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Historians' libraries: a new subject for study?

Les bibliothèques d'historiennes et d'historiens : un nouvel objet d'étude ?

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Published on Monday, November 25, 2019

Abstract

Le groupe de travail BIBLHIS (Bibliothèques d'historiennes et d'historiens) organise le 6 mars 2020 sa première journée d'études, à l'université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines. Elle servira à lancer des pistes de recherche sur ce domaine qui n'a pour l'instant fait l'objet que de travaux relativement ponctuels et dispersés.

Announcement

Argumentaire

Le rapport des historiennes et des historiens aux bibliothèques en général, et à leurs bibliothèques en particulier, n’a jusqu’à présent suscité que peu de travaux. Il existe pourtant, depuis longtemps, un intérêt certain pour ces questions. Les bibliothèques des artistes[1], celles des écrivains[2], font depuis quinze ou vingt ans l’objet d’études plus systématiques. Par ailleurs, dans le cadre d’une histoire des sciences (notamment humaines) renouvelée et attentive aux conditions concrètes de la production des savoirs, en lien aussi avec les perspectives de la sociologie et de l’anthropologie de la lecture, des bibliothèques ou des sciences sociales, les bibliothèques des savants et des intellectuels ont déjà fait l’objet de plusieurs recherches, qui ont montré tout l’intérêt de telles perspectives, tant pour comprendre comment le cadre de travail peut déterminer les modalités de la recherche, que pour saisir leurs lectures et les influences qu’ils ont pu recevoir[3]. Enfin, l’étude des archives de ces créateurs de savoirs est aussi une tradition ancienne et c’est notamment le cas de celles des membres de la communauté historienne[4].

En dépit de ces perspectives inspirantes, on s’est relativement peu intéressé aux bibliothèques des historiennes et des historiens, en raison sûrement de la prédominance du « goût de l’archive » dans la culture historienne, et peut-être aussi des conditions de transmission, de conservation et donc d’étude de ces collections, moins aisées que celles de leurs papiers, souvent légués à des centres d’archives ou de documentation[5]. Beaucoup de ces bibliothèques ont du reste été dispersées à la mort de leurs propriétaires, par la vente de tout ou partie de la collection (on pensera par exemple à celles de Jules Michelet, de Fustel de Coulanges, de Georges Duby). On en conserve cependant parfois les catalogues de vente. Pour d’autres pourtant, les collections ont été données ou léguées et sont aujourd’hui conservées dans des institutions variées (bibliothèques, centres d’archives, organismes de recherche, musées…). Quelques études sur ces fonds ont déjà permis de montrer tout l’intérêt que pouvait représenter une étude sur ces bibliothèques d’historiennes et d’historiens[6].

Cette première journée d’études organisée par le groupe de travail BIBLHIS se propose donc, à partir de ces quelques études pionnières et encore isolées, de poser des jalons d’une étude de ces bibliothèques. Les communications pourront tourner autour des cinq axes suivants, non exclusifs les uns des autres ni d’autres perspectives qui pourraient être proposées, notamment de la part de chercheurs et de chercheuses ayant travaillé sur les bibliothèques de créateurs du savoir extérieurs au champ historique ou sur des historiens étrangers (à titre de comparaison) :

  • La constitution des bibliothèques. Il s’agit d’abord de comprendre comment les historiennes et les historiens ont amassé leurs collections, les modalités d’acquisition (achats, dons, emprunts, héritages…), les périodes et lieux d’achat. Quelle part d’un hypothétique noyau familial originel ? Quelle place pour les lectures datant de la période des études, si on ne s’en est pas complètement débarrassé ? Quels moyens aussi a-t-on de reconstituer la genèse de ces bibliothèques (inventaires et catalogues successifs, archives comptables, témoignages et souvenirs, dédicaces, etc.) ? Les bibliothèques sont aussi des organismes vivants, qui se recomposent au fil des ans, des changements dans la carrière, des déménagements, avec des ajouts mais aussi des disparitions, des pertes, des vols, des dispersions, autant d’événements volontaires ou accidentels dont on peut tenter de reconstituer l’histoire.
  • La composition des collections. L’inventaire de ces bibliothèques peut-il être fait ? Et peut-il être fait à un autre moment que celui où le legs ou la mort porte un coup d’arrêt à l’évolution de cette bibliothèque ? Grâce à quels outils (catalogues de vente, inventaires systématiques produits par le propriétaire ou par l’institution dépositaire…) ? Au-delà d’une analyse statistique permettant d’évaluer la composition par grands types de publications (manuels et revues, monographies et albums, dictionnaires et recueils de sources, romans et guides pratiques, bandes dessinées et atlas…), par genres et par sujets, il s’agit de comprendre comment la collection reflète les thématiques de travail mais aussi les centres d’intérêt (y compris non-professionnels) de leurs propriétaires, ainsi que leur évolution. On peut s’interroger aussi sur le caractère bibliophilique ou non de cette bibliothèque : est-elle l’œuvre d’un collectionneur de « vieux livres » ? Sans oublier le mode d’organisation et de classement des livres : par thèmes, par auteurs, par formats, par couleurs… 
  • L’utilisation des bibliothèques. Comment historiennes et historiens utilisent-ils leur bibliothèque ? Il y a d’abord la bibliothèque comme lieu : travaille-t-on dans sa bibliothèque quand on est historien·n·e, par rapport aux autres lieux de son activité, notamment les bibliothèques publiques ? Peut-on saisir, de ce point de vue, de grandes logiques dans les modalités concrètes de la recherche, en fonction de la période ou du lieu de vie (on partira de l’hypothèse qu’on travaille davantage dans sa bibliothèque quand on a peu accès à des lieux de la lecture publique). Il y a ensuite la bibliothèque comme collection : que fait-on des livres ? Les lit-on vraiment ? Partiellement ou intégralement ? Pour préparer des cours, faire des recherches, pour le loisir et le plaisir ? Ces livres ont-ils fait l’objet, de la part de leurs propriétaires, de comptes rendus critiques ? de commentaires marginaux? de fiches de lecture ? de prise de notes ? d’évocations et de références dans leurs propres publications ? Ont-ils fait l’objet de dégradations volontaires ?
  • La mise en scène des bibliothèques. Comment ces bibliothèques sont-elles installées et organisées ? Occupent-elles un mur, une pièce, tout un étage ? Quel mobilier est utilisé ? Quel rapport avec le bureau ou le cabinet de travail ? Avec les espaces de réception du lieu de vie ? Autrement dit, comment la bibliothèque est-elle montrée, mise en scène ? La tradition du portrait devant les livres est ancienne, et les historiennes et les historiens s’y sont aussi prêté·e·s. Pour des portraits dans la presse ou sur les réseaux sociaux, pour des interviews télévisées ou la participation à des reportages ou documentaires, ils ont choisi de « poser » devant leur bibliothèque, parfois même devant certaines parties bien particulières. On peut s’interroger sur ce que ces choix nous disent de leur rapport aux livres, à leurs livres. Et aussi sur la présence d’autres objets que les livres sur les rayonnages (bibelots, photographies, etc.).
  • Le devenir des bibliothèques. Si les bibliothèques sont des organismes vivants, elles sont aussi « mortelles », pour reprendre l’expression d’Henri-Jean Martin. Que deviennent-elles après la disparition de leur propriétaire ? Les cas de conservation en l’état par la famille sont sûrement minoritaires, mais quelle est la part respective des ventes et des dons à des institutions ? Quels types de dispositions sont prises par les historien·ne·s pour assurer la conservation et l’intégrité de leur collection ? Comment les organismes dépositaires gèrent-ils ces acquisitions massives ? Quel tri est fait au moment de leur réception ? Assiste-t-on à un phénomène de patrimonialisation, avec reconstitution à l’identique de ces bibliothèques dans les organismes qui les conservent ? Les témoignages de professionnels ayant eu à gérer ou gérant aujourd’hui l’acquisition ou la conservation de tels fonds seront particulièrement bienvenus.

Comité d’organisation

  • Agnès Sandras, BnF ;
  • Jean-Charles Geslot, CHCSC, UVSQ ;
  • Jonathan Barbier, LaSSP, chercheur associé à la BnF

Soumission des propositions

Les propositions d’interventions, d’une page maximum, seront accompagnées d’une courte bio-bibliographie.

Elles seront soumises avant le 15 décembre 2019.

Une réponse sera adressée avant les fêtes de fin d’année.

Elles sont à adresser aux trois membres du comité d’organisation (Agnes.Sandras@bnf.fr; jean-charles.geslot@uvsq.fr; jonathbarbier@gmail.com).

Notes

[1] Voir notamment : Le Men Ségolène, « « Les bibliothèques d’artistes : une ressource pour l’histoire de l’art », Perspective, actualité en histoire de l’art, 2/2016 ; Levaillant Françoise, Gamboni Dario et Bouiller Jean-Roch (dir.), Les Bibliothèques d’artistes (XXe-XXIe siècles), Paris, PUPS, 2010.

[2] Voir notamment : D’Irio Paolo et Ferrer Daniel (dir.), Bibliothèques d’écrivains : genèses de textes littéraires et philosophiques dirigé par Paolo d’Irio et Daniel Ferrer, Paris, CNRS Éd., 2001 ; Belin Olivier, Mayaux Cathrine et Verdure-Mary Anne (dir.), Bibliothèques d’écrivains. Lecture et création, histoire et transmission, Torino, Rosenberg & Sellier, collection "Biblioteca di Studi Francesi", 2019.

[3] Jacob Christian (dir.), Lieux de savoir. Tome I : Espaces et communautés ; tome II : Les mains de l’intellect, Paris, Albin Michel, 2007-2010 ; Bret Jean-François, L’Atelier de Marcel Mauss, Paris, CNRS Éditions, 2012, 268 p. ; Bret Jean-François, Une histoire de la fiche érudite, Villeurbanne, Presses de l’enssib, 2017 ; Bret Jean-François, Comment pense un savant ? Un physicien des Lumières et ses cartes à jouer, Paris, Anamosa, 2018.

[4] On citera à titre d’exemple les projets sur les archives d’historiens du XIXe siècle menés au sein du CERILAC (Univesité Paris-Diderot) ; voir également : Artières Philippe et Laé Jean-François, Archives personnelles. Histoire, anthropologie et sociologie, Paris, Armand Colin, 2011.

[5] Voir à ce sujet : Amalvi Christian (dir.), Les Lieux de l’histoire, Paris, A. Colin, 2005 ; Chapron Emmanuelle, « Bibliothèque », dans C. Gauvard et J.-F. Sirinelli (dir.), Dictionnaire de l’historien, Paris, PUF, 2015.

[6] Voir, à titre d’exemples : Barbiche Bernard, « La Pratique du prêt à domicile dans les grandes bibliothèques de Paris sous la monarchie de Juillet – L’exemple d’un universitaire : Frédéric Ozanam », dans F. Barbier (éd.), Le Livre et l’historien. Etudes offertes en l’honneur du professeur Henri-Jean Martin, Genève, Droz, 1997, 817 p., pp. 691-696 ; Barbier Jonathan et Petiteau Natalie, “La bibliothèque de Maurice Agulhon : cadre de travail, coulisses de l’écriture, et patrimoine scientifique”, Revue d’histoire du XIXe siècle, 2013/2, 47, p. 95-112 ; Brandi Felipe, “Comptes rendus, tirés à part, bibliothèque : ce que lit Duby, ceux qui lisent Duby”, dans P. Boucheron et J. Dalarun (dir.), Georges Duby, portrait de l’historien en ses archives, Paris, Gallimard, nrf, 2015, p. 161-184 ; Müller Bertrand, Lucien Febvre, lecteur et critique, Paris, Albin Michel, 2003.

 

Places

  • Guyancourt, France (78)

Date(s)

  • Sunday, December 15, 2019

Keywords

  • bibliothèque, historien, histoire, lecture, historiographie

Contact(s)

  • Jean-Charles Geslot
    courriel : jean-charles [dot] geslot [at] uvsq [dot] fr

Reference Urls

Information source

  • Jean-Charles Geslot
    courriel : jean-charles [dot] geslot [at] uvsq [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« Historians' libraries: a new subject for study? », Call for papers, Calenda, Published on Monday, November 25, 2019, https://doi.org/10.58079/13wx

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