Justices manifestes
L’enregistrement de la scène judiciaire (Moyen Âge - Époque moderne)
Published on Tuesday, December 14, 2021
Abstract
Les institutions judiciaires ne gardent pas seulement la trace des crimes et délits, du contentieux et des éventuelles décisions rendues, mais aussi du caractère apparent, ritualisé de la justice. Elles rendent ainsi, en leurs écrits, la justice manifeste. En considérant la scène judiciaire comme une rencontre, ce colloque vise à en envisager le déroulement, les espaces et les acteurs, mais aussi le décor, les paroles, les gestes et les objets ; tous en tant qu’ils sont saisis par l’enregistrement judiciaire. De la réception des magistrats à la prononciation et l’exécution des décisions de justice en passant par le déroulé des audiences, on cherchera à saisir les pratiques d’enregistrement du rituel judiciaire dans sa globalité et dans la diversité des institutions judiciaires médiévales et modernes.
Announcement
Argumentaire
La loi du 11 juillet 1985, promue par le ministre de la Justice Robert Badinter, a rendu possible la captation audiovisuelle des audiences publiques tenues devant les juridictions de l’ordre administratif ou judiciaire. Plus de deux mille heures d’enregistrement, tournées entre 1987 et 2018, ont ainsi été versées aux Archives nationales où elles ont fait l’objet d’une exposition récente « Filmer les procès. Un enjeu social ». Au-delà de l’issue de ces procès, leur enregistrement institutionnalisé donne à voir et met en jeu la scène judiciaire dans sa dimension rituelle et politique.
Les archives des justices médiévales et modernes portent déjà les traces – écrites mais aussi visuelles – de l’exercice ritualisé de la justice. Le rituel judiciaire, compris comme un ensemble d’actes solennels d’ordre verbal, postural et gestuel et dont la fonction sociale est de résorber les divergences, d’administrer les territoires et les hommes, a ainsi fait l’objet de nombreux travaux, notamment sur la prononciation et l’exécution des peines. On sait combien, toutefois, les traces de ces rituels sont d’abord des actes d’écriture. La prise en compte des pouvoirs et des enjeux de l’écrit, souvent mobilisés pour l’étude de l’élaboration des décisions de justice, offre aussi de nouvelles perspectives sur l’appréhension de la scène judiciaire elle-même, et notamment sur les raisons et les modalités de son enregistrement. Les institutions judiciaires ne gardent pas seulement la trace des crimes et délits, du contentieux et des éventuelles décisions rendues, mais aussi du caractère apparent, ritualisé de la justice. Elles rendent ainsi, en leurs écrits, la justice manifeste.
En considérant la scène judiciaire comme une rencontre, il s’agira d’en envisager le déroulement, les espaces et les acteurs, mais aussi le décor, les paroles, les gestes et les objets ; tous en tant qu’ils sont saisis par l’enregistrement judiciaire. De la réception des magistrats à la prononciation et l’exécution des décisions de justice en passant par le déroulé des audiences, on cherchera à saisir les pratiques d’enregistrement du rituel judiciaire dans sa globalité et dans la diversité des institutions judiciaires médiévales et modernes. Les propositions pourront s’inscrire dans un ou plusieurs des axes suivants, qui n’épuisent pas le champ des possibles.
L’objet de l’enregistrement
Un premier axe touche à l’objet même de l’enregistrement. En quoi l’écrit rend-il compte de la scène judiciaire, du lieu dans lequel elle se déroule, de la présence, de l’apparence et de la répartition spatiale des acteurs qui y participent, enfin des gestes effectués et des paroles prononcées ? Quelle place est accordée dans l’enregistrement à tout ce qui participe visuellement de la manifestation de la justice ?
Les motifs de l’enregistrement
Un deuxième axe concerne les raisons mêmes de l’enregistrement du rituel judiciaire. Son apparition ou son évolution sont-elles le fruit d’une décision politique ? L’enregistrement est-il nécessaire à la performativité du rituel judiciaire lui-même ou est-il entrepris à des fins mémorielles ? Dans quelle mesure participe-t-il de la mise en scène de l’institution elle-même ? Ces questions renvoient à celle, cruciale, des destinataires de l’enregistrement. Celui-ci est-il produit à des fins institutionnelles internes ou est-il destiné à être rendu public ?
Les pratiques de l’enregistrement
Un troisième axe concerne les pratiques de l’enregistrement de la scène judiciaire. Cet enregistrement connaît-il des transformations à l’occasion de cérémonies ou d’événements particuliers – par exemple un lit de justice ou un grand procès politique – ou bien fait-il l’objet d’une standardisation progressive ? En considérant un fonds sur une moyenne ou longue durée, peut-on observer et interpréter une évolution dans les pratiques d’enregistrement ? Peut-on mesurer l’élargissement du spectre de la captation de la scène judiciaire, ou au contraire sa permanence, voire sa réduction ? Enfin se pose – à mesure de la complexification de la procédure comme des modalités générales de l’enregistrement – la question de la répartition des informations dans les différents actes ou séries d’une même institution, et du filtrage opéré selon les étapes de l’enregistrement.
La confrontation avec d’autres types de documentation
Un dernier axe s’intéressera à la confrontation des archives produites par les institutions avec d’autres types de documentation – sources narratives, presse ou archives émanant d’autres institutions – pour tenter de cerner ce qui est ou n’est pas enregistré, et peut-être dévoiler les fictions de l’enregistrement institutionnel.
Modalités de soumission
Les propositions de communication, sous forme d’un résumé de 500 mots environ, en français ou en anglais, accompagné d’un bref CV devront parvenir avant le 15 février 2022 aux adresses suivantes : aurelien.peter[a]gmail.com, elisabeth.schmit[a]gmail.com
La rencontre, soutenue par le LabEx Hastec, LaMOP et l’IMHC, se tiendra aux Archives nationales (site de Paris) les mercredi 22 & jeudi 23 juin 2022. La durée prévue des communications (en français ou en anglais) est de 30 minutes. Celles-ci donneront lieu à une publication.
Organisation scientifique
- Aurélien Peter, doctorant à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne | IHMC
- Élisabeth Schmit, post-doctorante du LabEx Hastec | Archives nationales
Comité scientifique
- Pascal Bastien, professeur à l’Université de Québec à Montréal | GRHS
- Véronique Beaulande, professeure à l’Université Grenoble Alpes | LUHCIE
- Françoise Briegel, professeure à l'Université de Genève | Maison de l'histoire
- Martine Charageat, maîtresse de conférence à l’Université Bordeaux Montaigne | Ausonius
- Olivier Mattéoni, professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne | LaMOP
- Michel Ollion, conservateur en chef du patrimoine aux Archives nationales | DMAAR
- Aurélien Peter, doctorant à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne | IHMC
- Élisabeth Schmit, post-doctorante du LabEx Hastec | Archives nationales
Subjects
Places
- Salle d'Albâtre - 11, rue des Quatre-Fils
Paris, France (75)
Event attendance modalities
Full on-site event
Date(s)
- Tuesday, February 15, 2022
Attached files
Keywords
- justice, rituel, pratique de l'écrit, institution judiciaire, scène judiciaire, enregistrement
Contact(s)
- Elisabeth Schmit
courriel : elisabeth [dot] schmit [at] gmail [dot] com - Aurélien Peter
courriel : aurelien [dot] peter [at] gmail [dot] com
Reference Urls
Information source
- Elisabeth Schmit
courriel : elisabeth [dot] schmit [at] gmail [dot] com
License
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To cite this announcement
« Justices manifestes », Call for papers, Calenda, Published on Tuesday, December 14, 2021, https://doi.org/10.58079/17w9