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Albert Camus et la question des genres littéraires

Albert Camus and the issue of literaty genres -respect or transgressions?

Respect ou transgression(s) ?

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Publié le jeudi 21 juin 2018

Résumé

Le colloque international Albert Camus et la question des genres littéraires : respect ou transgression(s) ? que l'Unité de Recherche en Littérature, Discours et Civilisations (URLDC) se propose d'organiser au mois de Novembre 2018 s'intéresse à la question de l'hybridité générique et transgénérique dans l'oeuvre d'Albert Camus.

Annonce

Argumentaire

Depuis le XIXe siècle notamment, nombre d’écrivains expriment explicitement leur désir de transgresser les genres, Baudelaire à la recherche d’une prose poétique, Mallarmé d’un poème lu comme un roman, et d’un roman comme un poème, Barthes d’un essai critique et autobiographique, Blanchot d’un récit qui soit aussi un essai. Caeiro, l’un des hétéronymes de Pessoa, entreprenait, lui, de mettre en prose ses vers. Cependant, Laurent Jenny, à la suite d’Antoine Compagnon, fait remarquer que « pour être perçue et comprise, cette transgression systématique des genres voulue par la modernité s'appuie encore sur l'identification des genres traditionnels. Sans cette identification préalable, la transgression ne serait même pas repérée et on n'aurait affaire qu'à une textualité indifférenciée. Les genres demeurent donc la mesure de toute innovation littéraire. »[1]

Les études consacrées à Albert Camus sont nombreuses et variées, mais très peu portent sur la place et les fonctions de l’intergénérique. Or, la question des rapprochements, comparaisons et interactions des genres littéraires semble pertinente. En effet, Albert Camus est romancier, nouvelliste, dramaturge, essayiste, philosophe et journaliste. Il passe aisément d’un genre à un autre et n’hésite pas, dans certains textes, à brouiller les codes et les catégories génériques. De plus, son attitude envers la question des genres n’est pas établie une fois pour toutes ; elle est complexe. En ce sens, il construit son œuvre dans cet espace problématique qui va du respect des genres et du refus de leur confusion à la recherche d’une porosité, chaque fois renouvelée, d’un genre à l’autre  et dans certains cas, à leur croisement, voire à leur fusion. Dans sa dernière interview, il affirme : « J’écris sur des plans différents pour éviter justement le mélange des genres »[2], tout en rectifiant : « Ces livres différents disent, il est vrai, la même chose. »[3] Il ne semble pas séparer ses textes narratifs des autres genres qu'il pratique : il organise l'ensemble de son œuvre selon un projet progressif et unificateur. Il précise, dans cette perspective, que techniques et styles divers sont utilisables, non pas comme des fins, mais comme des moyens. Il s’agirait donc de l’œuvre « unique » d’un même auteur, mais une œuvre qui n’est  jamais finie, jamais parfaite, donc sans téléologie et marquée des mêmes contradictions que leur auteur.

S’il y a donc des récits, romans, nouvelles, pièces, essais, articles, un récit peut être dialogique, une nouvelle philosophique, un roman la mise en images d’une philosophie, un essai lyrique, une pièce de théâtre la mise en scène d’une pensée ou une création collective aux techniques radiophoniques… Manifestement les frontières entre les différents genres ne sont pas étanches. Les thèmes, les modes d’écriture, les types textuels s’entrecroisent et se reflètent au point que de multiples glissements génériques peuvent s’effectuer dans la même œuvre. Les cinq textes de l'Envers et l'Endroit, que Camus juge "informes" sont-ils des "essais-fictions ou "autofictions"[4] ? Ces textes hybrides sont-ils poétiques ou argumentatifs, lyriques ou ironiques? La Mer au plus près ou les courts textes qui accompagnent les photos de La Postérité du soleil ne se lisent-ils pas comme des poèmes en prose? L'art musical et pictural, présent dans certains textes comme Le Premier Homme, La Peste, La Chute ou L'Exil et le Royaume, n’influence-t- il  l'écriture?

Mieux encore, il semble nécessaire de prendre en considération, en deçà des mouvements littéraires et philosophiques contemporains de Camus, l’influence qu’exercent sur lui des écrivains du XVIIe siècle comme Pascal, ou des auteurs  de la Grèce antique, notamment des tragiques et des penseurs présocratiques, Héraclite ou Empédocle par exemple. Leur pensée et leur conception du monde s’expriment en images, aphorismes, fragments fulgurants et sont une des sources de la poésie de René Char dont l’écriture a aussi exercé sur Camus une réelle fascination. Jeune homme, il avait consacré son mémoire de fin d’études à Plotin et Augustin, dont une des problématiques est bien ce désir d’Unité à travers la multiplicité de ses manifestations. Enfin, il ne faut pas négliger le rapport de son œuvre au silence, à ce « monde muet » que sa mère incarne mais dont Francis Ponge et Brice Parain lui fournissent des clés poétiques et théoriques.

Ce mélange des genres remplit donc diverses fonctions chez Camus : il permet d’abord une remise en question des normes imposées par les esthétiques traditionnelles, impliquant un questionnement qui portent sur les formes adoptées. Permet-il de répondre aux attentes des lecteurs d’aujourd’hui, aux diverses crises qu’ils traversent, aux difficultés qu’ils affrontent ?  Ce métissage des genres assure ensuite un renouvellement,  qui favorise la créativité au-delà des frontières discursives. Il bouleverse aussi l’horizon d’attente des récepteurs et permet à Camus de doter son public « d’une compétence lecturale »[5].

Nous voulons, dans le prolongement d'une réflexion antérieure effectuée lors de deux colloques précédents[6], nous interroger à cette occasion sur la question des genres dans l'œuvre d'Albert Camus. Nous pouvons nous demander si la question générique est au centre de ses préoccupations littéraires et stylistiques. Pourquoi éprouve-t-il le besoin d’emprunter aux genres littéraires des procédés qui leur sont spécifiques mais qu’il exploite dans tous ses textes ? Peut-on parler d’hybridité, et dans ce cas quel est l’impact, projeté ou non, de cette hybridité générique et transgénérique sur les lecteurs ?

Nous aimerions favoriser une approche poétique et stylistique. Nous proposons quelques axes de réflexion à titre indicatif :

  • Albert Camus et les genres littéraires
  • Signifiance et déclinaison thématique d’un genre à l’autre.
  • La question de l'hybridité générique dans l'œuvre d'Albert Camus
  • La question de l'hybridité transgénérique dans l'œuvre d'Albert Camus
  • Hybridité et style
  • Interaction générique et réception

Université de Sfax, Tunisie

Faculté des Lettres et Sciences Humaines

Unité de Recherche en Littérature, Discours et Civilisations (URLDC)

22-23 Novembre 2018

Quelques repères bibliographiques :

Aristote, Poétique, Seuil, « Poétique », 1980, trad. R. Dupont-Roc et J. Lallot.

Baby, Hélène (dir.), Fiction narrative et hybridation générique dans la littérature française, L’Harmattan, 2006.

Bessière, Jean (direction), Hybrides romanesques, fiction (1960-1985), Presses Universitaires de France, 1988

Budor, Dominique et Geerts, Walter (direction), Le Texte hybride, Presses Sorbonne Nouvelle, 2004.

Combe, Dominique, Les Genres littéraires, Hachette supérieur, 1992.

Dambre, Marc et Gosselin-Noat, Monique (dir.), L’éclatement des genres au XXe siècle, Presses de la Sorbonne nouvelle, 2001.

Dion, Robert, Fortier Frances et Haghebeart Elisabeth. (dir.), Enjeux des genres dans les écritures contemporaines, Nota Bene, 2001.

Frontières des genres, Textes réunis et présentés par Stistrup Jensen Merete et Thirouin Marie-Odile, Presses Universitaires de Lyon, 2005.

Genres et textes, sous la direction de Monte Michèle et Gilles Philippe, Presses Universitaires de Lyon, 2014.

Genette, Gérard, Introduction à l’architexte, Seuil, « Poétique », 1979.

Genette, Gérard et Todorov, Tzvetan, Théorie des genres, Seuil, « Points », 1986.

Genette, Gérard, "Des œuvres et des genres", Figures V, Paris, Seuil (Poétique), 2002.

Hamburger, Kate, Logiques des genres littéraires, 1957, trad. Fr. Seuil, « Poétique », 1986.

Jauss, H.-R., Pour une esthétique de la réception (1966) traduct. Fr. Gallimard, 1978.

La Question de l’hybride, Etudes réunies par Arselène Ben Farhat et Mustapha Trabelsi, éditions Nouha, 2014

Molino, Jean, « Les genres littéraires », Poétique, 93, février, 1993.

Raimond, M. La crise du roman, des lendemains du naturalisme aux années vingt, José Corti, 1966.

Schaffer, Jean.-Marie, Qu’est-ce qu’un genre littéraire ?, Seuil, coll. « Poétique », 1989.

Schaffer, Jean-Marie, «Genres littéraires», Dictionnaire des genres et notions littéraires, Albin Michel, Encyclopædia Universalis, 1997, p. 339-344.

Modalités de soumission

Le titre et le résumé de la communication d’une quinzaine de lignes, accompagnés d’une notice biographique de dix lignes, dans un document séparé, seront envoyés à l’adresse suivante :

colloque.camusgenre2018@gmail.com

Les frais de participation seront de 120 euros, ou leur équivalent en dinars tunisiens. Les participants tunisiens seront redevables de 150 dinars. 

Les organisateurs du colloque prendront en charge l’hébergement de deux nuitées (en pension complète) pour les intervenants étrangers et tunisiens.

Lieu du déroulement du colloque : hôtel Monastir centre

Responsable du colloque

Unité de Recherche en Littérature, Discours et Civilisation

Comité scientifique 

Zineb Ben Ali, Mounira Chatti, Arbi Dhifaoui, Kamel Gaha, Jeanyves Guérin, Pierre Garrigues, Philippe Jousset, Martine Mathieu-Job, Jean Sarocchi, Kamel Skander, Mustapha Trabelsi, Sonia Zlitni-Fitouri.

Comité d’organisation 

Ons Affes, Arselène Ben Farhat, Mohamed Amine Kacem, Fadoua Khalaf, Mouna Sassi.

Calendrier

  • 30 juin 2018 : Réception des propositions de communication
  • 15 juillet  2018 : Notification aux auteurs
  • 22-23 novembre  2018 : Colloque international
  • Juin 2019 : publication.

[1] Laurent Jenny, « Méthodes et les genres littéraires : les genres littéraires », Université de Genève, 2003, https://www.unige.ch/lettres/framo/enseignements/methodes/genres/glintegr.html

[2] Cité dans Albert Camus, Essais, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1966.

[3] Ibid.

[4] Jeanyves Guérin, "Essai", Dictionnaire Albert  Camus, Robert Laffont, 2009, p. 272.

[5] Y. Reuter, « Lire: une pratique socio-culturelle », Pratiques, n° 52, Dé­cembre 1986, p. 81.

[6]  Albert Camus. L'écriture des limites et des frontières, Presses Universitaires de Bordeaux, 2009 et L'écriture théâtrale dans les récits d'Albert Camus, Unité de Recherche en Littérature, Discours et Civilisation Sfax, 17-18 octobre  2016

Catégories

Lieux

  • Monastir Center Hôtel - Avenue Habib Bourguiba, Monastir 5000, Tunisie.
    Monastir, Tunisie

Dates

  • samedi 30 juin 2018

Mots-clés

  • Albert Camus, genres littéraires, hybridité

Contacts

  • Mustapha Trabelsi
    courriel : mutrabelsi [at] gmail [dot] com
  • Mohamed Amine KACEM
    courriel : medaminekacem3 [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Mustapha Trabelsi
    courriel : mutrabelsi [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Albert Camus et la question des genres littéraires », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 21 juin 2018, https://doi.org/10.58079/10ft

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