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La conservation-restauration des objets de scène

The conservation-restoration of stage objects

Revue Dēmēter – Théories et pratiques artistiques contemporaines (Université de Lille)

Dēmēter journal – Contemporary artistic theories and practices (Lille University)

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Publié le mercredi 02 septembre 2020

Résumé

Le numéro Déméter qui paraîtra à l’été 2021 sera consacré à la « conservation-restauration des objets de scène ». À l’issue du tournage d’un film, d’une pièce de théâtre, d’un spectacle de danse, d’un opéra, d’un concert ou d’une performance, les accessoires connaissent des destinées extrêmement variables après leur utilisation. La plupart ne sont pas faits pour être conservés et, même s’ils ont été essentiels lors de la représentation, leur existence matérielle compte en général bien peu et elle est souvent oubliée. Ces objets, en apparence mineurs et insignifiants, peuvent être jetés ou stockés dans l’attente d’être réemployés dans un prochain spectacle ou sur un autre tournage de film. Certains sont récupérés par des spectateurs, des membres de l’équipe ou leurs proches. Ces objets de souvenirs peuvent rester à l’état de reliques chez des particuliers, acquérir le statut d’objet patrimonial dans des collections publiques ou encore faire irruption sur le marché en tant que marchandises plus ou moins coûteuses.

Annonce

Argumentaire

Le numéro Déméter qui paraîtra à l’été 2021 sera consacré à la « conservation-restauration des objets de scène ». À l’issue du tournage d’un film, d’une pièce de théâtre, d’un spectacle de danse, d’un opéra, d’un concert ou d’une performance, les accessoires connaissent des destinées extrêmement variables après leur utilisation. La plupart ne sont pas faits pour être conservés et, même s’ils ont été essentiels lors de la représentation, leur existence matérielle compte en général bien peu et elle est souvent oubliée. Ces objets, en apparence mineurs et insignifiants, peuvent être jetés ou stockés dans l’attente d’être réemployés dans un prochain spectacle ou sur un autre tournage de film. Certains sont récupérés par des spectateurs, des membres de l’équipe ou leurs proches. Ces objets de souvenirs peuvent rester à l’état de reliques chez des particuliers, acquérir le statut d’objet patrimonial dans des collections publiques ou encore faire irruption sur le marché en tant que marchandises plus ou moins coûteuses.

Certains objets de scène sont longtemps perdus avant de réapparaitre, d’autres possèdent une telle aura, tel le fauteuil de Molière[1], que leur valeur symbolique et historique est immédiatement reconnue. D’autres encore sont classés monuments historiques par la suite, comme certains masques de théâtre de l’Antiquité collectionnés au XIXe siècle puis classés au XXe siècle[2]. En cas d’altérations ou de dégradations majeures, seuls les restauratrices et les restaurateurs sont alors habilités à intervenir sur ces objets d’importance patrimoniale.

Il faut compter aussi avec tous ces objets qui n’ont au départ aucun statut, recueillis sur la vie des tournages (par exemple dans le cadre du chantier de fouilles du tournage du film Peau d’âne de Jacques Demy par une équipe du CNRS, 2012-2016) ou par des fans de groupes de musique qui récoltent le moindre objet abandonné ou lancé dans la foule et qui créent leur propre espace muséal au sein de leur foyer.

Quant à l’art contemporain, les pratiques performatives recourent régulièrement à des objets de (re)présentation. Le statut de ces objets est souvent délicat à fixer et pose en conséquence des questions déontologiques particulières quant à leur collecte, conservation, exposition voire restauration en dehors des recommandations éventuellement prévues par l’artiste. Est-il légitime par exemple de défendre l’intégrité physique d’un objet, vestige d’une action artistique, si l’intention artistique originelle entend rompre avec le principe de pérennité ? Si cette infidélité est signalée au spectateur, peut-on s’autoriser à aller à l’encontre de l’intention artistique ? Renversement ironique, certaines oeuvres installatoires mettant en scène des objets directement utilisables par les spectateurs sont parfois rendues impraticables par l’institution qui les expose, en raison du risque de dégradation. Ces œuvres qui recouraient aux objets comme vecteur relationnel ne se retrouvent-elles pas mises en conserve davantage que conservées, en somme réduite à l’état de document ?

Déméter est une revue scientifique électronique à comité de lecture. La revue, semestrielle, privilégie le dialogue entre les arts (arts plastiques, cinéma, théâtre, danse, musique), ainsi qu’avec les sciences humaines en général (philosophie, histoire, sociologie, anthropologie). La revue est vouée à réfléchir les articulations entre théorie et pratique (pratique artistique ou pratique de l’analyse), entre discours scientifiques et gestes créateurs, entre savoir et imagination.

Les articles de ce numéro pourront prendre, par exemple, les orientations suivantes, sans aucune limitation d’aire géographique, d’époque ou de matériaux :

1/La collecte des objets de scène

L’intention de ce numéro sera dans un premier temps de donner une définition de ce qu’est un « objet de scène ». Comment déterminer la patrimonialité d’un objet ? Une fois la définition posée, les textes préciseront les modalités de leur collecte. Les objets de scène sont-ils délibérément seulement collectés par des instances officielles (institutions culturelles, muséales) dédiées à la culture du spectacle, de l’art et de la fiction ? Quelles autres instances peuvent s’intéresser à ces objets ? Ainsi en 2015, la maquette de l’USS Enterprise, le vaisseau emblématique de la saga Star Trek, a été cédée par la Paramount au musée américain de l’aérospatiale Smithsonian (qui a même engagé une opération de restauration grâce à l’aide financière du public). Nous pourrons aussi nous demander selon quelles procédures et quelles pratiques elles intègrent ces objets à leurs collections. Existe-t-il un cadre juridique spécifique, une législation régulant la collecte de ces objets ? La collecte d’objets de scène est-elle le fruit d’une dévotion, d’un besoin de garder en mémoire de familles, de groupies, de passionnés, de collectionneurs privés, d’historiens ou est-elle tout simplement le fruit du hasard ? Il serait intéressant de s’interroger sur le passage du statut de ces objets de scène au statut d’objet muséifié. En fonction de quels critères la sélection s’effectue-t-elle ? Est-il possible de définir une typologie spécifique à ces objets ? Faut-il prévoir des personnes en particulier, formées dans ce but, chargées de la collecte de ces objets « mineurs » sur les tournages ou à l’issue des représentations ? Et en définitive, que collecter, pourquoi collecter et pour quels publics ?

2/La conservation préventive des objets de scène

Le numéro précisera dans un deuxième temps les lieux, les pratiques et les méthodes de conservation de ce type d’objets. Ces objets sont-ils bien conservés en respectant les normes de la conservation préventive en fonction de leur matérialité ou sont-ils au contraire en danger ? Faudrait-il adresser des recommandations spécifiques à destination des producteurs, des réalisateurs pour permettre une meilleure protection et conservation de certains objets de scène ? Le patrimoine consiste non seulement à transmettre à l’objet, mais aussi à perpétuer des savoirs, des techniques de fabrication et des gestes professionnels. L’histoire de ces gestes techniques est-elle également conservée ? Quelles sont les perspectives d’avenir, les recherches actuelles pour une meilleure conservation préventive de ces objets ?

La diversité de la production de l’art contemporain impose-t-elle pour sa part que cette réflexion sur les modalités de conservation se fasse au niveau du contrat d’acquisition de l’oeuvre, en incluant par exemple des closes sur le devenir de la réalisation ?

3/La restauration des objets de scène

Un troisième axe se fera l’écho des dégradations et des altérations que subissent ces objets et la manière dont ils sont réparés ou restaurés. Existe-t-il des restauratrices et des restaurateurs spécialisés dans la restauration de ce type d’objets ? Quelles sont les modalités et les procédures de restauration et quels choix déontologiques et techniques sont opérés lors des interventions sur les objets pour respecter leur identité physico-chimique ? Ces objets sont-ils systématiquement restaurés par des professionnels ou également réparés dans des ateliers spécialisés par d’autres corps de métiers ? Le Musée Miniature & cinéma à Lyon dispose par exemple d’une « clinique du cinéma » vouée à restaurer des accessoires emblématiques.

Nous pourrons aussi nous demander de quelle liberté disposent les restaurateurs dans la reconstitution des objets (l’on peut s’interroger par exemple sur les raisons pour lesquelles le costume de peau d’âne du film de Jacques Demy conservé à la Cinémathèque fut restauré en bleu, alors qu’il est rouge dans le film). De plus en plus d’expositions de cinéma reconstituent des décors, costumes ou objets de films avec plus ou moins de liberté, et cette pratique n’est pas si récente, puisqu’en 1970 Henri Langlois commandait une réplique du célèbre robot du film Metropolis de Fritz Lang (1928), au sculpteur Walter Schulze-Mittendorff, auteur du robot original.

4/De la conservation à l’exposition 

La tension entre conservation et programmation anime régulièrement les débats à l’occasion de l’organisation d’expositions durant lesquelles ces objets sont pour ainsi dire remis en scène. Dans quels lieux, quels environnements et quelles conditions sont-ils exposés, en prenant quelles précautions ? Les normes de conservation influencent-elles l’exposition des objets ? Les objets de scène sont-ils aisément prêtés et comment sont-ils transportés d’un lieu à un autre ? Certains de ces objets sont-ils réutilisés lors d’un spectacle par exemple ?

Comment garde-t-on et par là même regarde-t-on ces objets ? Si, sur un plan matériel, on entend généralement conserver ces objets afin qu’ils restent fidèles à eux-mêmes, quelles transformations symboliques engendrent leurs mises en exposition ? Quelles mises en abime, la conservation et l’exposition d’objets de scène, opèrent-elles sur les œuvres dont ces derniers sont issus ? Quels types de mises en récit ou storytelling accompagnent ces objets ? De l’accessoire devenu fétiche ; de l’outil devenu témoin ; de l’instrument devenu pièce à conviction ; de l’objet manufacturé devenu attribut… comment les objets initialement instruments de la production artistique deviennent finalement aussi vecteur de la réception esthétique de l’œuvre ? Quand la conservation se fait conversation : quels nouveaux dialogues s’instaurent à partir de la mise en scène de ces objets ? Quelles intentions, plus ou moins conscientes, individuelles ou collectives, président à cette seconde vie médiatique des objets de scène ? La collecte et l’exposition croissante de ces objets ne signent-elles pas aussi le triomphe de la petite histoire en déplaçant sur un terrain affectif la réflexion sur l’art ? Plus largement, quels métadiscours sur la création artistique leurs mises en exposition entretiennent-elles et qu’apprenons-nous de nos sociétés ?

Coordination

Ce numéro est coordonné par Thomas Beaufils (Université de Lille - IRHiS UMR 8529), Raphael Gomérieux (Université de Lille - EA 3587 Centres d’études des arts contemporains) et Joséphine Jibokji (Université de Lille - EA 3587 Centres d’études des arts contemporains).

Soumission des contributions

Les propositions accompagnées d’une courte présentation biobibliographique de l’auteur doivent être envoyées à l’adresse revue-demeter@univ-lille.fr en format word (.doc) ou opendocument (.dot).

Les propositions de contribution doivent être soumises au comité de rédaction

pour le 8 novembre 2020.

Les auteurs dont la proposition aura été acceptée devront adresser leur article à la rédaction pour le 15 mars 2021 dernier délai.

Notes

[1] https://www.comedie-francaise.fr/www/comedie/media/document/moliere-collec-fauteuil.pdf

[2] La base Palissy indique entre autres un masque de théâtre antique classé en 1953 dans le musée George Sand à Nohant.

 

Catégories

Lieux

  • Lille, France (59)

Dates

  • dimanche 08 novembre 2020

Mots-clés

  • performance, théâtre, cinéma, objet, décor

Source de l'information

  • Joséphine Jibokji
    courriel : josephine [dot] jibokji [at] univ-lille [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« La conservation-restauration des objets de scène », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 02 septembre 2020, https://doi.org/10.58079/1587

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