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Donner une deuxième chance

Giving a second chance

Contexte, cadre et conditions des dispositifs d'accompagnement vers la qualification et l'emploi

Context, framework and conditions of accompaniment measures for qualifications and employment

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Publié le jeudi 16 février 2017

Résumé

Il existe de nombreux dispositifs, dits de « deuxième chance », visant à encadrer des jeunes non qualifiés et « éloignés de l’emploi » dans la perspective de les conduire à la qualification et/ou à l’emploi. Ceux-ci ont la particularité de ne procurer aucune qualification. Ils consistent à transmettre un ensemble de compétences, d’attributs, de qualités dont les mauvaises conditions de socialisation, et particulièrement de scolarité, n’ont pas permis l’inculcation et qui sont supposés permettre un accès plus aisé à la qualification ou à l’emploi.

Annonce

Coordination

par Benjamin Denecheau et Gérald Houdeville

Argumentaire 

Il existe de nombreux dispositifs, dits de « deuxième chance », visant à encadrer des jeunes non qualifiés et « éloignés de l’emploi » dans la perspective de les conduire à la qualification et/ou à l’emploi. Ceux-ci ont la particularité de ne procurer aucune qualification. Ils consistent à transmettre un ensemble de compétences, d’attributs, de qualités dont les mauvaises conditions de socialisation, et particulièrement de scolarité, n’ont pas permis l’inculcation et qui sont supposés permettre un accès plus aisé à la qualification ou à l’emploi.    
On peut qualifier cette activité d’ « accompagnement », notion qui s’est imposée dans le secteur de l’insertion, de la formation et de l’éducation. On peut le constater en termes de modalités de mise en œuvre : des procédures de sélection des publics, aux stages effectués en entreprise, en passant par la mise au travail de soi normée autour de l’idée de projet notamment (projet professionnel, projet d’avenir) dans un rapport étroit aux attentes du marché du travail à l’égard des salariés d’exécution. C’est aussi vérifiable en matière de principes censés légitimer ces actions : individualisation, autonomie, responsabilisation, empowerment.

Des variations existent tout de même selon l’organisme qui s’efforce de faire ce travail d’imposition symbolique, sous l’aspect par exemple des moyens dont celui-ci dispose pour le mener, notamment de l’étendue de l’enveloppement dans lequel il peut enserrer les personnes (de l’internat aux rendez-vous ponctuels). Cet accompagnement peut également se traduire par différentes postures ou pratiques pouvant être interrogées au regard des parcours et des situations des agents chargés de le mettre en œuvre. Il est nécessaire de sortir d’une vision techniciste de l’emploi (souvent opposé au travail comme l’ensemble des mouvements d’entrée et de sortie du marché du travail) pour prendre en compte l’aspect moral de l’emploi, des normes et des valeurs qui structurent fondamentalement toutes les actions visant à le rendre accessible à tous. Il s’agit d’interroger par là l’intérêt que les chercheurs portent aujourd’hui aux soft skills par opposition aux hard skills.

Plusieurs thématiques peuvent être déclinées. On peut s’interroger, par exemple, sur la genèse de cette formule et questionner l’évidence de son existence actuelle. Comment a-t-elle réussi à s’imposer ? Par quels canaux ? Suivant quelles étapes ? Les auteurs ayant travaillé dans ces domaines soulignent souvent la rupture que constitue « l’accompagnement » comme mode de prise en charge par rapport à des formules d’encadrement plus traditionnelles dans le travail social. Un tel point de vue ne sous-estime-t-il pas des formes de continuité ? Quel récit peut-on faire de l’histoire de cet espace de l’insertion, en France, depuis 40 ans, et comment la formule de l’accompagnement revendiquée aujourd’hui y prend-elle place ?
A côté de la posture consistant à croire au caractère inédit du type de relation instaurée entre formateurs et jeunes dans le cadre de « l’accompagnement », il existe son double inversé, à savoir considérer cette relation comme inchangée. Est-elle à tout point de vue la même depuis les premières politiques publiques d’accès à l’emploi en faveur des jeunes ─ les « Contrats emploi formation » inspirés de l’apprentissage sont créés en juin 1975, les « Pactes nationaux pour l’emploi des jeunes » sont en vigueur de 1977 à mai 1981 ─ jusqu’à la « Garantie jeunes », en 2015, que l’Etat a chargé les Missions locales, créées au début des années 1980, de mettre en œuvre ?            
Il y a là probablement à réfléchir au contexte dans lequel chacune de ces politiques, et les dispositifs qui en relèvent, prend place, les contextes de l’emploi ─ au milieu des années 1970 et au milieu des années 2010 ─ ne sont sans doute pas entièrement substituables. Ceux de l’école et des scolarités non plus d’ailleurs. La situation des « sans qualification », particulièrement, n’ayant pas la même signification aujourd’hui et hier. L’évolution des normes sociales vis-à-vis de l’emploi, de la détention d’un diplôme et de qualifications, ainsi que la justification des politiques publiques mises en œuvre sur ces questions (qu’il s’agisse de viser la réduction d’un coût économique ou celle des inégalités sociales), ont pu impacter les moyens, le fonctionnement de ces dispositifs et les objectifs qui leur sont assignés, principalement l’insertion sociale et professionnelle des jeunes éloignés de l’emploi. Ainsi, cet objectif d’insertion sur le marché des emplois peu qualifiés est à interroger au regard des possibilités estimées par les agents en charge des dispositifs et par les jeunes eux-mêmes aujourd’hui mais aussi, éventuellement, en fonction des époques.

Il ne faut pas exclure, pour mieux appréhender les réalités des dispositifs qui ne qualifient pas mais accompagnent vers la qualification, ceux qui qualifient. Nous songeons ici à ceux, à l’instar des micro-lycées (qui accueillent, en théorie, les mêmes publics que les dispositifs et les actions de « formation » non qualifiants), qui se placent différemment dans le champ de la formation puisqu’ils visent la préparation, par exemple, au baccalauréat avec un objectif d’émancipation plus que d’insertion et des pratiques plus proches de l’école. Cela permettrait de comparer des dispositifs ou des actions (qualifiants/non-qualifiants) entre eux qui visent à accueillir les jeunes « sans qualifications » mais avec des modèles et des conceptions différents.

Dans un texte souvent cité[1], le sociologue américain Howard Becker note que la réponse des sociologues à la question de savoir si l’efficacité des dispositifs mis en place afin que des individus changent de comportements, d’attitudes, déçoit le plus souvent leurs promoteurs. Reste à voir quelles formes prennent les modalités contemporaines d’évaluation et de quelles manières elles s’articulent aux actions conduites. Becker souligne que la perspective sociologique interroge davantage le fonctionnement de ces dispositifs plutôt qu’elle mesure la capacité de ceux-ci à atteindre leurs objectifs dans un souci strictement évaluatif. Qu’en est-il donc en matière de dispositifs d’accompagnement vers la qualification et l’emploi ? Comment leurs agents s’emploient-ils à obtenir des personnes dont ils ont la charge d’encadrer des comportements, des attitudes, des conduites de vie plus généralement, déterminés ? Y parviennent-ils toujours ? Quelles limites rencontre leur action ? Quels effets prévus et surtout non prévus produit-elle ?

Si les dispositifs peuvent être étudiés par une approche micro, ils peuvent aussi être considérés comme prenant place dans différents espaces. Comment s’inscrivent-ils dans des territoires, qui sont aussi des bassins d’emplois et de formations, dont les caractéristiques socio-économiques des habitants et la configuration des espaces ruraux et/ou urbains peuvent impacter la constitution des publics de formation ? Les dispositifs s’inscrivent également (et temporairement) dans les espaces de socialisation des jeunes. Quels en sont les effets sur les actions d’accompagnement ? L’aspect des effets de la prise en charge interroge la manière dont les publics visés et/ou finalement accueillis dans les dispositifs répondent aux sollicitations institutionnelles, aux encouragements et aux découragements. Constituent-ils effectivement le public homogène visé (les « sans qualification » par exemple) ? Qu’est-ce qui est de nature à expliquer les manières suivant lesquelles les personnes « accompagnées » s’engagent ou non, totalement ou partiellement, temporairement ou pour un temps plus long ?

Autant de questions qui, parmi d’autres, peuvent sous-tendre les contributions à ce numéro thématique. Celui-ci entend en tout cas contribuer à éclairer toutes ces questions. A cet effet, pourront y trouver leur place des contributions de sociologues, de juristes ou encore d’historiens, d’économistes qui, tour à tour, de leur point de vue et dans des contextes sociopolitiques variés, mobilisant enfin des méthodes tant qualitatives que quantitatives, éclaireront le questionnement. Les propositions pourront être issues de terrains de recherche français mais aussi d’autres espaces nationaux.

Bilinguisme

Les propositions d’article peuvent être soumises en français ou en anglais. Les articles soumis en anglais, s’ils sont acceptés, seront ensuite fournis en français par les auteurs.

Consignes aux auteurs

Plus les articles arriveront tôt, plus les échanges avec le comité de rédaction faciliteront leur acceptation.

Les textes des articles sont attendus pour le 15 mai 2017 avec publication envisagée mi 2018.

Des projets d’article devront être envoyés avant le 16 mars 2017 (une page à deux de description de l’article envisagé avec une courte présentation des auteurs).

Il peut être utile de prendre contact auparavant avec les coordinateurs du dossier :   benjamin.denecheau@u-pec.fr ; gerald.houdeville@uco.fr ou avec la rédaction vergnies@cereq.fr

Les articles devront respecter les normes de la revue (cfnote aux auteurs, soit 15 pages maximum http://formationemploi.revues.org/2611
et devront être accompagnés de la liste de vérification remplie : http://formationemploi.revues.org/4441.)

Les projets d’article et les textes définitifs sont à envoyer par courriel à la rédaction : vergnies@cereq.fr   É : +33.4.91.13.28.17.

Références

[1] Howard S. Becker, 2006, "Le soi et la socialisation de l'adulte", Dans : Howard S. Becker, Le travail sociologique, Fribourg, Academic Press Fribourg, pp. 379-397.


Dates

  • jeudi 16 mars 2017

Mots-clés

  • deuxième chance, jeune non qualifié, accompagnement, insertion, formation, éducation, qualification, travail, emploi

Contacts

  • jean-frédéric vergnies
    courriel : vergnies [at] cereq [dot] fr

Source de l'information

  • jean-frédéric vergnies
    courriel : vergnies [at] cereq [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Donner une deuxième chance », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 16 février 2017, https://doi.org/10.58079/wyv

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