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Changes in the myth of DNA
Mutations du mythe de l'ADN
Published on Thursday, October 27, 2016
Abstract
L'ADN comme support de l'information héréditaire est fortement investi du point de vue symbolique et convoque notamment les notions d'identité, de programme et de pérennité. Afin de tenter de décrire le plus largement possible le statut symbolique de l'ADN et définir au mieux comment les évolutions scientifiques et sociales modifient, ou au contraire laissent intacts, les récits sur l'ADN, nous ouvrons un espace de réflexion ouvert à tous, sous la forme de journées d’étude interdisciplinaires.
Announcement
Argumentaire
La fonction originale de l’ADN en tant que support de l’information héréditaire constitue indubitablement la découverte la plus importante du siècle écoulé en biologie. La prégnance ontologique de cette molécule lui a valu d’être fortement investie au niveau symbolique. Différentes modalités d’investissement symbolique, de la part des chercheurs mais aussi de l’homme ordinaire, ont conféré une dimension proprement mythologique à cette molécule. Ceci conduit certains auteurs à qualifier le génome de patrimoine tout à la fois matériel et immatériel. A l’heure où dans le discours médiatique et politique, bruissent des questions identitaires individuelles et collectives, il nous semble approprié de nous interroger sur les façons dont cette molécule biologique dans sa dimension mythologique est convoquée dans les discours et les imaginaires sociaux. Chaque individu des sociétés industrialisées intègre probablement la notion d’ADN à un certain niveau de la définition et de la compréhension de soi et de l’altérité, et certaines découvertes ou redécouvertes récentes peuvent mettre à mal cette part scientifico-mythologique de la définition du soi. On s'attachera au questionnement sociologique et anthropologique du recours direct à la technologie génomique dans les constructions identitaires (biosocialités, tests ADN et généalogies génétiques), mais aussi plus largement à tenter de décrire le statut symbolique de l’ADN et essayer de définir de quelles manières certaines découvertes récentes (ou déjà anciennes) décalent, modifient ou au contraire laissent intact, parfois contre la logique, le récit sur l’ADN. Nous pensons que cet exemple peut constituer un bon paradigme de la relation entre science et société. Cette relation est circulaire, loin d’être polarisée uniquement du monde scientifique vers la société; les modifications des pratiques et des imaginaires sociaux façonnent à leur tour pratiques et imaginaires scientifiques.
Les expressions du type « c’est dans notre ADN » fleurissent dans les discours personnels, artistiques, le jargon publicitaire et le langage politique. Dans ces formulations, les idées d'identité, de programme et de pérennité sont largement invoquées comme autant de façons de célébrer une dimension essentielle de l’ADN. De par son caractère soi-disant temporellement immuable, l’ADN est pris pour ce qui se transmet et reste inchangé. De façon remarquable, cette image symbolique est en contradiction avec le sens que la biologie néo-darwinienne a donné à ce support matériel de l’information héréditaire: l’ADN est au cœur du fonctionnement du vivant certes car il permet une transmission suffisamment fiable de l’information héréditaire, mais aussi et de façon centrale, car cette molécule est capable de subir des modifications aléatoires. C’est la condition première d’une évolution, une propriété immanente du vivant.
L’impact de la génétique sur les représentations sociales suscite chez certains une révolte contre un déterminisme génétique absolu qui priverait l’homme de la maîtrise de son destin. Cette réaction d’ordre politique ou philosophique contre le « tout-génétique » a vu d’un bon œil la (ré)émergence dans le champ biologique de l’importance des phénomènes épigénétiques. Ceux-ci correspondent notamment mais pas exclusivement à des modifications chimiques transmissibles mais réversibles des composants protéiques et nucléiques des chromosomes en partie sous l'influence de l'environnement. Aussi étrange que cela puisse paraître, il existe des exemples historiques qui font voir le génétique comme idéologiquement « à droite », et l’épigénétique comme davantage socialiste (cf. affaire Lyssenko). Il est cependant important de comprendre que la dimension déterministe contre laquelle certains s’élèvent dans la science génétique n’est pas moins à l’œuvre dans les théories épigénétiques.
Parmi les fruits scientifiques récoltés par la génomique et une nouvelle science qu’on appelle métagénomique, le moindre n’est pas la réalisation de l’étendue de nos relations symbiotiques au monde microbien. La métagénomique s’inscrit dans le cortège des approches big data et permet d’avoir accès de façon indirecte à la diversité biologique notamment microbienne d’un lieu, modifiant ainsi en profondeur notre perception de la composante microbienne du monde. Jusqu’au 19e siècle, le monde microbien était absent des esprits, alors qu'au cours du siècle dernier s’est construit une vision hygiéniste de ce monde microbien. La réalisation de la part du microbiome est propre à bouleverser notre représentation du monde et de notre individualité, puisque les frontières du moi biologique sont devenues floues car je suis une sorte de consortium d’organismes. Et ceci est vrai aussi de cet arbre, de l’oiseau posé sur sa branche et du lichen sur son tronc, troublant l'appréhension de l'environnement par ces catégories sémantiques classiques. Le repli sur l’ADN pour tenter de reconquérir chaque moi biologique pur/unitaire est vain. La notion de pangénome selon laquelle une part importante du patrimoine génétique est un bien commun partagé par différentes espèces bouleverse cette représentation de l’ADN comme essence. La microbiologie est actuellement le champ de la biologie porteur de grands bouleversements au niveau fondamental mais peut-être aussi dans la sphère symbolique.
Nous proposons donc d'explorer plus particulièrement deux thèmes qui viennent achopper contre la dimension symbolique de l’ADN et le rôle de cette dimension dans la définition/connaissance de soi. L’un tient à l’ADN comme chose inaltérable, l’autre à l’ADN comme essence. Ces deux dimensions ne résistent pas à l’analyse logique et c’est pour cette raison qu’il nous paraît d’un grand intérêt de nous questionner sur leur place présente et future dans les imaginaires sociaux. Pour ce faire, nous proposons une réflexion sous la forme de journées d’étude interdisciplinaires afin de provoquer des rencontres entre chercheurs issus d’horizons disciplinaires différents. La thématique du mythe de l'ADN incite à recourir à des disciplines aussi diverses que la biologie, l'anthropologie, l'histoire et la philosophie des sciences. Le projet n'est pas une confrontation classique des sciences humaines et des sciences biologiques, où les secondes seraient l'objet critique des premières, mais une interrogation en commun sur un objet matériel et culturel qui, un demi-siècle après son invention, prend toute sa place opérante dans nos imaginaires.
Programme
Lundi 5 décembre
- 10h10-10h50 Ouverture
- 10h50-12h00 Jean-Luc Bonniol, anthropologue Donner corps à l’invisible. L’entrée en scène de l’ADN dans l’imaginaire des origines
- 13h30-14h50 Claude-Olivier Doron, historien et philosophe des sciences Racisme 2.0 : identités politiques et biodiversité humaine à l’heure d’internet
- 14h50-16h00 Evelyne Heyer, anthropologue généticienne Interactions entre culture et génétique dans l’évolution de l’Homme
- 16h30-17h40 Purificación López-García, microbiologiste L’ADN et l’histoire évolutive : de la diversité microbienne à l’origine des eucaryotes
- 17h40-18h20 Discussion
Vendredi 9 décembre
- 10h40-11h20 Ouverture
- 11h20-12h30 Philippe Huneman, philosophe de la biologie ADN, déterminismes et équivoques de la prédiction : la double nature du gène
- 14h00-15h20 Andràs Pàldi, biologiste généticien Hérédité, génétique et épigénétique : quel rapport ?
- 15h50-17h00 José Carlos Gutiérrez Privat, philosophe Écritures moléculaires : réflexions sur le caractère « textuel » de l’ADN
- 17h00-17h40 Discussion
Subjects
- Science studies (Main category)
- Society > Science studies > History of science
- Society > Science studies > Sociology of science
- Society > Science studies > Philosophy of science
Places
- Amphithéâtre de la Maison des Suds - Campus universitaire, 12 Esplanade des Antilles
Pessac, France (33607)
Date(s)
- Monday, December 05, 2016
- Friday, December 09, 2016
Attached files
Keywords
- ADN, génétique, évolution, diversité, identité, biosocialité, hérédité, déterminisme, textualité
Contact(s)
- Sonia Dheur
courriel : sonia [dot] dheur [at] cnrs [dot] fr - Sven Saupe
courriel : sven [dot] saupe [at] ibgc [dot] cnrs [dot] fr
Reference Urls
Information source
- Sonia Dheur
courriel : sonia [dot] dheur [at] cnrs [dot] fr
License
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To cite this announcement
« Changes in the myth of DNA », Study days, Calenda, Published on Thursday, October 27, 2016, https://doi.org/10.58079/w0y