AccueilAgir dans la ville. Art et politique dans l'espace urbain 4

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Agir dans la ville. Art et politique dans l'espace urbain 4

Acting in the city. Art and politics in the urban space 4

De la destruction

All about destruction

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Publié le jeudi 25 avril 2019

Résumé

Conformément à ses trois éditions précédentes, l’objectif du colloque « Agir dans la ville. Art et politique dans l'espace urbain 4 : De la destruction » est de réunir des chercheurs issus de différents champs disciplinaires tels que l’architecture, l’histoire de l’art, la sociologie, l’anthropologie, la philosophie, les arts et sciences de la communication, les langues et lettres, la géographie, le droit ou les sciences historiques autour d’une analyse critique de la dimension politique des interventions dans les espaces urbains. Afin de faire du colloque une véritable plateforme d’échanges et de débats scientifiques, chaque intervenant disposera d’un temps de parole de 40 minutes suivi d’un échange avec l’assistance de 20 minutes. Dans cette perspective, il est attendu des participants qu’ils assistent à l’entièreté du colloque.

Annonce

11-13 décembre 2019. Université de Mons

Argumentaire

Dans nos sociétés contemporaines, la destruction d’un bâtiment ou plus largement d’un ensemble architectural ou urbain suscite des discours contradictoires que l’on peut globalement regrouper selon deux approches. D’un côté, la destruction involontaire d’un lieu urbain, lors d’une catastrophe naturelle par exemple, est systématiquement présentée de manière négative : elle apparaît comme un déficit, tant au niveau de la matérialité des bâtiments détruits qu’au niveau de leurs usages. Celle-ci fait souvent l’objet d’une narration qui articule la destruction à ses conséquences immédiates. Aux images d’espaces urbains détruits correspondent en effet celles, d’une part, d’habitants contraints à la survie, trouvant refuge dans un gymnase, un hall ou une école, absolument dépendants d’une aide venant de l’extérieur et celles, d’autre part, de groupes de pillards, voire de violeurs et de meurtriers évoluant dans un univers en ruine. Il en va de même pour les destructions volontaires, dans le cas par exemple d’une guerre ou d’attaques terroristes. Ici aussi, destruction d’espaces urbains et disparition d’une norme sociale sont étroitement liées dans les représentations qu’elles génèrent : ce que l’on perdrait en même temps que l’agencement matériel d’un bâtiment ou d’un espace urbain, ce sont des usages ou des pratiques données comme légitimes. Corollairement, l’espace apparaît, non pas comme le produit d’usages et de pratiques toujours susceptibles de le transformer, mais comme le cadre normé et normatif en dehors duquel toute socialité ou civilité semble radicalement fragilisée. De l’autre côté, les transformations continues des espaces urbains par le pouvoir, le plus souvent pour des raisons économiques, imposent chaque fois des destructions, parfois à très grande échelle, comme par exemple dans le cas du développement du Grand Paris impliquant la démolition de dizaines de tours de logements en banlieue, voire de grands ensembles entiers. Dans les discours du pouvoir justifiant la destruction, celle-ci n’apparaît pas comme une perte, mais comme une transformation des espaces et de leurs usages induits. La destruction s’apparente alors à une reconfiguration positive autant que nécessaire comme en témoignent exemplairement les expressions désignant cette destruction. On parle ainsi de « grands travaux », de « réaménagement urbain », de « revitalisation urbaine » ou encore de « grand projet de ville ». Autrement dit, à l’instar du processus de « destruction créatrice » identifié par l’économiste Schumpeter, la destruction n’est plus présentée comme une perte, mais au contraire comme la condition de possibilité d’une reconfiguration nécessaire des usages et des pratiques conditionnés par un espace. Dans bien des cas, c’est alors une raison supérieure relevant généralement de l’intérêt économique, du redéploiement, de l’expansion ou encore de l’ajustement de tout un quartier à l’échelle ou à l’économie visuelle d’un nouveau bâtiment – en somme : un alignement sur une norme supérieure – qui est invoquée pour justifier la destruction d’un bâtiment ou d’un quartier. Par ailleurs, les manifestations d’opposition à ces destructions par les défenseurs du patrimoine, témoignent, elles aussi, de l’attachement à une norme. En tant qu’il ne questionne pas les rapports de force instaurés par un pouvoir dominant, l’impératif de la conservation d’un bâtiment ou d’un ensemble qualifié « d’historique » vise en effet à préserver un pouvoir en place, comme le confirment, en creux, bien des moments révolutionnaires dans lesquels le renversement d’un régime politique va de pair avec la destruction, par les insurgés, de ses bâtiments les plus représentatifs.

Les traitements des destructions volontaires ou involontaires rapidement décrits ici s’articulent tous à une norme dont on regretterait la perte (suite à une catastrophe naturelle, un conflit armé, etc.) ou, au contraire, dont on voudrait favoriser l’instauration (au nom d’une revitalisation, du redéploiement, etc.). Quand la destruction est le fait de mouvements s’inscrivant dans une perspective de résistance ou d’émancipation politique, c’est-à-dire d’une contestation même des normes existantes, elle fait également l’objet d’une instrumentalisation, par le truchement d’une mise en scène notamment médiatique, qui la présente sur le mode d’un déficit. Les luttes sociales et politiques mettant directement en jeu la matérialité des espaces urbains sont, en effet, systématiquement présentées de façon négative. Dans le cas des mouvements d’occupation ou de blocage d’usine par les ouvriers, par exemple lors d’une grève ou, plus récemment, à l’occasion de l’occupation de certaines facultés françaises par les étudiants, les médias généralistes et une large partie du monde politique insistent ainsi sur le « saccage » des lieux, celui-ci affectant directement leur fonctionnalité, parfois jusqu’à les rendre inopérants. Dans ces discours, la disparition d’usages attribués jusqu’alors au lieu ou au bâtiment détruit est assimilée à un écart que les destructeurs opèrent par rapport à une norme sociale (violence débridée, vandalisme, distinction entre « manifestants » et « casseurs » etc.). Or, il est possible de développer d’autres perspectives/approches de ces phénomènes. Lorsqu’il revient sur les mouvements d’occupation d’usine par les ouvriers, Jacques Rancière montre comment la destruction de certains lieux intérieurs aux usines obéit non pas à un objectif de « saccage », mais, au contraire, à un objectif de construction des lieux d’assemblée et de réunion qui rendront possible l’émergence puis la constitution d’une parole ouvrière, celle-ci étant de facto interdite par l’agencement spatial de l’usine. De la même façon, la destruction supposée des universités par les étudiants peut être comprise comme la tentative de transformer le rapport dominant aux savoirs et les hiérarchies qu’il impose en reconfigurant l’espace qui les rend possibles et les justifie au quotidien. Sur un tout autre plan encore, l’insistance médiatique sur la situation misérable des personnes sinistrées suite à une catastrophe naturelle, sur les pillages qu’elles subissent, ou encore sur l’effondrement de toute organisation sociale suite à un bombardement par exemple, occulte avant tout l’ensemble des réactions collectives à la catastrophe. Ces narrations prolongent ainsi cette catastrophe par une invisibilisation des formes de solidarité et de nouvelles modalités du politique que les survivants trouvent dans les espaces « ouverts » par les ruines.

Ces quelques exemples, très différents, de la destruction – volontaire ou involontaire, réalisée ou subie – comme condition de la reconfiguration ou réinvention des usages et des pratiques sociales, des formes de socialité et de civilité, nous invitent à poser le postulat de départ suivant qui sera au fondement de ce colloque : si les destructions organisées par le pouvoir ou s’inscrivant dans les logiques de pouvoir dominantes sont qualifiées positivement en tant qu’elles seraient par exemple un mal nécessaire, on peut également tenter de penser à nouveaux frais les destructions échappant ou s’opposant à ces logiques. Autrement dit, si l’on accepte l’idée suivant laquelle la désignation des phénomènes de destruction, d’un côté, comme création ou transformation et, de l’autre côté, comme perte, dégradation ou saccage, est déterminée par la relation de renforcement ou d’opposition de ces phénomènes avec les logiques de pouvoir dominantes, la question n’est plus : « que perd-on dans telle destruction ? », mais « qu’est-ce qui se transforme, se reconfigure ou se réinvente à la suite de la destruction ? », « quels nouveaux usages, quelles nouvelles pratiques fait-elle exister ? », « qu’est-ce qui, à même la ruine, est toujours en train de voir le jour ? »

Partant de ces questions, cette 4e édition du colloque « Agir dans la ville. Art et politique dans l’espace urbain » a précisément pour objectif d’interroger les phénomènes de destructions non autorisées des espaces urbains comme autant de phénomènes de reconfiguration, de réinvention, voire de création d’usages et de pratiques sociales. Dans cette optique, plusieurs axes thématiques pourront être envisagés parmi lesquels :

  • la reconfiguration des usages et des pratiques d’un lieu dans les mouvements de blocage ou d’occupation ;
  • la requalification de la portée politique de la destruction par les modes de désignation des agents de la destruction (les casseurs, les terroristes) ;
  • l’analyse des nouvelles formes de socialité naissant dans le cadre de la destruction ;
  • l’impact de la destruction sur le partage entre espaces publics et privés comme vecteur de dépassement d’une norme ;
  • l’intégration de la destruction/reconfiguration à la planification urbanistique ou architecturale (comme modalité de contournement d’une commande par exemple) ;
  • la destruction d’un bâtiment comme geste artistique visant à remodeler les usages et trajectoires dans un lieu.

Informations pratiques

Conformément à ses trois éditions précédentes, l’objectif du colloque « Agir dans la ville. Art et politique dans l'espace urbain 4 : De la destruction » est de réunir des chercheurs issus de différents champs disciplinaires tels que l’architecture, l’histoire de l’art, la sociologie, l’anthropologie, la philosophie, les arts et sciences de la communication, les langues et lettres, la géographie, le droit ou les sciences historiques autour d’une analyse critique de la dimension politique des interventions dans les espaces urbains. Afin de faire du colloque une véritable plateforme d’échanges et de débats scientifiques, chaque intervenant disposera d’un temps de parole de 40 minutes suivi d’un échange avec l’assistance de 20 minutes. Dans cette perspective, il est attendu des participants qu’ils assistent à l’entièreté du colloque.

Modalités de soumission

Les propositions de communication (max. 500 mots) suivies d’une brève note biobibliographique de l’auteur doivent être adressées à Marjorie Ranieri (Marjorie.Ranieri@umons.ac.be) pour le 1er juin 2019 au plus tard. Réponse sera donnée aux proposants le 30 juin 2019 au plus tard.

Les deux langues officielles du colloque sont le français et l’anglais.

L’Université de Mons prendra en charge le logement ainsi que les repas des intervenants pendant la totalité du colloque. Les frais de déplacement seront à charge des participants.

Direction scientifique

  • Damien Darcis (Université de Mons)
  • Jeremy Hamers (Université de Liège)
  • Marjorie Ranieri (Université de Mons)

Comité scientifique 

  • Emmanuel Béhague (Université de Strasbourg)
  • Julia Bonaccorsi (Université Lumière Lyon 2)
  • Grégory Cormann (Université de Liège)
  • Miriam de Rosa (Coventry University)
  • Maud Hagelstein (Université de Liège)
  • Étienne Holoffe (Université de Mons)
  • François Provenzano (Université de Liège)

Laboratoires partenaires

  • U.R.B.A.In.E (UMONS)
  • MAP (UR Matérialités de la politique, Traverses/ULiège)
  • Contrechamp (Traverses/ULiège) 
  • Lemme (Laboratoire d’étude sur les médias et la médiation, Traverses/ULiège)
  • CONTRECHAMP (Traverses/ULiège)

Lieux

  • Université de Mons, Faculté d'Urbanisme et d'Architecture, rue d'Havré 88, B-7000 Mons
    Mons, Belgique (B-7000)

Dates

  • samedi 01 juin 2019

Fichiers attachés

Mots-clés

  • destruction, ville, mouvements sociaux, art urbain

Contacts

  • Damien Darcis
    courriel : damien [dot] DARCIS [at] umons [dot] ac [dot] be

Source de l'information

  • jeremy hamers
    courriel : jhamers [at] uliege [dot] be

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Agir dans la ville. Art et politique dans l'espace urbain 4 », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 25 avril 2019, https://doi.org/10.58079/12jo

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