AccueilL’archéologie des conflits contemporains : méthodes, apports, enjeux

AccueilL’archéologie des conflits contemporains : méthodes, apports, enjeux

L’archéologie des conflits contemporains : méthodes, apports, enjeux

The archaeology of contemporary conflicts - methods, contributions, issues

*  *  *

Publié le mercredi 04 juillet 2018

Résumé

Depuis plus d’une décennie, l’archéologie contemporaine s’est appropriée ce nouvel objet d’étude que sont les conflits de l’ère contemporaine. Ce champ de recherche encore jeune, dont la pertinence est de moins en moins disputée à mesure que se succèdent les découvertes, a vu l’émergence de questions spécifiques auxquelles les archéologues n’avaient que peu ou pas été confrontés jusqu’alors.

Annonce

Argumentaire

Depuis plus d’une décennie, l’archéologie contemporaine s’est appropriée ce nouvel objet d’étude que sont les conflits de l’ère contemporaine. Ce champ de recherche encore jeune, dont la pertinence est de moins en moins disputée à mesure que se succèdent les découvertes, a vu l’émergence de questions spécifiques auxquelles les archéologues n’avaient que peu ou pas été confrontés jusqu’alors. 

Dix ans après le colloque du Mémorial de Caen, à l’occasion duquel avait été posées les premières pierres d’un dialogue interdisciplinaire réunissant notamment archéologues et historiens, il apparaît aujourd’hui nécessaire de porter plus avant nos questionnements en vue de mieux cerner la nature et les limites des apports de l’archéologie à l’étude des conflits contemporains, en particulier des guerres de masse de l’ère industrielle qui, à deux reprises au cours du XXe siècle, ont affecté le territoire national comme l’international, et aux vestiges desquelles les services archéologiques sont désormais régulièrement confrontés dans leurs travaux.

Cette contribution est néanmoins réelle, ainsi qu’en témoignent les recherches déjà menées, achevées ou en cours dans ce domaine. C’est à la lumière de ces expériences acquises et des développements méthodologiques qu’elles suscitent, qu’il est proposé de mettre l’accent sur les approches les plus fructueuses et novatrices en termes d’apports à la connaissance des conflits.

 Un colloque tenu en deux temps et en deux lieux chacun marqués par l’un des deux conflits mondiaux, le premier à Verdun, en 2018, et le second à Caen, en 2019, fournira l’opportunité aux chercheurs investis dans ces recherches d’aborder à travers des communications synthétiques un large panel de problématiques portant aussi bien sur des aspects réglementaires que sur des thématiques scientifiques ou sociétales, en rapport avec l’histoire des grands conflits contemporains.

 La première session, qui se tiendra à Verdun à l’automne 2018, abordera les questions spécifiques à l’archéologie, dans ses pratiques d’investigation comme dans les méthodes de conservation des objets dégagés.

 La seconde session, organisée à Caen au printemps 2019, sera consacrée au dialogue interdisciplinaire en déterminant les apports possibles de l’archéologie aux autres champs de la recherche, de la Révolution française à nos jours, à l’échelle internationale. Cette dimension très large permettra ainsi d’éclairer les enjeux spécifiques des guerres de masse de l’ère industrielle qui se sont déroulées au XXe siècle, aux vestiges desquelles les services archéologiques sont désormais régulièrement confrontés dans leurs travaux.

Entre l’abondance de documentation administrative ou privée d’un côté, et de l’autre la standardisation croissante des équipements de guerre qui font souvent perdre intrinsèquement à l’objet dégagé des fouilles tout intérêt significatif, la fenêtre est étroite sur les apports de l’archéologie aux sciences humaines pour la période contemporaine. Elle est pourtant réelle, au vu d’études déjà menées et de projets en cours dans ce domaine. C’est précisément à la lumière de ces expériences qu’il est proposé de dégager les approches qui paraissent les plus fructueuses.

Plus que jamais, l’interdisciplinarité s’impose ici. Si l’histoire paraît le champ disciplinaire naturel dans ce dialogue, elle n’est pas seule en lice : la sociologie, l’anthropologie biologique ou sociale et la géographie y ont, entre autres, tout autant leur place. L’archéologue ne peut en effet prétendre faire émerger une documentation se suffisant à elle-même, en particulier sur la période la plus récente, déjà labourée par d’autres disciplines grâce à une multitude de sources écrites, iconographiques ou audiovisuelles. Pour autant, ces archives traditionnelles sur lesquelles se basent la plupart des travaux académiques n’ont rien d’absolu, d’abord parce qu’une infime partie de la documentation produite à l’époque parvient aux chercheurs, ensuite parce que cette documentation n’est pas exempte de biais qu’il est parfois utile de corriger. L’archéologie peut dès lors permettre de faire émerger une documentation alternative complémentaire.

Attendus des communications

À chaque fois, il s’agira d’abord de s’interroger sur la philosophie générale, la fonction et les finalités possibles d’une intervention archéologique pertinente au regard des travaux de recherche liés aux conflits contemporains, généralement bien documentés. À quoi bon en effet faire ressurgir tout ou partie d’un cantonnement militaire ou d’un champ de bataille ? Quel apport significatif la démarche archéologique peut-elle apporter dans la compréhension du passé ? Autrement dit, quelle(s) source(s) complémentaire(s) peut-elle faire émerger, qui ne relève(nt) pas de l’anecdotique ?

Ces apports sont relativement nombreux. Encore faut-il les présenter, non pas à travers une juxtaposition de cas d’étude dont la portée est presque à chaque fois limitée à leur sujet spécifique, mais par de larges synthèses thématiques, à la fois nationales et internationales, qui permettent de décliner dans une démarche comparative les perspectives ouvertes par l’approche archéologique, mais aussi ses limites. Une douzaine de thématiques – sans exclusive – paraissent d’emblée susceptibles de faire l’objet de retours d’expérience.

Les pratiques funéraires comme l’archéologie des corps de militaires décédés s’imposent presque naturellement ici (De quoi meurt-on ? Comment enterre-t-on ?).

Quels éléments de connaissance pertinents peut apporter l’archéologie à l’histoire des opérations militaires, à la fois sur terre et sur mer ?

Quelles contributions peut apporter l’archéologie à la connaissance du quotidien du soldat, tant au combat qu’en marge des opérations, par exemple son alimentation (avec ce que cela implique sur son approvisionnement), ses maladies et son hygiène, ou encore son univers culturel à travers les traces collectives ou individuelles qu’il a laissées (peintures murales, graffitis etc.) ?

Comment l’archéologie peut-elle documenter la vie et la survie des civils en temps de guerre et dans l’immédiat après-guerre, ou encore éclairer la privation de liberté, aussi bien dans les camps de prisonniers, les camps d’internement ou les camps de concentration ?

Comment et dans quelle mesure peut-elle documenter les crimes, que ce soit dans les fosses communes ou  les camps d’extermination ?

Comment l’archéologie, en lien avec la géomorphologie, peut-elle renseigner les méthodes et matériaux de construction des ouvrages militaires, ou encore déterminer le niveau de destructions des villes et les bouleversements induits par les opérations sur les paysages ?

Il s’agit ensuite de déterminer quels éclairages spécifiques l’archéologie peut apporter en s’insérant dans les questionnements liés aux nombreux enjeux sociétaux liés à la mémoire de ces conflits, mais aussi à leur gestion au quotidien. En même temps, il s’agit de réfléchir sur les problématiques que l’archéologue peut soulever à travers son travail sur des périodes récentes, à la fois d’un point de vue patrimonial, mais aussi parce qu’ils représentent autant d’enjeux de mémoire potentiels. Qu’il s’agisse de la mémoire des crimes (camps, massacres), des formes d’appropriation ou de rejet mémoriels, d’enjeux de connaissance appliqués à la gestion de patrimoine (et donc intégrant une politique de tourisme de mémoire), l’archéologue se trouve en effet confronté à des problématiques qui ne lui étaient pas forcément familières en travaillant sur des temps plus reculés. Dans le même temps, son travail lui permet d’apporter des réponses sur des enjeux environnementaux, notamment en lien avec la pollution des sols et la transformation des paysages.

L’archéologue participe à un mouvement structurel qui tend à appréhender de manière de plus en plus extensive le patrimoine, dans sa diversité comme dans son ancienneté. En 1945, les Services des Monuments Historiques concevaient ainsi difficilement d'appliquer la sauvegarde d’un patrimoine de moins d’un siècle, qui plus est militaire. Désormais, la politique de sauvegarde s’est largement étendue au fait guerrier sur des biens mobiliers et immobiliers beaucoup plus proches de nous. Toutefois, les moyens de la puissance publique n’étant pas illimités, cela suppose des choix, et donc des renoncements sur ce qui est digne d’être « mémorialisé » pour la postérité, en l’intégrant dans des politiques d’aménagement du territoire et de valorisation touristique. Quand intervenir ? Avec quels moyens ? Quelles protections émettre ? Dans quels buts ?

Dans ce cadre, il s’agit aussi de s’interroger sur la place de l’objet issu des fouilles. La production massive d’équipements militaires tout comme la conservation de ces équipements dans les espaces muséographiques doivent conduire à s’affranchir de toute fascination pour l’objet de guerre. Pour autant, les objets détournés de leur usage ou les créations artistiques (on pense bien évidemment ici à l’artisanat dans les tranchées pendant la Grande Guerre) sont des sources qu’il est impensable de négliger, tant ils permettent de documenter une réalité difficilement saisissable autrement.

Peut-être davantage que pour d’autres périodes historiques, l’archéologue est confronté, lorsqu’il aborde les vestiges des conflits contemporains, à la fascination que leur portent certains collectionneurs de militaria. La passion pour l’Histoire comme la marchandisation de ces objets parfois « à haute valeur ajoutée » conduisent à des opérations de fouille « sauvages ». Loin d’être toutes clandestines, certaines sont, à défaut d’être autorisées, menées avec des moyens conséquents, tant par des associations culturelles, des collectivités territoriales ou de simples particuliers qui n’hésitent pas à communiquer sur leur action dans la presse ou sur le web. Ces pratiques démontrent que la réglementation en vigueur n’est pas connue, et plus encore révèlent les approches désormais décalées entre, d’un côté, une administration qui a très récemment intégré ces vestiges dans le patrimoine et, de l’autre, une population qui s’affranchit de la réglementation en vigueur, fréquemment par habitude et méconnaissance. Dès lors, il y aurait lieu de réfléchir sur les meilleurs moyens de diffuser ces règles et de canaliser ces pratiques.

Modalités de soumission

Les propositions de communications (2000 signes maximum) doivent être envoyées

au plus tard le 8 juillet 2018.

Elles doivent être accompagnées d’un CV et d’une liste de publications.

Contact : Vincent Carpentier (vincent.carpentier@inrap.fr)

Conseil scientifique

  • Yves Desfossés (MC),
  • Cyril Marcigny (Inrap),
  • Vincent Carpentier (Inrap),
  • Cyrille Billard (MC),
  • Gilles Prilaux (Coll.),
  • Jean-Pierre Legendre (MC),
  • Olivier Dutour (EPHS),
  • Francois Fichet de Clairefontaine (MC),
  • Jean-Luc Leleu (CNRS),
  • François Cochet (Univ.),
  • Nicolas Offendstadt (Univ.)

Lieux

  • Mémorial de Caen - Esplanade Général Eisenhower
    Caen, France (14)

Dates

  • dimanche 08 juillet 2018

Mots-clés

  • archéologie, conflit, contemporain, méthode, apport, enjeu

Contacts

  • Vincent Carpentier
    courriel : vincent [dot] carpentier [at] inrap [dot] fr

Source de l'information

  • Cyril Marcigny
    courriel : cyril [dot] marcigny [at] inrap [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« L’archéologie des conflits contemporains : méthodes, apports, enjeux », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 04 juillet 2018, https://doi.org/10.58079/10ix

Archiver cette annonce

  • Google Agenda
  • iCal
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search