AccueilÉconomie sociale et solidaire, « bien vivre » et santé globale : recherche partenariale et innovation pédagogique

AccueilÉconomie sociale et solidaire, « bien vivre » et santé globale : recherche partenariale et innovation pédagogique

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Publié le lundi 28 mars 2022

Résumé

Cette école d’été est construite sur le croisement pluridisciplinaire entre l’économique, le médical, le sanitaire et le social. Elle prend en compte la santé dans sa globalité sur les territoires. Il s’agit d’intégrer de façon cohérente les contributions de plusieurs disciplines, de décloisonner des métiers et des secteurs d’activité, mais aussi de questionner la gouvernance, les modalités de la collaboration et les formes de coopération à l’échelle des territoires. Ce projet participe au programme de recherche initié en 2021 par la chaire Économie sociale et solidaire de l’université de Haute-Alsace : « Lien social et Santé globale » dans les clusters des villes de l’Est de la France (Mulhouse, Strasbourg, Belfort), en relation avec d’autres équipes de recherche, des acteurs territoriaux et des partenaires de l’économie sociale et solidaire de la chaire.

Annonce

Argumentaire

Depuis plusieurs décennies, le basculement de nos sociétés dans l’ère néolibérale et ses multiples impacts (dérèglementation, compétition effrénée, privatisation) mettent en péril notre environnement et nos modes de vie et, in fine, l’existence-même de nos sociétés. La vulnérabilité du bien vivre est accrue par l’emprise des marchés, qui met en danger la santé globale et la vie bonne comme fondements de toute société. L’enjeu est leur reconnaissance comme des « communs sociaux[1] » (Defalvard, 2017) dont la légitimité reste à construire.

La pandémie mondiale de 2020 constitue un fait social global, paradoxalement subi alors qu’il était prévisible. C’est aussi une crise économique, sociale, sanitaire, écologique et démocratique (Stiegler, 2021) qui interroge des communs sociaux invisibles – supposés aller de soi – qui restent irréductibles à la financiarisation néolibérale. La santé globale des personnes (ou pleine santé) fait partie de ces communs (Laurent, 2020).

Fruit d’un monde instrumental devenu muet, cette invisibilité est comprise comme l’épuisement des relations aux autres jusqu’à l’absence de relation au monde (Rosa, 2021) ; elle peut également être entendue comme le résultat d’un changement de mode d’appropriation du monde, l’échange socio-anthropologique étant réduit à un échange marchand. Entre aliénation et désenchantement d’un côté, et aveuglement du dogme néolibéral de l’autre, les individus et les communautés se mobilisent et expriment leurs capacités de résistance par l’attachement à des liens et des formes collectives d’engagement pour la santé des autres « en tant que principale expression du bien commun » (Petrella, 1996). Cette expression résulte d’un processus de négociation d’une transaction sociale qui aboutit à un accord tacite sur le bien vivre.

L’économie sociale et solidaire (ESS) se présente comme une instance de resocialisation des échanges par la réappropriation du sens des relations aux autres et par l’affirmation de valeurs et de modalités d’accès local et démocratique au droit à la santé pour toutes et tous. Les initiatives solidaires sont pionnières d’un changement de paradigme, passant de la coopération à une éthique de la coopération qui pose autrement les échanges sociaux encastrés localement et socialement, et qui coexiste avec l’échange marchand. Ces échanges marchands non monétaires (don de temps, care) relèvent d’arrangements qui intègrent l’utilité, la valeur marchande et la dimension subjective et objective de liens. Ces échanges encastrés dans un processus transactionnel (re)définissent la confiance et les valeurs (solidarité, justice sociale).

La crise sanitaire de 2020 met à l’épreuve une pluralité d’acteurs, professionnels et citoyens, autour des conflits d’intérêt et de valeurs à l’origine de tensions complexes qui traversent les secteurs d’activités du social, du médico-social, de l’insertion. Cette pandémie a montré deux choses : d’une part, les besoins sociaux ont été sous-estimés dans le domaine sanitaire et social ; d’autre part, le cloisonnement des disciplines et des professions n’a pas permis de développer une approche cohérente. Pour répondre au mieux, une approche globale est requise, interdisciplinaire et interprofessionnelle à la fois ; surtout, cette approche ne peut ignorer les premiers concernés, que l’on appelle habituellement les « usagers », mais qui font partie des acteurs de la santé globale. Le point de départ de ce projet est le questionnement d’objets complexes : la santé globale, l’économie sociale et solidaire, le « bien vivre » (ou « société bonne », Rosa, 2021).

La Chaire Economie sociale et solidaire (ESS), laboratoire SAGE, de l’Université de Haute-Alsace organise du 23 au 25 mai 2022 sa 1ère Ecole doctorale d’été de l’ESS au Campus Fonderie à Mulhouse. Cette Ecole doctorale d’été est l’occasion pour les contributeurs et contributrices retenu.es de présenter un texte sur une question ciblée (chapitre ou partie de chapitre de la thèse, article en cours de rédaction), afin de favoriser les discussions croisées entre participant.es partageant des intérêts et des objets de recherche. Les textes présentés feront l’objet de discussion avec l’ensemble des chercheur.es présent.es, qu’ils/elles soient seniors ou juniors.

Ce projet participe au programme de recherche initié en 2021 par la Chaire ESS de l’UHA : « Lien social et Santé globale » dans les clusters des villes de l’Est de la France (Mulhouse, Strasbourg, Belfort), en relation avec d’autres équipes de recherche, des acteurs territoriaux et des partenaires de l’ESS de la Chaire.

Objectifs de l’école doctorale d’été

Cette école est construite sur le croisement pluridisciplinaire entre l’économique, le médical, le sanitaire et le social. Elle prend en compte la santé dans sa globalité sur les territoires. Il s’agit d’intégrer de façon cohérente les contributions de plusieurs disciplines, de décloisonner des métiers et des secteurs d’activité, mais aussi de questionner la gouvernance, les modalités de la collaboration et les formes de coopération à l’échelle des territoires.

La recherche a une contribution spécifique à apporter et elle doit pour cela s’ouvrir à 3 niveaux :

  1. Entre disciplines, chacune apportant son éclairage : l’ambition affichée d’interdisciplinarité est trop souvent un vœu pieux. Elle reste enserrée dans des cadres théoriques et méthodologiques qui sont autant de freins. Nous invitons les jeunes chercheurs à l’analyse réflexive de leurs expériences de recherche, en mettant en valeur l’intérêt heuristique et méthodologique des pratiques. Comment soutenir les interactions et la coopération entre des disciplines et des cultures ? C’est une nouvelle manière de faire de la recherche.
  2. Entre les chercheurs et les professionnels qui vivent les problèmes de l’intérieur. Les échanges entre des acteurs et des chercheurs qui interagissent à différentes échelles peuvent enclencher une dynamique transformatrice et co-construite. La pandémie du Covid-19 a mis en lumière les failles d’une gestion qui est soumise aux urgences et qui donne la priorité aux questions de santé (le confinement), au détriment du vivre ensemble. Cette expérience interroge les professionnels de l’économie, du médico-social et de la santé, autant que les chercheurs.
  3. En associant les usagers aux décisions qui les concernent. Ils et elles ont eux aussi des savoirs issus de l’expérience vécue : Ce terme englobe les habitants, les familles, les salariés (pour la santé au travail), les associations de malades, mais aussi les aidants ; de nombreux acteurs de l’ESS interviennent pour faciliter l’insertion sociale, accompagner les malades, soulager les familles etc. Toutes et tous sont porteurs d’expériences et de savoirs concrets ; ce sont des acteurs de l’ombre, avec le sentiment d’être négligés et ignorés ; ils sont en attente d’écoute et de participation. Par exemple, lors de l’épidémie du VIH-SIDA, les malades ont émergé comme des acteurs qui ont des savoirs issus de l’expérience vécue de la maladie : ils ne sont plus de simples « patients » qui subissent passivement les traitements décidés par les « sachants ». Ils deviennent les coproducteurs de leur guérison (Fleury, 2019).

Le premier principe pédagogique est l’ouverture sur l’interdisciplinarité. Le point de départ est le questionnement d’objets complexes : la santé globale ou « pleine santé » (Laurent, 2020), les initiatives collectives solidaires, le « bien vivre ». Pour explorer leurs interactions, les apports croisés des chercheurs en anthropologie, en économie, en épidémiologie, en histoire, science politique et en sociologie sont indispensables, même si cette confrontation peut être déstabilisante.

Le second principe est la recherche partenariale. Cette forme de recherche-action est née au Québec et elle considère que la recherche est une co-production des partenaires (chercheurs, acteurs et usagers) qui ont des rôles distincts mais complémentaires (Gillet et Tremblay, 2017). Elle a été expérimentée d’abord dans le domaine sanitaire et social, avant d’aborder d’autres domaines, notamment l’économie sociale et solidaire.

Pendant cette école doctorale, l’initiation des doctorants et des jeunes chercheurs à cette démarche se fera de trois façons complémentaires :

  • La mise en débat des témoignages de praticiens (professionnels, usagers) qui ont réalisé des projets innovants.
  • La discussion des travaux de chercheurs pratiquant la recherche partenariale et l’interdisciplinarité (anthropologues, économistes, épidémiologistes, historiens, sociologues, etc.).
  • La mise en discussion des travaux de recherche des doctorant.e.s et l’auto-formation des jeunes chercheurs eux-mêmes, mis à contribution comme acteurs de leur formation. La rencontre des acteurs de terrain dans les ateliers leur permettront de présenter et de discuter leur recherche doctorale.

La source d’inspiration est la pédagogie coopérative (Stoessel-Ritz & Blanc, 2020), qui insiste sur le rôle actif des personnes concernées dans le processus éducatif, qui devient un processus de transaction sociale porteur d’un agir collectif à résonance éthique et d’une grammaire de l’action partagée (Chello, 2013 ; Lafont et al., 2020). Cette école ne sera pas un vase clos et elle fait le choix de l’ouverture de deux façons : les participants iront à la rencontre des acteurs locaux et les conférences seront ouvertes au public.

Des témoignages d’acteurs d’établissements sociaux et médico-sociaux et de collectifs d’usagers seront proposés aux participants invités à analyser le caractère innovant des expériences présentées. Des ateliers dédiés aux doctorants et étudiants de master 2 permettront d’échanger à partir des travaux des uns et des autres en présence de discutants. Enfin, des tables rondes réunissant des professionnels (travailleurs sociaux et des acteurs de l’ESS et de la santé) autour de questions d’actualité.

Porté par la Chaire ESS, ce programme ne manquera pas de poser la question du rôle et de la portée territoriale de l’ESS qui est à la jonction de plusieurs logiques d’action oeuvrant pour « une pleine santé », une santé sociale au fondement des solidarités (Duvoux & Vezinat, 2022) et le bien vivre sur un territoire : quelle politique de santé pour demain ? le système de santé produit-il des communs sociaux dans le domaine de la santé ? et quels sont les liens entre inégalités sociales et crise sanitaire ?

Ateliers thématiques

Les participants pourront s’inscrire dans des workshops dans l’un des trois axes de recherche qui sont proposés :

  • Santé et insertion : comment sortir des logiques sectorielles par la médiation sociale, médico-sociale et professionnelle pour des personnes en situation de précarité ? quels enjeux et quelle place pour la santé globale (psychologique ou mentale) des personnes et des patients dans la ville ? quelles initiatives collectives émergentes pour faire face aux besoins sociaux révélés par la crise sanitaire ? quelle est la place des acteurs de l’ESS dans la promotion du soin, de l’accompagnement des personnes, l’accès à l’autodétermination des personnes en situation de handicap ou de perte d’autonomie dans les établissements d’accueil et d’hébergement ?
  • Les rapports entre la santé environnementale et les inégalités sociales et territoriales : approche socio-épidémiologique des risques en situation de crise sanitaire, mobilisation d’acteurs et d’usagers pour la reconnaissance de l’expertise des usagers, des patients et des aidants dans la manière de résoudre des problèmes (soins, isolement, précarité). Face aux enjeux de la démocratie sanitaire, quel rôle des acteurs de l’ESS pour relever ce défi ?
  • Santé et activités physiques : pratiques sociales et logiques d’engagements. Comment sont prises en charge les activités vitales (bouger, manger), quelles sont les logiques d’engagement dans les activités physiques et sportives ? Le rapport social, culturel à la santé, la transmission familiale, le rapport social au corps.

Modalités de soumission

Les propositions de communication des doctorantes et doctorants accompagnées de la fiche d’inscription (dans le fichier joint) sont à adresser pour le 18 avril 2022 au plus tard à : chaire.ess.fsesj@uha.fr

Frais de participation

L’hébergement et la restauration sont pris en charge par la Chaire ESS pour les doctorants de l’Unistra et de l’Uha. Participation demandée pour les autres doctorants : 100 € pour les 3 jours (possibilité de tarif réduit sur justification).

Comité d’organisation

  • Guillaume Girardin, ingénieur d’étude, Chaire ESS
  • Sarra El Idrissi, doctorante SAGE, Chaire ESS
  • Gabriel Samb, doctorant SAGE, Chaire ESS
  • Elsa Tiendrebeogo, doctorante SAGE
  • Charly Camilien Victor, doctorant SAGE

Comité scientifique

  • Maurice Blanc (SAGE, Unistra et UHA Chaire ESS), sociologie de la ville et de la transaction sociale
  • Benoît Cordelier (UQAM, Canada), communication sociale dans les organisations
  • Salomé Deboos (SAGE, Unistra), anthropologie des échanges et du politique dans la construction de l’identité communautaire
  • Jutta Guhl, Fachhochschule Nord-West (Bâle, Suisse), travail social communautaire
  • Abdelhafid Hammouche (Clersé, Université de Lille) sociologie de la ville et de l’intervention sociale
  • Francis Kern (BETA, Unistra et UHA Chaire ESS), économie du développement et de l’ESS
  • Sandrine Knobé, (E3S, Unistra), sociologie des activités physiques et de la santé
  • Frédéric Mauny (CHU, Université de Franche-Comté) épidémiologie environnementale
  • Marc-Henry Soulet (Chaire travail social, Fribourg, Suisse) politiques sociales et inégalités
  • Josiane Stoessel-Ritz (SAGE, UHA Chaire ESS) sociologie du lien social, de la transaction sociale et des communs
  • Nadège Vezinat, (CRESPPA, université Paris 8), politiques sociales et de santé

Bibliographie indicative

Blanc M., (1999) « Participation des habitants et politique de la ville », in CURAPP & CRAPS, La Démocratie locale. Représentation, participation et espace public, Paris, Presses universitaires de France, p. 177-196. https://www.u-picardie.fr/curapp-revues/root/43/maurice_blanc.pdf_4a0a915c4e0b2/maurice_blanc.pdf

Chello, F. (2013) « Assumer l’incertain et développer le bien commun. La transaction sociale comme paradigme de la pédagogie ». Pensée Plurielle, n° 33-34, p. 85-95. Bruxelles, de Boeck. https://www.cairn.info/revue-pensee-plurielle-2013-2-page-85.htm

Defalvard H. (2017) « Des communs sociaux à la société du commun », RECMA, n° 345, pp. 42-56.

Duvoux, N.& Vezinat, N. (dir.) (2022). La santé sociale, Paris, Presses universitaires de France.

https://www.puf.com/content/La_sant %C3 %A9_sociale

Fleury C. (2019). Le soin est un humanisme. Paris, Gallimard, Tracts.

Gillet A. & Tremblay D.-G. (dir.). (2017). Les recherches partenariales et collaboratives, coédition Presses universitaires de Rennes & du Québec.

Lafont P., Laport D. & Pariat M. (dir.). 2020. Mobilité et migration. Transactions éducatives et sociales, Paris, éd. Pétra.

Laurent, E. (2020). Et si la santé guidait le monde ? Paris, éd. LLL.

Petrella, R . (1996). Le bien commun. Éloge de la solidarité. Bruxelles, Ed. Labor.

Rosa, H. (2021) Résonance. Une sociologie de la relation au monde. Paris, La découverte.

Stiegler, B. (2021) De la démocratie en pandémie. Santé, recherche, éducation. Gallimard, Tracts, n° 2.

Stoessel-Ritz J. & Blanc M. (dir.). (2020). Comment former à l’économie sociale et solidaire ?, Rennes, Presses Universitaires.

Note

[1] Les communs sociaux sont définis par « une mise en commun de ressources dotées de droits universels, tels que la santé [...] accessibles et ayant un potentiel de transformation sociale » (Defalvard, 2017, 42).

Lieux

  • Campus Fonderie - 16 rue de la Fonderie
    Mulhouse, France (68100)

Format de l'événement

Événement uniquement sur site


Dates

  • lundi 18 avril 2022

Mots-clés

  • économie sociale et solidaire, santé globale, bien vivre, recherche partenariale, recherche-action

Contacts

  • Guillaume Girardin
    courriel : guillaume [dot] girardin [at] uha [dot] fr

Source de l'information

  • Guillaume Girardin
    courriel : guillaume [dot] girardin [at] uha [dot] fr

Licence

CC0-1.0 Cette annonce est mise à disposition selon les termes de la Creative Commons CC0 1.0 Universel.

Pour citer cette annonce

« Économie sociale et solidaire, « bien vivre » et santé globale : recherche partenariale et innovation pédagogique », École thématique, Calenda, Publié le lundi 28 mars 2022, https://doi.org/10.58079/18ko

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