Présentation
Ce colloque a reçu le label et le soutien officiel de la Fédération Romane de Sémiotique[1], qui a décidé d’organiser sa prochaine Assemblée Générale à Limoges, pendant le colloque, et d’inciter les équipes qu’elle fédère à apporter leur contribution scientifique à cette manifestation.
Il est organisé, sous la responsabilité de Jacques Fontanille, par le Centre de Recherches Sémiotiques de l’université de Limoges, équipe membre de la Fédération Romane de Sémiotique.
Il se tiendra sous la Présidence d’Honneur de Paolo Fabbri, Professeur de sémiotique, Directeur du Centro Internazionale Umberto Eco di Scienze Semiotiche (CiSS) de l’Université Carlo Bo à Urbino.
Argumentaire
Le colloque de 2019 (en octobre) à Limoges, intitulé « De la manipulation à l’incitation. Inflexions des comportements et politiques publiques », regroupera des spécialistes de sémiotique, des sciences politiques, et des sciences cognitives et des sciences de gestion. Il s’adressera notamment à tous ceux qui, dans les structures de l’Etat, les administrations et les collectivités territoriales, ont à concevoir et à conduire des politiques d’incitation et de modification des comportements.
Le problème à traiter
En matière de politiques publiques, ce ne sont ni les bonnes idées ni la force des arguments qui font défaut, mais la capacité à infléchir durablement les comportements, à comprendre comment et pourquoi ils apparaissent ou disparaissent, pourquoi ils perdurent ou changent. L’information est disponible, voire largement diffusée, mais les comportements apparemment non rationnels (dans les domaines de l’alimentation, de la santé, des addictions, des transports, etc.) ne disparaissent pas. L’analyse la plus répandue consiste alors à considérer que la transition entre les informations disponibles et les décisions prises est affectée de divers biais cognitifs, sociaux et culturels.
La solution des nudges
La solution actuellement la plus connue est d’abord venue des sciences économiques et de gestion : il s’agit des « nudges », ces « coups de pouce » qui incitent à prendre les meilleures décisions.
Richard Thaler, l’économiste (prix Nobel) qui a porté la solution du nudge depuis plusieurs décennies, propose d’influencer en douceur les consommateurs, en les aidant à réaliser leurs objectifs ou leurs attentes. Pour R. Thaler et C. Sunstein, il s’agit « d’une version relativement modérée, souple et non envahissante du paternalisme, qui n’interdit rien et ne restreint les options de personne. Une approche philosophique de la gouvernance, publique ou privée, qui vise à aider les hommes à prendre des décisions qui améliorent leur vie sans attenter à la liberté des autres »[2]. Les sciences cognitives ont alors pris le relais, en faisant l’inventaire des « biais » qui produisent ces décisions « irrationnelles ». On évoque notamment des raccourcis mentaux et des pressions et normes sociales. Au titre des pressions sociales, par exemple, David Cameron a mis en place une équipe intitulée « Nudge Unit » en 2010, en Grande-Bretagne, qui a conçu un dispositif pour améliorer la collecte des impôts : les contribuables retardataires étaient systématiquement avertis quand leurs voisins avaient payé leurs impôts.
Eléments de discussion
La théorie des nudges, dès ses débuts il y a cinquante ans, affiche ostensiblement ses fondements idéologiques : l’insistance systématique sur le fait que le nudge n’affecte pas la liberté de choix de l’individu, ne compromet pas son libre-arbitre, et ne vise qu’à renforcer ce qu’il désire, montre bien que l’utilisation du nudge en matière de politiques publiques participe d’un libéralisme maximaliste, celui qui n’admet aucune contrainte ou limite imposée à la libre volonté de l’individu. Cette orientation idéologique évite par ailleurs de poser la question de la justification des inflexions et incitations publiques, en présupposant que tous les citoyens veulent librement ce que la puissance publique souhaite par ailleurs.
Pourtant, l’approche sémiotique (et non idéologique) montre bien que la liberté du vouloir-faire, du pouvoir-faire ou du savoir-faire consiste aussi à refuser, résister et s’opposer aux souhaits et injonctions de la puissance publique. Il est évident que les questions modales (le vouloir, le pouvoir, le devoir, le savoir et le croire) seront au cœur de l’interrogation de cette catégorie graduable que nous intitulons « De la manipulation à l’incitation ».
Ensuite, pour rendre compte du fonctionnement des nudges, les sciences cognitives se réfèrent en général à l’architecture des choix qui guide la décision individuelle. Néanmoins, d’autres courants des sciences cognitives avancent plus prudemment. Daniel Kahneman, autre économiste, autre Prix Nobel, distingue deux niveaux et deux vitesses de la pensée et de la décision : le circuit court (les « raccourcis mentaux ») est rapide, car il exploite les émotions et l’« instinct » (pour éviter les implications problématiques de la notion d’« instinct », mieux vaudrait ici parler d’impulsions) ; le circuit long est plus lent, car il emprunte les voies de l’analyse et de la réflexion. On peut rappeler ici le rôle que Claude Zilberberg attribuait au tempo dans la formation même des configurations sémiotiques. Mais le tempo entraîne également, au sein même de ces configurations, des affects et des émotions : on ne sait plus très bien où situer l’action des nudges, entre impulsion, émotion et décision. Daniel Kahneman a notamment montré, avec sa théorie des perspectives, que l’appréciation des gains et des pertes est dissymétrique, en raison du poids respectif des affects qui portent sur les uns et les autres. « Décision » est le nom de la pratique telle qu’on l’observe de l’extérieur, mais ce nom dit peu de choses de la composition sémiotique du processus qui y conduit, du point de vue de l’acteur social.
L’état des lieux en sémiotique
La sémiotique de l’action s’est dotée à la fin des années soixante-dix d’une « théorie de la manipulation », qui était supposée exploiter la première phase de la séquence narrative canonique, et déboucher sur une sémiotique des passions[3]. Cette ébauche, reprise succinctement dans Sémiotique 1[4], a finalement eu peu d’écho, car la sémiotique des passions, élaborée au cours des années quatre-vingt, a pris d’autres directions, et fait peu de cas du rôle des émotions et des passions dans les interactions du type « manipulations ». Le concept de « manipulation », entendu au sens générique de modalités du « faire faire », était pourtant suffisamment extensif pour faire place à des typologies précises et opératoires.
Il faut attendre une vingtaine d’années pour que, dans les développements d’une sociosémiotique dont les recherches sont fondées sur l’analyse des interactions sociales, et inspirées notamment par les travaux d’Eric Landowski, on retrouve de possibles articulations entre la manipulation et toutes ses variétés, les émotions, les passions et les régimes de signification. En ce sens, on pourrait également considérer que la plupart des recherches de Paolo Fabbri, depuis près de quarante ans, et même si leur intitulé ne l’indique pas directement, sont des contributions à une sémiotique de la manipulation qui ne dirait pas ostensiblement son nom.
La question des nudges est donc une opportunité théorique et méthodologique, pour relancer une recherche collective et internationale en prolongement de la théorie de la manipulation, pour faire un état des acquis et des apports les plus récents, pour identifier et circonscrire des solutions alternatives. On examinera notamment la possibilité de faire porter l’incitation et l’inflexion des comportements directement sur les interactions entre les acteurs et leur environnement, que ce soit en termes du guidage du flux de l’attention, ou en termes de « confort » ou d’« inconfort » des voies alternatives des comportements. Explorer systématiquement les différents régimes sémiotiques de l’influence. Intégrer les interactions acteurs/milieux, qui s’apparenteraient à une « factitivité » écologique. Examiner les solutions retenues, disponibles et possibles pour quelques politiques publiques concrètes. Etudier les aspects sémiotiques des propositions formulées par les sciences économiques, politiques et cognitives. Ce sont quelques-uns des enjeux de ce colloque.
Jacques Fontanille
Professeur émérite de Sémiotique
jacques.fontanille@unilim.fr
Programme :
Vous trouverez le programme complet sur le site officiel du colloque : https://www.unilim.fr/ceres-colloquenudges2019/programme/.
Voici les thèmes étudiés, plusieurs conférences ayant lieux pour chacun :
- Mercredi 16 octobre : Inflexions douces - Pressions sociales - Tactiques et instruments.
- Jeudi 17 octobre : Régulations collectives - Réviser la théorie de la manipulation - Terrains, milieux et collectifs.
- Vendredi 18 octobre : Affects, passions et incitations sensibles - Après-midi consacrée à une séance pénière organisée par la Chaire e-santé, bien vieillir et autonomie.
Mercredi 16 Octobre
- 9h Accueil
- 10h Allocution d’ouverture de Gérard Blanchard, Vice-Président de la Région Nouvelle Aquitaine
- 10h15 Présentation du colloque par Jacques Fontanille
Inflexions douces
- 10h30 Paolo FABBRI (Université d’Urbino)La « poussée gentille » : tactiques obliques pour « faire faire » le « ne pas faire »
- 11h Denis BERTRAND (Université Vincennes-Saint-Denis)Praxis énonciative, habitude et résistance au changement
- 11h30 Didier TSALA-EFFA et Lucile BERTHOME (CeReS, Limoges) Détours, retardements, échecs, incertitudes du jeu Terra Aventura : la gamification géolocalisée comme forme d’incitation au bénéfice d’un territoire
- 12h Discussion
13h Déjeuner sur place
Pressions sociales
- 14h15 Oscar QUEZADA MACHIAVELLO (Universidad de Lima)Interdépendances de l’université : enchevêtrements et désenchevêtrements
- 14h45 Juan ALONSO et Mehrvi FAZAL (Philépol, Paris Diderot)« Je vais lui faire une offre qu’il ne pourra pas refuser ». Du hard power au soft power
- 15h15 Nedret OZTOKAT KILICERI (Université d’Istanbul, Groupe SémiotIST)Du faire discursif politique au comportement civil : nudges et effets
- 15h45 Discussion
Pause
Tactiques, instruments et affordances
- 16h15 Marion COLAS-BLAISE (Université du Luxembourg)Vers une politique du nudge : l’instrument au service de l’incitation
- 16h45 Jorge LOZANO (Université Complutense de Madrid)Je sais que c’est faux, mais je le crois. Transformations modales du croire
- 17h15 Camille ALLOING et Julien PIERRE (CEREGE, Poitiers)Des nudges ou des affordances ? Les affects pour observer ce qui fait agir
- 17h45 Discussion
19h Réception à la Mairie de Limoges
Jeudi 17 Octobre
Régulations collectives
- 9h Anne BEYAERT-GESLIN (MICA, Université Montaigne, Bordeaux)Mobilités urbaines : quelques manipulations du « vivre ensemble »
- 9h30 Isabella PEZZINI et Paolo PEVERINI (Lars – Laboratoire Romain de Sémiotique)Communication non conventionnelle et nudging en contexte urbain
- 10h Jean-Marie KLINKENBERG (Université de Liège)L’incitation douce dans la mise en œuvre des politiques linguistiques. Le cas des « usages non sexistes »
- 10h30 Fiona OTTAVIANNI (EM Grenoble)Transformations de l’action publique et dynamiques institutionnelles : quels changements dans les comportements ?
- 11h Discussion
Pause
11h45 Table-ronde des élus de Limoges-Métropole
13h Déjeuner sur place
Réviser la théorie de la manipulation
- 14h15 Anouar BEN MSILA (LTD – Langages,Textes, Discours – Université de Meknès)Le nudging, un processus sémiotique spécifique
- 14h45 Valeria DE LUCA (CeReS, Limoges)Qui gardera les gardiens ? Manipulation, affect et transparence : quelques éléments sémiotiques pour une évaluation critique des nudges
- 15h15 Hamid Reza SHAIRI ( Université Modares,Téhéran)Quand la sanction manipulatoire et les instances de manipulation influencent le cours du comportement économique de la société iranienne
15h45 Discussion
Pause
Terrains, milieux et collectifs
- 16h30 Anne KRUPICKA et Cécile McLAUGHLIN (CEREGE Poitiers et CeReS Limoges)Goûtons aux nudges : contre le gaspillage alimentaire
- 17h Jacques FONTANILLE et Julie LAIRESSE (CeReS, Limoges)Les nudges et le contrôle sémiotique du milieu et du collectif : de l’influence socio-environnementale dans l’inflexion des comportements collectifs
- 17h30 Discussion
- 17h45 Assemblée Générale de la Fédération Romane de Sémiotique
20h Dîner du colloque
Vendredi 18 Octobre
Affects, passions et incitations sensibles
- 9h Angelo DI CATERINO (CeReS, Limoges)Nouvelles formes du faire croire : le rôle de la théorie des nudges et des passions dans les fake-news
- 9h30 Evangelos KOURDIS et Loukia KOSTOPOULOU (Université Aristote de Thessaloniki, AUTH SemioLab) Les campagnes médiatiques sur la crise économique grecque comme moyen d’inflexion des comportements de la population européenne
- 10h Tiziana MIGLIORE (Université d’Urbino) Les nudges ou la manipulation du sensible : les Îles de plastique
- 10h30 Discussion
Pause
- 11h15 Pierluigi BASSO FOSSALI (ICAR, Université Lyon Louis Lumière) Des index aux pouces. La rationalité liquide
- 11h45 Discussion
- 12h00 Alessandro ZINNA (Université Toulouse Jean Jaurès)Synthèse et conclusions
12h30 Déjeuner sur place
Séance grand public
Organisée par la Chaire CHAIRE e-santé, bien-vieillir et autonomie
Fondation Partenariale de l’Université de Limoges
14h30 Programmation en cours
Modalité d'inscription
Les inscriptions sont obligatoires pour assister au colloque. Elles doivent se faire en ligne à cette adresse : https://www.unilim.fr/ceres-colloquenudges2019/inscription/.
Pour toute question, n'hésitez pas à nous contacter.
Comité d’honneur
- Denis Bertrand,
- Paolo Fabbri,
- Jorge Lozano,
- Oscar Quezada Machiavello
Comité d’organisation
- Isabelle Klock-Fontanille,
- Anne Krupicka,
- Cécile McLaughlin,
- Jacques Fontanille,
- Céline Chrétien,
- Julie Lairesse,
- Alexandre Sbabo,
- Bruno Guiatin,
- Alix Ngoma,
- Manale Lahmar,
- Valentin Moulin.
Les partenaires du projet
La responsabilité scientifique de ce colloque est assurée par :
- Le Centre de Recherches Sémiotiques (CeReS, Université de Limoges)
- Le Centre de Recherche en Gestion (CEREGE, Université de Poitiers)
Avec le soutien des équipes suivantes, membres de la Fédération Romane de Sémiotique : LHE (Paris 8, Vincennes-Saint-Denis), CISS (Centre Umberto Eco, Urbino), ICAR (Lyon 2, Louis Lumière), MICA (Bordeaux Montaigne) ; SES (Puebla, UAP), Comunicación y Cultura (Lima).
En partenariat avec la Région Nouvelle-Aquitaine (AAP « Nudges et objectifs de développement durable »)
Le CEREGE et le CeReS sont engagés dans un programme de recherches portant sur les nudges, financé par la Région Nouvelle-Aquitaine, et commun aux deux Universités de Poitiers et Limoges. Dans ce programme, est prévue l’organisation de deux colloques, le premier en 2019, consacré aux politiques publiques et à la structuration conceptuelle des problématiques de « manipulation et d’incitation », à Limoges et à l’initiative du CeReS et de la Fédération Romane de Sémiotique, et le second, en 2021, consacré aux résultats des études de terrain et de la dimension « développement durable » du programme AAP, à Poitiers, à l’initiative du CEREGE.
Références
[1] La Fédération Romane de Sémiotique regroupe une trentaine d’équipes dans une quinzaine de pays différents, en Europe, en Asie, en Amérique et en Afrique
[2] Richard Thaler et Cass Sunstein, Nudge : la méthode douce pour inspirer la bonne décision, Paris, Vuibert, 2010, 288 p.
[3] Bulletin du GRSL – Groupe de Recherches Sémio-Linguistiques issu du Séminaire de Sémantique générale d’Algirdas Julien Greimas à l’EHESS, n°1, décembre 1977.
[4] Algirdas Julien Greimas et Joseph Courtés, Sémiotique. Dictionnaire raisonné de la théorie du langage, Paris, Hachette, 1986.
Presentation
This symposium received the label and the official support of the Fédération Romane de Sémiotique[i], which decided to organize its next General Assembly in Limoges, during the symposium, and to encourage the research teams that it federates to bring their scientific contribution to this event.
It is organized, under the responsibility of Jacques Fontanille, by the Semiotic Research Center (CeReS) of the University of Limoges, member of the Fédération Romane de Sémiotique.
It will be held under the Honorary Presidency of Paolo Fabbri, Professor of Semiotics, Director of the Centro Internazionale Umberto Eco di Scienze Semiotiche (CiSS) of Carlo Bo University in Urbino.
The symposium of 2019 (in October) in Limoges, entitled “From manipulation to incentive. Inflexions of Behaviors and Public Policies “, will bring together specialists in semiotics, political science, cognitive science and management sciences. It will be addressed in particular to all those who, within political structures, administrations and territorial collectivities, have to conceive and conduct policies of incentive and modification of the behaviors.
The issue
When it comes to public policy, good ideas and strong projects abound. Yet, the ability to sustainably influence behaviors, to understand how and why they appear or disappear, why they persist or change lacks. Information is available and often even widely distributed, but seemingly non-rational behavior (in the areas of food, health, addictions, transport, etc.) persists. Thus, it is commonly held that the transition between available information and decision-making is influenced by cognitive, social and cultural biases.
The solution of Nudges
Research in economics and management offer a viable solution: the “nudges”, i.e. strategic devices that encourage people to take best decisions.
The economist Richard Thaler, recently awarded with the Nobel Prize, has been promoting the nudge solution for several decades now, suggesting to gently influence consumers through nudges in order to help them achieve their goals or expectations. According Thaler and Sunstein, this is “a relatively moderate, flexible and non-invasive version of paternalism, which does not prohibit or restrict anyone’s options. A philosophical approach to governance, public or private, which aims at helping individuals to make decisions that improve their lives without harming the freedom of others “[i]. The cognitive sciences then took over, making an inventory of the “biases” that produce these “irrational” decisions – consider, for example, mental shortenings and social pressure. In terms of social pressures, for example, David Cameron set up a team called “Nudge Unit” in Britain in 2010, which devised a scheme to improve tax collection: late taxpayers were systematically notified when their neighbors had paid their taxes.
Elements of discussion
The theory of nudges, since its inception fifty years ago, ostensibly displays its ideological foundations: the nudge does not affect the freedom of choice of the individual and does not compromise his free will. It merely aims at strengthening what he already wants. This assumption shows that the use of the “nudge” in public policies is part of a maximalist liberalism, which admits no constraint or limit to the free will of the individual. This ideological orientation also avoids raising the issue of the justification of inflexions and public incentives, presupposing that all citizens freely want what the public authorities also want.
However, the semiotic (and non-ideological) approach shows that freedom also consist in refusing, resisting and opposing the wishes and injunctions of the public authorities. It is obvious that the modal questions (to will, to can, to know, to have to, to beleive) will be at the heart of the questioning of this category, which we call “From manipulation to incentive”.
Thus, in order to account for the functioning of nudges, cognitive science generally refers to the architecture of choices that guides the individual decision. Nevertheless, other currents in cognitive sciences advance more cautiously. Daniel Kahneman, economist and Nobel graduate, distinguishes two levels in decision making: the short circuit (the “mental shortcuts”) is fast because it exploits emotions and “instinct” (in order to avoid the problematic implications of the notion of instinct, it would be better to talk here about impulses); the long circuit is slower, because it relies on of analysis and reflection. We can recall here the role that Claude Zilberberg attributed to the tempo in the formation of the semiotic configurations. Yet, the tempo also causes, within these configurations, affects and emotions: there is no certainty as to where to place the action of the nudges, between impulse, emotion and decision. Daniel Kahneman has shown, with his theory of perspectives, that the appreciation of gains and losses is dissymmetrical, because of the respective weight of affects which relate to each one of them. “Decision” is the name of the practice as it is observed from the outside, but this name says little about the semiotic composition of the process that leads to it from the point of view of the social actor.
Overview of the situation in semiotics
At the end of the seventies, the semiotics of action was endowed with a “theory of manipulation”, which was supposed to exploit the first phase of the canonical narrative sequence and to attain a semiotics of passions.[i] This sketch, succinctly repeated in the Dictionary Semiotics 1[ii], had little echo, because the semiotics of passions – elaborated during the eighties – took other directions and does not investigates the role of emotions and passions in interactions belonging to the category of “manipulation”. The concept of “manipulation” was nevertheless vast enough to make way for precise and operative typologies.
As far as sociosemiotics is concerned, possible articulations between manipulation and all its varieties (emotions, passions and systems of signification) are found once again in the works of Eric Landowski and the analysis of social interactions. In this respect, most of Paolo Fabbri’ research for the last forty years can be considered as a contribution to the semiotics of manipulation, despite Fabbri’s books not having titles that explicitly allude to this research field.
The issue of nudges is therefore a theoretical and methodological opportunity to revive a collective and international research and advance the theory of manipulation, as well as recollect the most recent achievements and contributions and identify and circumscribe alternative solutions. In particular, the possibility of incentivizing and inflecting behaviors directly on the interactions between actors and environment, whether to guide the attention or in terms of “comfort” or “discomfort” for alternative behaviors, will be discussed; the different semiotics regimes of the influence will be examined; the actors/environments interactions, which would be similar to an ecological “factitivity”, will be integrated; the chosen solutions, available and possible for some concrete public policies, will be examined; he semiotic aspects of the propositions formulated by the economic, political and cognitive sciences will be studies. Here are some of the issues of this symposium.
Jacques Fontanille
Professeur émérite de Sémiotique
jacques.fontanille@unilim.fr
Program
The program can be found here : https://www.unilim.fr/ceres-colloquenudges2019/programme/.
Registration
Registration is required to attend the conference. They must be done online at this address : https://www.unilim.fr/ceres-colloquenudges2019/inscription/.
For any question, do not hesitate to contact us.
Honorary Committee
- Denis Bertrand,
- Paolo Fabbri,
- Jorge Lozano,
- Oscar Quezada Machiavello.
Organisation Committee
- Isabelle Klock-Fontanille,
- Anne Krupicka,
- Cécile McLaughlin,
- Jacques Fontanille,
- Céline Chrétien,
- Julie Lairesse,
- Alexandre Sbabo,
- Bruno Guiatin,
- Alix Ngoma,
- Manale Lahmar,
- Valentin Moulin.
Project Partners
The scientific responsibility of this seminary is ensured by:
– The Semiotic Research Center (CeReS, University of Limoges)
– The Center for Management Research (CEREGE, University of Poitiers)
With the support of the following research teams, members of the Fédération Romane de Sémiotique: LHE (Paris 8, Vincennes-Saint-Denis), CISS (Center Umberto Eco, Urbino), ICAR (Lyon 2, Louis Lumière), MICA (Bordeaux Montaigne) ; SES (Puebla, UAP), Comunicación y Cultura (Lima).
In partnership with the Region of New Aquitaine (AAP “Nudges and Sustainable Development Goals”)
The CEREGE and CeReS are engaged in a research program on nudges, funded by the « Nouvelle Aquitaine » Region, and common to both Universities of Poitiers and Limoges. In this program, is provided the organization of two symposium, the first one in 2019, devoted to public policies and the conceptual structuring of “manipulation and incentive” issues, in Limoges and at the initiative of CeReS and the Fédération Romane de Sémiotique, and the second, in 2021, devoted to the results of field studies and the “sustainable development” dimension of the AAP program, in Poitiers, on the initiative of CEREGE.
References
[i] The Fédération Romane de Sémiotique brings together some thirty teams in fifteen different countries, in Europe, Asia, America and Africa.
[ii] Richard Thaler et Cass Sunstein, Nudge : la méthode douce pour inspirer la bonne décision, Paris, Vuibert, 2010, 288 p.
[iii] Bulletin du GRSL – Groupe de Recherches Sémio-Linguistiques issu du Séminaire de Sémantique générale d’Algirdas Julien Greimas à l’EHESS, n°1, décembre 1977.
[iv] Algirdas Julien Greimas et Joseph Courtés, Sémiotique. Dictionnaire raisonné de la théorie du langage, Paris, Hachette, 1986.