Published on Tuesday, November 16, 2021
Abstract
Cette journée d’étude souhaite croiser les regards des missions protestantes francophones et anglophones sur les notions de liberté au XIXe et XXe siècles en Afrique et en Océanie.
Announcement
Cadrage
Cette journée d’étude est organisée dans le cadre des travaux du GRER (Groupe de recherche sur l’Eugénisme et le Racisme) de l'Université de Paris, site Diderot
Elle souhaite croiser les regards des missions protestantes francophones et anglophones sur les notions de liberté au XIXe et au XXe siècle en Afrique et en Océanie.
On entendra par missions protestantes toutes les sociétés de mission issues des églises réformées et évangéliques anglophones et francophones (Société des missions évangéliques de Paris/SMEP, Société missionnaire de Londres/LMS, Church Missionary Society/CMS, Free Church Missionary Society, la Mission romande...), ce qui comprend leurs autorités en métropole, les stations missionnaires en Afrique et Océanie (Congo, Cameroun, Lesotho, Zambèze, Afrique du Sud, Madagascar, Tahiti, Nouvelle-Calédonie, Nouvelle-Zélande, Australie ...), les missionnaires européens et autochtones, (agents, pasteurs, femmes, enfants...) etc.
Le terme « Liberté » revêt une grande diversité de sens. Il sera étudié dans le contexte et l’époque où il est employé. On comprendra par l’expression « “Libertéˮ et Missions protestantes » l’idée que la Mission, produit à la fois de l’inculturation et du repli identitaire, influence, protège, mais aussi tait la Liberté, voire la brime. Il s’agit donc d’examiner la Mission qui peut être autant protectrice et constructrice de liberté que liberticide.
Ce sont précisément les contextes endogènes et exogènes qui (re)définissent les rapports entre le concept de « Liberté » et la Mission. Les missionnaires et leurs ouailles œuvrent et évoluent dans le champ colonial français et britannique ou dans l’empire informel, ce qui interroge l’approche géopolitique de la liberté au sein du projet missionnaire dans un contexte colonial et post-colonial. On s’interrogera donc sur les opportunités et les limites que provoque le champ colonial sur la liberté d’action et de pensée des acteurs de la mission. On pourra aussi se pencher sur la « liberté » d’action des missionnaires et autres évangélistes dans le domaine politique. Doivent-ils, ou non, intervenir dans les affaires publiques des peuples qu’ils évangélisent ou se contenter de la sphère religieuse privée ? Entre la mission et l’Empire, il conviendra d’en apprécier la « collaboration systématique » à travers la notion de liberté dans la pensée protestante. La réalité du champ missionnaire révèle d’autres collaborations mais aussi de nombreuses résistances, comme en témoigne David Livingstone. Pourfendeur de la traite des esclaves, il n’en a pas moins une attitude impérialiste puisqu’il prône la stratégie des « 3 C » : Christianity, Commerce and Civilisation. Si la conversion au christianisme est, aux yeux des missionnaires, libératrice et libératoire pour les indigènes, que penser de la destruction et privation de leur culture au nom de la foi et du progrès ?
« Rendre la liberté » aux autochtones de la mission est aussi l’essence même de l’institution missionnaire. Certains ont pu penser que la « civilisation chrétienne » avait pour mission de libérer les peuples de l’obscurantisme (fin de la magie noire, du cannibalisme, des crimes rituels, etc.), comme l’illustrent les activités de la missionnaire écossaise Mary Slessor au Calabar.
Qu’elles soient francophones ou anglophones, les missions s’accordent, en grande majorité, sur le fait que, in fine, l’évangélisation des autochtones incombe aux autochtones eux-mêmes. Cependant, de la liberté d’accepter l’évangélisation à la liberté ecclésiale, voire politique, il n’y a qu’un pas. En effet, des foyers éthiopiens, nés d’un réveil des populations locales tant sur le plan ecclésial que politique, apparaissent çà et là dans les missions protestantes africaines. En fondant leur propre confession, Mangena Mokone, Pambani Jeremiah Mzimba, et d’autres pasteurs autochtones formés dans les missions, ouvriront la voie à « L’Afrique aux Africains ». Aussi, les missions dénonceront-elles les mouvements éthiopiens, soit pour les avoir étudiés et avoir craint que l’éthiopisme ne se répande comme une traînée de poudre à travers les territoires sous obédience européenne (Maurice Leenhardt...), soit pour avoir fait l’amère expérience de leur propagation (James Stewart dans la Province du Cap, Robert Laws dans le protectorat du Nyasaland,François Coillard au Zambèze ...). On pourra retenir de ces quelques exemples la grande hétérogénéité des pratiques missionnaires et des conceptions de la liberté sur des continents aussi vastes que l’Afrique et l’Océanie et au cours d’une période longue de deux siècles de colonisation et de décolonisation.
On pourra ainsi s’intéresser à l’idée de la Mission en tant qu’« espace de l’entre-soi » que l’on peut comprendre comme la réunion de personnes ayant des caractéristiques communes qui excluent celles et ceux qui sont différents. Il peut s’agir aussi bien de groupes qui veulent dominer que de groupes opprimés (les femmes racisées revendiquant la non-mixité des luttes par exemple).
On pourra également s’intéresser à la notion de liberté au sein des missions protestantes dans des situations liberticides comme l’apartheid en Afrique du Sud. Certaines Églises protestantes ont soutenu ce régime inique alors que d’autres s’y sont opposées. Qu’elles furent les limites à leur liberté auxquelles ces Églises furent confrontées ? Quelles formes de liberté ont-elles prônées ? etc. On pourra également se pencher sur les « libertés » octroyées aux Églises locales au moment des indépendances.
Priver de liberté cet Autre, qu’il soit un missionnaire indigène d’Afrique ou d’Océanie ou un missionnaire de souche européenne, ou au contraire lui accorder la liberté d’expression et d’« être », relève du champ des altérités et des identités culturelles. La conception de la liberté est le fruit de cultures que missionnaires et autochtones véhiculent et confrontent au sein de la mission. C’est précisément au cœur de la mission que se font et se défont les libertés et les identités. Creuset des contradictions, la mission abrite et protège autant qu’elle déconstruit et détruit.
Cette journée d’étude souhaite aborder la question de l’articulation entre la notion de liberté et les missions protestantes selon les modalités suivantes sans qu’elles ne soient restrictives :
- Mission, éducation et cultures africaines et océaniennes
- Mission et race -Missions protestantes et religions (animisme, islam, catholicisme etc.)
- Mission et autorités (sociétés missionnaires, Églises-mères, administration coloniale)
- Mission, autonomie, autochtonie et éthiopisme -Mission et esclavage -Mission et empires formels et informels
- -Évangélisation et politique, etc.
Modalités de contribution
Merci d’envoyer votre proposition de communication (titre et résumé d’environ 200 mots), accompagnée d’une brève notice biographique,
avant le 15 janvier 2022.
à claire.kaczmarek@univ-artois.fr et gilles.teulie@univ-amu.fr
Responsables scientifiques
- Gilles TEULIE, Pr. à Aix-Marseille Université (laboratoire du LERMA)
- Claire KACZMAREK, MCF à l'université d'Artois (Laboratoire du CREHS).
Subjects
Places
- DEFAP - Boulevard Arago
Paris, France (75)
Event attendance modalities
Hybrid event (on site and online)
Date(s)
- Saturday, January 15, 2022
Keywords
- mission religieuse, liberté, entre-soi, Afrique, Océanie, liberté religieuse, inculturation, altérité, identité culturelle, colonisation, décolonisation
Contact(s)
- Gilles Teulié
courriel : gilles [dot] teulie [at] univ-amu [dot] fr - Claire Kaczmarek
courriel : claire [dot] kaczmarek [at] univ-artois [dot] fr
Information source
- Claire Kaczmarek
courriel : claire [dot] kaczmarek [at] univ-artois [dot] fr
License
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To cite this announcement
« Liberté et missions protestantes », Call for papers, Calenda, Published on Tuesday, November 16, 2021, https://doi.org/10.58079/17ms