AccueilRaconter, exposer et commémorer l’histoire des minorités aux États-Unis

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Raconter, exposer et commémorer l’histoire des minorités aux États-Unis

Telling, exhibiting and commemorating minority histories in the United States

Les musées et sites historiques états-uniens et les récits minoritaires

U.S. museums and historic sites, and minority narratives

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Publié le jeudi 27 mai 2021

Résumé

À côté du roman national, de multiples récits minoritaires subsistent, qu’ils soient inclus comme un aspect du tout, ou bien qu’ils proposent une histoire parallèle, voire opposée. Nous souhaitons interroger la manière dont différentes minorités ont voulu intégrer leur histoire particulière au récit national, corriger ce dernier, le contester, voire s’en séparer en revendiquant la réappropriation de son histoire autonome. Les récits minoritaires mobilisent des mémoires collectives spécifiques, des processus de patrimonialisation et différentes médiations de l’histoire, notamment dans les cadres scolaires, médiatiques. Nous proposons de nous concentrer sur une de leurs formes concrètes, à savoir les musées et les sites patrimoniaux aux États-Unis. Ces derniers sont en effet au centre d’enjeux politiques et historiographiques dans la manière dont ils articulent, ou pas, le récit des minorités et le récit national.

Annonce

Journée d’étude organisée par l’Institut d’Histoire du Temps Présent, UMR 8244, le vendredi 10 décembre 2021.

Argumentaire

Les perspectives critiques ont participé au développement des recherches en histoire sur le fait minoritaire, qui peut être approché de deux manières : d’une part du point de vue de la domination qui s’exerce, d’autre part du point de vue des expériences des membres de la minorité (Chassain et al., 2016). Un colloque en sciences sociales posait ainsi la question de savoir si « L'histoire des minorités est une histoire marginale ? » (Laithier et al., 2008). Le terme polysémique de « minorité » prend sur le sol étatsunien le sens de minorités ethnoraciales, que lui a donné l’histoire de son peuplement au travers des migrations successives de populations diverses. Il implique l’inclusion dans un tout national, mais renvoie aussi à un statut subalterne, éventuellement cible de discriminations et d’exclusions diverses. A côté du roman national qui participe à la construction d’une « communauté imaginaire », de multiples récits minoritaires subsistent, qu’ils soient inclus comme un aspect du tout, ou bien qu’ils proposent une histoire parallèle, voire opposée (Anderson, 1986). Le roman national n’exclut pas nécessairement les narrations minoritaires, mais il implique différentes formes d’exclusions et d’oublis, dont Benedict Anderson a montré comment ils participaient de la construction d’un « fratricide rassurant » (Anderson, 1986 ; Mylonas, 2013). Nous souhaitons interroger la manière dont différentes minorités ont voulu intégrer leur histoire particulière au récit national, corriger ce dernier, le contester, voire s’en séparer en revendiquant la réappropriation de son histoire autonome.

Les récits minoritaires mobilisent des mémoires collectives spécifiques, des processus de patrimonialisation et différentes médiations de l’histoire, notamment dans les cadres scolaires, médiatiques.  Nous proposons de nous concentrer sur une de leurs formes concrètes, à savoir les musées et les sites patrimoniaux. Ceux-ci sont en effet au centre d’enjeux politiques et historiographiques dans la manière dont ils articulent, ou pas, le récit des minorités et le récit national. Les plus grands musées focalisent de ce point de vue l’attention : à Washington les musées prestigieux de la Smithsonian Institution se succèdent sur le National Mall : National Museum of American History, National Museum of the American Indian, fondé en 1989 et National Museum of African American History and Culture, ouvert en septembre 2016. Le 21 décembre 2020 le Congrès vient de voter la Smithsonian Women’s History Act qui autorise le lancement d’un musée national des femmes, dont le projet remonte à 1998, et d’un National Museum of the American Latino, proposé lui dès 1994. Ces institutions sont certes les plus visibles, mais elles ne doivent pas faire oublier des structures plus petites, dont les origines et les dynamiques peuvent être des plus diverses.

L’événement scientifique que nous vous soumettons propose d’explorer ces questions sous différents angles et par différentes approches disciplinaires du champ des sciences sociales. La question de la médiation de l’histoire, ici abordée par le prisme des institutions muséales et des sites patrimoniaux, de même que l’articulation entre passé et présent, seront au centre de cet événement.

Axes thématiques

Les pistes de recherche que nous proposons ci-dessous ne prétendent pas épuiser le sujet, et toutes les propositions de communication seront étudiées.

  • Nous souhaitons interroger les débats soulevés autour des musées et des sites patrimoniaux américains (répertoriés par exemple en tant que Parcs Nationaux), et éclairer la manière dont ces institutions ont été l’enjeu de batailles mémorielles, politiques, urbanistiques. C’est le cas alors qu’ils ne sont encore que des projets, comme lors de leur fondation ou par la suite lorsqu’ils développent des politiques muséales et patrimoniales. Une démarche qui interroge la relation de ces institutions avec les espaces dans lesquels ils s’insèrent est aussi envisageable, afin de prendre en compte la manière dont les mémoires collectives s’inscrivent dans l’espace. Ainsi la tradition des fresques (murals) qui couvrent certains murs, particulièrement dans les quartiers hispaniques peut aussi être évoquée, alors que leurs thèmes sont très souvent historico-politiques. A ce titre les jeux d’échelle et l’articulation entre des lieux, des territoires et différents espaces pourrait aussi être une approche intéressante.
  • Une attention particulière peut-être apportée aux discours développés par ces institutions quant à leurs objectifs, qu’il s’agisse de la volonté affirmée d’intégrer le récit minoritaire au grand récit national, de le corriger, ou de le contester et de revendiquer la réappropriation de sa propre histoire autonome. De même les formes que prennent ces tentatives, que ce soit dans la politique de collection, dans les expositions proposées ou dans la démarche envers le public, peuvent être éclairées. Il est possible d’interroger la façon dont la minorité est construite dans une représentation mémorielle cohérente, qui peut dans le même temps faire l’impasse sur les clivages sociaux, genrés, spatiaux ou générationnels qui risqueraient de mettre en péril l’affirmation du groupe minoritaire. La popularité des dispositifs qui proposent des reconstitutions historiques, avec acteurs en costumes, activités proposées au public et scènes historiques jouées peut aussi faire l’objet d’une réflexion.
  • Il est enfin possible d’interroger la diversité des formes de récits proposés par ces musées, de leurs approches et de leurs collections. Certains, proposent une histoire polyphonique qui met l’accent sur la multiplicité des récits, tel le Musée National de l’Immigration d’Ellis Island, tandis que d’autres suivent un récit plus linéaire, voire téléologique tel le National Museum of American History. Ce musée a toutefois abrité en 1987 une exposition à propos d’un épisode dramatique, l’internement des japonais-américains à partir de 1942[1]. Ailleurs certains sites historiques sont mis en valeur au travers d’une mise en scène, tel Harper’s Ferry, aujourd’hui en Virginie Occidentale, autour du coup de main militaire mené par l’abolitioniste radical John Brown en 1859. Une approche typologique peut être envisagée.

Propositions

Nous encourageons les chercheur.se.s de différents champs disciplinaires rattachés aux sciences humaines et sociales (histoire, histoire de l’art, civilisation, sociologie) à soumettre des propositions pour des communications en français ou en anglais.

Merci d’adresser votre proposition (environ 500 mots), en anglais ou en français, éventuellement accompagnée d’images, ainsi qu’une brève biographie,

pour le 15 septembre 2021

à cette adresse : raconterlesminorites@gmail.com

Nom, prénom, institution de rattachement, adresse mail, et une liste de mots clés. Vous présenterez la problématique en rapport avec le titre annoncé, l’ancrage scientifique et conceptuel dans lequel vous vous situez et la méthodologie adoptée. Vous proposerez, après le résumé.

Calendrier

  • Date de soumission : 15 septembre 2021

  • Notification de sélection : 30 septembre 2021
  • Date de la journée d’étude : Vendredi 10 décembre 2021

Lieu : Campus Condorcet, à préciser

Le comité organisateur de cette JE prend en charge la sélection des communications.

Comité organisateur

  • Olivier Maheo (IHTP),
  • Pauline Peretz (IHTP),
  • Sarah Frioux-Salgas (musée du quai Branly – Jacques Chirac).

Références

Anderson B., 1986, Imagined Communities: Reflections on the Origin and Spread of Nationalism, Londres, Verso, 266 p.

Chassain A. et al., 2016, « Approches expérientielles du fait minoritaire », Tracés. Revue de Sciences humaines, 30, p. 7‑26.

Deutsch K.W. et Foltz W.J., 1963, Nation Building, Atherton, CA, Atherton Press, 194 p.

Elgenius G. et Aronsson P., 2014, National museums and nation-building in Europe 1750-2010: mobilization and legitimacy, continuity and change, London, Routledge.

Ferry M.A.H.F.N.H.P.N.P.S.P.B. 65 H. et Us W. 25425 P.-6029 C., Harpers Ferry National Historical Park (U.S. National Park Service), document en ligne, consulté le 16 mars 2021 : https://www.nps.gov/hafe/index.htm.

Hobsbawm E. et Ranger T., 2012, The Invention of Tradition, Cambridge University Press, 329 p.

Ignatiev N., 2015, How the Irish Became White., Londres et New York, Routledge.

Jones J.L., 1987, A more perfect union: Japanese americans and the United States constitution : a new exhibition at the National Museum of American History Smithsonian Institution October 1 1987., Washington, Smithsonian Institution Press.

Laithier S. et al. (éd.), 2008, L’histoire des minorités est-elle une histoire marginale?, Paris, PUPS, Presses de l’Université Paris-Sorbonne.

Mylonas H., 2013, The Politics of Nation-Building: Making Co-Nationals, Refugees, and Minorities, Cambridge, Cambridge University Press, coll. « Problems of International Politics ».

Painter N.I., 2018, Histoire des blancs, Paris, Max Milo.

Quarles B., 2001, Allies for freedom: Blacks and John Brown, Cambridge, Mass., Da Capo.

Roediger D.R., 1999, The Wages of Whiteness: Race and the Making of the American Working Class, Verso, 220 p.

Takaki R.T., 1993, A different mirror: a history of multicultural America, Boston, Little Brown and Co, ix+508; 16 p.

Thiesse A.-M., 2001, La création des identités nationales: Europe, XVIIIe-XXe siècle, Paris, Seuil, 330 p.

Thiesse A.-M., 2010, « L’Histoire de France en musée. », Raisons politiques, n° 37, 1, p. 103‑117.

Thiesse A.-M., 2019, La fabrique de l’écrivain national: entre littérature et politique, Paris.

[1] Le décret exécutif présidentiel 9066 décide l’enferment des citoyens américains d’origine japonaise, dits Iséis et Niséis dans des camps. Ces derniers étaient suspectés de sympathie pour leur patrie d’origine. Cette exposition s’intitulait « A more perfect union », et reste toujours disponible en ligne (Jones, 1987). Par ailleurs deux anciens camps d’internement sont devenus des sites muséaux. https://amhistory.si.edu/perfectunion/non-flash/index.html

Lieux

  • 4ème étage - 14 Cours des Humanités
    Aubervilliers, France (93300)

Dates

  • mercredi 15 septembre 2021

Fichiers attachés

Mots-clés

  • États-Unis, Musées, Minorités, Patrimoine, sites patrimoniaux

Contacts

  • Olivier Maheo
    courriel : maheo [dot] prof [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Olivier Maheo
    courriel : maheo [dot] prof [at] gmail [dot] com

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Raconter, exposer et commémorer l’histoire des minorités aux États-Unis », Journée d'étude, Calenda, Publié le jeudi 27 mai 2021, https://doi.org/10.58079/16o6

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