calenda, Publicado terça, 02 de fevereiro de 2016, https://doi.org/10.58079/uav

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