AccueilLa recherche multisituée : méthodologies, démarches, objets

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La recherche multisituée : méthodologies, démarches, objets

Multi-site research - methodologies, approaches and objects

Revue « Espaces et sociétés »

Espaces et sociétés journal

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Publié le mardi 14 août 2018

Résumé

Ce numéro d’Espaces et sociétés entend interroger la portée et la nouveauté, tout comme les limites de la recherche multisituée, en l’envisageant dans ses différentes (méthodologie, approche, objet) ainsi que dans leurs croisements. Que recouvrent la méthodologie et les démarches multisituées revendiquées dans un nombre important de recherches ? En quoi se distinguent-elles des études comparées ou des enquêtes multi-localisées ? Quelles sont les limites des démarches et des méthodologies multi-situées ? Comment, par exemple, résoudre le défi de la « profondeur » (depth) analytique dans une recherche multisituée, ou celui de la saisie de la simultanéité des processus distants ?

Annonce

Argumentaire

Depuis les années 1990, l’approche multisituée a pris une place croissante dans les recherches en sciences sociales. Dans ses travaux sur l’ethnographie multisituée, Marcus la présente comme une nouvelle exigence méthodologique de la recherche à l’heure de la mondialisation, impliquant pour le chercheur de suivre les individus, les objets, les intrigues, les biographies, et d’être par conséquent en mouvement (Marcus, 1995). Mais le multisitué est aussi invoqué comme une démarche de recherche renvoyant à la positionnalité du chercheur, amené à se « multisituer » lui-même en occupant différentes positions afin d’appréhender son objet depuis une variété de points de vue – ce que Marcus appelle un « activisme de circonstances ». L’impossibilité de saisir désormais les phénomènes sociaux en restant ancré en un seul lieu ou à partir d’une seule position fonde cette proposition à la fois théorique et méthodologique.

Un bref recensement des résumés des thèses et d’articles de sciences humaines et sociales publiés au cours des vingt dernières années met en évidence une forte occurrence du qualificatif « multisitué », mobilisé comme attribut pour qualifier, décrire et analyser des objets d’étude, lesquels sont les produits d’un processus de fabrication matérielle ou immatérielle mondialisée. Ce qui est regardé peut être alors très divers : des lieux ou des espaces – villages, territoires (Cortes et Pesche, 2013 ; Dia, 2009) -, des dynamiques culturelles - religions, musiques (DeWind et Vásquez, 2014), des processus sociaux - inégalités (Roulleau-Berger, 2011) - et, de façon prédominante, des groupes (migrants, gangs, etc. – les travaux étant ici trop nombreux pour être cités).

Cette popularité croissante du terme est concomitante à la fois du tournant des mobilités (mobility turn) et du tournant spatial (spatial turn) qui l’accompagne.

Le premier propose de refondre la sociologie à partir des mobilités, devenues centrales dans les sociétés contemporaines, dans la mesure où elles recomposent les relations aux autres et aux lieux (Urry, 2005). L’émergence du paradigme transnational dans les recherches sur les phénomènes migratoires (Glick Schiller, Basch et Szanton Blanc, 1992), et les débats qui l’ont accompagné depuis le début des années 1990, sont révélateurs de la nécessité de penser la pluralité des ancrages et des appartenances simultanées, faisant voler en éclats le nationalisme méthodologique, ou le modèle de l’Etat ou espace conteneur. Penser la multi-territorialité des groupes mobiles invite à de nouvelles conceptualisations des lieux comme points de connexion ou « circonstances de croisements » (Retaillé, 2012).

Le tournant spatial favorise quant à lui un renouveau des réflexions sur la production sociale de l’espace, dans un contexte de mondialisation qui permet un affranchissement de l’espace euclidien et requiert la pensée de l’espace réseau, de la proximité du distant, de la co-spatialité (Lussault, 2009). En émanent des propositions pour repenser les lieux et la production de la localité comme « dimension de la vie sociale et valeur articulée de voisinages particuliers » (Appadurai, 2005), ou pour refonder une théorie de l’espace depuis le champ de la sociologie (Löw, 2015), en l’envisageant dans sa dimension relationnelle, comme un agencement des biens sociaux et des êtres vivants en certains lieux. Dans la « société hypertexte », les individus participent de champs sociaux (travail, résidence, loisirs, etc.) qu’ils traversent, auxquels ils appartiennent, et qui sont interconnectés de multiples façons (Ascher, 2005). Connections, nouveaux rapports à l’espace, constituent des enjeux scientifiques renouvelés, qui traversent abondamment les recherches sur les mobilités, les migrations, les villes, les réseaux, les nouvelles technologies, la globalisation et ses lieux.

Ce numéro d’Espaces et sociétés entend interroger la portée et la nouveauté, tout comme les limites de la recherche multisituée, en l’envisageant dans ses différentes (méthodologie, approche, objet) ainsi que dans leurs croisements.

Que recouvrent la méthodologie et les démarches multisituées revendiquées dans un nombre important de recherches ? En quoi se distinguent-elles des études comparées ou des enquêtes multi-localisées ?

Quelles sont les limites des démarches et des méthodologies multi-situées ? Comment, par exemple, résoudre le défi de la "profondeur" (depth) analytique dans une recherche multisituée, ou celui de la saisie de la simultanéité des processus distants (Falzon, 2009) ?

Les démarches multisituées sont-elles requises par des objets de recherche nouveaux et spécifiques, ou peuvent-elles être appliquées à toutes les recherches, quel que soit leur objet ? En quoi s’agit-il d’approches innovantes ? Qu’apportent-elles au champ des études socio-spatiales ?

Les contributions pourront proposer, en s’appuyant sur des éléments empiriques, des aspects de théorisation et conceptualisation, une analyse critique des démarches et méthodologies multisituées, ou encore des études de cas se focalisant sur des processus ou des objets multisitués, en y apportant une dimension critique.

Coordinateurs du dossier

  • Geneviève Cortes,
  • Virginie Baby-Collin,
  • Alain Bourdin

Modalités de participation

Adresse de contact pour l’envoi des articles en version électronique : virginie.baby-collin@univ-amu.fr, genevieve.cortes@univ-montp3.fr

Date limite de réception des articles : 1er novembre 2018

Les articles doivent être adressés complets suivant les normes indiquées sur le site de la revue : http://www.espacesetsocietes.msh-paris.fr/soumission-darticles-et-consignes-aux-auteurs/

References

Appadurai A., [1995] 2005, Après le colonialisme : les conséquences culturelles de la globalisation, traduit par Bouillot F., Frappat H., Petite bibliothèque Payot,

Ascher F., 2005, La société hypermoderne, La Tour d’Aigues, éditions de l’Aube.

Cortes G., Pesche D., 2013, « Territoire multisitué », L’Espace géographique, Tome 42, 4, p. 289‑292.

DeWind, J., Vásquez, M.A. (dirs.), 2014, The religious lives of migrant minorities: a  transnational and multi-sited perspective, in Global Networks 14, 3, p. 251-400 (numéro spécial).

Dia H., 2009, Espaces domestiques, espaces villageois, espaces urbains multi-situés. : Cinquante ans de migrations à partir de la moyenne vallée du fleuve Sénégal (1960-2010), Thèse de doctorat en sociologie, Université Paris 5.

Falzon D.M.A., 2009, Multi-Sited Ethnography: Theory, Praxis and Locality in Contemporary Research, Farnam, Angleterre, et Burlington, Vermont, Ashgate Publishing, Ltd..

Glick Schiller N., Basch L.G., Szanton Blanc C., 1992, Towards a Transnational Perspective on Migration: Race, Class, Ethnicity, and Nationalism Reconsidered, New York, Annals of the New York Academy of Sciences, vol. 645.

Löw M., [2000] 2015, Sociologie de l’espace, traduit par Renault D., Paris, Editions de la MSH.

Lussault M., 2009, De la lutte des classes à la lutte des places, Paris, Grasset.

Marcus G.E. 1995, ‘Ethnography in/of the World System: The Emergence  of Multi-Sited Ethnography’, Annual Review of Anthropology 24, p. 95-117.

Retaillé D., 2012, Les lieux de la mondialisation, Editions Le Cavalier Bleu.

Roulleau-Berger L., 2011, ‘Repenser la question migratoire: migrations, inégalités multisituées et individuation’, SociologieS [URL: http://journals.openedition.org/sociologies/3701 ]

Urry J., [2000] 2005, Sociologie des mobilités, traduit par Burch N., Paris, Armand Colin.


Dates

  • jeudi 01 novembre 2018

Mots-clés

  • méthodologie, multisitué, espace, société, mobilité

Contacts

  • Virginie Baby-Collin
    courriel : virginie [dot] baby-collin [at] univ-amu [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • Virginie Baby-Collin
    courriel : virginie [dot] baby-collin [at] univ-amu [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« La recherche multisituée : méthodologies, démarches, objets », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 14 août 2018, https://doi.org/10.58079/10rf

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