Accueil(Dé)construire les « archives coloniales » : enjeux, pratiques et débats contemporains

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(Dé)construire les « archives coloniales » : enjeux, pratiques et débats contemporains

Deconstructing "colonial archives" - issues, practices and contemporary debates

Journée d'étude aux Archives nationales d'Outre-mer (Aix-en-Provence)

Study day at the Archives nationales d'Outre-mer (Aix-en-Provence)

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Publié le mardi 11 décembre 2018

Résumé

Cette journée d’étude, organisée par le Groupe de recherche sur les ordres coloniaux (GROC) à Aix-en-Provence le vendredi 28 juin 2019, a pour objectif d’alimenter une réflexion à la fois épistémologique, théorique et pratique sur les usages des archives coloniales. Elle aura lieu au cœur d’une institution centrale pour les recherches portant sur le passé colonial français et le passé de nombreux autres pays : les Archives nationales d'Outre-mer (ANOM). Elle permettra ainsi de faire dialoguer les approches archivistes et historiennes, autour de trois axes de réflexion principaux : « Qu'est-ce qu'une archive coloniale ? » ; « Comment articulier l'“archive coloniale” à d'autres archives ? » ; « Les “archives coloniales” comme lieux d'histoire et de mémoire ». En plus des panels de discussions, cette journée d'étude prévoit une présentation des ANOM et de certains de ses fonds par les archivistes de l'institution. 

Annonce

Journée d’Étude aux Archives nationales d’Outre-mer (Aix-en-Provence)

28 juin 2019

Argumentaire

Les « archives coloniales » : un sujet d’actualité

Qu’il s’agisse de la restitution d’archives aux pays anciennement colonisés ou de la déclassification de certains fonds jusqu’ici non-consultables, ces vingt dernières années ont été marquées par des controverses vives dont les « archives coloniales » ont été le centre. L’expression « archives coloniales » a désormais fait son entrée dans le débat public, corollaire de la prolifération du terme « colonial ». Ces dernières semaines, les médias se sont ainsi emparés d’une polémique scientifique, autour de la publication de Sexe, Race, et Colonies[i], reproduisant et diffusant des archives coloniales bien particulières : celles issues de la domination sexuelle en situation coloniale. Certain-e-s chercheurs-euses[ii] ou/et militant-e-s[iii] ont avancé que cette démarche, insuffisamment appuyée sur un appareil critique spécifique, tendait au voyeurisme et, ce faisant, reproduisait en partie le geste colonial.

La parution de ce livre prend place dans un contexte marqué par l’actualité d’une réflexion épistémologique sur les archives coloniales. Il y a près de dix ans, Ann Laura Soler publiait Along the Archival Grain[iv] (qui attend toujours sa traduction) au retentissement encore important de nos jours. Dans cet essai, l’anthropologue s’oppose à l’approche, devenue dominante, de prendre « à contre-pied » des archives coloniales, ou de les contourner par « l’invention » d’autres sources (entendues comme « non-coloniales »), à la recherche des voix des colonisé-e-s[v]. L’auteure propose en effet de plonger frontalement dans les archives coloniales et, au moyen d’un appareil critique ajusté, de les prendre au sérieux dans ce qu’elles nous apprennent sur leur contexte de production, les catégories sociales et administratives mais aussi les affects qui les traversent, ainsi que la manière dont les institutions archivistiques coloniales se construisent et se structurent au sein des sociétés coloniales.

Axes de réflexion

À l'image du passé colonial qu'elles interrogent, les archives coloniales sont des matériaux historiques qui font constamment l'objet de controverses. Cette journée a donc pour objectif d’alimenter une réflexion, à la fois épistémologique, théorique et pratique sur les usages des archives coloniales. Elle aura lieu au cœur d’une institution centrale pour les recherches portant sur le passé colonial français et le passé de nombreux autres pays ; elle permettra également de faire dialoguer les approches archivistes et historiennes.

Qu’est-ce qu’une « archive coloniale » ?

Cette dénomination cache, en effet, une multiplicité de documents souvent (mais pas exclusivement) écrits. Qui les produit ? Si les archives sont constituées par les autorités coloniales elles-mêmes, les matériaux qu’elles regroupent peuvent être de simples saisies, originellement produits par d’autres groupes et donc, parfois, par les populations colonisées (courriers, brochures, pamphlets, etc.). Dès lors, comment user des catégories « coloniales » qui les structurent ? Sont-elles toutes marquées par un rapport de domination coloniale comparable ? Quelles méthodes, pratiques, voire précautions les historien-ne-s doivent-ils adopter face, et avec, ces dites « archives coloniales » ?

Comment articuler l’ « archive coloniale » à d’autres archives ?

Si le premier axe vise à identifier les catégories coloniales de même que les précautions à prendre à leur égard, il s'agira, dans un second temps, de souligner l'articulation avec, d’une part, des documentations « non-coloniales » (en interrogeant la pertinence de cette catégorisation). Ainsi, le recueil de témoignages oraux par les historien-ne-s, de même que la recherche des écrits de l’intime sont souvent mobilisé-e-s pour obtenir des alternatives aux récits des archives coloniales. D’autre part, dans le cadre de l’étude des archives coloniales, les fonds abrités aux Archives nationales d’Outre-mer (ANOM) peuvent être mis en regard avec ceux d'autres lieux de conservation (archives d’autres puissances coloniales, archives coloniales conservées localement ou fonds « diplomatiques » comportant un nombre important de volumes produits durant la colonisation). C’est notamment ainsi que peuvent s’observer les tensions, divergences ou cohérences entre différentes branches des administrations coloniales. Il s’agira donc ici d’interroger l'articulation de corpus archivistiques distincts, de décloisonner les approches, d’interroger l’unilatéralité des « archives coloniales », de saisir le « colonial » à travers des archives résultant de divers contextes de productions. L’établissement de tableaux synoptiques de répartition des archives, encore souvent difficile à saisir, voire de premiers « inventaires bilatéraux[vi] » pourra être abordée.

Les « archives coloniales » comme lieux d’histoire et de mémoire.

En témoignent les événements scientifiques (congrès de la French Colonial Historical Society), et grand-publics (journées du patrimoine) organisés aux ANOM : l’institution abritant les documents issus de la colonisation française a une place centrale dans la production de discours sur le passé colonial exclusivement. Quelle est l’histoire de ces archives[vii] ? Quelles sont les continuités et les ruptures dans l’histoire de l’institution ? Plus largement, comment ont cheminé les documents aujourd’hui consultables aux ANOM depuis leur production et leur organisation dans les armoires des institutions coloniales ? Quels gestes, quelles intentions et quels hasards ont conduit à la constitution des fonds ? Au-delà du moment de production et de classification des documents, quels usages en ont été faits et en sont faits à l'heure actuelle ? Qui les consulte et pourquoi ? En plus de ces interrogations d’ordre scientifique, quels sont les enjeux politiques et mémoriels entourant une institution rarement évoquée dans le débat public alors même qu’elle abrite des documents sensibles ? Comment mobiliser ces archives dans le cadre de la transmission et de l’enseignement de l’histoire de la colonisation française ?

En plus des panels de discussion, cette journée d’étude prévoit une présentation des ANOM et de certains de ses fonds par les archivistes de l’institution.

Participation à la journée d’étude

Qui sommes nous ?

Le Groupe de recherche sur les ordres coloniaux (GROC) est un collectif d’une quarantaine de jeunes chercheurs et chercheuses en sciences sociales, fondé au printemps 2017. Nous avons tou-te-s en commun de travailler sur les « ordres coloniaux », c’est-à-dire sur la façon dont sont élaborés les Empires coloniaux (sans exclusive chronologie ni géographique), et dont l’ « ordre public » y est maintenu et contesté. Présent-e-s dans plusieurs universités, nous organisons à Paris des rencontres mensuelles de lectures, de dialogue et de travail.

Pour participer

Cette journée d’études est organisée aux ANOM à Aix-en-Provence le vendredi 28 juin 2019 est ouverte à tou-te-s, sur inscription. Les propositions de communication doivent être transmises au Groupe de recherche sur les ordres coloniaux (GROC) par courriel

au plus tard le 21 janvier 2019

à journeegrocanom@gmail.com. Elles se composeront d’un titre (provisoire), d’un résumé d’environ 500 mots présentant brièvement les questions proposées à la discussion, les archives mobilisées et la façon de les envisager. Les propositions doivent être accompagnées d’une courte biographie.

Les auditeurs peuvent d’ores et déjà s’inscrire en envoyant un courriel à journeegrocanom@gmail.com.

Comité d’organisation et conseil scientifique

Cette journée est organisée de manière collective par un groupe de jeunes chercheurs-euses (GROC).

  • Élise Abassade (IDHES, Paris 8 - LAH, La Manouba, Tunis),
  • Vincent Bollenot (CHAC, Paris 1),
  • Quentin Gasteuil (Centre d’histoire du XIXe siècle – ISP, Sorbonne Université – ENS Paris-Saclay),
  • Thierry Guillopé (ACP – CHS, Paris Est Marne-la-Vallée – Paris 1),
  • David Leconte (IDEES – LARHRA, Le Havre – ENS Lyon),
  • Sara Legrandjacques (CHAC, Paris 1),
  • Julie Marquet (ICT – CHAC, Paris 7 – Paris 1),
  • Baptiste Mollard (CESDIP, Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines).

Références

[i] Nicolas Bancel, Gilles Boëtsch, Pascal Blanchard, Jacques Martial, Achille Mbembe, Leïla Slimani, Christelle Taraud et Dominic Thomas (dir.), Sexe, race et colonies, Paris, La Découverte, 2018.

[ii] Philippe Artières, « Sexe, Race et Colonies : livre d’histoire ou beau livre ? », Libération, 30 septembre 2018 ; Kaoutar Harchi, « Quand l’art est l’autre nom de la violence », Le nouveau magazine littéraire, 12 octobre 2018.

[iii] Collectif Cases Rebelles, « Les corps épuisés du spectacle colonial », 27 septembre 2018 ; Mélusine, « Un ouvrage sans ambition scientifique »,Libération, 30 septembre 2018.

[iv] Ann Laura Stoler, Along the Archival Grain: Epistemic Anxieties and Colonial Commonsense, Princeton, Princeton University Press, 2009.

[v] Voir Gayatri Chakravorty Spivak, « Can the subaltern speak ? », Social theory: the multicultural and classic readings Colonial discourse and post-colonial theory: a reader, in Cary Nelson et Lawrence Grossberg (dir.), Marxism and the Interpretation of Culture, Londres, Macmillan Education, 1988, p. 271 – 313.

[vi] Sylvie Thénault, Violence ordinaire dans l’Algérie coloniale. Camps, internements, assignations à résidence, Paris, Odile Jacob, 2012, p. 15.

[vii] Dans le prolongement des réflexions initiées par plusieurs auteurs dans Isabelle Dion et Benoît Van Reeth (dir.), Histoires d'Outre-mer : les Archives nationales d'outre-mer ont 50 ans, Aix-en-Provence et Paris, ANOM et Somogy, 2017.

Lieux

  • 29 chemin du moulin de Testas
    Aix-en-Provence, France (13)

Dates

  • lundi 21 janvier 2019

Mots-clés

  • archive, ANOM, colonisation, colonial studies, histoire

Contacts

  • Vincent Bollenot
    courriel : Vincent [dot] Bollenot [at] univ-paris1 [dot] fr

Source de l'information

  • Sara Legrandjacques
    courriel : sara [dot] legrandjacques [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« (Dé)construire les « archives coloniales » : enjeux, pratiques et débats contemporains », Appel à contribution, Calenda, Publié le mardi 11 décembre 2018, https://doi.org/10.58079/11fz

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