AccueilDécouper l’espace politique

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Découper l’espace politique

Demarcating the political space

Numéro spécial de la revue « L’espace politique »

L’espace politique journal special issue

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Publié le jeudi 13 décembre 2018

Résumé

Cet appel à articles pour un numéro spécial « Découper l’espace politique » de la revue « L’espace politique » espère susciter l’intérêt d’auteurs travaillant sur la production de limites et de frontières et la délimitations de territoires que ce soit dans des perspectives théoriques ou empiriques mais avec une forte dimension politique ou géopolitique.

Annonce

Argumentaire

« Sport favori des géographes traditionnels » (Brunet, 1993), le découpage de l’espace en régions et en mailles de toutes tailles est avant tout le fait d’acteurs légitimes qui entendent exercer un pouvoir sur un territoire. En effet, si les chercheurs régionalisent l’espace avec, le plus souvent, un objectif heuristique, les découpages spatiaux ont avant tout un objectif de gestion et d’administration. Ainsi, les maillages administratifs partitionnent l’espace et s’emboîtent sur plusieurs niveaux scalaires afin de disposer de relais efficaces du pouvoir. Il ne s’agit toutefois pas de surestimer la différence entre les deux approches tant il est vrai que « diviser pour connaître » n’est pas très éloigné du « diviser pour régner » ; le savoir et le pouvoir étant « cousins germains » (Pinchemel, 1988/2002) comme l’illustre le découpage du monde en civilisations rivales proposé par S. Huntington dans les années 1990 à l’administration américaine. Les interrogations sur cette proximité ont donné lieu à de nombreux travaux sur « les ciseaux du géographe » (Vanier et Pelletier, 1997) ou sur « Les découpages du territoire » (Insee Méthodes, 1998) et plus généralement sur les experts du découpage de l’espace politique (Giraut et Antheaume, 2005 ; Rey, Coudroy de Lille, Boulineau, 2004). Bref, découper l’espace relève de techniques, de politiques mais aussi de pratiques qui comportent tout autant de représentations de l’espace et contribuent à lui donner une dimension politique. Ce regain de questionnements sur les découpages de l’espace et leurs architectes au tournant des années 1990-2000 s’inscrivaient alors dans la fin annoncée des territoires et dans l’ébranlement d’un monde sorti de l’ère de la Guerre froide où la mondialisation et sa contraction de l’espace-temps semblait imposer l’ère du flux et du réseau.

Depuis, l’espace politique continue d’être découpé, et le point est fait régulièrement sur la production de nouveaux territoires, Il est grand temps de revenir sur ce que découper l’espace politique veut dire aujourd’hui. Le présent appel à articles vise à explorer les recompositions d’acteurs, de formes, de modalités pour « découper l’espace politique », il invite à réfléchir aux axes suivants :

  1. La fin programmée des territoires s’est muée en l’émergence de territoires multiformes, où les territoires nés de la modernité politique (bornés, contigus, non-recouvrant et hiérarchisés) coexistent avec de nouvelles formes de découpages territoriaux plus labiles. D’un côté donc, les maillages territoriaux se trouvent renouvelés par la décentralisation (régions, aires métropolitaines) ou l’injonction à la bonne gouvernance ; ils peuvent être malmenés par la tension entre démocratie participative et démocratie représentative (Rosanvallon, 2008) avec des formes de recomposition des circonscriptions électorales par exemple, mais ils résistent. De l’autre côté, les nouveaux découpages de l’espace politique ne s’inscrivent plus forcément dans la durée de la gestion des territoires (apparition et disparitions de zonages d’action par exemple) ni dans l’emboîtement, la contiguïté et le non recouvrement des niveaux (on pense aux PNR en France par exemple). Les espaces aux limites flous (fuzzy borders), les soft spaces par opposition au hard spaces (Haughton, Allmendinger, Oosterlynck, 2013) deviennent de nouveaux découpages de la gestion mais aussi de l’action territoriale. Les contributions pourront interroger la multiplication de ces partitions territoriales à toutes les échelles et les enjeux qu’elles soulèvent dans la gestion des territoires. La multiplication de zonages aux limites plus ou moins floues et éphémères est-elle le signe d’une concurrence entre plusieurs visions des territoires et de la gouvernance territoriale ou reflète-t-elle le besoin d’inventer des outils complémentaires pour l’aménagement des territoires ? Quelles visions politiques des territoires induisent ces recompositions des espaces de gouvernance ?
  2. Ces découpages aux multiples facettes de l’espace politique révèlent l’entrée en jeux de nouveaux acteurs et de nouvelles formes d’action dans « l’art de la découpe ». Aux praticiens du découpage, tels que l’État ordonnateur, le géographe traceur de lignes et de frontières ou encore l’expert se sont ajoutés de nouveaux acteurs. La montée en puissance de l’ingénierie territoriale a désincarné parfois à l’excès le sens du découpage de l’espace politique pour les sociétés. A l’autre bout du spectre, au contraire, les individus eux-mêmes deviennent des découpeurs de l’espace : que l’on songe aux no-go zones construites par les réseaux sociaux (Giraut, 2013) comme nouveaux espaces politiques de non droit, ou bien encore aux cartes mentales des migrants qui, dans leur périple, perçoivent et se représentent autrement les découpages politiques du monde (Migreurop, 2017). Les contributions pourront ainsi interroger la multiplication des acteurs dans la gouvernance territoriale et, de fait, la multiplication des visions et des représentations appliquées à un espace.
  3. Le monde se recompose sous nos yeux de façon multipolaire mais régionalisée. Le découpage en régions et Etats-nations est reconfiguré par les nouvelles formes de découpage politique du monde. La figure politique de l’empire est ainsi rediscutée dans ses formes territoriales et sous ses avatars de puissances émergentes qui redécoupe le monde à leurs vues : vu d’Inde ou de Chine le planisphère politique est autre. La logique du trans-, celle du franchissement des limites politiques conventionnelles (trans-nationale) et de la traversée longitudinale des échelles (trans-scalaire) l’emporte désormais ; l’Union européenne et son ingénierie territoriale en est un des exemples les plus aboutis. Les contributions pourront interroger ces tensions ou recompositions dans les découpages de l’espace politique à l’ère du « trans- » (transnational, transfrontalier). Comment, par exemple, la construction d’espaces transfrontaliers, au cœur de la politique régionale européenne entrent-ils en concurrence avec les représentations traditionnelles de l’Etat-nation, fortement intégrées par les populations comme le traduisent leurs pratiques spatiales ? Comment les Etats, les institutions régionales ou les populations accueillent et gèrent ces nouveaux périmètres de l’action publique ? Comment s’expriment désormais des projets étatiques supranationaux comme l’ambitieux projet chinois des « nouvelles routes de la soie » qui traduit la volonté de construire une zone d’influence économique et politique à l’échelle transcontinentale.
  4. La mondialisation et la contraction de l’espace-temps ont recomposé l’articulation entre les échelles et entre les niveaux du local au global. Le monde s’organiserait dorénavant selon la scansion entre les mobiles et les immobiles et leurs visions respectives du monde (Veltz, 2015). Il pose de nouveaux défis aux espaces politiques de gestion et d’action. Le règne de la mobilité recompose les espaces d’action selon une logique fonctionnelle autour d’aires ou de bassins. Le réseau, social ou spatial, permettant la circulation, devient primordial dans la façon de penser les découpages de l’espace politique (Vanier, 2015). Par ailleurs, la glocalisation (Swyngedouw, 2004) tant annoncée et qui fait la part belle à l’articulation local/global réduit-elle pour autant le rôle des niveaux intermédiaires ? Quid des régions, des aires métropolitaines et de l’articulation avec les niveaux intermédiaires dans le cadre de récente réforme territoriale par exemple ? Plus encore, la mondialisation aboutit à un retour de la proximité spatiale. Loin d’effacer les échelles intermédiaires, la recomposition des échelles (rescaling) (Brenner, 1998) conduit à de nouveaux découpages politiques, à de nouvelles formules dont l’interterritorialité proposée par Martin Vanier est un avatar.

Les propositions d’articles allieront des aspects théoriques et des analyses empiriques. La perspective est à dessein ouverte mais il conviendra de voir autrement, de changer de prisme d’analyse sans restriction sur les échelles d’analyse. Une approche par la santé, la migration ou les risques par exemple constituent ainsi des entrées pertinentes pour remettre en question les découpages classiques de l’espace politique. Tous les continents et toutes les échelles pourront être mobilisés.

Modalités de soumission

Les instructions aux auteurs se trouvent au lien suivant : https://journals.openedition.org/espacepolitique/1302

Calendrier :

  • Novembre 2018 : appel à propositions
  • 15 avril 2019 : date limite d’envoi des articles

  • Septembre 2019 : retours des évaluations (double aveugle) aux auteurs
  • Décembre 2019 : date de retour des versions corrigées
  • Début 2020 : publication.

Coordination du numéro

Ce numéro spécial est coordonné par Emmanuelle Boulineau, Université de Lyon, ENS de Lyon, UMR 5600 EVS et Clarisse Didelon-Loiseau, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, UMR Géographie-Cités

Lieux

  • Reims, France (51)

Dates

  • lundi 15 avril 2019

Mots-clés

  • géographie politique, découpage, limite, frontière, territoire

Contacts

  • Clarisse Didelon-Loiseau
    courriel : Clarisse [dot] Didelon-Loiseau [at] univ-paris1 [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • Clarisse Didelon-Loiseau
    courriel : Clarisse [dot] Didelon-Loiseau [at] univ-paris1 [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Découper l’espace politique », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 13 décembre 2018, https://doi.org/10.58079/11gv

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