Home« La Politique des grands nombres » d’Alain Desrosières aura bientôt trente ans !

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Published on Tuesday, May 03, 2022

Abstract

En 2023, Il y aura trente ans qu'Alain Desrosières publiait La politique des grands nombres, la pièce maîtresse de son œuvre. Aboutissement d’un long travail de repérage et de lecture attentive d’une somme considérable de travaux consacrés à l’histoire de la statistique, issus de diverses disciplines ou pays, La politique des grands nombres constituait un véritable point de départ de la fondation d’une école de sociologie politique de la quantification. Dans la perspective d’entretenir l’héritage de La politique des grands nombres, ce colloque propose de reprendre les grilles d’analyse forgées à travers cet ouvrage pour nourrir la réflexion sur les grands enjeux qui occupent l’agenda des sociétés contemporaines.

Announcement

Argumentaire 

Lorsque paraît l’ouvrage, en 1993, l’audience de la réflexion d’Alain Desrosières a déjà commencé à s’étendre au-delà du champ de la statistique publique où elle s’est forgée, notamment depuis la publication, quelques années plus tôt, de l’ouvrage qu’il a consacré avec Laurent Thévenot aux catégories socio-professionnelles pièces essentielles au système statistique public français. Mais La politique des grands nombres opère une bascule dans la trajectoire professionnelle et scientifique d’Alain Desrosières. Avec cet ouvrage, l’administrateur de l’INSEE passionné d’histoire et de sociologie prend place dans le champ des sciences sociales et le modifie, à l’échelle du pays, mais aussi internationalement.

L’ouvrage ne constitue pas seulement une mine épistémologique sur le versant technique et fondateur de la sociologie, celui de son lien gémellaire avec la statistique. Il inaugure un chemin pour engager les sociologues à réinterroger leurs liens avec la science statistique et les données statistiques, qui ont une incidence fondamentale sur la sociologie et sa manière de construire une connaissance du monde social. La sociologie, ses écoles quantitatives, mais aussi celles qui revendiquent une approche qualitative, doivent reprendre la discussion avec la statistique qui les a faites advenir. Comme une démonstration, les chapitres de l’ouvrage, briques savantes d’un raisonnement subtil, reposent sur une langue et des titres simples qui permettent à chacun de se replonger dans cette genèse intriquée. « Le préfet et le géomètre » ouvre sur les politiques des données statistiques, en particulier françaises mais aussi anglaises et allemandes, « Le juge et l’astronome » sur celles de la science statistique, d’une grande complexité. Chaque étape de la réflexion expose de manière inédite les enjeux sociologiques enfouis de l’histoire de la statistique.

La politique des grands nombres inaugura d’emblée, en France, une « école Alain Desrosières », au croisement de la sociologie, de l’histoire des sciences et de la science politique aussi, un champ académique que Alain Desrosières n’avait pas véritablement rencontré jusque-là. Une tradition de sociohistoire du politique s’y institutionnalisait alors, à travers notamment le développement de la revue Genèses engagé quelques années auparavant. Alain Desrosières fut intégré à son comité de rédaction, l’occasion pour lui de la fréquentation de problématiques liées aux sciences du gouvernement dont la statistique constituait naturellement une forme emblématique. Sur ce terreau, il engagea une somme de chantiers sur les formes d’États ou de gouvernement, les outils quantitatifs de gouvernement émergeants, de type comptable ou prenant la forme d’indicateurs aux formes disciplinaires parfois hybrides, à l’échelle européenne ou internationale.

Cela fera bientôt dix années que Alain Desrosières n’est plus là pour alimenter les perspectives qu’il a ouvertes. Comment aurait-il adapté sa réflexion aux grands enjeux sociétaux qui se sont imposés à l’agenda des gouvernements au cours des dernières années ? La plupart d’entre eux étaient déjà là, en gestation dans les années 2000. Mais leur conception et leur formulation ont évoluées, largement en lien avec l’urgence qui souvent s’est imposée. Comment Alain Desrosières se serait-il saisi de la « financiarisation » diagnostiquée aujourd’hui ? Le poids croissant de la finance était bien au coeur de sa réflexion et il se passionnait pour le mouvement Occupy Wall Street et sa formule symbole, naturellement : « nous sommes les 99 % ». Mais le terme de financiarisation n’avait pas encore l’audience qu’il a aujourd’hui. De même, comment Alain Desrosières se serait-il intéressé aux quantifications qui entourent le succès nouveau de la notion d’anthropocène ? Comment alimenterait-il la réflexion sur les big data qui bouleversaient déjà le champ de la statistique, celui par lequel il était entré en sociologie ?

Dans la perspective d’entretenir l’héritage de La politique des grands nombres, ce colloque propose de reprendre les grilles d’analyse forgées à travers cet ouvrage pour nourrir la réflexion sur les grands enjeux qui occupent l’agenda des sociétés contemporaines.

  1. Les quantifications comptables et financières au temps de la financiarisation
  2. L’anthropocène : quantifier les enjeux environnementaux.
  3. Les big data : un renversement épistémologique
  4. Quantification et géographie : quels nouveaux territoires pour la quantification ?
  5. Comment enseigner Alain Desrosières et la sociologie de la quantification ? 

Programme

Jeudi 30 juin

15h30 Accueil café

16h00 Mots d’accueil et introduction par Cécile Delolme, directrice de l’ENTPE et Fabrice Bardet, directeur de recherches, EVS – ENTPE.

16h30-18h00 Comment enseigner Alain Desrosières et la sociologie de la quantification ?

Présidé par Isabelle Bruno

  • Cécile Lefèvre et Olivier Martin, Université de Paris et Université Sorbonne Nouvelle, CNRS, CERLIS, Enseigner la sociologie de la quantification et faire lire La politique des grands nombres. Retours sur des expériences en licence et master.
  • Victor Anduze Rivero, ENTPE - EVS Lyon, Alain Desrosières dans la Péninsule du Yucatán. Apprendre la sociologie de la quantification en tant que jeune sociologue formé au Mexique.
  • Fabrice Bardet et Théo Chassouant, ENTPE - EVS Lyon, L’ingénieur et le sociologue. Enseigner la sociologie de la quantification à l’Ecole de l’aménagement durable des territoires.
  • Mélanie Sargeac, IDHES (Université Paris-Nanterre/ENS Paris-Saclay), Enquêter sur les statisticiens du ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI). Un terrain contemporain pour la sociologie de la quantification.
  • 18h00 Remise du prix Alain Desrosières en lien avec la SFdS

Vendredi 1er juillet

8h30 Accueil café

9h00-10h45 Les quantifications comptables et financières au temps de la financiarisation

Présidé par Eve Chiapello

  • Gabrielle Bouleau, LISIS/INRAE (Paris-Marne-la-Vallée), Ce que la comptabilité fait aux motifs environnementau
  • Stéphanie Barral et Fanny Guillet, INRAE, UMR LISIS et CNRS, UMR CESCO, Qualifier la biodiversité pour gérer son érosion. Conventions scientifiques et gestionnaires dans les politiques environnementales.
  • Tamara Gouël, ENTPE - RIVES Lyon, Donner « une qualité verte » aux actifs financiers ». Une approche sociologique du développement des fonds d’investissement pour les énergies renouvelables.
  • Marine Duros, CMH, EHESS – Paris, « Un actif comme un autre ». Une sociologie politique de l’émergence de l’indicateur de performance immobilière en France (1990-1999).
  • Jean-Marie Pillon, Université Paris-Dauphine – IRISSO, Politique des outils de gestion. Que racontent les indicateurs de performance de Pôle emploi ?
  • 10h45 -11h Pause

11h00-12h30 L’anthropocène : quantifier les enjeux environnementaux ?

Présidé par Michel Lussault

  • Carolina Mudan Marelli, Université de Bologna (Italie) – Département de Sociologie et droit de l’économie, Un concept en quête d’une mesure. L’exigence politique de la commensurabilité de la biodiversité urbaine.
  • Antoine Hardy, Centre Emile-Durkheim - Université de Bordeaux, Rouvrir la boîte noire de « l’empreinte carbone ».
  • Gaëlle Ronsin, Florian Sanguinet, Koyré - EHESS Paris, Quantifier les relations entre les phoques et les morues au Canada dans l’Anthropocène. Controverses autour de la construction d’un « espace d’équivalence et de comparabilité » et effets sur les politiques de conservation de la nature.
  • Daniel Enama, UCAC, Yaoundé, Faire sens (commun) autour de la soutenabilité environnementale ? Portée et enjeux des pratiques quantificatoires dans le secteur minier au Cameroun.

12h30 – 13h45 Pause midi. Déjeuner. Buffet sur place

13h45-15h30 Les big data : un renversement épistémologique ?

Présidé par Roser Cussó

  • Dominique Deprins, UCLouvain Saint-Louis – Bruxelles, Big Data, le dehors du probable.
  • Edwige Cyffers, ENS Lyon, Quantifier ou dédouaner ? La mathématisation de l’équité pour COMPAS.
  • Baptiste Kotras, LISIS/INRAE (Paris-Marne-la-Vallée), La vie souterraine des catégories sociales. Big data, quantification et production des publics marchands.
  • Davide Ceccato et Giovanni Favero, UniL, IGD Lausane et Ca’ Foscari, VSM Venise, Imaginer le Big Data. Des statistiques pour l’avenir.
  • Olivier Martin, Université de Paris et Université Sorbonne Nouvelle, CNRS, CERLIS, La « raison statistique » à l’échelle des individus. À propos de quelques défis pour la sociologie de la quantification.

15h30 – 15h45 Pause

15h45-17h15 Quantification et géographie : quels nouveaux territoires ?

Présidé par Gabrielle Bouleau

  • Mathis Stock et Valérian Geffroy, Université de Lausane, Institut de géographie et de durabilité, Géographicité de la statistique. L’espace en question dans la quantification du tourisme en France.
  • Sara Fernandez UMR GESTE, Strasbourg (INRAE), La gestion territorialisée de l’environnement et les « grands nombres ». Le cas de la gestion des flux et des stocks d’eau.
  • Maria Besselièvre, Jean-Pierre Nicolas et Stéphanie Vincent, LAET, Université de Lyon, Entre le territoire et la localité. Quel compromis entre deux langages statistiques pour alimenter des réflexions transversales ?
  • Nicolas Bué, Université d’Artois, CERAPS, Qu’est-ce qu’un manifestant ? Politique des conventions statistiques afférentes au comptage des manifestants.

17h15 – 17h45 Clôture du colloque. Les perspectives pour le futur et l’ouverture à l’international. Mot final par : Jean-Pierre Beaud et Roser Cussó.

Informations pratiques

Le colloque se tiendra en présentiel (possibilité de s’adapter en fonction de l’évolution du contexte sanitaire) dans les locaux de l’Ecole Nationale des Travaux Publics de l’Etat (ENTPE). Si vous souhaitez y assiter, merci d’envoyer un e-mail à victor.anduze@entpe.fr

Places

  • Prendre la ligne 3 pour venir en transports en commun - ENTP. Rue Meurice Audin
    Lyon 01, France (69)

Event attendance modalities

Full on-site event


Date(s)

  • Thursday, June 30, 2022
  • Friday, July 01, 2022

Keywords

  • sociologie, quantification, Alain Desroisières, La politique des grands nombres, histoire, statistique

Contact(s)

  • Fabrice Bardet
    courriel : bardet [at] entpe [dot] fr
  • Tamara Gouël
    courriel : tamara [dot] gouel [at] entpe [dot] fr
  • Victor Anduze Rivero
    courriel : victor [dot] anduze [at] entpe [dot] fr
  • Maria Besselièvre
    courriel : Maria [dot] BESSELIEVRE [at] entpe [dot] fr

Information source

  • Fabrice Bardet
    courriel : bardet [at] entpe [dot] fr

License

CC0-1.0 This announcement is licensed under the terms of Creative Commons CC0 1.0 Universal.

To cite this announcement

« « La Politique des grands nombres » d’Alain Desrosières aura bientôt trente ans ! », Conference, symposium, Calenda, Published on Tuesday, May 03, 2022, https://doi.org/10.58079/18ty

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