AccueilAu-delà des frontières : cartographie des sexualités et sexualisation des espaces

AccueilAu-delà des frontières : cartographie des sexualités et sexualisation des espaces

Au-delà des frontières : cartographie des sexualités et sexualisation des espaces

Beyond Borders: Mapping Sexualities and the Sexualisation of Spaces

*  *  *

Publié le jeudi 23 juillet 2020

Résumé

Ce colloque international se propose de s’intéresser aux rapports qu’entretiennent les notions de frontières et de sexualité dans une perspective interdisciplinaire, transnationale et transculturelle. Il s’agira en particulier de cartographier les façons dont l’espace détermine les sexualités et les pratiques sexuelles, et en retour, de comprendre comment celles-ci structurent et bornent les espaces dans lesquels nous vivons, ainsi que la façon dont nous nous les représentons.

Annonce

Argumentaire

À une époque où l’on érige un peu partout sur le globe des murs et des barrières dont le but avoué est de contenir et de séparer les populations, il paraît urgent de s’interroger sur la façon dont ces limites, qu’elles soient physiques ou symboliques, politiques ou sociales, conditionnent les pratiques sexuelles et façonnent les représentations de la sexualité. Réciproquement, le franchissement de ces limites, s’il permet souvent de s’affranchir de certaines limitations (discriminations, persécutions, surveillance, etc.) en trouvant refuge ailleurs, est également parfois motivé par la volonté de transgresser les lois interdisant la marchandisation des corps et l’exploitation sexuelle, et ce alors qu’un nombre toujours croissant de personnes, qu’elles soient touristes, migrant.e.s, flâneurs/ses, ou travailleurs/ses, traversent chaque jour les frontières qui quadrillent les lieux publics et l’espace international. Qu’on l’ouvre ou qu’on la ferme, qu’on la franchisse ou qu’on la respecte, la frontière définit non seulement un espace géographique ou une communauté culturelle, mais aussi les lois et les normes qui régulent les pratiques et les identités sexuelles considérées comme légales ou légitimes sur un territoire donné.

La frontière définit l’altérité, elle fait la distinction entre le « Nous » et le « Non-Nous » (Clifford Geertz, The Anthropologist as Author, 1988). Ainsi, elle nomme l’étranger, c’est-à-dire le migrant, le non-citoyen, celui qui n’a pas la nationalité. Elle définit également le barbare, celui qui pénètre, avec sa différence, et tous les dangers et les stigmates qu’on lui associe (maladies, perversions, etc.). Les frontières déterminent nos pratiques, elles circonscrivent l’ici et l’ailleurs, bornent notre domaine du possible. Or, c’est souvent cette dichotomie du « impossible ici » / « possible ailleurs » (prostitution, procréation médicalement assistée, avortement, etc.) qui se trouve à l’origine d’un passage de frontière dans le cadre des questions de sexualité.

Pour Michel Foucault, la sexualité est particulièrement propice à la création d’ « hétérotopies », ces espaces que l’on réserve à certaines fonctions, ces lieux « nulle part », qui structurent les territoires urbains : maisons closes, quartiers rouges et bars de striptease décrivent une géographie urbaine de ce qui est traditionnellement associé à la débauche et au vice, en contrepoint des banlieues résidentielles de la classe moyenne ou des centres-villes bourgeois où sont censés régner l’ordre moral, l’idéologie familiale et la sexualité procréative. Inversement, les périphéries sont souvent stigmatisées comme des lieux où règne l’homophobie, par opposition à des centres-villes urbains progressistes où la sexualité peut s’exprimer librement (les quartiers gays des grandes métropoles par exemple). Se pose ainsi la question des politiques publiques en la matière car, si l’on assimile aisément la sexualité à l’intime et à la vie privée, on omet la porosité de la frontière qui sépare l’espace public de l’espace privé. La sphère privée, tout comme la sphère publique, est, elle aussi, régie par un ensemble de lois et d’injonctions qui viennent gommer la délimitation entre ces deux espaces, au même titre que le développement d’Internet a quelque peu aboli la limite entre l’intime et le public (sites de rencontre, sites pornographiques, prostitution en ligne, etc.).

Histoire de l’art, analyse littéraire, enquête sociologique, archives historiques, études de genre, philosophie, anthropologie, histoire des migrations et urbanisme sont autant de disciplines et de méthodologies qui seront convoquées afin de répondre aux questions suivantes : que se passe-t-il lorsque la sexualité se déplace, lorsque les pratiques sexuelles se font en dehors des frontières ? Qu’advient-il des normes et des pratiques sexuelles dans un contexte de mondialisation des échanges, de développement d’Internet, et de droit international parfois contesté ? Comment est-ce que la sexualité et ses représentations sont affectées par la mobilité croissante des individus, forcée ou récréative ? Est-ce que passer la frontière, quelle qu’elle soit, implique une transgression, une transformation ? Quelles raisons poussent des individus à franchir une frontière, à aller dans l’ailleurs, au motif de leur sexualité ?

Parmi les pistes de réflexion possibles, on pourra envisager des communications qui s’inscriraient dans les thématiques suivantes :

1/ Sexualités, mondialisation et migrations transnationales

  • Quand les questions sexuelles poussent à franchir la frontière : fuir la répression sexuelle dans son pays d’origine ; trafic sexuel et sexe utilisé comme monnaie pour payer la migration ; passer la frontière pour obtenir une interruption de grossesse, une aide à la procréation, une contraception ou une réassignation sexuelle ;
  • Affaiblissement des frontières et sexualité : la mondialisation et l’uniformisation des comportements sexuels ; épidémies de MST liées aux phénomènes migratoires, discours et enquêtes de santé publique sur les pathologies d’importation ; pornographie à l’ère d’Internet ;
  • Attrait de la sexualité d’ailleurs : tourisme sexuel et matrimonial ; couples binationaux ; mariages blancs ; abus sexuels des étrangers qui viennent en aide aux populations locales (humanitaires, missionnaires, etc.) ; retour ponctuel dans le pays d’origine dans le cas des mutilations génitales.

2/ Sexualités, espaces régionaux et migrations nationales 

  • Mieux vivre sa sexualité en changeant d’espace : passer d’un espace rural à un espace urbain, d’une petite à une grande ville, de la province à la capitale, quand on est LGBTQI+ ;
  • Frontières et interdits : relations « interdites » dans certaines régions d’un pays donné pour des raisons raciales, religieuses, culturelles (lois contre le métissage dans le sud des États-Unis, etc.) ; pratiques sexuelles acceptées uniquement au sein d’un groupe prescrit mais condamnées de l’extérieur (polygamie chez les Mormons, etc.)

3/ Sexualités, migrations locales et espace urbain

  • Organisation urbaine et espaces assignés à la sexualité : les quartiers gays, les quartiers rouges, cartographie de la prostitution dans chaque ville ; espaces réservés à la marginalité (clubs échangistes ou SM, maisons closes, bois réservés à la prostitution ; quartiers bourgeois comme cadre de la sexualité acceptable, normative, reproductive ; espaces réservés à l’infidélité (Michel Foucault et son hétérotopie des motels américains par exemple)

4/ Frontières mentales : ici et ailleurs, exotisme, orientalisme, idéalisation, stéréotypes et projections

  • la figure de l’étranger/ère comme objet de fascination et d’attirance ou représentation de l’étranger comme celui qui importe des maladies, menace l’intégrité et incarne un danger sexuel (violeur, pédophile, etc.) ;
  • Rester au sein de son groupe pour une sexualité acceptable : la sexualité de l’entre-soi (espaces de rencontre aménagés au sein d’un groupe social, culturel, ou religieux, comme les rallyes, les bals, etc.) ;
  • Identité nationale et « exoticisation » de l’homophobie : opposition stratégique entre progressisme sexuel dans les nations occidentales et les centres urbains et « archaïsme barbare » sur la question dans les nations du Sud et les banlieues (Jasbir K. Puar, Homonationalism in Queer Times, 2007).

Modalités de communication

Les communications pourront être en anglais ou en français. Les propositions (autour de 300 mots) accompagnées d’une brève notice biographique devront être envoyées

avant le 2 novembre 2020

aux deux organisateurs/trices : Pierre-Antoine Pellerin (pierre-antoine.pellerin@univ-lyon3.fr) et Marie Moreau (marie.moreau1@univ-lyon3.fr)

Comité scientifique

  • Sophie Coavoux (Lyon 3),
  • Sibylle Goepper (Lyon 3),
  • Georges-Claude Guilbert (Le Havre),
  • Gregory Lee (Lyon 3),
  • Hélène Quanquin (Lille 3),
  • Corrado Neri (Lyon 3),
  • Christabelle Sethna (Ottawa)

Lieux

  • Université Jean Moulin Lyon 3
    Lyon, France (69)

Dates

  • lundi 02 novembre 2020

Mots-clés

  • frontière, sexualité, migration

Contacts

  • Pierre-Antoine Pellerin
    courriel : pierre-antoine [dot] pellerin [at] univ-lyon3 [dot] fr
  • Marie Moreau
    courriel : marie [dot] moreau1 [at] univ-lyon3 [dot] fr

Source de l'information

  • Marie Moreau
    courriel : marie [dot] moreau1 [at] univ-lyon3 [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Au-delà des frontières : cartographie des sexualités et sexualisation des espaces », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 23 juillet 2020, https://doi.org/10.58079/1558

Archiver cette annonce

  • Google Agenda
  • iCal
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search