AccueilMusique et attachement : lieux, territoires et scènes musicales

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Musique et attachement : lieux, territoires et scènes musicales

Music and attachment - places, territories and musical stages

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Publié le mardi 23 février 2016

Résumé

Depuis une décennie les travaux de géographes francophones sur la musique, mobilisant les avancées des recherches anglophones et des terrains européens et internationaux, ont démontré la pertinence de la « géomusique » à la fois comme champ à part entière de la géographie et comme épistémologie féconde dans le tournant culture de la géographie. Les UMR Passages (Bordeaux) et Pacte (Grenoble) proposent un appel à communication pour une journée scientifique qui aura lieu à Bordeaux le 16 septembre 2016 sous le titre suivant : « Musique et attachement. Lieux, scènes et territoires musicaux ». Cette proposition s'inscrit dans un travail autour de l'espace mobile, imaginant une approche dialectique de l'attachement.

Annonce

La journée se tiendra le 16 septembre 2016.

Université Bordeaux Montaigne, UMR 5319 PASSAGES (ex ADESS)

Argumentaire

Depuis une décennie les travaux de géographes francophones sur la musique, mobilisant les avancées des recherches anglophones et des terrains européens et internationaux, ont démontré la pertinence de la "géomusique" à la fois comme champs à part entière de la géographie, mais aussi comme épistémologie féconde dans le tournant culturel de la géographie.

Les  publications francophones qui ont abordé cette thématique (Romagnan, 2000 ; Raibaud, 2005, 2009, 2011 ; Canova, Bourdeau, Soubeyran, 2014 ; Soubeyran, 2015) admettent quelques lacunes, tandis que les travaux à l’international offrent un spectre d’analyse plus large, comme le montrent les synthèses théoriques et méthodologiques sur « l’état de l’art » (Connell & Gibson, 2003 ; Bennett & Hawkins, 2004 ; Guiu, 2006 ; Canova, 2013 et 2014).

En premier, le versant quantitatif dont les liens avec les travaux sur les réseaux et la notion de complexité ont été ouverts (Séminaire CartoMuse - Avignon, 2014). Les premières propositions des diffusionnistes de Berkeley (p.e. Carney, 1978 ; Ford, 1984) avaient ouvert un champ jugé stérile par les humanistes (Smith, 2000). Pourtant, les méthodes quantitativistes ont perduré depuis le changement de paradigme et, bien qu’actualisées, nourrissent aujourd’hui les études culturelles en géographie.

En deuxième, l’aménagement du territoire qui a, par exemple, peu exploité les notions de quotidien et de ruralité, dont l'imaginaire s'incarne par une recrudescence du revivalisme dans un contexte d'interrogation sur les nouveaux enjeux environnementaux. Ici encore, les travaux anglophones des années 1980 sur la ruralité (Brown, 1980 ; Woods & Gritzner, 1981) ont été repris dans les synthèses épistémologiques, mais les études de cas n’ont pas vraiment emboîté le pas. Aussi, les travaux de De Nora (2000) sur le quotidien musical ont affirmé l’heuristicité de cet espace-temps spécifique.

En troisième lieu, la thématique des mobilités encore sous-exploitée par les contributions de ces dernières années. Qu’elle soit considérée à l’échelle touristique (Kruse, 2003) ou qu’elle ne concerne que les artistes en tournée (Krim, 1998), les études contemporaines des déplacements auraient à y gagner.

Nous proposons donc un appel à communication pour une journée scientifique qui aura lieu à Bordeaux, le 16 septembre 2016 sous le titre suivant : « Musique et attachement. Lieux, scènes et territoires musicaux ». Cette proposition s’inscrit autour de deux thèmes proches du concept « d’espace mobile » (Denis Retaillé), en imaginant une approche dialectique de l’attachement. 

L’ancrage : la musique comme générateur d’émotions qui donnent des «raisons d’être là, de s’enraciner ».

La mobilité : la musique comme générateur d’émotions qui donnent des « raisons de partir, de migrer, de revenir ».

Trois axes sont proposés aux contributeurs

Axe 1 - Instabilité des territoires musicaux

En continuité des travaux cités, et autour de la thématique « musique et territoires », on envisagera la musique (les musiques) sous l’angle de la relation fixité/fluidité, interrogeant les processus de territorialisation (Gibson & Connell, 2005). L’approche des territoires par la géomusique questionne la fixation des imaginaires géographiques et ce que lui oppose la réalité mouvante des pratiques spatiales, tension dont les musiques apparaissent comme les géoindicateurs, que ce soit à travers l’expression des sentiments nationaux dans les musiques dites classiques des XIXème et XXème siècles (Sternberg, 1998 ; Lévy, 1999 ; Pailhé, 2004), dans les musiques populaires, en particulier européennes (Canova, 2010 ; Guiu, 2009) ou au cœur d’une sono mondiale, influencée par les « musiques noires » (Parent, 2011 ; Raibaud, 2011). La fixité musicale serait-elle le propre de la territorialisation ? Un pouvoir, un nom, une loi, une musique ? Quel rôle joue la musique dans cette « définition » (de finire, arrêter) ? Peut-on lui opposer une fluidité musicale, propre de la territorialité ? L’instabilité des processus culturels est un angle d’attaque pour penser cette dynamique. Comment inscrire la musique dans ce questionnement géographique ? À quel instant « l’attachement » signe-t-il l’arrêt (provisoire ou définitif) des transformations des territoires musicaux ?

Axe 2 - Historicité des territoires musicaux : tradition, folklorisme, revivalisme

L’existence d’un fort revivalisme des musiques populaires est signalée par les chercheurs de toutes disciplines sur des aires culturelles opérant à une échelle mondiale (Johansson & Bell, 2009), participant parfois même à travers une « sono mondiale » au maintien de ces aires, qu’on peut légitimement considérer comme des fictions (Whiteley, Bennett, Hawkins, 2004). À l’exemple du travail réalisé en France par l’ethnomusicologue Yves Guilcher, on cherchera à comprendre, dans une vision diachronique, comment se sont recomposés et articulés les territoires musicaux aux XIXème et XXème siècle et comment ils se recomposent aujourd’hui dans un contexte « post » (postmodernité, postcolonialisme...).

Seront privilégiées dans cette approche les pratiques culturelles « ordinaires » en s’interrogeant en particulier sur des pratiques musicales de masse moins étudiées par les chercheurs (dont chorales, musique et danse traditionnelles, harmonies et fanfares, musiques de rue) et sur les raisons de leur faible visibilité dans le champ des politiques culturelles et des médias. Que peuvent nous dire ces pratiques musicales de la recomposition des territoires européens, et en particulier des territoires que les acteurs considèrent eux-mêmes comme « ruraux » ? Comment interagissent-elles avec de nouveaux récits globalisants tels que le réchauffement climatique, la dégradation de l’environnement, le terrorisme et le communautarisme, l’accélération des migrations ou le dérèglement de l’économie mondiale, qui performent de façon continuelle les idéologies nécessaires au consensus local ? À travers le calendrier de la répétition, du concert, du bal, de la fête de l’assemblée générale associative se construit et s’incorpore l’attachement au lieu. On étudiera attentivement ces conditions du compromis local en s’interrogeant sur l’autonomie des amateurs et de leur goût musical (voir les travaux d’Antoine Hennion), souvent construit à travers le récit des « origines », en rapport avec la construction et la reproduction des territoires musicaux.

Axe 3 - Scènes et lieux musicaux

Dans cet axe on s’interrogera sur la spatialité des musiques et des musiciens eux-mêmes, toujours entre fixité et fluidité, entre ancrage et mobilité. On s’interrogera sur la manière dont les scènes musicales créent des conditions d’antimondes éphémères dans les festivals, fêtes musicales, raves ou freeparties (Boutouyerie, 2006 ; Kong, 2006 ; Guibert & Hein, 2007 ; Saldanha, 2005). Cela questionnera également les musiciens en tournée et les déplacements plus généralement que suppose ce genre d’événements. À l’inverse, on s’interrogera sur les espaces de pratiques (lieux de répétitions et d’apprentissages) et sur le fait qu’ils fonctionnent comme des « maisons » (maisons des Basques, des Bretons, mais aussi maisons-des-hommes, par exemple dans les musiques actuelles, le chant pyrénéen, le cor de chasse), créant les conditions d’attachement au territoire par la médiation de lieux (équipements), matériellement inscrits dans l’espace, et consacrés à la musique (Hudson, 2006 ; Leyshon, 2009). On cherchera à comprendre comment certaines musiques s’approprient l’espace public au point d’en devenir l’élément central à certaines occasions (par exemple les musiques amplifiées lors de la fête de la musique du 21 juin en France et en Europe), ou comment dans l’espace plus traditionnel du village ou de la petite ville, les défilés musicaux continuent à circonvenir le territoire, participant à la commémoration communautaire et à l’attachement des individus aux lieux.

Bibliographie

BENNETT A.; HAWKINS S., 2004, Music, space and place, Sheila Whiteley, Aldershot.

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Modalités de soumission

Proposition de communication

Les propositions de communication sont à envoyer avant le 10 juin 2016 

 à Nicolas CANOVA, canovanicolas@yahoo.fr et Yves  RAIBAUD, yves.raibaud@cnrs.fr

Sélection de communication pour publication

La publication d’une sélection de communications est prévue en mars 2017 dans un numéro spécial de la revue L’Information Géographique (direction éditoriale Denis Retaillé). Les textes définitifs doivent être adressés

pour le 16 septembre dernier délai

à Nicolas CANOVA, canovanicolas@yahoo.fr et Yves  RAIBAUD, yves.raibaud@cnrs.fr

Responsables 

  • Nicolas CANOVA, UMR Pacte , ENSAP de Lille [canovanicolas@yahoo.fr]
  • Yves  RAIBAUD, UMR Passages, Université  Bordeaux  Montaigne [ yves.raibaud@cnrs.fr]

Comité scientifique

  • Jean-Pierre Augustin, Pr géographie,Passages, Université Bordeaux Montaigne
  • Philippe Bourdeau, Pr géographie, Pacte, Université Grenoble-Alpes
  • Nicolas Canova, MA géographie, Pacte, ENSAP de Lille.
  • Yaël Epstein, Directrice du Centre des Musiques Traditionnelles Rhône-Alpes
  • Myriam Houssay-Holzschuch, Pr géographie, Pacte, Université Grenoble-Alpes
  • Lucas Manassi Panitz, géographe, Universidade Federal de Pelotas, Brésil
  • Thomas Perrin, Mcf aménagement et urbanisme, TVES, Université dede Lille 1
  • Yves Raibaud, Mcf HDR géographie, Passages, Université Bordeaux Montaigne
  • Denis Retaillé, Pr géographie, Passages, Université Bordeaux Montaigne
  • Anne Volvey, Pr géographie, Discontinuités, Université d’Artois

Lieux

  • Maison des Suds, 12 esplanade des Antilles
    Pessac, France (33607)

Dates

  • vendredi 16 septembre 2016
  • vendredi 10 juin 2016

Mots-clés

  • musique, mobilité, pratique sociale, pratique culturelle, migration, rural, urbain

Contacts

  • Yves Raibaud
    courriel : yves [dot] raibaud [at] cnrs [dot] fr
  • Nicolas Canova
    courriel : canovanicolas [at] yahoo [dot] fr

Source de l'information

  • Yves Raibaud
    courriel : yves [dot] raibaud [at] cnrs [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Musique et attachement : lieux, territoires et scènes musicales », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 23 février 2016, https://doi.org/10.58079/ud4

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