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Published on Wednesday, February 23, 2022

Summary

Le colloque Care(s) matérialiste(s) vise à rendre possible un espace de dialogue et de confrontation entre les différentes théorisations féministes du care, les féminismes matérialistes ainsi que les théorisations féministes marxistes de la reproduction sociale. Le but est de poser frontalement et explicitement les perspectives et les possibilités d’une mise en dialogue. En permettant à la fois l’expression des divergences et des oppositions, mais aussi des complémentarités et des intersections, il s’agit de déterminer si nous pouvons créer des alliances stratégiques face à un contexte particulier, celui de la pandémie qui révèle et exacerbe les inégalités, et celui plus structurel d’un capitalisme semblant se renforcer en se réappropriant le féminisme en général et le care en particulier. Il se veut interdisciplinaire et intergénérationnel et horizontal, le but étant de créer un espace de rencontre entre chercheur.euses, permettant à la fois transmissions et renouveaux.

Announcement

Argumentaire

 « Vous, les gens du care, je ne sais pas très bien ce que vous voulez, mais je comprends très bien de quoi vous parlez. Vous parlez d’ici et maintenant, du bien-être des gens et de ce qui est nécessaire à leur bien-être. Je ne dirais pas à leurs besoins mais à leur bien-être. Et là-dedans, il y a des choses qui sont bien pour eux mais pas bien pour le bien-être de tout le monde ; le « besoin sexuel » des uns n’est pas bien pour le bien-être des « assistantes sexuelles » qui vont être formées pour répondre à ces « besoins »-là... » (Delphy et al. 2012)

Le colloque « Care(s) matérialiste(s) » vise à rendre possible un espace de dialogue et de confrontation entre d’un côté, les différentes théorisations féministes du care (Brugère 2011 ; Garrau et Le Goff 2010 ; Gilligan [1982] 2008 ; Glenn 2010 ; H. S. Hirata 2021 ; Ibos et al. 2019 ; Kittay et Feder 2002 ; Molinier 2020 ; Paperman et Laugier 2011 ; Tronto [1994] 2009), de l’autre, les féminismes matérialistes (Adkins et Leonard 1996 ; Delphy 2013 ; Falquet 2016c ; Guillaumin 2016 ; Kergoat 2012 ; Tabet 2005 ; Wittig et al. 2018) ainsi que les théorisations féministes marxistes de la reproduction sociale (Bhattacharya et Vogel 2017 ; Dalla Costa et James 1973 ; Federici 2016 ; Firestone 2015 ; Kofman, Phizacklea, et Raghuram 2000 ; Mies 2014).

Ces croisements ne sont pas évidents, les théoriciennes du care ne nouant pas un dialogue fréquent et continu avec ces deux traditions, et ces dernières entendant parfois se distinguer d’elles de manière critique (Delphy et al. 2012 ; Falquet 2016a, 2016b, 2017, 2021). Pourtant, ces traditions de pensée convergent dans leur diagnostic d’une inégalité structurelle de l’assignation au travail de « production du vivre ensemble » (Hirata et Zarifian 2000). Le but est alors de s’interroger sur les théorisations différenciées – complémentaires ou conflictuelles – du travail de care, du travail reproductif, du travail domestique, du travail ménager, du travail de la dépendance : leur division à la fois sexuelle, raciale et de classe ; leur appropriation dans un cadre privé (Guillaumin 1978) ; leur exploitation dans un cadre marchand désormais globalisé (Ehrenreich et Hochschild 2004 ; Falquet et al. 2010 ; Federici 2017 ; Ibos 2013 ; Moujoud et Falquet 2018 ; Moujoud et Pourette 2005 ; Parreñas 2015) ; leurs vécus corporels et psychiques spécifiques (Avril 2018 ; Galerand et Kergoat 2008 ; Gutiérrez Rodriguez 2011 ; Hooks 2014a ; Molinier 2018)

Aussi, les camps ne sont peut-être pas aussi bien délimités et les féminismes du care pas aussi unifiés qu’il n’y paraît. On trouve des articles qui portent explicitement sur le care dans la revue historique du féminisme matérialiste Nouvelles Questions Féministes (Cresson et Gadrey 2004 ; Hochschild et Bachmann 2004 ; Ibos 2008 ; Molinier 2004) ; Evelyn Nakano- Glenn dialogue avec le féminisme marxiste (Nakano Glenn 2009) ; Nancy Fraser apparaît dans l’ouvrage collectif The Subject of care (Kittay et Feder 2002) ; Christine Verschuur noue les perspectives du care et le travail de Paola Tabet pour penser en matérialiste ce qu’elle appelle l’« échange économico-affectif » (Verschuur 2018) ; Silvia Federici et Mariarosa Dalla Costa emploient depuis peu le concept de care (Barbagallo et Federici 2018) ; l’ouvrage collectif Le Sexe de la mondialisation (Falquet et al. 2010) mêle ces différentes conceptualisations pour penser la globalisation du marché de reproduction et de soins ; Helena Hirata œuvre tout particulièrement à la rencontre et au dialogue entre ces traditions (Hirata 2021) ; et l’on trouve récemment un usage conjoint des perspectives matérialistes et des perspectives de care dans le champ marxien français contemporain (Cukier 2016 ; Renault 2021).

Le but de ce colloque est donc de poser frontalement et explicitement les perspectives et les possibilités d’une mise en dialogue. En permettant à la fois l’expression des divergences et des oppositions, mais aussi des complémentarités et des intersections, il s’agit de déterminer si nous pouvons créer des alliances stratégiques face à un contexte particulier, celui de la pandémie qui révèle et exacerbe les inégalités, et celui plus structurel d’un capitalisme semblant se renforcer en se réappropriant le féminisme en général (Arruzza et al. 2019) et le care en particulier (Borgeaud-Garciandía, Guimarães, et Hirata 2020 ; Brugère 2012 ; Destremau et Georges 2017).

Ce colloque se veut :

1) interdisciplinaire (philosophie, sociologie, psychologie, histoire, anthropologie, théorie politique), tout en étant centré sur la question des modèles théoriques et des lectures du monde social et

2) intergénérationnel et horizontal, le but étant de créer un espace de rencontre entre chercheur.euses, permettant à la fois transmissions et renouveaux. Il aura lieu le 30 juin et 1er juillet 2022.

Axes thématiques

Plusieurs thèmes pourront être abordés :

  • Clarifier les différences d’usages sociologiques, psychologiques et philosophiques des concepts, en se demandant, par exemple : quelles conséquences, pour le dialogue entre ces trois traditions, de penser le care comme catégorie socio-professionnelle ou comme concept philosophique, comme disposition éthico-politique débouchant sur des pratiques spécifiques et/ou comme le travail de différents groupes de sexe, de race et de classe ? Comment saisir les divergences et les affinités existant entre les différentes conceptions du travail (travail de care, travail reproductif, travail domestique, etc.) qui circulent chez ces théoriciennes ? qu’est-ce qui distingue et/ou rassemble ces traditions dans leurs approches du vécu corporel et psychique de ce travail ? quelles sont les lignes de fracture entre la manière dont s’articulent l’éthique et le politique dans ces courants ? (Ferrarese 2018 ; Molinier 2018 ; Paperman et Laugier 2011).
  • Questionner les apports et les limites de ces courants hétérogènes à la compréhension des causes, mécanismes et conséquences de la dévaluation systématique et de l’organisation inégalitaire du soutien à la vie et de la (re)génération des corps, en examinant, en particulier, ce qui distingue et rapproche ceux-ci dans leurs diagnostics d’une “crise du care” (Care Collective 2020 ; Damamme, Hirata, et Molinier 2017 ; Federici et Jones 2020 ; Fraser 2016) : comment situer les théoriciennes du care par rapport à la distinction entre travail productif et reproductif et sa critique dans le féminisme matérialiste et imbricationnel ? quels rapports entretiennent- elles à la critique du capitalisme et/ou du néolibéralisme et comment pensent-elles la globalisation du marché de care ?
  • Interroger comment les développements récents, à l’intérieur de ces champs d’étude, modifient les lignes de fractures ayant traditionnellement mené à opposer ces trois traditions. Se pose ainsi la question de savoir si et comment les théories queer (Andrucki 2021 ; Gleeson O’Rourke, et Rosenberg 2021 ; Lewis 2017 ; Sears 2016), les études post-coloniales et critiques de la race (Camille Gear Rich 2016 ; Davis 1983 ; Dorlin 2020 ; Hill Collins 2017 ; hooks 2014b ; Narayan 1995), ainsi que les recherches sur la construction socio-historique du handicap (Douglas, Rice, et Kelly 2017 ; Kelly 2013 ; Tremain 2021 ; Winance, Damamme, et Fillion 2015) participent à redéfinir le care et la reproduction sociale et ainsi à troubler/déplacer les oppositions concernant la définition du soin comme “féminin” ou maternel, la définition des femmes comme une “classe” de travailleuses et l’appréhension des liens existants entre organisation(s) familiale(s), migrations et structures du marché du travail. Se pose également la question de savoir comment ces cadres d’analyse éclairent l’ambivalence des relations de soin et de soutien en fonction de la position du ou de la bénéficiaire, qui peut se trouver en position privilégiée de domination et/ou en position de vulnérabilités accrues, exposé.e à des formes d’essentialisation et/ou de réification. En partant du vécu psychique et corporel de celleux qui en sont les récepteur.ices, comment celleux-ci théorisent-iels la possibilité qu’à travers le care et la reproduction sociale soit renforcés, plutôt que déconstruits, les rapports sociaux de classe, de genre, de sexualité, et de race, ainsi qu’un certain nombre de biais validistes ?
  • Examiner les stratégies politiques élaborées par, à partir de, ou au-delà de ces trois traditions dans le but d’imaginer à quoi pourraient ressembler des luttes féministes matérialistes et/ou marxistes autour des enjeux du care et réfléchir à la place que doit occuper l’histoire des luttes sociales et syndicales des travailleuses ainsi que les archives de ces combats (Hobart et Kneese 2020). Les contributions pourront porter :
  • sur le problème du dialogue autour du rapport à l’État, à l’État social (Daly et Lewis 2000 ; Walby 1989) et à la gouvernementalité (Giraud et Lucas 2011) et ainsi, éclairer la question des théories politiques discutées (démocratie et démocratie radicale, républicanisme et néo-républicanisme, socialismes, anarchismes, communismes) dans le but de redonner une place centrale à cette “production du vivre” (Federici 2019 ; Garrau 2012 ; Goff 2013 ; Tronto 2013)
  • sur l’élaboration de formes de mobilisation collective qui n’invisibilisent pas la reproduction sociale nécessaire à l’action politique elle-même et qui ne participent pas à présenter les activités de soin comme ayant une forme nécessaire, transhistorique et transculturelle (Butler 2016 ; Jeffries 2018 ; Spade 2020)
  • sur l’étude des luttes des travailleuses domestiques, ayant été historiquement invisibilisées et secondarisées (Ervin 2016 ; Federici et al. 2020 ; Schwartz 2019) en se demandant : qu’apportent, modifient ou contredisent les stratégies politiques spécifiques qu’elles ont mis en place, et quels débats ouvrent-elles au sujet du droit du travail, des formes de résistance et de l’agentivité ? quelles méthodes pour appréhender théoriquement les débats à l’intérieur des mouvements de ces travailleuses ? quelle est la relation entre les débats à l’intérieur de ces mouvements/des syndicats de travailleuses domestiques et les théories du care, les théories matérialistes ou du féminisme marxiste ?

Nous sommes particulièrement intéressées par des communications adoptant une approche intersectionnelle ou imbricationniste, queer et non-validiste, pour interroger les points de contacts et/ou les incompatibilités existantes entre ces trois traditions. Les contributions axées autour de l’un des objectifs présentés sont encouragées, mais nous sommes également ouvertes à des propositions renvoyant vers d’autres enjeux, tant qu’ils participent d’une lecture croisée des théories du care et des féministes matérialistes et marxistes.

Modalités de soumission

La date limite de soumission des propositions est le 7 avril 2022. Les propositions doivent être adressées à l’adresse suivante : caresmaterialistes@gmail.com

Documents à nous faire parvenir :

Un résumé détaillé (entre 500 et 750 mots) et anonymisé de votre proposition de communication en format PDF. Un document séparé spécifiant clairement votre nom, le titre de votre proposition et votre affiliation institutionnelle.

Modalités de sélection et calendrier

L’équipe organisatrice sélectionnera entre 10 et 15 propositions sur une base d’anonymat. Les participant.es sélectionné.es en seront informé.es à la mi-avril. Une réponse sera envoyée à tou.te.s les candidat.es. Celles-ci s’ajouteront aux interventions de théoriciennes ayant participé à la construction de ces débats.

Le colloque se tiendra les 30 juin et 1er juillet 2022 à Paris.

Organisation

Chaque session sera consacrée à deux ou trois présentations. Les présentations seront suivies de discussions ouvertes entre les participant.e.s, organisateur.ice.s et le public extérieur. Des collations (pauses café, déjeuner, dîner) seront offertes aux intervenant.e.s pendant la durée de la conférence. Nous faisons notre possible pour que les coûts de transports et de logement des participant.e.s soient pris en charge, mais ne pouvons, pour le moment, l’assurer.

Comité d’organisation

  • Rosa Mestanza, doctorante en sociologie et genre, LCSP, Université de Paris.
  • Lucile Richard, doctorante en théorie politique, CEVIPOF, Sciences Po.
  • Adèle Sueur, doctorante en philosophie sociale et politique, LCSP, Université de Paris.
  • Ana-Maria Szilagyi, doctorante en théorie politique, CEVIPOF, Sciences Po.

Comité scientifique

  • Fabienne Brugère, Professeure de philosophie de l’art et de philosophie morale et politique, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, LEGS, Présidente de la ComUE Paris Lumières.
  • Aurélie Damamme, Maîtresse de Conférences en sociologie, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, CRESPPA-GTM.
  • Jules Falquet, Professeure de philosophie, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, LLCP.
  • Estelle Ferrarese, Professeure de philosophie morale et politique, Université de Picardie Jules Verne, chercheuse au CURAPP-ESS.
  • Marie Garrau, Maîtresse de Conférences en philosophie sociale, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, Institut des Sciences juridique et philosophique de la Sorbonne.
  • Caroline Ibos, Professeure de sociologie et d’études de genre, Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis, Directrice du LEGS (UMR CNRS 8238).
  • Lucile Richard, doctorante en théorie politique, Sciences Po, CEVIPOF.
  • Adèle Sueur, doctorante en philosophie sociale et politique, Université de Paris, LCSP.
  • Ana-Maria Szilagyi, doctorante en théorie politique, Sciences Po, CEVIPOF.

Information

Pour toute demande, n’hésitez pas à nous contacter à l’adresse suivante : caresmaterialistes@gmail.com

Places

  • Université de Paris, 5 rue Thomas Mann, 75013 Paris
    Paris, France (75)

Event format

Hybrid event (on site and online)


Date(s)

  • Thursday, April 07, 2022

Attached files

Keywords

  • care, féminisme matérialiste français, théories marxistes de la reproduction sociale, travail domestique, soin, travail reproductif

Contact(s)

  • Lucile Richard
    courriel : caresmaterialistes [at] gmail [dot] com

Information source

  • Lucile Richard
    courriel : caresmaterialistes [at] gmail [dot] com

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« « Care(s) » matérialiste(s) », Call for papers, Calenda, Published on Wednesday, February 23, 2022, https://calenda.org/969653

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