AccueilPratiques artistiques contemporaines d'Afrique : formes et enjeux politiques

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Pratiques artistiques contemporaines d'Afrique : formes et enjeux politiques

Contemporary artistic practices in Africa - forms and political issues

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Publié le mercredi 23 mai 2018

Résumé

Interroger les pratiques artistiques contemporaines d’Afrique au prisme du politique, dans une perspective transdisciplinaire et dans le cadre d’un dialogue entre universitaires et praticiens, constituait le principal objectif du programme d’enseignement-recherche « Pratiques artistiques contemporaines d’Afrique : formes et enjeux politiques » (2015-2018). Le colloque de clôture du programme, qui se tiendra sur deux journées, s’organise en deux volets distincts mais perméables et communiquant entre eux grâce à une série de passerelles arc-boutées sur un socle épistémologique commun. Il s’agit en effet de provoquer une réflexion plurielle sur notre héritage historique dont l’ère coloniale constitue un des principaux jalons. Les impensés qu’il charrie jusqu’à aujourd’hui sont véhiculés dans les regards exotisants portés sur les Afriques comme dans le discours de l’opinion et des institutions qui participent à rendre visibles les productions artistiques liées (ou attribuées) au continent et à ses diasporas.

Annonce

Argumentaire général

Interroger les pratiques artistiques contemporaines d’Afrique au prisme du politique, dans une perspective transdisciplinaire et dans le cadre d’un dialogue entre universitaires et praticiens, constituait le principal objectif du programme d’enseignement-recherche Pratiques artistiques contemporaines d’Afrique : formes et enjeux politiques (2015-2018), porté par le laboratoire LAM à Bordeaux. Dans un premier temps, il a été question d’examiner la façon dont les artistes composent avec un héritage historique parfois douloureux et, dans un second temps, nous nous sommes attachées à questionner le paradigme de l’engagement de l’artiste dans la cité aujourd’hui.

Aussi le colloque de clôture du programme, qui se tiendra sur deux journées, s’organisera-t-il en deux volets distincts mais perméables et communiquant entre eux grâce à une série de passerelles arc-boutées sur un socle épistémologique commun. Il s’agit en effet de provoquer une réflexion plurielle sur notre héritage historique dont l’ère coloniale constitue un des principaux jalons. Les impensés qu’il charrie jusqu’à aujourd’hui sont véhiculés dans les regards exotisants portés sur les Afriques comme dans le discours de l’opinion et des institutions qui participent à rendre visibles les productions artistiques liées (ou attribuées) au continent et à ses diasporas.

Le premier volet, intitulé Trajectoires et imaginaires d’objets chargés se déroulera le 17 mai, tandis que le second, intitulé Performance et performativité se tiendra le 18 mai au Musée d'Aquitaine à Bordeaux.

Coordination scientifique

  • Armelle Gaulier
  • Maëline Le Lay
  • Dominique Malaquais
  • Marian Nur Goni
  • Emmanuelle Spiesse

Organisation

  • LAM, Bordeaux avec le soutien de la Fondation Daniel & Nina Carasso et de l’IMAF, Paris

Volet 1 - Trajectoires et imaginaires d'objets chargés

Novembre 2017. Lors d’un discours à Ouagadougou, Emmanuel Macron affirme que "le patrimoine africain ne peut pas être uniquement dans des collections privées et des musées européens. Le patrimoine africain doit être mis en valeur à Paris mais aussi à Dakar, à Lagos, à Cotonou". Six mois plus tard, il missionne deux experts, Felwine Sarr et Bénédicte Savoy, pour envisager des "restitutions temporaires ou définitives" d’œuvres pillées pendant la période coloniale. Si ces mots, ce geste, peuvent laisser espérer qu’enfin seront prises au sérieux les revendications de pays africains spoliés, le risque est grand qu’il ne s’avèrera là que de belles mais creuses paroles.

S’il est sérieux dans sa démarche, l’État français devra impérativement s’inspirer d’initiatives déjà en cours. On pense, notamment – c’était en 2014 – à la décision de tel collectionneur, héritier d’objets pillés lors de la mise à sac de Benin City (Nigeria) par les troupes britanniques en 1897, de rendre ces trésors à la cour du Bénin. À un projet développé par le centre d’art et de recherche Iwalewahaus (Allemagne), qui s’attelle actuellement à la numérisation d’une importante archive, le fonds photographiques d’Ulli Beier, en vue d’un transfert physique de celui-ci vers le Centre of Black Culture and International Understanding (CBCIU) à Oshogbo (Nigeria). Aux recherches et expérimentations de communautés diasporiques dans les Amériques, les Caraïbes et en Europe, qui à l’aide d’outils numériques tentent de se réapproprier des objets conservés sous vitrine afin de les « rendre à la vie ». À de nombreux ateliers et projets participatifs menés par des institutions africaines et européennes, tentant de répondre collectivement aux défis que posent de tels objets. Aux prises de position sur ces questions de nombreux activistes africains, dont, pour n’en citer que deux, l’historienne d’art Peju Layiwola et l’écrivain et blogueur Kwame Opoku.

Comment, aujourd’hui, manipuler les objets dont il est question ici ? Comment, pour qui et à qui raconter les histoires dont ils sont porteurs et témoins ? Et si l’on se réfère souvent aux archives qui les accompagnent en tant que « mines » dont l’exploration peut expliquer en partie leur trajectoire, comment étudier ces archives sans les exploiter ? Comment les déminer, tout en gardant intact leur potentiel contestataire ? Quel rôle peut jouer, dans ces processus, le recours à la fiction et à l’imagination et quelles stratégies artistes, activistes et commissaires mettent-ils en place pour examiner ces problèmes fondamentaux ? Enfin, peut-on « réparer » avec un travail sur l’archive ?

Programme

17 mai 2018 - Musée d’Aquitaine, Bordeaux

10h - Mot de bienvenue

10h15-12h-15 Panel 1 – Réparer (avec) l’archive ?

Modération : Marian Nur Goni (CRAL/EHESS) - Séance en anglais

  • Sam Hopkins (artiste, University of the Arts London, GB)
  • Simon Rittmeier (vidéaste)
  • Abira Hussein (archiviste, activiste, GB)
  • Marian Nur Goni (CRAL/EHESS)

14h-16h Panel 2 – Archives sonores : (dé)collection et (ré)interprétations

Modération : Dominique Malaquais (CNRS/IMAF, Paris) - Séance en anglais

  • Katja Gentric (Centre George Chevrier, Université de Dijon / Université de Free State, Bloemfontein, Afrique du Sud)
  • John Peffer (Ramapo College, États-Unis)

16h15-18h15 Panel 3 – Restitute this! De la violence coloniale, du pillage, du retour

Modération : Emmanuelle Spiesse (LAM) - Séance en anglais

  • Peju Layiwola (Université de Lagos, Nigeria)
  • Nadine Siegert (Iwalewahaus, Université de Bayreuth, Allemagne)
  • Jelili Atiku (artiste, performeur, Nigeria)

Projection d’un extrait du film Invasion 1897 du cinéaste Lancelot Oduwa Imasuen.

Volet 2 - Performance et performativité : des pratiques artistiques performatives ?

En Afrique, l’art ou, du moins, le travail de certains artistes, fonctionne souvent comme un outil de sensibilisation voire un dispositif de guérison. Il a pu être, à cet effet, instrumentalisé par des régimes politiques qui y ont vu un vecteur idéal pour propager leurs idées. Cependant, l’exercice du pouvoir politique ne peut plus se résumer à une simple concentration autocratique. Son hybridation et sa dissémination à travers différentes institutions locales comme internationales – notamment les ONG – se répercutent sur les dynamiques propres au champ artistique, tant dans le domaine des arts visuels que dans celui des arts de la scène. Toutes ces cultures expressives abordent des problématiques sociales bien ciblées en vue d’un changement ou d’un dépassement des traumatismes. On constate que la démarche de l’artiste sur le marché de l’humanitaire est autant éthique qu’esthétique, tant domine dans la doxa une rhétorique de la prescription en faveur du développement et de la paix.

La performance nous semble proposer une forme particulièrement signifiante pour étudier l’aspiration récurrente à la performativité de l’art. Transdisciplinaire par essence, la performance caractérise tout type de présentation de soi dans un espace public devant une assemblée, ce soi pouvant être fictionnel (jouer un rôle) ou non, et cette mise en scène pouvant être verbale (dialoguée et/ou chantée) ou plastique. Plus largement, il s’agira de penser au-delà de la « représentation », en ayant recours aux notions de performance et de mise en scène, c’est-à-dire à la façon dont le dispositif théâtral ou musical (concerts, clips) imprime son relief sur plusieurs lieux de l’espace public. Quelles opérations cognitives génèrent, dans l’espace public (qui peut être scénographié), la monstration du corps – nu ou paré – et la résonance vocale, voire la profération de paroles ? Quels sont les mécanismes intrinsèques de la performance qui permettent aux artistes et aux intermédiaires d’en appeler à la performativité? Quels sont les enjeux sociopolitiques des pratiques performatives envisagées selon cette optique ? Comment analyser le pouvoir symbolique de ces performances ? En fonction des différents contextes (espace public, médium vidéo, réseaux sociaux, etc.), quels processus de réception, voulus par l’artiste ou non, provoquent-elles et comment les étudier? Faut-il lire, dans cette tendance artistique qui s’observe en Afrique, une actualisation du paradigme bien connu de l’engagement de l’artiste, indiquant l’entrée dans un nouveau régime d’historicité ?

Après un tour d’horizon des différentes formes que peut prendre la mise en scène de l’humanitaire, une étude de cas structurera notre réflexion sur ces questions :

En France, les années 1980 sont marquées par le développement du répertoire de la chanson humanitaire. Le collectif Tam tam pour l’Afrique à l’initiative de Manu Dibango ou encore le 45 tours « SOS pour l’Éthiopie » des Chanteurs Sans Frontières par exemple, luttent contre la famine en Éthiopie. C’est dans ce contexte qu’apparaît une nouvelle catégorie marketing de l’industrie du disque: la musique du monde, avec de multiples festivals qui déclinent ce « nouveau » genre dans l’hexagone et à l’international. Elle sera bientôt suivie par un autre label une littérature monde (ou world litterature) qui regroupe des écrivains affranchis des frontières et qui trouve son public dans un système d’édition mondialisé. En prenant l’exemple de trajectoires d’artistes musiciens, chanteurs ou écrivains, ce panel aura pour objet de réinterroger le concept de cosmopolitisme (Hooft et Vandekerckhove, 2010; Wateau et Pais de Brito, 2015). Quelle place est donnée, tant dans l’espace public que dans l’industrie du disque ou de la littérature, aux artistes venus « d’ailleurs » et notamment du continent africain.

Musiciens, chanteurs et écrivains se construisent dans un espace « d’entre-deux », entre la France et leur pays d’origine. Cette dynamique d’aller-retour est aussi pour ces artistes l’occasion de se faire entendre, de performer, lors des concerts de lectures ou dans leurs œuvres littéraires, des combats citoyens : dénonciation de la corruption, lutte pour la reconnaissance de minorités, par exemple. Le « Brigadier Sabari » de l’Ivoirien Alpha Blondy en 1983, la chanson « Nous pas bouger » en 1989 de Salif Keïta à propos des immigrés maliens en France, ou encore la « Lettre ouverte aux... » en 1998 du chanteur kabyle Matoub Lounès, sont autant d’exemples d’un engagement artistico-politique et d’une reconnaissance acquise dans un espace international.

Mais comment se sont réellement construites ces trajectoires d’artistes ? Quels sont les intermédiaires qui leur ont permis de se faire connaître dans cet espace d’entre-deux ? S’ils sont souvent reconnus en France comme étant « engagés » ou « citoyens du monde » quid de la réception de leur musique et de leurs œuvres littéraires dans leur pays d’origine ? Quels sont en France les discours produits par les médias sur ces artistes ? À quel(s) compromis identitaire(s) ont-ils fait face ? Quelle libération de parole permet cet espace intermédiaire de circulation musicale et/ou littéraire (facilité aujourd’hui par les réseaux sociaux) ? Autrement dit, l’enjeu sera de comprendre en quoi les créations musicales, littéraires et les parcours professionnels de ces artistes témoignent moins d’une « citoyenneté du monde » (Balibar, 2004 ; Tassin, 2014) que des mondes de la citoyenneté.

Programme

18 mai 2018 - Musée d’Aquitaine, Bordeaux

9h30-11h30 Panel 1 : La mise en scène de l’humanitaire

Modération : Maëline Le Lay (CNRS/LAM)

  • Marta Amico (Université Rennes 2)
  • Aurore Desgranges (Université Lyon II)
  • Emmanuelle David (Sciences Po Bordeaux/U. Lausanne/LAM)

11h45 - 12h45 - Performance de l’artiste Jelili Atiku, "Rawson’s Boat" (Parvis du Musée d’Aquitaine et environs proches)

14h-16h30 Panel 2 : Trajectoires d’artistes de l’entre-deux et combats citoyens

Modération : Armelle Gaulier (LAM)

  • Fazia Aïtel (Claremont McKenna College, Califormie, États-Unis)
  • Tristan Leperlier (CESSP, Paris)
  • Emmanuelle Olivier (EHESS - Centre Georg Simmel Paris)
  • Monika Salzbrunn (ISSRC, Université de Lausanne, Suisse)
  • Armelle Gaulier (LAM)

16h30 - 16h45 - Conclusion et remarques finales

Lieux

  • Musée d’Aquitaine - 20 cours Pasteur
    Bordeaux, France (33)

Dates

  • jeudi 17 mai 2018
  • vendredi 18 mai 2018

Mots-clés

  • archives, collections, performance, performativité de l’art, humanitaire, circulations, citoyenneté

URLS de référence

Source de l'information

  • Marian Nur Goni
    courriel : m [dot] nurgoni [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Pratiques artistiques contemporaines d'Afrique : formes et enjeux politiques », Colloque, Calenda, Publié le mercredi 23 mai 2018, https://doi.org/10.58079/10b6

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