Published on Monday, December 13, 2021
Abstract
Il s’agit dans cet appel à communication de s’interroger plus largement sur la manière dont les réseaux urbains font face aujourd’hui aux situations de crises liées à des catastrophes, et de quelle manière ils intègrent dans leur fonctionnement les incertitudes propres au contexte anthropocénique. Ce contexte amène en effet à penser les réseaux urbains dans l’incertain quant aux bouleversements futurs et aux moyens de faire face. Ainsi, la crise engendre elle-même de nombreuses inconnues en raison de « la dislocation des cadres et des repères qui fondent la routine des organisations sociales »
Announcement
Coordination scientifique
- Hélène Beraud, maîtresse de conférences à l’université Gustave Eiffel, Lab’urba
- Mathieu Durand, maître de conférences à Le Mans Université, UMR ESO CNRS, IUF
Argumentaire
Contexte
L’anthropocène fait le postulat que « l’espèce humaine est [aujourd’hui] un agent géologique majeur » pour la planète (Dictionnaire critique de l’anthropocène, 2020 : X). Ce constat accompagne des bouleversements importants en terme climatiques, écologiques et de biodiversité. Ces évolutions impactent déjà en partie, ou pourront à l’avenir impacter, le fonctionnement des espaces urbanisés et des réseaux urbains qui les structurent. Si les conséquences des bouleversements climatiques et écologiques en cours sont encore très incertaines, la littérature scientifique s’accorde sur le fait que les prochaines décennies seront marquées par une multiplication des périodes de crises liées à des catastrophes climatiques, écologiques, industrielles.
Les travaux sur les réseaux urbains et les crises sont anciens. Les réseaux urbains constituent en effet l’armature du système urbain (Dupuy, 1991), dont ils sont susceptibles de perturber fortement le fonctionnement (Blancher, 1998). Ils sont supports d’un certain nombre de services essentiels. Par ailleurs, leur forte interconnexion favorise la diffusion des dysfonctionnements au-delà de la zone impactée. Ils jouent donc un rôle important dans le fonctionnement des territoires, et participent à leur résilience. Ainsi, dès les années 1990, des travaux d’abord lancés aux États-Unis s’intéressent aux impacts du dysfonctionnement de certains réseaux sur les territoires, en tant qu’infrastructures critiques ou vitales. Ces travaux s’appuient sur l’étude de quelques expériences majeures d’interruption du fonctionnement de certains réseaux. Ils mettent en évidence les effets en cascade de ces interruptions de réseaux et leurs conséquences au-delà des premières zones impactées (Bouchon, 2009 ; Galland, 2010 ; Michel-Kerjan, 2003). Se détachant de la notion d’infrastructures critiques, d’autres travaux portés par les géographes de la vulnérabilité territoriale mettent également en évidence le rôle joué par les réseaux en tant que ressources stratégiques de la gestion de crise (Demoraes, 2009 ; D'Ercole & Metzger, 2012 ; Sierra et al., 2020).
Au-delà d’être eux-mêmes à l’origine de crises, il a été montré que les réseaux urbains étaient susceptibles de perturber ou de favoriser le rétablissement des territoires après la survenue de catastrophes. Cette démonstration a par exemple été réalisée autour de l’ouragan Katrina, du tsunami en Indonésie ou du tremblement de terre au Japon ont fortement dynamisé la recherche autour de ce sujet tel qu’évoqué dans les lignes suivantes. Ainsi, depuis les années 2000, les liens entre réseaux urbains et catastrophes sont mieux appréhendés (Brown & Milke, 2016 ; Gleyze, 2005 ; Lhomme, 2015). Il s’agit aussi de mettre en évidence l’interdépendance de ces réseaux (Toubin, Diab, Laganier, & Serre, 2013) et leur contribution à la résilience des territoires (Barroca & Serre, 2014). Par ailleurs, les dysfonctionnements pendant les crises (Gabrielli et al., 2018 ; Moe, 2010 ; Popescu et al., 2020) ou en situation post-crise (Durand, Popescu, & D’Ercole, 2015) ont été étudiés. Il s’agit dans d’autres cas de montrer le rôle des réseaux dans le redémarrage du territoire (Hassett & Handley, 2006) ou le rôle de la crise dans la modification du fonctionnement du réseau (Granier, 2018).
Au-delà de ces travaux, il s’agit dans cet appel à communication de s’interroger plus largement sur la manière dont les réseaux urbains font face aujourd’hui aux situations de crises liées à des catastrophes, et de quelle manière ils intègrent dans leur fonctionnement les incertitudes propres au contexte anthropocénique. Ce contexte amène en effet à penser les réseaux urbains dans l’incertain quant aux bouleversements futurs et aux moyens de faire face. Ainsi, la crise engendre elle-même de nombreuses inconnues en raison de « la dislocation des cadres et des repères qui fondent la routine des organisations sociales » (Reghezza-Zitt, 2019).
Contributions recherchées
L’appréhension des réseaux au temps de l’anthropocène se fera sous l’angle des questions d’incertitudes et de crises liées à des catastrophes (climatiques, naturelles, industrielles…). L’incertitude fait alors « partie intégrante de la science » (May, 2001) tout comme des politiques des gestionnaires et usagers des réseaux urbains. Ainsi, « la société du risque, devenue société de l’incertitude, […] suppose d’accepter la précarité de sa condition » (Reghezza-Zitt, 2015 : 266), laissant la place à une vision renouvelée du rapport aux réseaux en tant qu’armature fragilisée et incertaine d’un système urbain qui cherche la stabilité.
Les propositions pourront s’articuler autour de l’une ou de plusieurs des entrées suivantes :
- Comprendre comment l’anticipation des catastrophes potentielles structure la constitution matérielle des réseaux, mais aussi leur appropriation culturelle, sociale et politique par les acteurs et les habitants d’un territoire.
- Analyser le fonctionnement des réseaux urbains et leur usage pendant les phases de crise, ainsi que leur niveau de résilience ou de métamorphose.
- Décrypter dans quelle mesure, la prise en compte de l’incertitude influence la gestion des réseaux urbains, modifie l’organisation du territoire, la construction des sociabilités, le cadre politique ou économique d’un espace donné.
Les propositions peuvent mettre en avant des études de cas relevant d’un ou de plusieurs réseaux de façon simultanée.
Modalités de réponse à l’appel
Un résumé pour le 31 janvier 2022
Dans un premier temps, les autrices et auteurs enverront une proposition de communication de 4000 caractères maximum, accompagnée du nom du ou des autrices et auteurs et son/leur affiliation institutionnelle.
Elles sont à adresser avant le 31 janvier 2022 à helene.beraud@univ-eiffel.fr et Mathieu.durand@univ-lemans.fr
Les autrices et auteurs recevront un retour sur leur résumé pour le 28 février 2022.
Article complet pour le 31 mai 2022
Dans un second temps, sur la base des résumés pré-validés par la revue Flux, les autrices et auteurs auront jusqu’au 31 mai 2022 pour envoyer la version complète de leur article. Celui-ci correspondra aux standards de la revue Flux, à savoir un texte de 30 000 à 40 000 caractères, un résumé de 1000 à 1500 caractères en français et en anglais, ainsi qu’une notice biographique du ou des autrices et auteurs de 600 caractères environ.
Nous vous invitons à consulter les recommandations aux auteurs accessibles via ce lien.
Composition du comité de rédaction, procédure de publication et politique éditoriale et d'archivage, disponibles via ce lien.
Sortie du numéro thématique prévue au printemps 2023
Bibliographie
Barroca, B., & Serre, D. (2014). Behind The Barriers: A Resilience Conceptual Model. SAPIENS - Surveys And Perspectives Integrating ENvironment & Society, 6.1 / 2013. doi:http://journals.openedition.org/sapiens/1529
Blancher, P. (1998). Risques, ville et réseaux techniques urbains. In P. Blancher (Ed.), Risques et réseaux techniques urbains (pp. 13-24). Lyon: Certu, Coll. Débats : Environnement.
Bouchon, S. (2009). L'analyse de la vulnérabilité pour identifier les infrastructures critiques européennes. Exemple du système gazier en Europe. In S. Becerra & A. Peltier (Eds.), Risques et environnement : recherches interdisciplinaires sur la vulnérabilité des sociétés (pp. 215-229). Paris: L'Harmattan, Coll. Sociologies et environnement.
Brown, C., & Milke, M. (2016). Recycling disaster waste: Feasibility, method and effectiveness. Resources, Conservation and Recycling, 106, 21-32.
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Demoraes, F. (2009). De l’intérêt d’une étude sur la vulnérabilité des réseaux routiers et de transport pour la compréhension des vulnérabilités territoriales – Le cas du District Métropolitain de Quito (Équateur). Cybergeo. doi:10.4000/cybergeo.22101
Dupuy, G. (1991). L'urbanisme des réseaux : théorie et méthodes. Paris: Armand Colin, Coll. U. Géographie.
Durand, M., Popescu, R., & D’Ercole, R. (2015). Les déchets post-catastrophe à Haïti : les jeux d’acteurs d’une gestion informelle. VertigO(Volume 15 Numéro 1). doi:10.4000/vertigo.15970
Gabrielli, F., Amato, A., Balducci, S., Magi Galluzzi, L., & Beolchini, F. (2018). Disaster waste management in Italy: Analysis of recent case studies. Waste Management, 71, 542-555. doi:10.1016/j.wasman.2017.10.012
Galland, J.-P. (2010). Critique de la notion d'infrastructure critique. [Critical Infrastructure: A Critique of the Concept]. Flux, 81(3), 6-18. doi:10.3917/flux.081.0006
Gleyze, J.-F. (2005). La vulnérabilité structurelle des réseaux de transport dans un contexte de risques. (Doctorat sous la direction de). Université Paris 7 - Denis Diderot, Paris.
Granier, B. (2018). Smart cities et gouvernementalisation de la consommation d’énergie domestique au Japon. Le rôle central de l’accident de Fukushima et des pratiques étasuniennes. [Smart cities and the governing of household energy consumption in Japan: The central role of the Fukushima disaster and of US practices]. Flux, 114(4), 56-70. doi:10.3917/flux1.114.0056
Hansson, S., 2005a, The epistemology of technological risk, Techné, 9, 2, pp. 68-80.
Hassett, W. L., & Handley, D. M. (2006). Hurricane Katrina: Mississippi's Response. Public works management policy, Vol. 10, n° 4, 295-305.
Lhomme, S. (2015). Analyse spatiale de la structure des réseaux techniques dans un contexte de risques. Cybergeo. doi:10.4000/cybergeo.26763
May, R. Risk and uncertainty. Nature 411, 891 (2001).
Michel-Kerjan, E. (2003). Risques catastrophiques et réseaux vitaux : de nouvelles vulnérabilités. [Catastrophic Risks and Vital Networks: New Vulnerability]. Flux, 51(1), 6-15. doi:10.3917/flux.051.0006
Moe, T. L. (2010). Cleanup after Katrina: an analysis on policy, process, priorities, problems, and politics. Disaster prevention et management, vol. 19, 314-332.
Popescu, R., Beraud, H., & Barroca, B. (2020). The Impact of Hurricane Irma on the Metabolism of St. Martin’s Island. Sustainability, 12(17). doi:10.3390/su12176731
Reghezza-Zitt, M. De l’avènement du Monde à celui de la planète : le basculement de la societe du risque à la societe de l’incertitude. Mémoire d’habilitation à diriger les recherches, volume inédit. Géographie. Université Paris 1- Panthéon Sorbonne, 2015, 315p.
Reghezza-Zitt, M. (2019). Gestion de crise et incertitude(s) ou comment planifier le hors-cadre et l’inimaginable. Application aux crises résultant de crues majeures en Île-de-France. Annales de géographie, 726, 5-30.
Sierra, A., Gustiaux, R., Leclercq, R. (2020). La crise : saisir la ville par la rupture. Adisson, F. (ed.); Barles, S. (ed.); Blanc, N. (ed.); Coutard, O. (ed.); Frouillou, L. (ed.); Rassat, F. (ed.). Pour la recherche urbaine, CNRS, pp.181-201, 2020, Espaces et Milieux, 978-2-271-13260-4.
Toubin, M., Diab, Y., Laganier, R., & Serre, D. (2013). Les conditions de la résilience des services urbains parisiens par l’apprentissage collectif autour des interdépendances. VertigO(Volume 13 Numéro 3). doi:10.4000/vertigo.14568
Subjects
- Sociology (Main category)
- Society > Geography > Urban geography
- Society > Geography > Rural geography
- Society > Sociology > Urban sociology
- Society > Geography > Geography: society and territory
- Society > Geography > Nature, landscape and environment
- Society > Geography > Applied geography and planning
Date(s)
- Monday, January 31, 2022
Attached files
Keywords
- réseau urbain, crise, catastrophe, anthopocène, organisation sociale
Contact(s)
- Mathieu DURAND
courriel : mathieu [dot] durand [at] univ-lemans [dot] fr - Hélène Beraud
courriel : helene [dot] beraud [at] univ-eiffel [dot] fr
Reference Urls
Information source
- Aurélie Bur
courriel : aurelie [dot] bur [at] enpc [dot] fr
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To cite this announcement
« Crises et incertitudes : les réseaux au temps de l’anthropocène », Call for papers, Calenda, Published on Monday, December 13, 2021, https://doi.org/10.58079/17v3