Página inicialTransmettre la pratique ethnographique : contours et détours

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Transmettre la pratique ethnographique : contours et détours

Transmitting ethnographical practices - contours and detours

Appel à contributions, Terrains/Théories n° 11

Terrains/Théories journal no. 11, call for contributions

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Publicado segunda, 04 de fevereiro de 2019

Resumo

Aborder la transmission et la circulation de la pratique ethnographique implique de s’interroger sur les choix et les transformations opérés par le chercheur du terrain à sa restitution en lien avec les contingences de son activité (contraintes de temps, de finalités applicatives, de contextes institutionnels, etc.). Plus largement, ce thème nous invite à comprendre comment la pratique ethnographique est saisie, transformée et adaptée voire parfois « tordue » d’une discipline à l’autre (architecture, marketing, sciences politiques, de gestion…). En conséquence, il faut donc questionner les finalités des usages d’une telle pratique en considérant la portée instrumentale et politique, historiquement liée à celle-ci et les conséquences méthodologiques qui en découlent.

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Aborder la transmission et la circulation de la pratique ethnographique implique de s’interroger sur les choix et les transformations opérés par le chercheur du terrain à sa restitution en lien avec les contingences de son activité (contraintes de temps, de finalités applicatives, de contextes institutionnels…). Plus largement, ce thème nous invite à comprendre comment la pratique ethnographique est saisie, transformée et adaptée voire parfois « tordue » d’une discipline à l’autre (architecture, marketing, sciences politiques, de gestion…). En conséquence, il faut donc questionner les finalités des usages d’une telle pratique en considérant la portée instrumentale et politique, historiquement liée à celle-ci et les conséquences méthodologiques qui en découlent.

Avec la volonté d’ouvrir un dialogue entre les disciplines, ce numéro de Terrains/Théories souhaite accueillir des contributions issues de l’ethnologie mais aussi d’autres disciplines ayant recours à la pratique ethnographique sans privilégier aucun terrain particulier (culture, travail, santé, sexualité, etc.). Ce sont donc les différentes formes prises par cette activité singulière allant de la collecte du matériau empirique jusqu’à la restitution de son analyse par l’écriture qui font l’objet de cet appel à contributions.

Argumentaire détaillé

Depuis quelques années, la « démarche ethnographique » connaît un certain succès qui va bien au-delà des ethnologues eux-mêmes. C’est ainsi que de nombreux chercheurs utilisent et transmettent cette démarche en dehors des seules formations en ethnologie, en anthropologie ou en sociologie ce qui en fait une pratique que l’on pourrait qualifier de transdisciplinaire. De surcroît, dans le champ académique français[1], l’ethnologie a la particularité d’un paradoxe. Forte sur le plan théorique[2], la discipline présente une plus grande faiblesse quant à sa représentation à l’université, au demeurant relativement récente[3]. Cette asymétrie entre « consistance intellectuelle » et institutionnalisation prend forme dans le faible nombre de postes universitaires et une plus grande densité  des centres de recherche[4]. De fait, très peu de formations universitaires en France proposent d’enseigner la discipline dès la première année de licence[5], l’offre se densifiant surtout en master notamment en accueillant des étudiant.e.s d’autres disciplines (sociologie, philosophie, lettres…). Désormais, nombre d’ethnologues enseignent en dehors des départements de leur discipline voire s’insèrent dans des institutions et organisations extérieures à l’université[6].

Cette configuration particulière pose, de manière aigue, la question de la transmission mais aussi de la circulation de la pratique ethnographique et de ses devenirs au sein des différentes disciplines. On se saisira ici du terme ethnographie en tant qu’il « est aujourd’hui largement répandu dans l’ensemble des sciences sociales pour désigner tout à la fois une méthode et ses résultats : le travail qualitatif de collecte des matériaux de terrain, le corpus qui en résulte et l’écriture qui en restitue l’analyse »[7].

Aborder la transmission et la circulation de la pratique ethnographique implique de s’interroger sur les choix et les transformations opérés par le chercheur du terrain à sa restitution en lien avec les contingences de son activité (contraintes de temps, de finalités applicatives, de contextes institutionnels…). Plus largement, ce thème nous invite à comprendre comment la pratique ethnographique est saisie, transformée et adaptée voire parfois « tordue » d’une discipline à l’autre (architecture, marketing, sciences politiques, de gestion…). En conséquence, il faut donc questionner les finalités des usages d’une telle pratique en considérant la portée instrumentale et politique, historiquement liée à celle-ci et les conséquences méthodologiques qui en découlent.

Avec la volonté d’ouvrir un dialogue entre les disciplines, ce numéro de Terrains/Théories souhaite accueillir des contributions issues de l’ethnologie mais aussi d’autres disciplines ayant recours à la pratique ethnographique sans privilégier aucun terrain particulier (culture, travail, santé, sexualité, etc.). Ce sont donc les différentes formes prises par cette activité singulière allant de la collecte du matériau empirique jusqu’à la restitution de son analyse par l’écriture qui font l’objet de cet appel à contributions. Comment se transmettent, s’adaptent et se recueillent tout à la fois les subtilités et les contraintes pratiques, et, au fond, qu’en est-il véritablement transmis ? A qui (ce qui pose la question seconde de ses réappropriations) et comment cette pratique – tout autant que la connaissance qu’elle produit – (se) diffuse(nt)-t-elle(s) dans cette pluralité de devenirs individuels ?

Axe 1. De la prescription au terrain : le transmis, le laissé et le transformé

Ce premier axe interroge, d’une part, ce que seraient les « bonnes pratiques » de l’enquête ethnographique et, d’autre part, la réflexivité qu’elle implique au regard de la réalité approchée par le terrain d’enquête… soit la rencontre parfois malaisée de ces deux aspects.  Comment les chercheur.e.s s’approprient et mettent en œuvre ce qui est leur transmis, à la fois en termes de méthode, de pratique réflexive ou de déontologie ? Au-delà de la méthode, comment le « terrain » se transmet-il, sachant la part d’indicible et d’inévidence dont il est porteur. Comment se transmettent les émotions, la relation, la subjectivité, la réflexivité[8] mais aussi le « voir en creux », la question de l’écriture et du récit ou encore celle de « l’immersion » ? Enfin, toutes ses réflexions pose la question de la restitution du terrain, de l’analyse et de la mobilisation de catégories semi-empiriques apprises comme le mythe, le rite, la culture. Que faire de telles catégories ? Le terrain est-il soluble dans celles-ci ?

Ainsi pourrions-nous nous inspirer des sciences du travail[9] pour interroger ce qui s’opère depuis les prescriptions présentes dans la pédagogie jusqu’à la mise en œuvre du travail ethnologique. Ou, pour le dire autrement, interroger quels sont les aménagements créés ou négociés afin de « combler le fossé entre ce qui a été prévu et la vie »[10]. De même, les chercheurs sont amenés, aujourd’hui plus qu’hier, à transmettre le fruit et les modalités même de leur activité scientifique à des publics toujours plus variés (étudiants aux aspirations et attentes hétérogènes, collègues, journalistes, mais aussi auditeurs radios, téléspectateurs, public non initié, etc.). En quoi cela infléchit-il, d’une façon ou d’une autre, ce qui est ici transmis de l’ethnographie ?

Par ailleurs, devant les contraintes actuelles de la recherche – appels d’offres, évaluation, aux temporalités contraintes, injonctions méthodologiques[11] – mais également face aux évolutions du droit et de l’éthique vers une judiciarisation accrue de la vie sociale (protection des données personnelles et respect de la vie privée, droit à l’image, secret professionnel, droit de la propriété intellectuelle, etc.)[12], que deviennent les « règles de métier » ? Quels sont les aménagements, en particulier dans la relation aux enquêtés, que les contraintes de production de la recherche génèrent ? En somme, comment est négociée cette « prise de risque qui commence dans la relation d’enquête et se prolonge dans le travail d’écriture »[13] ? Qu’est-il transmis et laissé de côté de la pratique ethnologique ?

La spécificité liée à la dimension principalement applicative de l’ethnographie engage ainsi à aborder règles du métier et réflexivité à la fois à l’aune des réalités contemporaines de la recherche académique et des réalités pratiques liées aux contraintes de terrain. Ainsi les chercheur.e.s sont amené.e.s à mettre en perspective des « bonnes pratiques » et à en faire une critique contextualisée au regard des exigences de la représentativité, de la question de la transparence épistémologique ou encore des effets sociaux consécutifs à ses productions et aux modalités de celles-ci. 

Axe 2. Circulation et transmission des pratiques ethnographiques : les devenirs professionnels et théoriques de l’ethnographie

Nous avons souligné en préambule la diversité des horizons professionnels et théoriques dans lesquels les pratiques ethnographiques peuvent prendre place. Comment est appréhendée l’activité de l’ethnologue aujourd’hui ? Comment cette activité est-elle prise en charge dans les différents domaines de son effectuation ? Quelles circulations, réappropriations voire recyclages adviennent-ils hors les milieux académiques et hors les filières propres à la discipline ? Ce numéro de Terrains/Théories entend par conséquent poser également la question de la transmission de la pratique ethnographique, à la fois par des chercheur.e.s non ethnologues mais aussi par des professionnels en dehors du champ universitaire. En cela, ce sont les finalités scientifiques comme applicatives de ces usages que souhaitons éclairer.

Ainsi, proposons-nous d’interroger ce qu’il advient de la pratique ethnographique et les formes qui sont les siennes dans le cadre de formations professionnelles (travail social, professions de santé, etc.) mais aussi d’enquêtes et d’activités au sein d’organisations économiques, d’institutions, d’associations ou d’organisations non gouvernementales dont la finalité ne relève pas stricto sensu de la production de connaissances. Du design au travail social ou à l’action humanitaire, qu’est-il transmis ici et selon quelles modalités ? Et que devient ce qui a été transmis ? En d’autres termes, nous tenterons d’évaluer comment la pratique ethnographique se manifeste puis s’intègre dans une pluralité d’univers professionnels.

Ces questions renvoient enfin au fait de parler d’une pratique ethnographique « appliquée » et aux différents sens de cette application au sein de la discipline dont nous avons déjà souligné la dimension « applicative ». Mais ethnographie scientifique – dont l'objectif serait la production de connaissances en soi – et ethnographie appliquée – dont l'objectif serait de produire des connaissances utiles aux mondes du travail – sont-elles distinguables ? Qu’est-ce que ces ethnographes exerçant hors du champ académique transmettent de la pratique ethnographique (en particulier, bien entendu, dans leur univers professionnels) ? Comment la transforment-ils ? A reverso, ces différents champs d’application et d’appropriations de l’ethnographie la transforment-ils et quelles manières ?

Notes

[1] A la différence d’autres pays, anglo-saxons ou européens, où des formations à l’anthropologie existent dès le bachelor.

[2] Avec des auteurs « historiques » comme Marcel Mauss ou Claude Lévi-Strauss ou plus récemment  Marc Augé, Georges Balandier, Alban Bensa, Maurice Godelier, Philippe Descola, Marc Abélès, Didier Fassin, François Laplantine…

[3] L’institut d’ethnologie de l’université de Paris est fondé en 1925 et inaugure l’enseignement de l’ethnologie en France (Jolly, 2001).

[4] Rogers Susan Carol, « L’anthropologie en France », Terrain, n° 39, pp. 141-162, 2002.

[5] Cinq licences complètes de Sciences de l’homme, Anthropologie et Ethnologie existent en France. Trois autres proposent un accès en 2ème ou en 3ème année. L’offre de masters est, elle, plus conséquente avec une quinzaine de formations, pas toutes uniquement dédiées à la discipline (source : Onisep).

[6] Ministères, musées, entreprises, associations…

[7] Barthélemy Tiphaine, Combessie Philippe, Fournier Laurent-Sébastien, Monjaret Anne (dir.), Ethnographies plurielles. Déclinaisons selon les disciplines, Paris, CTHS, 2014.

[8] Ghasarian Christian, De l’ethnographie à l’anthropologie réflexive. Nouveaux terrains, nouvelles pratiques, nouveaux enjeux, Paris, Armand Colin, 2002.

[9] Daniellou François, Laville Antoine, Teiger Catherine, « Fiction et réalité du travail ouvrier », Les cahiers français, n° 209, p. 39-45, 1983 ; Leplat Jacques, Hoc, Jean-Michel. (1983). « Tâche et activité dans l’analyse psychologique des situations », Cahiers de psychologie cognitive, 3, 1, p. 49-63, 1983 ; Clot Yves, La fonction psychologique du travail, PUF, Paris, 1999.

[10] Lhuillier Dominique, « L’activité dans et au-delà du monde du travail », in Dujarier Marie-Anne, Gaudart Corinne, Gillet Anne & Lénel Pierre, L’activité en théories. Regards croisés sur le travail, Octarès éditions, coll. « Travail et activités humaines », 2016.

[11] On se souvient du « quantitatif honteux » soit la logique de preuve par le chiffre, souligné par Jean-Claude Passeron : Passeron Jean-Claude, Raisonnement sociologique : l’espace non-poppérien du raisonnement naturel, Paris, Nathan, 1991.

[12] Laurens Sylvain et Neyrat Frédéric (coord.), Enquêter : De quel droits ? Menaces sur l’enquête en sciences sociales, Paris, Éditions du Croquant, 2010.

[13] Fassin Didier, « L’inquiétude ethnographique », in Bensa Alban, Fassin Didier, Les politiques de l'enquête, Paris, La Découverte, 2008.

Modalités de soumission

La date limite de réception des propositions d’article est fixée au 15/02/2019.

Elles doivent être adressées aux coordinateurs du numéro : Emmanuelle Savignac (emmanuelle.savignac@sorbonne-nouvelle.fr) et Vincent Rubio (rubiovincent@hotmail.com).

Les propositions devront comporter :

  • un titre ;
  • un résumé d’environ 5000 signes ;
  • les informations sur le ou les auteurs : nom, affiliation institutionnelle, fonction, adresse professionnelle, numéro de téléphone et courriel.

Le comité de rédaction sélectionnera les propositions et en informera les auteurs au plus tard le 28/02/2019.

Il est demandé aux auteurs de bien vouloir respecter les consignes éditoriales de la revue : https://teth.revues.org/501

Les articles attendus sont d’un format de 45 000 à 60 000 signes (espaces, notes et bibliographie incluses) et devront être remis au plus tard le 31/05/2019 pour une publication du numéro en décembre 2019.

Les articles seront évalués en double-aveugle.

Pour toute information complémentaire, veuillez contacter le secrétariat d’édition : antoine.dauphragne@parisnanterre.fr

Présentation de la revue

Terrains/Théories est une revue pluridisciplinaire de sciences sociales à comité de lecture articulant la conceptualisation et la recherche empirique. Elle vise à constituer un carrefour entre sociologie, anthropologie et philosophie. Elle part du principe que la philosophie politique – au sens large – doit aujourd'hui dépasser une approche purement conceptuelle du politique en se rapprochant des sciences sociales, tandis qu’il devient de plus en plus important pour ces dernières d'expliciter les choix théoriques qui peuvent orienter les pratiques de recherche et les enquêtes de terrain.

Plus d’informations ici : https://teth.revues.org/

Responsables scientifiques

  • Emmanuelle Savignac Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3, CERLIS
  • Vincent Rubio Université Paris-Nanterre, Sophiapol

Datas

  • sexta, 15 de fevereiro de 2019

Palavras-chave

  • pratique ethnographique, transmission, règles de métier

Contactos

  • Emmanuelle SAVIGNAC
    courriel : emmanuelle [dot] savignac [at] univ-paris13 [dot] fr

Urls de referência

Fonte da informação

  • Emmanuelle SAVIGNAC
    courriel : emmanuelle [dot] savignac [at] univ-paris13 [dot] fr

Licença

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Para citar este anúncio

« Transmettre la pratique ethnographique : contours et détours », Chamada de trabalhos, Calenda, Publicado segunda, 04 de fevereiro de 2019, https://doi.org/10.58079/11vy

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