Argument
In Philosophie de la Relation (Philosophy of Relation), Édouard Glissant defines archipelagic thinking as hesitant intuitive thinking that can be opposed to continental ways of thinking, which above all rely on systems:
"With continental thinking, the mind runs with audacity, but we then believe that we see the world as a block, or at large, or at once, as a kind of imposing synthesis, just as we can, by way of general aerial views, see the configurations of landscapes and mountainous areas as they pass by. With archipelagic thinking, we get to know the rocks in the rivers, assuredly the smallest rocks and rivers".[1]
Within a globalized context, Édouard Glissant’s “one-world” can only be the network of its worlds[2]: the archipelagic relation cannot therefore happen without the narrative reconfiguration of the world, and this reconfiguration must necessarily occur through an ethics of the relation to the other. The opposition between “the continent” (figure of totality) and the “island” (open figure of fragmentation) implies considering the relation in its totality, on the physical, linguistic, intellectual and cultural levels. Between distance from the other (and placing value on this distance as constitutive of a radical identity) and relation, can the metaphor of insularity also allow for the construction of a comparative ethics of relation?
Indeed, with both diachronic and synchronic dynamics, comparatism is truly a “hermeneutics of defamiliarisation” – in the words of Françoise Lavocat following the publication of Death of a Discipline by Gayatri Chakravorty Spivak[3]. Insularities constitute a major issue in our discipline, which is strongly influenced by the questions of both heteroglossia and subalternity. Considering insularity means thinking about distance, the attention we give to isolation – as a critical approach to our own reflexive position – ; but also questioning the metaphoric status of the shores that surround the island and of insular ensembles. What movements? What stases? Can islands still be put in relation?
This call for papers of the journal Trans- proposes to go beyond the analysis of the works of Édouard Glissant, and to envision notions of insularity and of archipelagos as tools for analysis and of critical methodology in comparative literature. If Édouard Glissant laid out the notion of archipelago as the refusal of all “system thinking”[4], it is because the archipelago allows us to think through plurality and diversity and to take into account different insularities. It is because Glissant’s use of the metaphor of insularity functions to put in contact a plurality of worlds that archipelagic thinking can also contribute to epistemological considerations on the stakes of comparatism.
In this issue of the journal Trans-, it will be a matter not so much of studying glissantian archipelagoes in their thematic or symbolic dimensions, as of considering what the concept of archipelagic relation can do for the discipline of comparative literature, in analyzing the ramifications and the becomings of this concept in key texts and positions. Contributors to this issue are therefore invited to connect and disconnect the questions raised by the notions of insularity and archipelago, to be considered less as thematic and metaphorical ideas in literary works than as tools for analysis and of critical methodology for our discipline. We will in this way attempt to consider the ways in which the image of insularity/ies can inform our position as researchers in comparative literature.
Submission guidelines
Proposals for articles (3000 characters), along with a brief bibliography and short presentation of the author
must be sent before May 19th 2019
in .DOC or .RTF format to lgcrevue@gmail.com. The articles selected must be submitted by September 15th 2019. We remind you that the journal of comparative literature TRANS- accepts articles written in French, English, Italian and Spanish.
Notes
[1] Our translation. “Par la pensée continentale, l’esprit court avec audace, mais nous estimons alors que nous voyons le monde d’un bloc, ou d’un gros, ou d’un jet, comme une sorte de synthèse imposante, tout à fait comme nous pouvons voir défiler par des saisies aériennes les vues générales des configurations des paysages et des reliefs. Par la pensée archipélique, nous connaissons les roches des rivières, les plus petites assurément, roches et rivières.” GLISSANT, Édouard, Philosophie de la relation : poésie en étendue, Paris, Gallimard, 2009, p. 45.
Francesca TUMIA, docteure en Littérature française et francophone et chargée de cours à l’UFR de Littérature et Linguistique Française et Latine de l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
[2] GLISSANT, Édouard, Tout-monde, Paris, Gallimard, 1995.
[3] SPIVAK, Gayatri Chakravorty, Death of a Discipline, New York, Columbia University Press, 2003.
[4] GLISSANT, Édouard, Introduction à une poétique du divers, Paris, Gallimard, 1996.
Argumentaire
Dans sa Philosophie de la relation, Édouard Glissant définit la pensée archipélique comme pensée de l’essai, de la tentation intuitive, qu’on pourrait opposer à des pensées continentales, qui seraient avant tout de système :
"Par la pensée continentale, l’esprit court avec audace, mais nous estimons alors que nous voyons le monde d’un bloc, ou d’un gros, ou d’un jet, comme une sorte de synthèse imposante, tout à fait comme nous pouvons voir défiler par des saisies aériennes les vues générales des configurations des paysages et des reliefs. Par la pensée archipélique, nous connaissons les roches des rivières, les plus petites assurément, roches et rivières".[1]
Au sein d’un contexte mondialisé, le « Tout-monde » d’Edouard-Glissant ne peut être que le réseau de ses mondes[2] : la mise en relation archipélique ne peut donc se faire sans reconfiguration narrative du monde, et cette reconfiguration passe nécessairement par l’éthique d’une relation à l’autre. L’opposition entre « le continent » (figure de la totalité) et « l’île » (figure ouverte de la fragmentation) implique une pensée totale de la relation, aussi bien physique que linguistique, qu’intellectuelle ou culturelle. Entre distance avec l’autre (et mise en valeur de cette distance comme constitutive d’une identité radicale) et mise en lien, la métaphore de l’insularité peut-elle alors aussi permettre de construire une éthique d’une relation comparatiste ?
En effet, dans une dynamique à la fois diachronique et synchronique, le comparatisme est véritablement une « herméneutique de la défamiliarisation » – selon les mots de Françoise Lavocat à la suite de la parution du Death of a Discipline de Gayatri Chakravorty Spivak[3]. Les insularités constituent un enjeu majeur de notre discipline, fortement influencée à la fois par les questions d’hétéroglossie et de subalternités. Considérer l’insularité, c’est penser la distance, le regard que l’on porte sur l’isolement – démarche critique de notre propre position réflexive – ; mais aussi interroger les statuts métaphoriques des bandes de mer qui entourent l’île et les ensembles insulaires : quels mouvements ? Quels statismes ? Peut-on encore mettre en relation les îles ?
Cet appel de la Revue Trans- se propose donc de dépasser l’échelle de l’analyse des oeuvres d’Edouard Glissant, et d’envisager les notions d’insularités et d’archipels en tant qu’outils d’analyse et méthodologie critique en littérature comparée. Si Édouard Glissant a posé la notion d’archipel comme refus de toute « pensée de système »[4], c’est parce qu’elle permet la pensée d’une pluralité du divers et la saisie des différentes insularités. C’est parce que la métaphore de l’insularité chez Édouard Glissant fonctionne comme la mise en contact d’une pluralité des mondes que la pensée archipélique peut aussi participer d’une réflexion épistémologique sur les enjeux du comparatisme.
Dans ce dossier de la revue TRANS-, il ne s’agira donc pas tant d’étudier les archipels glissantiens dans leurs dimensions thématiques et symboliques, que de considérer ce que le concept de relation archipélique fait à la discipline de la littérature comparée, en analysant les ramifications et les devenirs de ce concept dans les textes et nos postures. Les contributeurs de ce numéro sont ainsi invités à nouer et à dénouer les interrogations que soulèvent les notions d’insularité et d’archipel, moins comme donnée thématique et métaphorique dans les œuvres littéraires, que comme outil d’analyse et de méthodologie critique pour notre discipline. Nous nous efforcerons ainsi de penser de quelle manière l’image de l’/des insularité/s peut informer la posture du chercheur en littérature comparée.
Modalités de soumission
Les propositions d’article (3000 signes), accompagnées d’une brève bibliographie et d’une courte présentation du rédacteur doivent être envoyées
avant le 19 mai 2019
en fichier .DOC ou .RTF à l’adresse lgcrevue@gmail.com. Les articles retenus seront à envoyer pour le 15 septembre 2019. Nous rappelons que la revue de littérature générale et comparée TRANS- accepte les articles rédigés en français, anglais, italien et espagnol.
Comité scientifique
Le comité scientifique, composé de chercheurs de l’université Paris 3, est le garant de la spécificité disciplinaire de la revue et de la qualité des contributions. Il définit les orientations de la revue, lui assure une cohérence et un caractère proprement comparatiste.
Le comité de rédaction publie sur le site de la revue et sur différentes listes de diffusion internationales (Fabula, MLA, etc.) un appel à communication correspondant à chaque nouveau numéro : les propositions de communication (3000 signes environ), accompagnées d’une brève bibliographie et d’une courte présentation du rédacteur, sont à envoyer à l’adresse lgcrevue@gmail.com. L’appel à contribution précise les délais d’envoi de la proposition de communication, et de l’article rédigé en cas de sélection. Les propositions comme les articles peuvent être rédigés dans les quatre langues acceptées par la revue : le français, l’anglais, l’espagnol et l’italien.
Le comité de lecture (auquel participent les membres du comité de rédaction) se réunit une première fois pour présélectionner les propositions de communication les plus intéressantes. Un courriel est alors envoyé aux rédacteurs afin de les informer de l’acceptation ou du refus de leur proposition. Le refus n’est pas nécessairement argumenté. Les rédacteurs dont la proposition a été retenue disposent d’environ deux mois pour rédiger l’article et l’envoyer à l’adresse lgcrevue@gmail.com. Les articles doivent respecter la feuille de style de la revue, indiquée dans un courriel au contributeur, et comporter deux résumés dans deux des langues acceptées par la revue, ainsi qu’une brève présentation du rédacteur. Le comité de lecture se réunit une seconde fois afin de sélectionner les articles qui seront publiés. La sélection de la proposition de communication n’entraîne donc pas automatiquement la publication de l’article, soumis au comité de lecture. Les rédacteurs reçoivent un courriel les informant de la publication ou du refus de leur article.
Membres du Comité scientifique
- Yen-Mai TRAN-GERVAT, maître de conférences en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Philippe DAROS, professeur de Littérature générale et comparée, directeur de l’Ecole Doctorale 120 – Littérature française et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Florence OLIVIER, professeur de Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Tiphaine SAMOYAULT, professeur de Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
Membres du Comité de lecture
- Philippe DAROS, professeur de Littérature générale et comparée, directeur de l’Ecole Doctorale 120 – Littérature française et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Nadja DJURIC, enseignante à l’Université de Belgrade, doctorante en Littérature générale et comparée à l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Marcos EYMAR, maître de conférences au département d’Espagnol de l’université d’Orléans
- Fiona MCINTOSH VARJABEDIAN, Professeur des universités, université Lille 3
- Julia PESLIER, maître de conférences en Littérature comparée à l’université de Franche-Comté.
- Yen-Mai TRAN-GERVAT, maître de conférences en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Membres du Comité de rédaction et du Comité de lecture
- Rédacteur en chef : Iván SALINAS ESCOBAR, docteur en Littérature générale et comparée de l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, enseignant au Lycée Claude Monet
- Ninon CHAVOZ, ancienne élève de l’Ecole Normale Supérieure et agrégée de lettres modernes, doctorante contractuelle en Littérature francophone et chargée de cours à l’université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Antoine DUCOUX, ancien élève de l’ENS de Lyon, agrégé de lettres modernes et doctorant contractuel en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Guillermo HECTOR, doctorant en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- A’icha KATHRADA, doctorante et chargée de cours en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Marie KONDRAT, doctorante en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, en cotutelle avec l’Université de Genève
- Adeline LIEBERT, docteur en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, enseignante en CPGE au lycée Thuilliers à Amiens
- Francesca MAMBELLI, doctorante à l'EHESS, Centre de Recherche sur les Arts et le Langage (CRAL)
- Matilde MANARA, doctorante contractuelle en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Amanda MURPHY, doctorante et chargée de cours en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, et lectrice d’anglais à l’université Panthéon Sorbonne – Paris 1
- Sana M’SELMI, doctorante en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Naomi NICOLAS KAUFMAN, doctorante en Littérature générale et comparée, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
- Cécile ROUSSELET : doctorante en Littérature générale et comparée, dont la thèse est financée par la Fondation pour la Mémoire de la Shoah
- Victor TOUBERT, doctorant contractuel en Littérature générale et comparé, université Sorbonne Nouvelle – Paris 3
Notes
[1] GLISSANT, Édouard, Philosophie de la relation : poésie en étendue, Paris, Gallimard, 2009, p. 45.
[2] GLISSANT, Édouard, Tout-monde, Paris, Gallimard, 1995.
[3] SPIVAK, Gayatri Chakravorty, Death of a Discipline, New York, Columbia University Press, 2003.
[4] GLISSANT, Édouard, Introduction à une poétique du divers, Paris, Gallimard, 1996.