AccueilPenser les espaces du futur à travers la crise en Amérique latine : Imaginaires et prospectives

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Penser les espaces du futur à travers la crise en Amérique latine : Imaginaires et prospectives

Thinking future spaces through the Latin American crisis: visions and forecasts

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Publié le mercredi 15 mai 2019

Résumé

La journée proposée invite à réfléchir sur les manières d’aborder le futur dans l’étude des espaces latino-américains, en s’inscrivant à la fois dans la lignée de la géographie régionale et territoriale, dans le champ de la prospective, et dans une plus large perspective interdisciplinaire. Que ce soit dans les exercices de prospective, dans les sciences sociales ou dans les arts, ce futur catastrophique a une spatialité : il s’appuie sur des données territorialisées et s’incarne dans des paysages. A travers les crises, diverses disciplines nous donnent en effet à voir des espaces tels qu’ils sont envisagés dans l’avenir.

Annonce

Présentation

La journée proposée invite à réfléchir sur les manières d’aborder le futur dans l’étude des espaces latino-américains, en s’inscrivant à la fois dans la lignée de la géographie régionale et territoriale, dans le champ de la prospective, et dans une plus large perspective interdisciplinaire. Elle aura lieu durant la Semaine annuelle de l’Amérique Latine et de Caraïbes instituée depuis 2014.

La géographie se saisit du futur à travers différentes approches : la prospective l’aborde explicitement mais la géographie du développement et la géographie du risque s’en saisissent également de manière implicite. Le développement est associé à l’idée de progrès et de modernité et renvoie à une vision de ce qui est souhaitable pour l’avenir tant du point de vue moral que matériel (Castillo Aguirre, 2015). La notion de développement durable, qui tente de renouveler celle du développement, notamment à travers la question des ressources et de leur gestion, fait encore plus clairement référence à l’avenir puisqu’il est question de préserver des ressources « pour les générations futures » (Dubresson, Veyret, 2012). La dénonciation des politiques développementalistes a cependant mis l’accent sur un ensemble de risques et l’idée d’un avenir fait de crises et de catastrophes majeures. À une vision utopique succède une vision dystopique, que les films-catastrophes et romans d’anticipation d’une part, et les simulations de crise d’autre part, illustrent chacun à leur manière.

Or, que ce soit dans les exercices de prospective, dans les sciences sociales ou dans les arts, ce futur catastrophique a une spatialité : il s’appuie sur des données territorialisées et s’incarne dans des paysages. A travers les crises, diverses disciplines nous donnent en effet à voir des espaces tels qu’ils sont envisagés dans l’avenir. La gestion de crise, qui relève de multiples spécialités, établit des scenarii qui doivent prendre en compte les données du territoire pour rendre réalistes et efficaces les exercices de préparation tels que les simulations. Les historiens, eux, montrent comment un avenir dystopique a pu être envisagé dans le passé révélant les inquiétudes et les maux du présent. Du côté des arts, les peintures murales, le street et le land art marquent l’espace de craintes et d’espérances ; le cinéma traduit des angoisses de l’avenir ; quant à la littérature, elle est riche de romans qui s’incarnent dans des territoires du présent pour rendre crédibles des fictions se déroulant dans le futur.

La question du futur catastrophique est d’autant plus aiguë quand des pouvoirs publics décident de préparer un territoire à une situation de crise qu’il n’a pas connu directement ou récemment mais qui, dimension globale du risque aidant, semble désormais probable. Tel est le cas des villes comme Los Angeles ou Lima qui attendent leur « big one » sismique ou des nombreuses métropoles qui s’inscrivent aujourd’hui dans le risque terroriste (Coaffee, 2009 ; Baudouï, 2015). Comment, dès lors, penser la catastrophe future quand il n’y a pas de retour d’expérience pertinent dans le même lieu ou la même région ? Si penser la catastrophe oblige à une réflexion interdisciplinaire (Acosta, Musset, 2018), se préparer à la suivante fait appel à une ensemble de savoirs parmi lesquels nous intégrons les représentations, les imaginaires, les croyances. Ainsi, le choix de préparer ou de représenter en priorité telle population ou tel territoire témoigne de représentations dominantes des causes de la crise et de la projection pour l’avenir des peurs présentes. Nous pouvons alors nous interroger sur les expériences, les représentations, les références et plus largement les savoirs (Coafee, 2009 ; Truc, 2017) qui sont mobilisés pour envisager la crise dans une région ou une ville.

Comment gestionnaires, artistes et écrivains pensent-ils les espaces potentiellement en crise ? Sur quels savoirs, formels ou informels, d’expert ou de profane, scientifique et d’usage construisent-ils leurs scenarii ?

L’attente de la catastrophe qui fonde le risque est un moment d’incertitude fait de méconnaissance, d’indétermination et d’inquiétude dans lequel se développent arguments et controverses. C’est donc un moment privilégié pour analyser ces arguments et pour observer des rapports de force en présence sur un territoire (Chateauraynaud, 2011 ; Nachi, 2006). Comment ces rapports de forces sont-ils envisagés ? Comment les espaces décrits dans ce futur incertain deviennent-ils des enjeux politiques ?

Cette journée souhaite mettre en valeur l’étude des Amériques pour plusieurs raisons. La première est la possibilité de dépasser la dichotomie Nord/Sud dans une région cohérente du point de vue de la circulation des références, des pratiques et des experts, rendue possible notamment par les grandes mobilités intra-régionales et internationales qui caractérisent les Amériques. La seconde est que les Amériques vivent du Nord au Sud un ensemble de menaces communes, notamment les aléas sismiques, climatiques, terroristes et d’incendie. Cependant, pour une même menace, les niveaux de développement, tout comme les contextes politiques, économiques et sociaux, sont différents. La région est riche d’utopies poétiques et politiques (Santiso, 1996). Le continent a connu précocement sa phase développementaliste, positiviste et progressiste et son retournement, post-moderne, dont témoigne le titre d’un ouvrage de la québécoise Nathalie Gravel (2009) : Géographie de l’Amérique latine : une culture de l’incertitude. Du Nord au Sud, un ensemble de menaces, naturelles ou technologiques, un ensemble d’événements disruptifs, justifient la projection dans un avenir en crise : une riche création littéraire, cinématographique, artistique construit des mondes dystopiques cependant que ces mêmes événements construisent un risque compris comme la représentation d’une catastrophe probable mobilisant experts et gestionnaires de la crise qui sont reconnus et fournissent protocoles et modèles à l’échelle internationale.

Parmi ces espaces du futur, les régions métropolitaines concentrent à la fois les habitants, les biens et les activités, donc les enjeux. Mais les métropoles ne sont pas indépendantes de leur environnement. La menace peut venir de la région (pensons à des réseaux d’approvisionnement comme les oléoducs ou à des sites industriels excentrés) qui subit en retour la crise en ville, le risque systémique contribuant à définir la condition de métropole (Sierra, 2015). Nous constatons également que la plupart des dystopies (comme des utopies) s’incarnent dans des régions métropolitaines. La plupart des communications présentées s’inscrivent donc dans ce cadre géographique.

Programme

Introduction : 9h30 - 10h15

  • Cécile Faliès, Alexis Sierra, Maud Yvinec : « Regards croisés sur les espaces du futur en Amérique latine »

TABLE 1 : Les imaginaires territoriaux sous tension de la littérature à la géopolitique (Mexique, Equateur, Argentine) – 10h15 – 12h00

  • Marina Salles (Littérature, CRHIA, Université de La Rochelle) : « Crise et utopie mexicaine dans Ourania de JMG Le Clézio »
  • Emmanuelle Sinardet (Centre d'études équatoriennes - CRIIA, Etudes romanes EA 369, Université Paris Nanterre): "Crise, canular et dystopie en Équateur : le docu- menteur Un secreto en la caja de Javier Izquierdo (2016)"
  • Sofia Pérez (Géographe, CRH, EHESS): « Et si la frontière se fond avec les glaciers ? Penser les enjeux géopolitiques de la Patagonie face à la crise climatique»

TABLE 2 : Penser les espaces futurs entre catastrophes passées et crises potentielles (Chili, Pérou, Argentine) – 14h – 16h30

  • Enrique Aliste (Géographe, Universidad de Chile): « La ville de Concepción (Chili) après le 27/02/2010 : sa condition tellurique comme un patrimoine territorial ?"
  • Alexis Sierra (Géographe, Prodig, Université de Cergy-Pontoise-ESPE) : « Penser la future crise en ville : les amphibolies, lieux du diagnostic et du pronostic »
  • Quentin Marchand (Géographe, Prodig, Université de Paris 1) : « Penser le futur des lieux de la ville avec le métro : entre promesse d’une intégration réussie et scenario de crise à Lima (Pérou) »
  • Alberto Preci (Géographe, Prodig, Université de Paris 1) : « Le bassin-versant du fleuve Pilcomayo (Argentine). Des inondations prévisibles, un futur incertain »
  • Marie Pigeolet (Géographe, Prodig, Université de Paris 1) : « Phénomènes climati- ques extrêmes, futurs urbains et religion à Lima (Pérou) »

Bibliographie indicative

Acosta V., Musset A., 2018, Les catastrophes et l’interdisciplinarité, dialogues, regards croisés, pratiques, Louvain-La Neuve, Academia,

Castillo Aguirre, 2015, « La evolución histórica de la idea de progreso en el contexto del desarrollo regional », Remexca vol 2, p. 375-380

Baudouï R., 2015, « La vulnérabilité des villes au terrorisme. Les dilemmes de l’action publique », Les Annales de la Recherche Urbaine, pp. 118-127

Chateauraynaud F., 2011, Argumenter dans un champ de forces. Essai de balistique sociologique, Paris : Éditions Petra, coll. « Pragmatismes »)

Coaffee J, 2009, “Protecting the Urban. The Dangers of Planning for Terrorism”, Theory, Culture & Society,Vol. 26(7–8), pp. 343–355

Dubresson A., Veyret Y, 2012, 10 défis pour la planète, Paris, Autrement, 2012, p. 7-11

Gravel N.(2009). Géographie de l’Amérique latine : une culture de l’incertitude. Montréal, Presses Universitaires du Québec. 372 p.

Nachi M, 2006, Introduction à la sociologie pragmatique, Paris, Armand Colin, coll. Cursus, 2006, 223p.

Santiso J., 1996. Le chant des utopies en Amérique Latine. In: Quaderni, n°28, Hiver 1996. Utopie et imaginaire de la communication. pp. 67-81.

Sierra A., 2015, « La capitale-risque ou comment le statut de métropole participe à construire le risque », Géocarrefour, 90/2 | 2015, 173-182.

Gérôme Truc, Sidérations. Une sociologie des attentats, Presses universitaires de France, Paris, 2016, 354 p.

Lieux

  • Institut de Géographie, 191, rue Saint-Jacques
    Paris, France (75005)

Dates

  • samedi 25 mai 2019

Fichiers attachés

Mots-clés

  • Territoires, futur, crise, imaginaire, prospective, géopolitique

Contacts

  • Alexis SIERRA
    courriel : a [dot] alexis [dot] sierra [at] gmail [dot] com
  • Association de Géographes Français
    courriel : assogeo [at] wanadoo [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • Alexis SIERRA
    courriel : a [dot] alexis [dot] sierra [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Penser les espaces du futur à travers la crise en Amérique latine : Imaginaires et prospectives », Journée d'étude, Calenda, Publié le mercredi 15 mai 2019, https://doi.org/10.58079/12sk

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