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« Autour » d'Antoine Hennion

Antoine Hennion - from the "Passion Musicale" to other fragile beings

De la « Passion Musicale » aux êtres fragiles

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Publié le mercredi 12 septembre 2018

Résumé

Il y a 25 ans paraissait la Passion musicale. En écho à la sociologie de la traduction développée au CSI sur les sciences et les techniques, Antoine Hennion mettait en œuvre sa sociologie de la médiation à partir du cas de la musique. Un tel objet, fragile, impossible à situer de façon définitive, invite à enquêter moins sur les objets que, de façon plus risquée, depuis les objets. De la musique aux amateurs, la médiation s’est ainsi muée pour Hennion en attachements réciproques (« ce qui nous tient, ce à quoi nous tenons ») : l’impossibilité à capturer les objets impose de renouveler les épreuves qui nous les font sentir. Réciproquement, des mondes « en train de se faire » (William James) se dessinent ainsi, où les choses conditionnent notre capacité à en faire l’expérience – sans jamais s’y réduire. Attentif à l’« œuvre à faire » (Étienne Souriau), impliqué et intéressé, le chercheur ne vise plus à se détacher d’un monde à analyser on ne sait d’où, mais à soutenir des êtres fragiles dont il contribue à augmenter l’existence.

Annonce

Colloque dans le cadre du projet CooPair financé par la Fondation Daniel et Nina Carasso pour Origens Medialab. Organisé par Alexandre Monnin, avec le soutien du Groupe ESC Clermont et de l’Ecole Supérieure d’Art de Clermont Métropole (ESACM).

Argumentaire

Il y a vingt-cinq paraissait la Passion musicale, illustration par le geste de la sociologie de la médiation d’Antoine Hennion, qui, parallèlement aux travaux développés dans le champ des sciences et des techniques par Bruno Latour et Michel Callon, puis Madeleine Akrich, ouvrit l’ANT (théorie de l’acteur-réseau) à de nouveaux terrains, dans les champs jusqu’alors inexplorés par cette dernière de l’art et de la culture. Cet anniversaire m’a donné l’idée d’organiser un événement autour de son auteur.

Moins pour célébrer un ouvrage passé, afin d’en souligner les indéniables qualités et contresigner ainsi son appartenance au patrimoine de la discipline, que pour tirer un fil bien vivace qui, à partir de l’analyse d’un objet fragile, impossible à situer de façon définitive, à savoir la musique, met au défi la sociologie et les sciences sociales en général de déployer leurs savoirs non sur les objets mais de façon plus risquée et incertaine depuis les objets. Autrement dit, en tenant compte, à chaque analyse, des spécificités qui les caractérisent ; de leurs réticences, même, et de leur capacité à mettre sans cesse à l’épreuve (voire en échec !) enquêtes et enquêteurs. C’est aussi dénier toute possibilité d’étendre à l’infini une méthode éprouvée, « tout terrain », appelée à conquérir progressivement et sans restes des arpents entiers de la réalité dans une gestuelle qui emprunte à un colonialisme disciplinaire tout à la fois daté et, comble des paradoxes, toujours d’actualité. De la musique aux amateurs, de l’impossibilité à saisir les objets une fois pour toute à la nécessité de renouveler les périlleuse épreuves destinées à les éprouver, c’est un monde « en train de se faire » qui se dessine, pour reprendre une expression choyée par l’auteur, où les choses, les pragmata chères à William James, excitent, conditionnent et dépassent tout à la fois notre capacité à en faire l’expérience – sans jamais s’y réduire.

D’où un intérêt certain pour des thèmes prompts à réactiver de vieux dualismes (sujet-objet, nature-société, réel-construit, etc.) tels que le goût ou la valeur, afin de mieux montrer l’inanité de ce type de traitements aux yeux d’une sociologie réellement pragmatiste. Ce monde « en train de se faire » est aussi un monde où la médiation s’est progressivement muée pour A.H. en attachements réciproques (« ce qui nous tient, ce à quoi nous tenons »), signalant moins une rupture théorique que la tentative, sans cesse remise sur le métier, de penser les objets comme la résultante de relations impermanentes, fragiles et précaires. D’où l’intérêt récemment affiché pour les travaux d’un philosophe tel qu’Etienne Souriau, son concept d’instauration en tête (autant que le pluralisme sur lequel il fait fond : pluralisme double, des objets et des modes d’existence qu’ils arpentent).

Initialement élaboré dans le champ de l’esthétique qu’il eut tôt fait de déborder, le concept d’instauration permet en effet d’accorder aux objets une réelle capacité d’agir tout en reconnaissant l’insistante fragilité de cette dernière, comme en témoigne la demande d’accroissement dans l’existence dont les objets, assimilés à des œuvres, sont porteurs (demande que donne justement à entendre le concept de « l’œuvre à faire » qui traverse de part en part la philosophie sourialienne). L’image du monde qui se précise emporte avec elle un autre regard sur la place du chercheur, non plus isolé et détaché mais (dans le droit fil des réflexions sur les amateurs) impliqué et intéressé, in media res, à faire exister les objets d’une enquête dont les termes se renouvellent à mesure que l’accent se déplace de la recherche (épistémologique) d’une introuvable méthode à la responsabilité (ontologique) vis-à-vis d’un monde sans dehors, dont pas même la quête du savoir n’autorise à prendre congé (en témoignent, exemplairement, les travaux récents menés par A.H. sur le care ou la « jungle » de Calais).

Ces journées entendent ainsi faire résonner les questions posées depuis vingt-cinq ans par Antoine Hennion avec les travaux de chercheurs de tous horizons, dont certains appartiennent à la jeune génération, afin de les soumettre à de nouvelles épreuves, seules à même, au croisement des enquêtes menées par les uns et les autres, de renouveler « l’échafaudage » (Souriau parle d’un « polygone de sustentation ») qui soutient nos rencontres passagères avec des êtres en constante émergence.

Programme

Lundi 24 septembre

(ESACM, 25 rue Kessler)

14h00 - 14h15 : présentation du colloque

  • 14h15 - 15h00 : Antoine Hennion (CSI – Mines ParisTech, Origens Medialab), « Puissances du fragile. Une sociologie des attentions »
  • 15h00 - 15h30 : Thierry Boutonnier (artiste), « Comment plantons nous des arbres avec les oreilles ! »
  • 15h30 - 16h00 : Yaël Kreplak (CEMS – EHESS, Orange Labs), « A mis-reading. Faire de la sociologie pragmatique de l’art à côté d’Antoine Hennion. »
  • 16h00 - 16h30 : Alexis Guillier (artiste), « Notre-Dame de France »

Table ronde : 45 mn

Pause de 15 mn

17h15 - 18h00 : Ghost Guest 18h00 - 18h45 : échanges

Mardi 25 septembre

(Groupe ESC Clermont, 4 boulevard Trudaine) :

09h45 - 10h15 accueil des participants

  • 10h15 - 10h45 : Jérôme Denis (CSI – Mines ParisTech), « Le travail et l’enquête. L’art de la description soignée »
  • 10h45 - 11h15 : Sophie Houdart (CNRS, Université Nanterre), « Les saules du vannier. Ou comment deux pousses d’arbre peuvent aider à s’attacher durablement à Fukushima »

Table ronde : 45mn

12h00 - 14h00 : déjeuner

  • 14h00 - 14h30 : Katrin Solhdju (FNRS, Ding Ding Dong), « Du déni : Entre symptôme, ruse et fiction vitale »
  • 14h30 - 15h00 : Emilie Hermant (Ding Ding Dong), « "Chaque chagrin partagé finalement produit une histoire" –  autour des groupes d'entraide pour porteurs et malades de Huntington »

Table ronde : 45 mn

Pause de 15 mn

  • 16h00 - 17h00 : Anne-Sophie Haeringer (CRESSON, associée au centre Max Weber, Lyon) et Anthony Pecqueux (CNRS, CRESSON, Grenoble), « Explorer la puissance des êtres virtuels »17h00 - 17h30 : Jérémy Damian (Anthropologue), « Des amateurs passionnés aux sensorialités aberrantes »

Table-ronde : 45 mn

(fin de la journée : 18h15)

Mercredi 26 septembre

(ESACM)

  • 09h30 - 10h00 : Ignacio Farias (Humboldt Universität), « Ethnography of a camera system: radicalizing pragmatism with Antoine Hennion »
  • 10h00 - 10h30 : Alexandre Monnin, Jérôme Denis, « Les trajets d’instauration de l’art contemporain, à propos du dispositif Re-Source »
  • 10h30 - 11h00 : Gwenola Wagon (artiste, enseignante, chercheuse, Université Paris 8), « Conférence avec animaux. Chèvres, chats, vaches, cochons et robot-loutre »

Table-ronde (1h)

12h00 - 13h45 : déjeuner

  • 13h45 - 14h15 : Francis Chateauraynaud (EHESS), « Du pragmatisme et de l'hypersensibilité en régime de criticité »
  • 14h15 - 14h45 : Alexandre Monnin (ESC Clermont, Origens Medialab), « Approcher en pragmatiste les mondes à dé-faire »
  • 14h45 - 15h15 : Antoine Hennion, « À l’épreuve des migrations : de quels mondes voulons-nous ? »Table-ronde : 45mn (fin de la journée : 16h00)

Remerciements

  • Muriel Lepage (ESACM)
  • Philippe Eydieu (ESACM)
  • Sophie Lapalu (ESACM)
  • Françoise Roudier (Groupe ESC Clermont)
  • Marc Lecoutre (Groupe ESC Clermont)
  • Diego Landivar (Origens Medialab, Groupe ESC Clermont)

Lieux

  • ESACM, 25 rue Kessler | Groupe ESC Clermont, 4 boulevard Trudaine
    Clermont-Ferrand, France (63)

Dates

  • lundi 24 septembre 2018
  • mercredi 26 septembre 2018
  • mardi 25 septembre 2018

Fichiers attachés

Mots-clés

  • art, sociologie de la médiation, attachements, théorie de l'acteur-réseau, instauration, pragmatisme

Contacts

  • Alexandre Monnin
    courriel : aamonnz [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Alexandre Monnin
    courriel : aamonnz [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« « Autour » d'Antoine Hennion », Colloque, Calenda, Publié le mercredi 12 septembre 2018, https://doi.org/10.58079/10u8

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