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Déconnexions

Disconnections

L'administration publique déconnectée ? Perte du lien citoyen et rupture de la chaîne des valeurs publiques

The public administration disconnected? The loss of the citizen bond and the break in the chain of public values

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Publié le vendredi 05 avril 2019

Résumé

L’actualité politique nous invite à interroger les déconnexions au sein de la chaîne des valeurs publiques. Quelles sont les manifestations et les causes d’une « administration déconnectée » ? Comment rencontrer les défis concomitants de l’action des gouvernements : (a) la difficulté de produire par l’action publique des effets socio-économiques justes, effectifs et perçus comme tels par les citoyens et (b) la difficulté à créer des boucles de rétroaction efficaces avec les usagers, les citoyens et l’opinion publique ?

Annonce

Le Séminaire francophone est un lieu unique d’échanges en langue française au sein du congrès annuel du Groupe Européen d’Administration Publique (GEAP-EGPA). Il y véhicule des idées, méthodes et traditions politico-administratives spécifiques, avec une large couverture européenne et internationale.

Le Séminaire Francophone est organisé avec le concours de l’Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE), organisme de recherche, de formation des fonctionnaires et d’accompagnement des réformes et des politiques publiques du Ministère de l’Economie et des Finances (Paris, Bercy).

Argumentaire

En plein déroulement du mouvement des « gilets jaunes », le ministre des Affaires Etrangères français livrait sur une radio nationale son analyse sommaire de la situation (RTL, 9 déc 2018) : « Je pense qu’on ne prend pas suffisamment en compte l’impact social et politique des mesures que nous sommes amenés à prendre ». Si cette analyse reflète une difficulté répandue de l’action gouvernementale, son sens ambigu illustre deux problématiques contemporaines : (a) la difficulté de prévoir et de produire par l’action publique des effets socio-économiques effectifs et perçus comme tels par les citoyens et (b) la difficulté de l’action publique à mettre en place et à fructifier des boucles de rétroaction avec les usagers, les citoyens et l’opinion publique, difficulté que l’on peut repérer plus simplement comme un problème d’écoute et de dialogue entre l’autorité publique et les administrés.

Ces difficultés ne sont pas inconnues de la recherche universitaire. Analysant la notion de performance publique, Bouckaert et Halligan (2008, 2011) posaient un « micro-modèle » idéal qui relie par causalités directes l’allocation et l’efficience des ressources, la performance des activités, le volume et la qualité des résultats des opérateurs, les effets socio-économiques induits et, in fine, la confiance des citoyens dans les institutions et les services publics. Or, les auteurs s’empressaient en même temps de souligner l’existence de « Grands Canyons » de la performance en montrant les liens distendus entre les productions des opérateurs et les effets socio-économiques d’une part, et entre les résultats des politiques publiques et la confiance citoyenne d’autre part. Pour autant la confiance des citoyens est un produit et un ingrédient essentiel de l’action publique ; elle assoit la légitimité des opérateurs, l’acceptabilité des politiques publiques, et conditionne la satisfaction des administrés (Van de Walle & Bouckaert 2003).

L’actualité politique nous invite donc à réinterroger les déconnexions inhérentes de la chaîne des valeurs de la performance publique. Faut-il pour autant y diagnostiquer le syndrome d’une administration déconnectée ?

Du point de vue du gestionnaire, la rupture ou la préservation du lien de confiance avec le citoyen est appréhendée à travers la qualité de service aux usagers. Les premières préoccupations pour assurer cette qualité seront la pertinence des moyens et leur bon usage. Or, certains cas de « non-gestion » ont aggravé des situations de déconnexion dont l’effet corrosif sur la confiance en l’Etat et sa légitimité n’est jamais évalué. Ainsi, une demande politique et sociale croissante ne s’est, pendant longtemps, traduite par aucune réflexion sur les moyens des cours et tribunaux belges (problèmes « d’efficience allocative », Knoepfel, Larrue, Varone, Hill 2011), aboutissant à un dérapage des délais de justice difficile à résorber (Al-Assi 1999). Actuellement encore dans de nombreux pays européens, le secteur pénitentiaire donne l’exemple quotidien de carences graves : surpopulation, désinsertion des détenus, absence de soins...

Outre ces situations de déconnexion « au premier degré », on doit aussi reconnaître la possibilité d’une rupture produite secondairement par les outils de management mis en place, c›est-à-dire par une logique d’action instrumentale dont découle l’essentiel des recommandations des réformes publiques contemporaines :

  • Perte d’autonomie des agents en contact (street-level bureaucrats) (Raone 2014)
  • Mise sous tension des grandes professions (Belorgey 2013)
  • Effets pervers de certains dispositifs, notamment liés à la mesure de la performance (Monjardet 1996; Finkelstein et Dowell 1996)
  • Poids des procédures, bureaucratisation managériale (contrôle et gestion des risques notamment), voire usage cosmétique ou ostentatoire de dispositifs managériaux (Talbot 2000)
  • Perte de pertinence des dispositifs participatifs qui n’arrivent pas à représenter tout le monde (Plamper et Beutel-Menzel 2007)

Ainsi loin d’être toujours une réponse simple à la déconnexion, le management public peut aussi s’avérer impuissant, voire parfois accentuer la rupture de certains liens entre l’administration et les citoyens.

Enfin, cette déconnexion tend à se retrouver également dans le champ académique, tant il est vrai que le champ de recherche des sciences administratives et du management public apparaît souvent déconnecté de celui de l’analyse et de l’évaluation des politiques publiques – et réciproquement. Tout se passe comme si les deux communautés scientifiques avaient de grandes difficultés à développer un programme de recherche commun sur des objets (relevant du domaine général de l’action publique) qui pourtant le sont très largement (Nahrath, Varone 2009 ; Emery, Giauque, Ritz 2009). Rares sont en effet les recherches de sciences sociales qui portent spécifiquement sur les effets (des réformes) du fonctionnement des administrations publiques sur la mise en œuvre des politiques publiques. Les processus de « rationalisation » administrative ont-ils réellement permis de renforcer la capacité de pilotage des politiques publiques par les autorités publiques ? De renforcer leur capacité d’action sur les groupes cibles ? Et plus fondamentalement encore, ont-ils permis d’accroître la capacité des autorités publiques à prendre en charge et résoudre les problèmes publics à l’origine de la formulation des politiques publiques ?

Parallèlement, les travaux généralement politologiques, ne formulent que peu d’hypothèses intégrant des dimensions d’analyse du management public pour expliquer ou évaluer les effets des politiques publiques. Quels rôles jouent les administrations publiques dans les processus de politiques publiques ? Dans quelle mesure constituent-elles un type d’acteurs à part dans les configurations actorielles des politiques publiques ? En quoi les caractéristiques des arrangements politico-administratifs permettent-elles d’expliquer les processus – plus ou moins efficaces – de mise en œuvre des politiques publiques ? Ces lacunes de connaissance au sujet de l’articulation entre les politiques institutionnelles (politiques d’organisation et de réformes administratives) et les politiques substantielles concernent notamment (1) la production des plans d’action organisant les priorisations spatio-temporelles des actes de mise en œuvre (outputs), (2) les impacts sur les groupes cibles et (3) les effets réels sur la résolution effective des problèmes publics.

Proposition de communication

L’agenda des réformes publiques récentes s’appuie sur l’hypothèse de la modernisation, cherchant à accroître la qualité et la performance des opérations, mais aussi sur l’idée d’une meilleure évaluation de l’action publique en général (Van de Walle & Bouckaert 2003) et sur l’impératif d’une meilleure écoute citoyenne et d’un dialogue renouvelé avec les citoyens. Il s’agit maintenant de prendre du recul sur l’efficacité de ces dispositifs, de réinterroger les déconnexions subsistant dans la relation aux citoyens et dans la chaîne des valeurs publiques.

Nous invitons les chercheurs et les praticiens des différents domaines de l’action publique à avoir une lecture critique des évolutions mentionnées. Les descriptions, comme les tests d›hypothèses, les travaux empiriques comme les réflexions de fond, l›exploration de l›existant comme la prospective sont également bienvenues. En particulier, les démarches comparatives ou celles mettant en lumière l’originalité des expériences de terrain ou des conceptions et doctrines administratives et gestionnaires, seront les bienvenues.

Vous pouvez nous communiquer par le biais du site Internet du congrès un résumé de deux pages maximum en respectant les intitulés suivants :

  • Titre de la communication
  • Les thèmes ou mots clés
  • La problématique soulevée
  • Un résumé des méthodes de recherche et/ou approche empirique utilisée
  • Les résultats avancés
  • Les références sélectives
  • Le nom des auteurs, le nom des Universités ou organisations et les coordonnées (Adresse, E-mail, N° téléphone)

Dates clé

  • Délai pour la soumission en ligne des propositions : Prolongé jusqu’au 29 avril 2019

  • Délai pour la décision et la sélection par les co-directeurs : 15 mai 2019
  • Délai pour la soumission de la communication complète : 12 août 2019

Modalités pratiques

Veuillez soumettre votre proposition de communication via le site web de la Conférence: https://www.egpa-conference2019.org/

Le Comité scientifique

  • Annie BARTOLI, professeur, Université de Versailles St-Quentin-en-Yvelines, France.
  • Véronique CHANUT, professeur, Université Panthéon-Assas, Paris, France.
  • Jean DESMAZES, professeur, Université de la Rochelle, France.
  • Yves EMERY, professeur, IDHEAP, Lausanne, Suisse.
  • Robert FOUCHET, professeur, Université d’Aix-Marseille, Aix-en-Provence, France.
  • Marcel GUENOUN, directeur de la recherche, Institut de la Gestion Publique et du Développement Economique, Paris, France.
  • Bachir MAZOUZ, professeur, ENAP, Québec, Canada.
  • Martial PASQUIER, professeur, IDHEAP, Lausanne, Suisse.
  • Marius PROFIROIU, professeur, Académie des Etudes Economiques, Bucarest, Roumanie.

Coordonnateurs

  • Emil TURC, Aix Marseille Univ, Université de Toulon, CERGAM, IMPGT, Aix-en-Provence, France
  • Jan MATTIJS, Solvay Brussels School of Economics and Management, Université Libre de Bruxelles
  • Stéphane NAHRATH, Institut de Hautes Etudes en Administration Publique (IDHEAP) Université de Lausanne

Lieux

  • Queen's University Belfast
    Belfast, Grande-Bretagne

Dates

  • lundi 29 avril 2019

Fichiers attachés

Mots-clés

  • gestion, management public, administration

Contacts

  • Jan Mattijs
    courriel : jan [dot] mattijs [at] ulb [dot] ac [dot] be

Source de l'information

  • Jan Mattijs
    courriel : jan [dot] mattijs [at] ulb [dot] ac [dot] be

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Déconnexions », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 05 avril 2019, https://doi.org/10.58079/12gw

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