AccueilLa dimension économique des alternatives éducatives : acteurs, intérêts, pédagogies, controverses

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La dimension économique des alternatives éducatives : acteurs, intérêts, pédagogies, controverses

The economic dimension of educative alternatives: actors, interests, teaching methods and controversies

VIIe journée du réseau de « Recherches sur les pédagogies différentes »

Recherches sur les pédagogies différentes network 7th study day

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Publié le lundi 03 août 2020

Résumé

Cette septième journée du réseau sera consacrée à la dimension économique de l’engagement dans des pratiques éducatives alternatives, dans le secteur public comme dans le secteur privé. Qu’on envisage cette dimension sous des abords aussi différents que les coûts et recettes, les sources de financement ou les frais d’inscription, les choix de locaux ou de matériel, les arbitrages sous contraintes, les comportements stratégiques, « l’économie » pèse – quoique de manière inégalement sensible – sur les pratiques pédagogiques « différentes » et, plus généralement, sur le quotidien des équipes éducatives, des familles et de l’ensemble des personnes concernées. Cette journée vise à identifier des problématiques à l’interface des préoccupations académiques et éducatives et à esquisser un premier repérage des travaux en France et à l’étranger.

Annonce

Argumentaire

Le développement des pratiques « innovantes » dans l’enseignement public et privé sous contrat, la multiplication des écoles privées « différentes » hors contrat, le nombre croissant de parents choisissant « l’instruction en famille » sont le plus souvent envisagés soit sous l’angle des idées et pratiques pédagogiques, soit sous l’angle des facteurs socio-institutionnels. Ces aspects centraux ont d’ailleurs été privilégiés lors des précédentes journées d’étude et publications du réseau « Recherches sur les pédagogies différentes ».

A contrario, la dimension économique de l’engagement dans des pratiques éducatives alternatives, dans le secteur public comme dans le secteur privé, est beaucoup moins étudiée. Qu’on envisage cette dimension sous des abords aussi différents que les coûts et recettes, les sources de financement ou les frais d’inscription, les choix de locaux ou de matériel, les arbitrages sous contraintes, les comportements stratégiques, « l’économie » pèse pourtant – quoique de manière inégalement sensible – sur les pratiques pédagogiques « différentes » et, plus généralement, sur le quotidien des équipes éducatives, des familles et de l’ensemble des personnes concernées.

Dans un contexte où des dynamiques de libéralisation, de privatisation ou de marchandisation de l’éducation semblent à l’œuvre, s’intéresser à la dimension économique permet de placer au centre de l’observation et de la réflexion certains objets empiriques peu analysés dans le champ des recherches en éducation : l’argent, les coûts et les dépenses, les contraintes budgétaires, les types de marché, les entreprises et leurs stratégies, les business plans

Nous proposons de consacrer la septième journée du réseau au repérage et, surtout à l’analyse de ces objets et dimensions « économiques ». Cette journée vise à identifier des problématiques à l’interface des préoccupations académiques et éducatives, à esquisser un premier repérage des travaux en France et à l’étranger, et aussi, par la mise en circulation précoce de cet appel, près d’un an avant la tenue de la journée, à susciter des recherches inédites.

Les communications, issues des différents types de recherche (universitaire, professionnelle, collaborative, appliquée…) que le réseau a pour objectif de faire dialoguer, pourront aborder l’un et/ou l’autre des axes ci-dessous, ou en proposer d’autres.

Le financement des alternatives éducatives

Dans le contexte français, pour des professionnel·les de l’enseignement public et de l’enseignement privé sous contrat, élaborer et mettre en œuvre des projets pédagogiques différents peut impliquer des frais spécifiques. Comment ces personnes identifient-elles et sollicitent-elles des sources de financement ? Ces sources peuvent être très diverses : Éducation nationale, fondations privées, parents, associations d’éducation populaire, collectivités territoriales, etc. Comment l’identité de ces partenaires potentiels influence-t-elle la nature des pédagogies différentes ?

La contrainte budgétaire est également sensible pour les établissements privés qui ne bénéficient pas de financements publics. Comment ces établissements travaillent-ils concrètement à la pérennité de leur entreprise ? Comment cela les conduit-il, et suivant quelles temporalités, à amender leur projet, à tracer le périmètre de leurs partenaires ou à recruter leur personnel et leur public ? Ces écoles ont-elles la préoccupation d’être accessibles à un large public et, si oui, quelles stratégies développent-elles pour proposer une scolarité ouverte à toutes et tous ?

Les pédagogies différentes suscitent parfois l’objection d’être accessibles seulement aux personnes dotées d’un important volume de capital économique : l’école à la maison irait avec le recrutement d’un précepteur privé, les écoles privées hors contrat ne seraient accessibles qu’en contrepartie de frais de scolarité s’élevant à plusieurs milliers d’euros par an, les pédagogies Montessori appelleraient un matériel coûteux, l’innovation dans l’enseignement public serait dépendante des subventions ministérielles (e.g. éducation prioritaire), des dons des parents (les coopératives scolaires répercutant ici les inégalités sociales) ou des moyens, très inégaux, des collectivités territoriales. Par exemple, il semble a priori aller de soi que les écoles privées hors contrat se réclamant de l’alternatif seraient fréquentées par les familles suffisamment pourvues économiquement pour assumer des coûts financiers importants. Ayant rencontré, au cours de nos travaux de terrain, des familles dotées de ressources financières limitées, nous faisons l’hypothèse que le recrutement des élèves peut, dans certaines de ces écoles, être relativement diversifié. Que sait-on de ces familles, de leur statut social, de leurs ressources économiques, des catégories socio-professionnelles auxquelles elles appartiennent ? Comment les budgets domestiques sont-ils affectés par le non-recours à l’école ordinaire ? La quête de financement conduit-elle des ménages à mobiliser leurs réseaux, à faire appel de manière spécifique à des solidarités familiales ? Le rapport aux dimensions économiques va-t-il de pair avec des usages socialement différenciés de la scolarisation ? Comprendre avec quelles ressources, compétences, bricolages ou stratégies ces aspects financiers sont concrètement appréhendés peut ainsi éclairer la fortune de pratiques pédagogiques.

Les éducations alternatives au prisme du marché

S’interroger sur la dimension économique des pédagogies différentes peut revenir à adopter un regard, des outils ou des problématiques issus des sciences économiques ou de la sociologie économique. On peut par exemple envisager ces pédagogies comme le fruit d’offres et de demandes de biens et services éducatifs « différents », comme l’interaction de producteurs et de consommateurs dans un contexte plus ou moins régulé. Mais une telle lecture économique n’est pas qu’une vue disciplinaire, ou universitaire : des enseignants, des parents ou des pouvoirs publics perçoivent explicitement les pédagogies alternatives comme un marché. Les produits marqués « Montessori » en offrent une illustration connue, et parfois dénoncée.

Si l’on peut donc s’interroger sur les modalités de structuration et de régulation de ce marché, on peut aussi s’intéresser aux acteurs qui déploient des stratégies pour l’investir en tant que tel, que ce soit dans une logique lucrative ou non. Qui sont ces entrepreneurs (enseignant·es du public développant une activité complémentaire, sociétés commerciales, fondations d’entreprise, mouvements pédagogiques, services publics, auto-entrepreneurs…) qui prennent position relativement à ce marché, par exemple pour tenter de le segmenter ? Comment ces personnes s’y prennent-elles pour faire connaître leurs biens ou services et en faire reconnaitre, voire certifier, la qualité ?

Dans les établissements publics d’enseignement, le monde de l’entreprise est présent depuis bien longtemps, selon des modalités différentes : participation aux conseils d’administration des lycées professionnels, stages en entreprise, etc. Mais on observe aujourd’hui une participation grandissante des entreprises, notamment via des fondations, au développement de projets dits « alternatifs » ou « innovants ». Les questions matérielles ont certes toujours été essentielles dans les pédagogies nouvelles : Freinet, en créant la Coopérative de l’enseignement laïque, en prenait déjà acte. Mais aujourd’hui, des enseignants qui se réclament de l’alternatif dans l’école publique en viennent à rechercher des financements extérieurs à l’Éducation nationale. On peut prendre l’exemple des enseignants faisant appel à la Fondation de France, du Centre de Recherche Interdisciplinaire et des Savanturiers soutenus par la Fondation Bettancourt Schueller, ou encore de Céline Alvarez, qui a pu mettre en place une expérimentation grâce à des fonds privés. Par ailleurs, plusieurs municipalités ont facilité la création d’écoles privées dans un contexte de désertification du monde rural et de l'absence de services publics. Des travaux de recherche étudiant ces évolutions, par exemple en analysant les motivations, les marges de manœuvre et les interactions entre les différents acteurs impliqués, seront les bienvenus. Comment ces logiques de marché concourent-elles à brouiller les différences, objectives ou subjectives, entre les secteurs « public » et « privé » ?

Pédagogies différentes et alternatives économiques

Certaines traditions de l’Éducation nouvelle sont liées à un engagement militant en faveur de la démocratisation et, plus généralement, à des projets de société émancipateurs. Comment les praticiens d’une éducation à la fois alternative et démocratique affrontent-ils la contradiction que semble parfois soulever en pratique le coût, donc la moindre accessibilité, des pédagogies différentes ? On peut faire l’hypothèse que des pédagogies différentes soulèvent ce risque de discrimination parce qu’elles sont mises en œuvre par et/ou dans des économies capitalistes qui en revisitent (voire en détournent) le sens ou les effets. Quels sont les modèles économiques alternatifs qui seraient en mesure de garantir les visées émancipatrices des pédagogies différentes ? Comment s’inscrivent-ils, le cas échéant, dans le paysage de l’économie sociale et solidaire ?

Si l’on pense à l’enracinement des pédagogies différentes dans l’histoire des contre-cultures, on peut ainsi s’interroger sur les approches sociales et économiques « différentes » dans lesquelles s’inscrivent les parents, enseignants et éducateurs mobilisés. Les mondes sociaux de « l’alternatif » sont irréductibles au seul plan pédagogique : éclairer les aspects éducatifs par les aspects financiers conduit, plus généralement encore, à se situer sur un registre plus général, afin d’apprécier l’économie de véritables modes de vie alternatifs, également sensibles dans les modes d’habitation ou de travail. L’analyse peut alors se situer, in fine, sur un plan politique. Certains débats – par exemple au sujet de Summerhill –, ont montré qu’un enseignement privé indépendant des finances publiques pouvait être envisagé comme un espace politique autonome. La journée d’étude souhaiterait travailler sur les enjeux d’émancipation politique que les conditions économiques des pédagogies différentes peuvent, dans des sens très différents, déterminer.

Modalités de soumission

Les propositions de communication sont attendues pour le 10 décembre 2020.

Les propositions sont à envoyer au comité d’organisation, à l’adresse : recherchespedagogiesdiff@gmail.com

Elles doivent comporter : le nom du ou des auteurs, leurs affiliations institutionnelles, une adresse électronique et un résumé, de 3 500 signes au plus, présentant la problématique de la recherche (en cours ou terminée), le terrain d’investigation, les orientations méthodologiques et les résultats (attendus ou obtenus). Sont également bienvenues les propositions d’analyses de pratique des praticiens-chercheurs, réfléchies et mises en perspective.

Les réponses seront communiquées au cours du mois de janvier 2021.

Un appel à articles scientifiques, pour constituer un dossier soumis à la revue Les Sciences de l’éducation. Pour l’Ère nouvelle, sera lancé complémentairement au présent appel à communications. Nos deux appels ne sont pas exclusifs ; au contraire, les autrices et auteurs qui souhaiteront soumettre une proposition d’article scientifique pour le dossier de revue sont incité·es à en proposer, simultanément, la présentation orale lors de la journée du 14 avril 2021.

Comité scientifique

  • Ines Albandea (IREDU, Université de Bourgogne),
  • Philippe Bongrand (ÉMA, CY Cergy Paris Université),
  • Françoise Carraud (ECP, Université Lumière Lyon 2),
  • Marie Anne Hugon (CREF, Paris Nanterre),
  • Anne-Claudine Oller (LIRTES, UPEC),
  • Ana Perrin-Heredia (CURAPP-ESS, CNRS),
  • Arnaud Pierrel (GRESCO, ENS),
  • Henri Peyronie (CIRNEF, Université de Caen-Normandie),
  • Marie-Laure Viaud (RECIFES, Université d’Artois).

Lieux

  • CY Cergy Paris Université, site universitaire de Gennevilliers
    Cergy, France (95)

Dates

  • jeudi 10 décembre 2020

Contacts

  • Marie-Laure VIAUD
    courriel : recherchespedagogiesdiff [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Marie-Laure VIAUD
    courriel : recherchespedagogiesdiff [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« La dimension économique des alternatives éducatives : acteurs, intérêts, pédagogies, controverses », Appel à contribution, Calenda, Publié le lundi 03 août 2020, https://doi.org/10.58079/156b

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