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Les écrits de travail en formation

Travel writings and training

Métiers de l'éducation, du travail social et de l'animation

Education professions, social work and animation

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Publié le mercredi 21 mars 2018

Résumé

Ce numéro 52 d’Éducation et socialisation espère interroger les relations entre pratique, formation et formation de formateurs, entre la question des parcours et celle du développement personnel et professionnel, entre acquis de l’expérience, analyse des pratiques et accompagnement au changement, à travers une question somme toute très concrète, celle de l’écrire et du faire écrire en formation.

Annonce

Argumentaire

Prendre pour objet les écrits de travail en formation doit permettre de décrire et d’analyser des pratiques et des représentations liées à l’écriture. L’enjeu est aussi de témoigner et de discuter les apports éducatifs, individuels et collectifs, des écrits produits dans un contexte de formation professionnelle, ou pour le dire autrement, dans un cadre qui leur assigne une visée formatrice, laquelle peut être étendue à l’autodidaxie/l’autoformation. Notre ambition est de mettre à jour des convergences et des divergences entre différents métiers liés au professorat, à l’éducation et au travail social (enseignement, formation, animation, éducation spécialisée, sportive, etc.).

La « culture écrite » implique une attention particulière aux conditions de production et à la diversité des usages de l’écrit. Elle se manifeste dans des objets matériels (supports d’inscription, lieux de stockage de l’écrit notamment) ou immatériels (représentations de l’espace et du temps, organisation de la pensée...). Elle n’exclut pas la question des interactions entre oral et écrit, qu’elle invite à penser au-delà d’une simple opposition et d’une approche séquentielle qui consisterait à identifier des temps consacrés à l’un et à l’autre. Elle appelle à interroger les conceptions de l’écrit, le rapport à l’écrit, les compétences mobilisées dans les pratiques du lire-écrire et leur développement « tout au long de la vie ». Le recours désormais généralisé à la notion de littératie (Fraenkel et Mbodj, 2010 ; Street, 1993 ; UNESCO, 2008) se justifie par l’intérêt d’adopter, à partir de pratiques socialement situées, un regard qui porte sur l’exercice de la pensée, la formation des esprits et le fait d’agir à travers l’écrit. La dimension culturelle de la cognition humaine (Tomasello, 1999) est au cœur du propos : les usages de l’information et la construction des savoirs, la capacité à décrypter des situations, à s’émanciper, à agir en citoyen.ne éclairé.e.

Le titre retenu pour le présent numéro d’Éducation et Socialisation est délibérément polysémique. « Les écrits de travail en formation » désignent à la fois les écrits sur lesquels on travaille et les écrits du milieu du travail. Dans le monde de l’enseignement, du travail social et de l’animation, les formations accordent une large place à l’expérience pratique et les écrits sont considérés comme l’opportunité d’une réflexivité. Dans le quotidien de leur profession, les enseignants, travailleurs sociaux, éducateurs et formateurs d’adultes écrivent des courriers, des projets, des rapports, de simples notes ou de longs bilans, pour eux et pour des destinataires très variés, de sorte que l’écrit relève bien de la pratique et représente une composante centrale, parfois peu prise en compte, de ces métiers.

Le numéroproposé s’inscrit donc dans la lignée d’une abondante littérature :

  • sur l’écriture en formation professionnelle d’une part (par exemple Balcou-Debussche, 2004 ; Champy-Remoussenard, 2006 ; Cros, 2007 ; Ejzemberg, 2005 ; et pour une excellente synthèse sur l’écriture et la professionnalisation dans les métiers de l’humain, voir Crinon et Guigue eds., 2006),

  • sur l’importance de l’écrit et du langage au travail d’autre part (par exemple Beaudet et al., 2016 ; Borzeix et Fraenkel eds., 2001, Boutet, 2008 ; Delcambre, 1997 ; Laborde et al., 2014, Moatty et al., 2004 ; Pène et al. Eds, 2001 ; Rousseau, 2006 ; voir aussi la bibliographie proposée dans la revue Vie sociale, 2009, et, pour un aperçu des premiers travaux, Bigot et Delcambre, 1994).

Il ne s’agit pas ici de mettre en évidence l’ensemble des problématiques traitées. Retenons simplement que, dans la perspective de la professionnalisation, deux types de pratiques scripturales sont distinguées et interrogées, les pratiques d’écriture dite professionnelle et les pratiques de formation professionnelle à et par l’écriture. Ces dernières interpellent les effets de l’écriture en termes de formation, en contexte universitaire en particulier. C’est bien cette question de l’écriture comme « lieu de formation » dans des contextes déterminés qui retiendra notre attention, pour reprendre dix ans après le titre d’un numéro spécial de la revue L’Éducation Permanente (Jobert, dir., 1997), qu’il s’agisse d’écrits de savoir, d’écrire l’agir, d’apprendre à écrire, d’apprendre le/du métier.

Soulignons également qu’un des apports majeurs des travaux existants est de montrer en quoi l’écriture favorise la formation de « praticiens réflexifs » (Schön, 1993). La dimension réflexive de l’écriture et son intérêt en formation ont donné lieu à de multiples études en particulier dans le domaine de la formation des enseignants et des travailleurs sociaux (par exemple Blanc et Varga eds., 2006 ; Crinon eds., 2003 ; Guigue, 1995 ; Dumont et Revuz, eds., 1994 ; Dufays et Thyrion, eds, 2004 ; Léglise ed., 2004, ou les travaux de S. Vanhulle, par ex. 2002). Elles se sont portées sur des pratiques emblématiques : l’approche biographique (Torterat, 2011, 2014), l’analyse des pratiques et le mémoire dit professionnel (Blanc, 2011). Ces études posent des questions qui se situent entre deux pôles, d’une part les savoirs, leur appropriation et leur transformation par l’écriture, d’autre part la subjectivation de l’expérience et la construction de l’identité professionnelle. L’enjeu est d’explorer ce que fait l’énonciation écrite. Les maîtres à penser peuvent aussi bien être ceux de l’écriture ordinaire, comme J. Goody par rapport à la « raison graphique » (1979), que ceux de l’écriture littéraire, comme R. Barthes dont on retient cette ligne : « seule l’écriture a la chance de lever la mauvaise foi qui s’attache à tout langage qui s’ignore » (1967, p. 16).

Dans le cadre de ce numéro dédié aux « écrits de travail en formation », c’est d’abord le travail de l’écriture qui retiendra notre attention, et avec lui, l’intérêt de mettre au travail la question des écrits comme une question-clé de la formation. Concrètement, en quelles circonstances écrit-on ? de quelles façons ? Pour qui ? selon quelles modalités d’évaluations ? seul(e) ou dans le cadre d’un travail collectif ? S’agit-il uniquement de prendre des notes de cours ? de produire des textes universitaires ou professionnels ? Quels types d’écrits, quels genres de texte sont convoqués ? Comment sont-ils définis, selon quels modèles et quelles attentes, par rapport à quels objectifs ? Quels sont les compétences linguistiques et les savoirs mobilisés ? Comment le texte est-il organisé ? Est-il socialisé, partagé avec les enseignant.e.s ou des étudiant.e.s ? Une place est-elle faite à la réécriture ? Comment sont pensés et mis en place l’encadrement, l’accompagnement, voire le tutorat s’il y a lieu ? Quels obstacles se présentent, et comment se manifestent-ils, du côté des étudiant.e.s / stagiaires d’une part, des encadrant.e.s d’autre part ? Dans quelle mesure les caractéristiques sociales des un.e.s et des autres déterminent-elles les pratiques et les représentations liées à l’écriture ? En quoi le milieu professionnel est-il décisif ? Reste-t-il secondaire et en partie dilué, en regard d’enjeux de formation qui se voudraient plus transversaux ? Enfin, quels sont les effets formatifs des dispositifs mis en place et comment les évaluer ?

Par ailleurs, si la réflexivité reste une question de premier plan, ce numéro sur l’écriture en contexte de formation professionnelle entend envisager de manière relativement large la palette des écrits considérés et des pratiques afférentes. Deux grands axes sont à considérer :

1) Les écrits de la formation : écrits d’évaluation, écrits pour soi comme les portfolios et journaux de bord, rapports de stage et mémoires (de recherche, professionnalisant, professionnel, etc.).

Le cas des mémoires est exemplaire, car ils représentent une composante essentielle des formations de Master et posent de manière particulièrement sensible la question de la professionnalisation (Fabre et Lang, 2000) dans des métiers dits « complexes » (Perrenoud, 1999) ; la problématique est, pour le dire rapidement, celle de l’articulation entre savoirs théoriques et savoirs d’action (Barbier, 1996). De tels écrits se définissent en référence à une pratique sur le terrain professionnel, mais aussi et d’abord dans un contexte institutionnel qui leur assigne un rôle formateur – ou qui, de manière plus flottante, leur attribue des vertus propédeutiques sans toujours se donner les moyens d’atteindre ce qui est visé.

À cet enjeu de formation professionnelle s’ajoutent des exigences universitaires. Les écrits sont ainsi pris dans une tension entre deux mondes, entre ce qui est attendu dans le cadre de la formation et ce qui se voudrait utile dans le cadre professionnel (Lillis et Rai, 2012 ; Rinck, 2011). Les attentes sont susceptibles d’entrer en conflit les unes avec les autres, comme lorsque les normes universitaires représentent des attentes de surface qui peuvent mettre en péril les enjeux de formation. Un bon exemple est celui du mémoire dans la formation des enseignants : quand le genre attendu s’identifie à des modèles de la science qui valorisent l’usage des statistiques et des graphiques, quel rôle fait-on jouer à la recherche dans le processus de formation ? En revanche, certaines formations, liées à d’autres professionnalités, accordent une place secondaire à l’écrit : il s’agit d’y apprendre « par corps » et par l’oral plus que par l’écrit (Lebon, 2007).

2) Les écrits professionnels mobilisés en formation : pour ne prendre que deux exemples, le rapport de signalement dans le champ du travail social (Rousseau, 2006 ; Serre, 2008), ou la fiche de préparation de séance pour un enseignant (Cadet et Rinck, eds., 2014).

La mise en relation entre le monde de la formation et du travail se fait en quelque sorte dans le sens inverse par rapport au cas précédent, puisque c’est ici l’usage des écrits du monde du travail qui est jugé formateur. Les modules de formation concernés peuvent se prévaloir d’une utilité directe. Ils consistent à prendre en charge dans la formation la réalité professionnelle du point de vue des pratiques scripturales qui lui sont propres.

Ces pratiques peuvent passer relativement inaperçues dans le milieu du travail (comme l’usage du tableau dans les pratiques enseignantes, aussi étonnant que cela puisse paraître). Elles peuvent par ailleurs ne pas être jugées légitimes en tant qu’objets de formation, précisément du fait de leur statut d’outil et des risques évidents qu’il y a à n’envisager la formation professionnelle qu’en termes d’application de savoirs clé en main et du prêt-à-penser.

Que ces écrits professionnels aient leur place en formation, au titre de la formation professionnelle, pose donc ensemble les questions du pourquoi et du comment. L’enjeu n’est pas seulement pratico-pratique : apprendre à rédiger tel courrier ou tel bilan peut aussi être conçu comme un outil de réflexivité. L’écrit authentique et ordinaire du professionnel peut en effet être compris comme un catalyseur des interrogations sur la profession, la construction et la régulation de l’agir professionnel.

Ce numéro 52 d’Éducation et socialisation espère ainsi interroger les relations entre pratique, formation et formation de formateurs, entre la question des parcours et celle du développement personnel et professionnel, entre acquis de l’expérience, analyse des pratiques et accompagnement au changement, à travers une question somme toute très concrète, celle de l’écrire et du faire écrire en formation.

Modalités de soumission

Les propositions sont à envoyer pour le 30 mai 2018

aux coordinateurs : Francis Lebon (francis.lebon@u-pec.fr), Fanny Rinck (fanny.rinck@univ-grenoble-alpes.fr) et Frédéric Torterat (frederic.torterat@umontpellier.fr) au format suivant : deux pages (de 4000 à 6000 signes). Avec titre, coordonnées institutionnelles, références bibliographiques et 5 mots-clés.

  • Retour des avis : juillet 2018.
  • Article en première version : 10 décembre 2018
  • Retour des évaluations février 2019
  • Article en version définitive : 20 avril 2019

Comité de rédaction

  • Céline Avenel,
  • Sylvain Connac,
  • Souâd Denoux,
  • Richard Etienne,
  • Yveline Fumat (Membre Honoraire),
  • Philippe Gabriel,
  • Jacques Gleyse,
  • Olivier Griffith,
  • Olivia Gross,
  • Hélène Hagège,
  • Pierre Hébrard,
  • Alain Jean,
  • Serge Leblanc,
  • Brigitte Louichon,
  • Eric Maleyrot,
  • Roger Monjo,
  • Valérie Munier,
  • Thérèse Perez-Roux,
  • Yves Soulé,
  • Michel Tozzi (Membre Honoraire),
  • Frédéric Torterat,
  • Sylvain Wagnon,
  • Geneviève Zoïa

Dates

  • mercredi 30 mai 2018

Mots-clés

  • écrit, travail, apprentissage, éducation, socialisation

Contacts

  • Francis Lebon
    courriel : francis [dot] lebon [at] u-pec [dot] fr
  • Frédéric Torterat
    courriel : frederic [dot] torterat [at] umontpellier [dot] fr
  • Fanny Rinck
    courriel : fanny [dot] rinck [at] univ-grenoble-alpes [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • Frédéric Torterat
    courriel : frederic [dot] torterat [at] umontpellier [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Les écrits de travail en formation », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 21 mars 2018, https://doi.org/10.58079/zub

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