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Questioning the philosophies of social intervention
Questionner les philosophies de l’intervention sociale
Sciences et Actions Sociales journal
Revue « Sciences et Actions Sociales »
Published on Wednesday, September 29, 2021
Abstract
Au quotidien, les intervenants sociaux ne semblent pas toujours à même de saisir tout ce que recouvrent véritablement leurs postures, justifications et pratiques professionnelles, contraints qu’ils sont de répondre aux urgences du terrain et de faire face à l’intensité du quotidien. Il n’est dès lors pas étonnant de constater que les intervenants sociaux tentent de « s’équiper » d’expertises plus ou moins savantes pour tenter de construire un récit sensé de leurs propres pratiques. Ce numéro thématique de la revue Sciences & actions sociales vise à interroger et rendre visibles les philosophies de l'intervention sociale. Il souhaite rendre visibles le sous-jacent et souvent le non-dit – ou le non-maîtrisé – qui est au cœur de l’intervention sociale.
Announcement
Contexte général
Au quotidien, les intervenants sociaux ne semblent pas toujours à même de saisir tout ce que recouvrent véritablement leurs postures, justifications et pratiques professionnelles, contraints qu’ils sont de répondre aux urgences du terrain et de faire face à l’intensité du quotidien ; pris qu’ils sont dans des tensions et des paradoxes (Autès, 1999) sans compter la multiplicité des structures et des missions dans lesquelles ils sont engagés (Ion, Tricart, 1998 ; Castel, 2005 ; Avenel, 2009), et ce, dans un contexte de transformation de l’action étatique (Boucher, Belqasmi, 2014) allant de pair avec des logiques gestionnaires ignorant les références existantes (Alix, Autès, Marlière, 2020). Il n’est dès lors pas étonnant de constater que les intervenants sociaux tentent de « s’équiper » d’expertises plus ou moins savantes (Trepos, 1996) pour tenter de construire un récit sensé de leurs propres pratiques. Il en résulte bien souvent des bricolages hasardeux, des appropriations brouillonnes et même des pertes de sens comme dans le champ de la lutte contre la radicalisation (Marchal, 2020).
Cela semble être d’autant plus le cas que la formation en alternance des intervenants sociaux, même si elle propose et transmet une offre de fait pluridisciplinaire, n’interroge pas le plus souvent les fondements épistémologiques des ingénieries qui pourtant les mettent en œuvre. C’est pourquoi il apparaît sans doute opportun d’interroger les implications de la formation professionnelle et de la « fabrique » des intervenants sociaux. Ainsi, la juxtaposition disciplinaire, n’abordant que trop peu les présupposés et choix épistémologiques retenus d’abord, et ceux axiologiques (valeurs) et praxéologiques (relatifs à l’action) ensuite, paraît être une piste heuristique à investiguer pour appréhender la mètis caractérisant la praxis ici concernée (Autès, 1999). Cela pourrait notamment se faire à l’aune des réformes successives des métiers de l’intervention sociale et de ses effets concrets sur les pratiques professionnelles et des manières de les concevoir. Dans ce même sens, la place et la fonction des sciences humaines et sociales (SHS) dans le champ de l’intervention sont un enjeu actuel du débat, et ce, à la croisée de la recherche et de l’action. En attestent les positions hétérogènes à propos de la disciplinarisation du travail social et de l’universitarisation des métiers du travail social (Jaeger, 2014) qui ouvrent tout un espace de controverses propice à penser le champ ici considéré et, particulièrement, ses fondements philosophiques plus ou moins conscientisés mais bel et bien à l’œuvre.
Aussi, ce numéro thématique de la revue Sciences & actions sociales vise-t-il à interroger, et du même coup à rendre visibles, les philosophies de l’intervention sociale – entendue ici dans un sens large, même si bien sûr intervention sociale et travail social peuvent être distingués. Par philosophies, il faut entendre les conceptions fondamentales, souvent implicites et peu questionnées, présidant aux pratiques d’intervention déclinées dans le concret de la vie sociale.
Les philosophies dont il est question ici portent aussi bien sur l’être humain, la culture, la société, la vie sociale, le social, les institutions, l’éducation, l’identité, la laïcité… Elles correspondent à des postulats, des vérités premières, des positions ultimes, des soubassements idéologiques, des cadres de référence a priori qui, immanquablement, sont posés sur le monde. Elles ont inévitablement, d’une façon ou d’une autre, un lien avec la question du sens au fondement des actions entreprises. Aussi ce numéro vise-t-il à montrer combien le sens de ce qui est fait sur le terrain puise nécessairement dans des supports de sens indépassables ou dans ce qu’il est possible de nommer des « étalons axiologiques ultimes » (Weber, 1992). C’est dire si les pratiques, les modes d’intervention et les cadrages mobilisés in situ ne sont pas inventés par les acteurs ex nihilo, quand bien même ils sont bricolés, interprétés et subjectivés (Wieviorka, 2008). Les positionnements ultimes plus ou moins conscientisés, verbalisés et assumés dans la pratique rendent possible, de quelque façon que ce soit, la formulation de modes d’action et, partant, de raisons d’exister et de faire tant sur le plan collectif qu’individuel.
Ce numéro veut rendre visibles le sous-jacent et souvent le non-dit – ou encore le non-maîtrisé – qui est au cœur de l’intervention sociale. Par exemple, il peut être question de rendre visibles les conceptions fondamentales de l’être humain qui sont convoquées sur le terrain. Sommes-nous en présence de postulats anthropologiques ou d’« anthropologies normatives » (Chanial, 2011) qui définissent et modélisent l’être humain comme un individu ici aliéné et hypersocialisé, là rationnel et stratège, ailleurs réflexif et angoissé ? De même pour la culture : celle-ci est-elle entendue a priori comme un ensemble de manières (de penser) d’agir, de sentir et de penser qui pèsent de l’extérieur sur l’individu, comme un stock de ressources disponibles pour un individu en capacité de jouer avec, ou encore comme un ensemble d’expériences interactives toujours en train de se faire à travers de multiples situations et scènes sociales ?
Et puis, pour ne prendre que cet autre exemple, qu’est-ce que « le social » quand le mot est utilisé comme un substantif – à ne pas confondre avec l’adjectif qualificatif « social » tel qu’il est décliné quand on parle de sécurité sociale ou de travail social. Se trouve-t-il au-dessus des individus (État, institutions, idéologies…), entre les individus (normes relationnelles, rites d’interaction, codes langagiers…), dans les individus (modèles culturels intériorisés, manières d’être incorporées, raisons d’agir…), à côté des individus (objets intimes, territoires vécus, lieux de mémoire…) ou même après (effet d’agrégation et de ségrégation, compromis et contrats résultant d’accords et de transactions sociales…) ?
Ces quelques exemples étant précisés, la question se pose de savoir si les quelques visées ultimes ou les orientations fondamentales prises en exemple ici s’intriquent ou bien s’excluent les unes des autres. Si tel est le cas, des positionnements radicaux voient le jour, pour le pire comme pour le meilleur… Les philosophies, conceptions fondamentales et autres options séminales dont il est question ici sont normatives et prescriptives en ce sens qu’elles ne sont pas neutres, peu s’en faut, tant elles engagent nécessairement des présupposés et cadres transcendantaux – au sens kantien du terme – auxquels personne n’échappe, la chose est entendue. Il y a alors toujours de l’éthique ou du sens qui se joue en l’espèce, mais aussi et surtout de la morale à n’en pas douter. Et puis faut-il rappeler que les orientations matricielles et autres cadrages a priori sont d’autant plus agissants et politiquement performatifs que leurs tenants et aboutissants s’avèrent difficiles à identifier et à maîtriser. Aussi puisse ce numéro aider à penser ce que l’on fait vraiment quand on intervient concrètement de telle ou telle manière dans le champ de l’intervention sociale.
Coordination
- Swan Bellelle
- Thibaut Besozzi
- Hervé Marchal
Modalités de contribution
En lien avec la ligne éditoriale de la revue (voir la présentation de la revue, les textes proposés doivent être originaux et ne pas avoir déjà fait l’objet d’une publication dans des revues. Néanmoins, à la condition qu’il demande l’accord préalable à la revue Sciences & Actions Sociales, l’auteur d’un article dans la revue SAS peut publier son article dans un ouvrage ou des actes de colloque à la condition de citer la source de première publication, c’est-à-dire la revue Sciences & Actions Sociales.
Les propositions de contribution doivent respecter les recommandations aux auteurs présentées dans la rubrique : « proposer un article ». Ces propositions doivent être envoyées par courrier électronique au format .doc ou .rtf à l’adresse suivante : redaction@sas-revue.org
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Un accusé de réception est alors adressé en retour.
Calendrier
Les propositions d’articles sont à envoyer à redaction@sas-revue.org
au plus tard le 30 septembre 2022.
Les retours aux auteurs sont prévus pour le 31 octobre 2022, pour une publication dans le numéro de décembre 2022.
Procédure d’évaluation
Les textes font l’objet d’une évaluation anonyme par trois lecteurs désignés au sein des comités de rédaction et scientifique de la revue. Sur la base de leurs évaluations, après une discussion de l’article au sein du comité de rédaction, une décision collective est prise : accepté en l’état, accepté avec modifications mineures, accepté sous réserve de modifications majeures, refusé.
Comité de rédaction
Directeur de la rédaction
- Manuel Boucher, Professeur des universités en sociologie à l'université de Perpignan. Membre du CORHIS (UPVD-UPVM), Président du conseil scientifique de l'IRTS-IDS Normandie, Président de l’ACOFIS, Responsable de l’axe « Normes, déviances et réactions sociales » de l’AFS.
Comité de rédaction
- Maïtena Armagnague-Roucher, Maître de conférences en sociologie, INS HEA / Université Paris Lumière (UPL), chercheur au GRHAPES, associée au Centre Emile Durkheim - Université de Bordeaux Segalen
- Brigitte Baldelli, Docteur en sociologie, chercheur au Laboratoire communication, ressources humaines et intervention sociale. Acteurs, dispositifs, institutions, réseaux/transformations sociales (CORHIS - Université Paul-Valéry Montpellier 3 - Université de Perpignan Via Domitia), enseignante à l'IRTS Languedoc-Roussillon
- Mohamed Belqasmi, Chargé de recherche, Laboratoire d'étude et de recherche sociales (LERS-IDS-TS Normandie), docteur en sociologie, Université de Nice - Unité de Recherche Migrations et Société (URMIS).
- Claudio Bolzman, Docteur en sociologie, professeur, Haute Ecole du Travail Social dans la Haute école spécialisée de Suisse occidentale (HES-SO) et Université de Genève
- Véronique Bordes, Maitre de conférences, département de sciences de l'éducation, Université de Toulouse - Jean Jaurès, chercheur à l'Unité mixte de recherche (MA122) « éducation, formation, travail et savoirs »
- Abdellatif Chaouite, Docteur en psychologie, anthropologue, rédacteur en chef de la revue Écarts d'identité
- Emanuela Chiodo, Docteur en sociologie et sciences politiques, attachée de recherche, département de sciences politiques et sociales (DiSpeS), Université de Calabre
- Laurent Courtois, Docteur en sociologie, chargé d'enseignement, Université de Poitiers
- Anne-Françoise Dequire, Docteur en sciences de l'éducation, chargée d'enseignements et de recherches, Université Catholique de Lille, Université Charles de Gaulle de Lille 3, Instituts des formations sociales, membre du laboratoire de recherche PROFEOR (EA2261), Université de Lille 3
- Jean Foucart, Docteur en sociologie, chargé de cours au département social, Haute École Louvain en Hainaut, directeur de la revue Pensée Plurielle
- Agathe Petit, Docteur en anthropologie, attachée de recherche à l'IRTS PACA et Corse
- Régis Pierret, Docteur en sociologie, Sociologue, Formateur-chercheur IDS-TS Normandie (Rouen), Membre de l’Association des Chercheurs des Organismes de la Formation et de l’Intervention Sociales (ACOFIS)
- Marie-Laure Pouchadon, Docteur en sociologie, chargée de recherche, IRTS Aquitaine, chercheure associée au Centre Emile Durkheim (UMR 5116)
Comité scientifique
- Céline Bellot, Professeur titulaire, École de service social, Université de Montréal
- Thibaut Besozzi, Docteur en sociologie, Ingénieur de recherche, Université de Bourgogne
- Michel Chauvière, Directeur de recherche, CNRS - Centre d'étude et de recherche de sciences administratives et politiques (CERSA), Université Paris 2
- Lena Dominelli, Professeur, School of Applied Social Sciences, co-directrice de l'Institute of Hazard, Risk and Resilience, Fellow of the Wolfson Research Institute for Health and Wellbeing, Université de Durham
- François Dubet, Professeur des universités émérite, directeur d'études à l'EHESS, Centre Emile Durkheim (UMR CNRS 5116) et CADIS (UMR 8039)
- Nicolas Duvoux, Professeur en sociologie, CRESPPA, UMR 7217, CNRS Paris 8
- Anna Elia, Professeur de Sociologie des relations ethniques et des Processus Migratoires, territoire et politiques au département de Sciences politiques et sociales (DiSPeS), Université de la Calabre
- Bernard Francq (†), Professeur ordinaire émérite, UCL, chercheur au CADIS-EHESS
- Didier Lapeyronnie (†), Professeur de sociologie, Université de la Sorbonne - Paris IV et membre du CADIS (EHESS-CNRS)
- Marta Llobet, Professeur au département de travail social et service sociaux, Université de Barcelone
- Giorgia Macilotti, Enseignante-chercheuse contractuelle en sociologie à l'Université Toulouse 1 Capitole, Faculté de Droit et Science Politique
- Hervé Marchal, Maitre de conférences (HDR), département de sociologie, Université de Lorraine, chercheur au Laboratoire lorrain de sciences sociales (2L2S)
- Danilo Martuccelli, Professeur de sociologie, Université Paris Descartes, chercheur au CERLIS-CNRS
- Gérard Mauger, Sociologue, directeur de recherche émerite, CNRS, directeur-adjoint du Centre de sociologie européenne (CSE)
- Vincent Meyer, Sociologue, professeur des universités au département des sciences de la communication à l'Université de Nice Sophia Antipolis - Université de Toulon
- Laurent Mucchielli, Directeur de recherche au CNRS, Laboratoire Méditerranéen de Sociologie (UMR 7305, CNRS & Aix-Marseille Université)
- Goeffrey Pleyers, Chercheur qualifié au Fonds national de la recherche scientifique (FNRS), professeur à l'Université de Louvain (UCL) et chercheur au Centre d'analyse et d'intervention sociologiques (CADIS, EHESS-CNRS)
- Paola Rebughini, Professeur de sociologie, département d’études sociales et politiques, Université de Milan
- Alain Vulbeau, Professeur des universités, département de sciences de l'éducation, chercheur au CREF, Université Paris Ouest Nanterre La Défense
- Michel Wieviorka, Directeur d'études à l'EHESS, administrateur de la FMSH.
Bibliographie
Alix J.-S., Autès M. et Marlière É., 2020 (dir.), Le travail social en quête de légitimité, Rennes, éd. Presses de l’EHESP.
Autès M., 1999, Les paradoxes du travail social, Paris, éd. Dunod.
Avenel C., 2009, « Actualités du travail social », Informations sociales, n° 152, p. 4-7.
Berthelot J.-M., 1990, L’intelligence du social. Le pluralisme explicatif en sociologie, Paris, éd. PUF.
Boucher M. et Belqasmi M. (dir.), 2014, L’État social dans tous ses états. Rationalisations, épreuves et réactions de l’intervention sociale, Paris, éd. L’Harmattan.
Castel R., 2005, « Devenir de l’État-providence et travail social », in Ion (dir.) Travail social en débat[s], Paris, éd. La Découverte, p. 27-49.
Chanial P., 2011, La sociologie comme philosophie politique et réciproquement, Paris, éd. La Découverte.
Crozier M. et Friedberg E., 1977, L’acteur et le système, Paris, éd. du Seuil.
Cuche D., 1996, La notion de culture dans les sciences sociales, Paris, éd. La Découverte.
Dewey J., 2018, Démocratie et éducation, Paris, éd. Armand Colin.
Dosse F., 1997, L’empire du sens. L’humanisation des sciences humaines, Paris, éd. La Découverte.
Jaeger M. (Coord.), 2014, Le travail social et la recherche - Conférence de consensus, Paris, éd. Dunod.
Goffman E., 1991, Les cadres de l’expérience, Paris, éd. de Minuit.
Ion J. et Tricart J.-P., 1998, Les travailleurs sociaux, Paris, éd. La Découverte.
Le Breton D., 2004, L’interactionnisme symbolique, Paris, éd. PUF.
Lévi-Strauss C., 1990, La pensée sauvage, Paris, éd. Pocket.
Marchal H., 2020, « La lutte contre la « radicalisation » : des acteurs sociaux ambivalents et diversement engagés », in Boucher M. (dir.), Radicalités identitaires. La démocratie face à la radicalisation islamiste, indigéniste et nationaliste, Paris, éd. L’Harmattan, p. 309-325.
Schütz A., 2008, Le chercheur et le quotidien, Paris, éd. Klincksieck.
Trepos J.-Y., 1996, Sociologie de l’expertise, Paris, éd. PUF.
Weber M., 1992, Essais sur la théorie de la science, Paris, éd. Pocket.
Wieviorka M., 2008, Neuf leçons de sociologie, Paris, éd. Robert Laffont.
Subjects
- Sociology (Main category)
Date(s)
- Friday, September 30, 2022
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Keywords
- travail social, action sociale, expertise, terrain
Contact(s)
- M. Boucher
courriel : acofis [at] gmail [dot] com
Reference Urls
Information source
- M. Boucher
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« Questioning the philosophies of social intervention », Call for papers, Calenda, Published on Wednesday, September 29, 2021, https://calenda.org/914030