AccueilLa presse arabophone hors du monde arabe : effets de contexte sur une presse allophone

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La presse arabophone hors du monde arabe : effets de contexte sur une presse allophone

The Arabic-speaking press of the Arab world: contextual effects on the allophone press

Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée - REMMM

Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée (REMMM) journal - the journal of the Islamic worlds and the Mediterranean

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Publié le vendredi 13 novembre 2020

Résumé

Cet appel à contribution de la Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée porte sur la presse arabophone publiée hors du monde arabe. Cette presse regroupe l’ensemble des publications (quotidiens et périodiques) éditées et publiées en langue arabe au sein de pays où cette langue n’est pas une langue dominante.

Annonce

Coordination

Proposé par Franck MERMIER, Asmaa AZIZI et Diana COOPER-RICHET

Argumentaire

Cet appel à contributions porte sur la presse arabophone publiée hors du monde arabe. Cette presse regroupe l’ensemble des publications (quotidiens et périodiques) éditées et publiées en langue arabe au sein de pays où cette langue n’est pas une langue dominante.

Si, pour les besoins de cet appel, l’usage de l’expression « la presse arabophone » est au singulier, cette dernière ne constitue pas pour autant une entité homogène. En effet, cette presse est bien plurielle au vu de l’hétérogénéité des temporalités et des contextes de sa naissance, de ses contenus, des trajectoires de ses instigateurs, Arabes ou arabisants, et leurs motivations mais aussi compte-tenu du statut évolutif de la langue arabe. Cette diversité est liée aussi aux différentes localisations de cette presse et aux rapports que ces contextes entretiennent avec l’espace arabe et avec les communautés arabes diasporiques. Les conséquences des interactions que cette presse allophone entretient avec les configurations sociales, politiques et culturelles dans lesquelles elle se déploie seront au centre de notre réflexion.

Cette presse constitue le parent pauvre de la littérature scientifique en France et ailleurs1. Elle n’a fait l’objet que d’un nombre limité de travaux de recherche qui, quand ils existent, s’apparentent davantage à des études de cas prenant pour objet un titre précis. Si de tels travaux ont le mérite d’étudier en profondeur la forme et le contenu d’un titre de presse, ils ne l’inscrivent pas pour autant dans la cartographie plus générale de ce type de publications. L’étude de cette presse dans l’aire « non arabophone » est pourtant cruciale pour la compréhension à la fois de l’histoire nationale et de l’histoire de la presse des pays où elle est née. Partant du rôle que joue l’imprimé dans la construction des imaginaires nationaux (Anderson, 1996), son étude permettrait d’interroger les processus de (ré)écriture des identifications et des cultures nationales de ces pays et/ou ceux d’origine de ses instigateurs. Par ailleurs, son analyse permettrait de saisir les enjeux diplomatiques et politiques que ces productions éditoriales donnent à voir.

Cette presse recèle des logiques temporelles et géographiques multiples : elle relève à la fois d’un phénomène ancien et d’actualité et est intimement liée aux cadres sociaux et historiques de sa parution. Ainsi, le présent appel à contributions couvre un champ temporel large traversé par des contextes politiques variés dans le monde arabe (Empire ottoman, colonisations, indépendances et constructions des Etats-Nations modernes) et dans les pays où ces titres de presse sont nés. Il porte sur les publications ayant vu le jour aux 19ème et 20ème siècles mais aussi sur celles qui sont plus récentes, celles ayant cessé de paraître ou continuant d’exister.

De même, cet appel ne se limite pas à l’Europe ou aux Etats-Unis. Historiquement, la France et le Royaume-Uni ont constitué deux zones clés d’épanouissement d’une presse arabe en quête de liberté et d’un climat d’édition favorable (Elias, 1993, p. 44). A Paris, de nombreux titres ont vu le jour comme, entre autres, « Al Urwa Al Wuthqa » né, en 1884, d’une collaboration entre Jamal Eddine Al-Afghani et Mohamed Abduh ou encore le titre satirique « Abou Naddara Zarqa » que Yaqub Sannu a continué à publier après son exil d’Egypte en 1878 et dans lequel il plaidait pour le nationalisme égyptien auprès des Européens (Fahmy, 2008). Faut-il rappeler toutefois l’ambiguïté du rôle de Paris dans l’existence de cette presse arabe ? Alors que la ville offrait un espace de libre expression aux journalistes et autres intellectuels qui y ont trouvé refuge, les autorités politiques françaises publiaient des titres en langue arabe à des fins de propagande en y réaffirmant les positions de la France vis-à-vis de l’Empire ottoman et en exposant ses désirs colonialistes. L’exemple phare de ce type de presse est le journal « Al Mustaqbal » ( L’Avenir) paru à Paris en 1916.

Outre-Manche, et dès la deuxième moitié du 19ème siècle, plusieurs titres hostiles à l’Empire ottoman ont vu le jour tels que « An-Nahla » ( L’abeille). Initialement parue à Beyrouth, cette publication a commencé à être publiée depuis Londres, à partir de 1876, après l’exil de son fondateur Louis Sabounji (Zolondek, 1978) (Visser, 2014). De même, des titres de propagande ont été édités et publiés par l’administration ottomane, depuis Londres, pour contrebalancer les idées qui lui étaient hostiles. Cette mission a été remplie entre autres par la publication « Al Ghayra » (Elias, 1993, p. 45).

Par ailleurs, les flux d’immigration syro-libanaise vers le Nouveau Monde ont permis la mise en place de plusieurs journaux arabes. Ces derniers ont mené une pluralité de rôles au sein de ces communautés dont un rôle éducatif et d’apprentissage et un autre d’intégration et de savoir-vivre. En 1910, il y avait plus d’une quinzaine de journaux arabes aux Etats-Unis (Cadinot, 2013). « Kawkab Amrika » ( Planète Amérique) paru en 1888 à New York en est un exemple (Abu Laban, 1981). Il est aussi important de souligner que cette presse, particulièrement en Amérique du Sud, fut un vecteur important d’idées nationalistes telles que le nationalisme pansyrien et le nationalisme libanais, et a joué un rôle important dans « les mobilisations politiques transnationales » (Logrono Narbona, 2014).

Au milieu des années 1970, et en raison de la guerre qui sévissait au Liban, de nombreux journalistes et titres de presse ont émigré à Paris et à Londres. C’est finalement cette dernière capitale qui devenait le centre de gravité de la presse arabe en Europe. Plusieurs journaux panarabes vont ainsi être créés grâce à des capitaux saoudiens (El Oifi, 2005). Les deux titres « Ach-charq Al Awsat » et « Al Hayat » fondés respectivement en 1978 et en 1989 en sont deux exemples phares. Plus récemment, le quotidien « Al Araby Al Jadeed » était publié à Londres, Doha et Istanbul, étendant dans la presse écrite la politique d’influence du Qatar dans le secteur télévisuel avec la chaîne satellitaire Al-Jazeera. Après 2011, les révolutions arabes vont susciter de profondes transformations dans les champs médiatiques arabes avec la floraison de titres de presse dans les pays mêmes (Tunisie) ou dans les espaces diasporiques créés par les déplacements forcés des populations résultant de la répression et/ou de la guerre (Syrie, Yémen, Egypte, Libye, Irak).

Ce numéro de la REMMM souhaite interroger les conditions de production de cette presse arabophone dans les divers contextes sociétaux, politiques et historiques dans lesquels elle s’est développée, à travers l’identification de ses acteurs et figures journalistiques, la détermination de son lectorat, de son aire de diffusion, de son contenu et de ses inflexions idéologiques. Il s’agira ainsi de questionner le rôle de cette presse dans la formation des identifications nationalistes et communautaires, dans les relations entre les territoires d’origine et les diasporas, dans les mobilisations politiques, dans la formulation et la diffusion des débats intellectuels, ainsi que dans la formation et la propagation de nouvelles formes d’expression linguistiques et culturelles.

Les propositions d’articles à soumettre pourront aborder, à titre d’exemple et de manière non exclusive, une ou plusieurs des problématiques suivantes :

Axe 1. Production et organisation

Les auteurs-éditeurs à l’initiative de ces expériences éditoriales présentent des profils variés qui ne peuvent être dissociés des contextes locaux dans lesquels ils ont déployé leurs activités et leurs entreprises de presse. Quels statuts ont-ils ? S’agit-il de productions éditoriales d’immigrés, de réfugiés, de militants politiques, de groupe d’intellectuels, d’une élite mondialisée, d’autorités politiques, de professionnels du journalisme ?

De même, nous pouvons nous intéresser plus spécifiquement aux types de ces productions éditoriales, à leurs identités matérielles (journal, brochure, bulletin, etc.), à leurs supports (papier, numérique), à leurs périodicités et à leurs modèles économiques. S’agit-il d’initiatives privées ou financées par les autorités des pays d’origine ou de parution de ces titres ? Les dispositifs législatifs en vigueur dans les pays de parution de ces titres favorisent-ils ou, au contraire, contraignent-ils la parution de ce type de presse ?

Axe 2. Contenus et enjeux

Il s’agira ici de s’intéresser aux thématiques exposées dans ces titres et à leurs lignes éditoriales. Que disent-elles des instigateurs de cette presse et des époques de leurs publications ? Qu’en est-il de la diversité linguistique de cette presse ? De quelles variantes de la langue arabe s’agit-il ? Quelle symbolique accompagne le choix de la langue ? La langue arabe est-elle la seule langue mobilisée au sein de ces titres ou se retrouve-t-on devant des productions éditoriales multilingues ? Est-elle d’ailleurs un thème à part entière faisant l’objet de débats ? On s’interrogera particulièrement sur la dimension nationaliste et communautaire des contenus pour déterminer les identifications que la presse promeut ainsi que les référents culturels et politiques qu’elle mobilise selon les différents titres et à différentes époques.

Les enjeux de cette presse sont multiples et varient en fonction des contextes et de l’état des relations entre les diasporas et leurs pays d’origine. On s’interrogera donc sur les évolutions de cette presse au cours de périodes données, et ce en relation avec des mobilisations identitaires, sociales, culturelles et politiques et de l’ancrage différencié de cette presse dans les pays d’accueil ou dans l’espace arabe.

Axe 3. Circulation et réception

La connaissance des modes de circulations de ces titres de presse est tributaire de plusieurs types d’interrogations. Cette circulation est-elle limitée uniquement aux territoires nationaux de leur parution ou les transcende-t-elle pour couvrir des zones davantage transnationales ? Qu’en est-il des circuits de diffusion et des modes de distribution de cette presse (vente au numéro, abonnements) ? Quid des acteurs qui participent à cette circulation (libraires, intellectuels, associations ou groupes politiques, etc.) ?

La question du lectorat, bien que souvent difficile à étudier, est une voie d’entrée privilégiée pour établir des relations entre le projet culturel/politique du titre de presse, son contenu et sa réception. Quels sont les lecteurs de ces titres de presse ? Quelle hétérogénéité se donne à voir au sein de ces publics ? Qu’en est-il des pratiques de lecture de cette presse ?

Les propositions d’articles voulant interroger les terminologies utilisées pour désigner ce type de presse sont aussi les bienvenues. Entre les pratiques d’auto-désignation et d’assignation identitaire, comment désigner cette presse ? Ces auteurs-éditeurs qualifient-ils leurs presses d’« arabe » ? Peut-on parler d’une presse communautaire ou d’une presse de « minorité » ? Comment la positionner dans le spectre plus large de la presse nationale des pays au sein desquels elle voit le jour ?

Cet appel est ouvert à plusieurs disciplines en Sciences Humaines et Sociales (Anthropologie, Sociologie, Sciences de l’information et de la communication, Sciences politiques, Histoire, etc.). Les chercheurs mobilisant des approches pluridisciplinaires sont fortement encouragés à soumettre des propositions d’articles. Les méthodologies aussi bien qualitatives que quantitatives sont les bienvenues. Ainsi, les travaux interrogeant les difficultés méthodologiques de repérage de ces titres de presse, de même que ceux proposant une lecture transversale de ces titres en fonction de leurs ancrages géographiques et historiques, s’inscrivent dans le sillage de cet appel.

Calendrier

  • 1er décembre 2020 : Date limite de réception des propositions d’articles

d’un maximum de 4000 signes avec le(s) nom(s) de l’auteur/ des auteurs, rattachement(s) institutionnel(s) et adresse(s) électronique(s) aux adresses suivantes : asmaa.azizi@univ-paris13.fr, franckmermier@yahoo.fr, diana.cooper-richet@uvsq.fr.

  • 1er janvier 2021 : Notification de la décision du comité scientifique.
  • 1er septembre 2021 : Date limite de réception des articles et mise en évaluation des textes.
  • Automne/Hiver 2022 : Publication du numéro spécial de la revue REMMM, vol 2022-2.
  • Plus d’informations concernant les règles de rédaction et le processus éditorial, voir ici.

Le comité scientifique

Fariba Adelkhah (Ceri/Paris), Denise Aigle (Ephe Islam médiéval/Paris), Sohbi Bouderbala (Ifao/Le Caire), Thierry Boissière (Gremmo/Lyon), Olivier Bouquet (Université Nice-Sophia Antipolis/Nice), Myriam Catusse (Iremam/Aix-en-Provence), Jocelyne Dakhlia (Ehess-Iismm/Paris), Stéphane Dudoignon (Cetobac/Paris), Iman Farag (sociologue du politique et chercheuse indépendante/Le Caire), Andrée Feillard (Case/Paris), Masashi Haneda (Center of Oriental studies, Todei University/Tokyo), James Mac Dougall (Université d’Oxford/Oxford), Éric Gobe (Centre Jacques Berque/Rabat), Élisabeth Longuenesse (Ifpo/Beyrouth), Élise Massicard (Ifea/Istanbul), Sabrina Mervin (Ceifr/Paris), Arietta Papaconstantinou (Université de Reading/Reading), Hassan Rachik (Faculté des Sciences Juridiques, économiques et Sociales de l’Université Hassan II/Casablanca), Christian Julien Robin (Laboratoire d’études sémitiques anciennes/Paris), Vincent Romani (Université du Québec/Montréal), Ahmed Skounti (Institut national des sciences de l'archéologie et du patrimoine/Rabat), Dominique Valerian (Université Lumière-Lyon 2 – Ciham/Lyon), Jean-Pierre Van Staëvel (Université de Paris 4/Paris), Éric Verdeil (Environnement, ville, société/Lyon), Mercedes Volait (InVisu, Cnrs/Inha/Paris)

Lieux

  • Aix-en-Provence, France (13)

Dates

  • mardi 01 décembre 2020

Mots-clés

  • presse, arabophone, presse allophone

Contacts

  • Asmaa Azizi
    courriel : aziziasmaa [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Asmaa Azizi
    courriel : aziziasmaa [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« La presse arabophone hors du monde arabe : effets de contexte sur une presse allophone », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 13 novembre 2020, https://doi.org/10.58079/15jy

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